Conseil d'État, 8ème - 3ème chambres réunies, 14 février 2018, 405649

  • Établissements publics et sociétés d'économie mixte·
  • Exonération prévue au 6° bis du 1 de l'art·
  • Bénéfices industriels et commerciaux·
  • Impôts sur les revenus et bénéfices·
  • Personnes et activités imposables·
  • Revenus et bénéfices imposables·
  • Contributions et taxes·
  • Règles particulières·
  • 207 du cgi·
  • Inclusion

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Il résulte de la combinaison des dispositions du 2 de l’article 38 et du 6° bis du 1 de l’article 207 du code général des impôts (CGI), des articles 46 bis et 46 ter de l’annexe III à ce code et de l’article R. 321-21 du code de l’urbanisme que les sommes inscrites dans des comptes de transferts de charges d’exploitation d’une société d’économie mixte, attributaire d’une concession d’aménagement, même si elles sont qualifiées de « rémunérations » par les conventions, ont pour seul objet de permettre l’affectation à l’opération d’une fraction, évaluée le cas échéant de manière forfaitaire, des frais de fonctionnement de la société et ne constituent pas, pour celle-ci, un produit définitivement acquis. Elles ne sauraient, par suite, être regardées comme constitutives d’un élément de bénéfice étranger aux opérations dont le résultat est exonéré d’impôt sur les sociétés en vertu du 6° bis du 1 de l’article 207 du CGI et des articles 46 bis et 46 ter de l’annexe III à ce code.

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Lexis Veille · 26 février 2018

Une Information Lexbase · Actualités du Droit · 22 février 2018
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Sur la décision

Référence :
CE, 8e - 3e ch. réunies, 14 févr. 2018, n° 405649, Lebon T.
Juridiction : Conseil d'État
Numéro : 405649
Importance : Mentionné aux tables du recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Cour administrative d'appel de Paris, 12 octobre 2016, N° 15PA00417
Identifiant Légifrance : CETATEXT000036601984
Identifiant européen : ECLI:FR:CECHR:2018:405649.20180214

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

La société d’économie mixte (SEM) de Montévrain a demandé au tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2006 et 2007 ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1302096 du 4 décembre 2014, ce tribunal a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 15PA00417 du 13 octobre 2016, la cour administrative d’appel de Paris a, sur appel de la SEM de Montévrain, annulé ce jugement et déchargé la société de ces impositions supplémentaires.

Par un pourvoi, enregistré le 5 décembre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, le ministre de l’économie et des finances demande au Conseil d’Etat d’annuler cet arrêt.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

 – le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

 – le code de l’urbanisme ;

 – le règlement n° 99-05 du comité de la réglementation comptable relatif au traitement comptable des concessions d’aménagement dans les sociétés d’économie mixte locales, homologué par un arrêté du ministre de l’économie et des finances du 14 décembre 1999 ;

 – le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

— le rapport de Mme Liza Bellulo, maître des requêtes,

— les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Haas, avocat de la société d’économie mixte de Montevrain.

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que par trois conventions conclues en application de l’article L. 300-4 du code de l’urbanisme les 7 janvier et 27 juillet 1995, la société d’économie mixte (SEM) de Montévrain a été chargée, aux risques et profits de la commune de Montévrain (Seine-et-Marne), concédante, de cessions ou locations portant sur des terrains que la SEM aura préalablement pourvus des aménagements, équipements généraux ou ouvrages nécessaires à leur utilisation, dans le cadre de trois zones d’aménagement concerté. A l’issue d’une vérification de comptabilité, l’administration a, notamment, remis en cause l’exonération d’impôt sur les sociétés dont la société s’était prévalue sur le fondement des dispositions du 6° bis du 1 de l’article 207 du code général des impôts et de l’article 46 bis de l’annexe III à ce code, en tant que cette exonération portait sur la fraction de son bénéfice résultant de sommes, qualifiées de « rémunérations forfaitaires », stipulées à son profit en application de l’article 21, premier alinéa, du cahier des charges de chacune de ces conventions. Par un jugement du 4 décembre 2014, le tribunal administratif de Melun a rejeté la demande de la société tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie, en conséquence, au titre des exercices clos en 2006 et 2007. Le ministre de l’économie et des finances se pourvoit en cassation contre l’arrêt du 13 octobre 2016 par lequel la cour administrative d’appel de Paris a fait droit à la demande en décharge de la SEM de Montévrain.

2. D’une part, aux termes du 6° bis du 1 de l’article 207 du code général des impôts, sont exonérés de l’impôt sur les sociétés : " Dans les conditions fixées par décret, les établissements publics et sociétés d’économie mixte chargés de l’aménagement par une convention contractée, en application du deuxième alinéa de l’article L. 300-4 du code de l’urbanisme (…), pour les résultats provenant des opérations réalisées dans le cadre des procédures suivantes : / a.- zone d’aménagement concerté ; (…) « . Selon l’article 46 bis de l’annexe III à ce code : » Les établissements publics et sociétés d’économie mixte chargés de l’aménagement par une convention contractée en application du deuxième alinéa de l’article L. 300-4 du code de l’urbanisme, sont exonérés de l’impôt sur les sociétés, sous les conditions énoncées à l’article 46 ter, pour la fraction de leurs bénéfices nets provenant soit de l’exécution des travaux d’aménagement, d’équipement général ou des ouvrages qu’ils effectuent sur des terrains dont ils ne sont pas propriétaires, soit des cessions ou locations portant sur des terrains ou immeubles qu’ils ont préalablement pourvus des aménagements, équipements généraux ou ouvrages nécessaires à leur utilisation « . L’article 46 ter de cette même annexe dispose : » L’exonération prévue à l’article 46 bis est subordonnée à la condition : / (…) 2° En ce qui concerne les sociétés d’économie mixte, qu’elles fonctionnent conformément aux dispositions de l’article R 321-21 du code de l’urbanisme et que les bénéfices dont l’exonération est demandée proviennent d’opérations effectuées par elles dans le cadre d’une convention publique d’aménagement prévue à l’article L. 300-4 du même code ".

