Conseil d'État, 1ère - 6ème SSR, 21 mars 2016, 395528, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CE, 1re - 6e ss-sect. réunies, 21 mars 2016, n° 395528
Juridiction : Conseil d'État
Numéro : 395528
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Autres
Décision précédente : Conseil d'État, 20 décembre 2015, N° 15VE02924
Identifiant Légifrance : CETATEXT000032279785
Identifiant européen : ECLI:FR:CESSR:2016:395528.20160321

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Le département du Val-d’Oise, à l’appui de sa requête d’appel tendant à l’annulation du jugement n° 1410500 du 9 juillet 2015 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé la décision du 30 juin 2014 par laquelle le président du conseil général de ce département a donné instruction à ses services d’orienter systématiquement vers le service intégré d’accueil et d’orientation (115) toute demande d’hébergement d’urgence à compter du 1er septembre 2014, a produit un mémoire, enregistré le 20 octobre 2015 au greffe de la cour administrative d’appel de Versailles, en application de l’article 23-1 de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, par lequel il soulève une question prioritaire de constitutionnalité.

Par une ordonnance n° 15VE02924 du 21 décembre 2015, enregistrée le 23 décembre 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, le président de la 2e chambre de la cour administrative d’appel de Versailles, avant qu’il soit statué sur la requête d’appel du département du Val-d’Oise, a décidé, par application des dispositions de l’article 23-2 de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, de transmettre au Conseil d’Etat la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l’article 68 de la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion.

Dans la question prioritaire de constitutionnalité transmise et dans un nouveau mémoire enregistré le 10 février 2016, le département du Val-d’Oise soutient que l’article 68 de la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009, applicable au litige, méconnaît l’article 72-2 de la Constitution.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

 – la Constitution, notamment son article 61-1 ;

 – l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

 – le code de l’action sociale et des familles ;

 – la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion, notamment son article 68 ;

 – le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

— le rapport de M. Marc Thoumelou, maître des requêtes en service extraordinaire,

— les conclusions de M. Jean Lessi, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Delamarre, avocat du département du Val-d’Oise ;

1. Considérant qu’il résulte des dispositions de l’article 23-4 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que, lorsqu’une juridiction relevant du Conseil d’Etat a transmis à ce dernier, en application de l’article 23-2 de cette même ordonnance, la question de la conformité à la Constitution d’une disposition législative, le Conseil constitutionnel est saisi de cette question de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou la procédure, qu’elle n’ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement de circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;

2. Considérant que l’article 68 de la loi du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion a complété in fine la première phrase du 4° de l’article L. 222-5 du code de l’action sociale et des familles, selon laquelle, dans sa rédaction alors en vigueur, « sont pris en charge par le service de l’aide sociale à l’enfance sur décision du président du conseil général (…) les femmes enceintes et les mères isolées avec leurs enfants de moins de trois ans qui ont besoin d’un soutien matériel et psychologique », par les mots « , notamment parce qu’elles sont sans domicile » ;

3. Considérant qu’aux termes du quatrième alinéa de l’article 72-2 de la Constitution : « Tout transfert de compétences entre l’État et les collectivités territoriales s’accompagne de l’attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice. Toute création ou extension de compétences ayant pour conséquence d’augmenter les dépenses des collectivités territoriales est accompagnée de ressources déterminées par la loi » ; que le département du Val-d’Oise soutient que l’adjonction résultant de l’article 68 de la loi du 25 mars 2009 confère automatiquement le bénéfice de l’aide sociale à l’enfance aux femmes enceintes et aux mères isolées d’enfants de moins de trois ans dépourvues de domicile, indépendamment de l’appréciation portée sur leur besoin de soutien matériel et psychologique, et procède ainsi au transfert d’une compétence de l’Etat vers les départements ou, à tout le moins, à une extension de leur compétence au titre de l’aide sociale à l’enfance ; que, faute d’avoir été accompagnée d’attribution de ressources à ces collectivités, elle porte atteinte au principe de compensation des transferts ou extensions de compétences entre l’Etat et les collectivités territoriales garanti par les dispositions constitutionnelles précitées ;

4. Considérant toutefois que, s’il est vrai que, en complétant comme il a été dit les dispositions de l’article L. 222-5 du code de l’action sociale et des familles, le législateur a souligné que les femmes enceintes et mères isolées d’enfants de moins de trois ans sans domicile doivent en principe être regardées comme ayant besoin d’un soutien matériel et psychologique au sens du 4° de cet article, il n’a, ce faisant, ni créé une nouvelle prestation sociale, ni élargi le champ des bénéficiaires de cette disposition, ni remis en cause la nature ou l’objet de la compétence exercée par les départements au titre de l’aide sociale à l’enfance ; qu’il n’a ainsi procédé ni à un transfert aux départements d’une compétence qui relevait de l’Etat ni à une création ou extension de compétence, de nature à imposer l’attribution aux départements de ressources en application de l’article 72-2 de la Constitution ; que, dans ces conditions, la question soulevée, qui n’est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux ;

5. Considérant qu’il résulte de ce qui précède qu’il n’y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il n’y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité transmise par la cour administrative d’appel de Versailles.

Article 2 : La présente décision sera notifiée au département du Val-d’Oise.

Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel, au Premier ministre ainsi qu’à la cour administrative d’appel de Versailles.

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