3. D’autre part, aux termes de la première phrase du premier alinéa du 2 de l’article 38 du code général des impôts : « Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l’actif net à la clôture et à l’ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l’impôt diminuée des suppléments d’apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l’exploitant ou par les associés ». Aux termes de l’article R. 321-21 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction applicable aux années d’imposition en litige : « Les établissements publics et les sociétés d’économie mixte doivent tenir leur comptabilité conformément à un plan comptable particulier établi sur les bases du plan comptable général et approuvé par le ministre de l’économie et des finances ». Il résulte de l’annexe du règlement du 23 juin 1999 du Comité de la réglementation comptable relatif au traitement comptable des concessions d’aménagement dans les sociétés d’économie mixte locales, homologué par un arrêté du ministre des finances du 14 décembre 1999, que les sommes que le concessionnaire est habilité à imputer sur chaque opération en vue de couvrir ses frais de fonctionnement, dont le cahier des charges précise les modalités d’assiette et de taux et qui sont qualifiées de « rémunérations », ont la nature d’un remboursement forfaitaire de frais à inscrire à un compte de transfert de charges. Il en résulte également qu’au cours de l’exécution d’une convention d’aménagement, le résultat intermédiaire provisoire de l’opération est neutralisé par le mouvement d’un compte de régularisation et qu’à l’issue de la concession, pour ce qui concerne les opérations d’aménagement concédées aux risques et profits du concédant, le solde de ce compte de régularisation est, s’il traduit un excédent des produits sur les charges, reversé à la collectivité territoriale concédante, le déficit étant, dans le cas contraire, comblé par une participation de cette collectivité.

4. Il résulte de la combinaison des dispositions précitées que les sommes ainsi inscrites dans des comptes de transferts de charges d’exploitation d’une société d’économie mixte, attributaire d’une concession d’aménagement, même si elles sont qualifiées de « rémunérations » par les conventions, ont pour seul objet de permettre l’affectation à l’opération d’une fraction, évaluée le cas échéant de manière forfaitaire, des frais de fonctionnement de la société et ne constituent pas, pour celle-ci, un produit définitivement acquis. Elles ne sauraient, par suite, être regardées comme constitutives d’un élément de bénéfice étranger aux opérations dont le résultat est exonéré d’impôt sur les sociétés en vertu du 6° bis du 1 de l’article 207 du code général des impôts et des articles 46 bis et 46 ter de l’annexe III à ce code.

5. Aux termes des stipulations du premier alinéa de l’article 21 de chacun des cahiers des charges des concessions d’aménagement attribuées à la SEM de Montévrain, rédigées de manière identique : « En contrepartie de ses frais généraux et de ses frais de fonctionnement, le concessionnaire perçoit, pour la mission qui lui est confiée à l’article 2, une rémunération maximale de 8 % de la somme des dépenses et recettes toutes taxes comprises de l’opération ». Aux termes de l’article 22 de ces mêmes cahiers des charges : «  Après achèvement des opérations concédées, le bilan de clôture est arrêté et approuvé dans les conditions définies par la réglementation en vigueur. Le maire arrête, en accord avec le concessionnaire, le montant définitif de la participation financière de ce dernier aux travaux d’aménagement réalisés. / Lorsque le bilan de clôture des opérations fait apparaître un excédent, celui-ci est versé au concédant, sauf affectation différente convenue entre les parties ».

6. Après avoir regardé, sans être contredite par le ministre, les conventions d’aménagement dont la SEM de Montévrain est attributaire comme des conventions conclues en application du deuxième alinéa de l’article L. 300-4 du code de l’urbanisme, entrant dans les prévisions des articles 46 bis et 46 ter de l’annexe III au code général des impôts, la cour administrative d’appel a, par une appréciation souveraine des faits non arguée de dénaturation, estimé que la « rémunération forfaitaire » stipulée par le premier alinéa de l’article 21 des cahiers des charges des conventions avait pour seul objet de permettre, par l’affectation d’une fraction des frais de fonctionnement de la société à chacune des opérations en cause, d’en déterminer le résultat en application de l’article 22 de ces mêmes cahiers des charges. La cour, qui a ainsi caractérisé les sommes en litige comme correspondant à des écritures de transfert de charges telles que celles mentionnées au point 4 ci-dessus, a pu, sans erreur de droit ni erreur de qualification juridique des faits et sans entacher son arrêt de contradiction de motifs, en déduire qu’elles ne pouvaient être regardées comme un élément de bénéfice exclu du champ de l’exonération prévue au 6° bis du 1 de l’article 207 du code général des impôts. La circonstance que la cour se soit, en outre, fondée sur l’absence de versement effectif des sommes en litige à la société et sur la manière dont elles étaient traitées en comptabilité analytique est sans incidence sur le bien- fondé de son arrêt.

7. Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que le pourvoi du ministre doit être rejeté.

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat une somme de 3 000 euros à verser à la SEM de Montévrain au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------


Article 1er : Le pourvoi du ministre est rejeté.


Article 2 : L’Etat versera une somme de 3 000 euros à la SEM de Montévrain au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.


Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l’économie et des finances et à la société d’économie mixte de Montévrain.

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