Conseil d'État, 5ème chambre, 15 juillet 2022, 442632, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Vulpi Avocats - Chronique de jurisprudence · 3 octobre 2022

Juillet-Août 2022 Actes et décisions - Procédure administrative non contentieuse 1 - Délibération jugée créatrice de droits – Décisions à caractère pécuniaire – Retrait impossible au-delà de quatre mois – Délibération annulée – Erreur de droit – Annulation. Commet une erreur de droit la cour administrative d'appel qui, pour annuler un titre exécutoire émis par une commune à l'encontre d'un conseiller municipal, se fonde sur ce que l'indemnité litigieuse avait été allouée par une délibération du conseil municipal qui avait créé des droits à son profit et qu'ainsi les versements …

 
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Sur la décision

Référence :
CE, 5e chs, 15 juill. 2022, n° 442632
Juridiction : Conseil d'État
Numéro : 442632
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Cour administrative d'appel de Versailles, 9 juin 2020, N° 19VE03026, 19VE04025
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 28 août 2023
Identifiant Légifrance : CETATEXT000046069129
Identifiant européen : ECLI:FR:CECHS:2022:442632.20220715

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Mme B A a demandé au tribunal administratif de Montreuil d’annuler pour excès de pouvoir la décision du 26 mars 2018 par laquelle la directrice de l’établissement public de santé de Ville-Evrard a, d’une part, mis fin à l’exécution de la décision du 14 novembre 2017 par laquelle elle avait suspendu Mme A de ses fonctions à titre conservatoire, d’autre part, décidé que Mme A ne serait plus rémunérée à compter du 1er avril 2018, faute de service fait. Par un jugement n° 1803816 du 21 juin 2019, le tribunal administratif a fait droit à sa demande.

Par un arrêt n° 19VE03026, 19VE04025 du 10 juin 2020, la cour administrative d’appel de Versailles a, sur appel de l’établissement public de santé de Ville-Evrard, annulé ce jugement, dit qu’il n’y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de l’établissement public de santé tendant à ce qu’il soit sursis à son exécution et rejeté les conclusions présentées par Mme A devant le tribunal administratif.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 10 août et 10 novembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, Mme A demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler cet arrêt ;

2°) réglant l’affaire au fond, de rejeter l’appel de l’établissement public de santé de Ville-Evrard, et de faire droit à ses conclusions d’appel et de première instance ;

3°) de mettre à la charge de l’établissement public de santé de Ville-Evrard la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu

— le code de la santé publique ;

— le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

— le rapport de M. Jean-Dominique Langlais, conseiller d’Etat,

— les conclusions de M. Florian Roussel, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de Mme A et à la SCP Thouvenin, Coudray, Grévy, avocat de l’Etablissement public de santé Ville-Evrard.

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme A, psychiatre exerçant en qualité de praticien hospitalier au sein de l’établissement public de santé (EPS) de Ville-Evrard, a été mise en examen et placée sous contrôle judiciaire avec interdiction d’exercer toute activité médicale par deux ordonnances du 29 septembre 2017 du juge d’instruction du tribunal de grande instance de Paris. Par une décision du 14 novembre 2017, la directrice de l’EPS de Ville-Evrard l’a suspendue de ses fonctions à titre conservatoire, en prévoyant le maintien de sa rémunération. Par un arrêt du 8 décembre 2017, la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris a confirmé l’interdiction faite à Mme A d’exercer une activité médicale au sein d’un établissement public de santé. Par une décision du 26 mars 2018, la directrice de l’EPS de Ville-Evrard a mis fin à la suspension de l’intéressée à compter du 1er avril 2018 et décidé que le versement de sa rémunération serait interrompu à cette date, en l’absence de service fait. Par un jugement du 21 juin 2019, le tribunal administratif de Montreuil a, sur la demande de Mme A, annulé la décision du 26 mars 2018. Mme A se pourvoit en cassation contre l’arrêt du 10 juin 2020 par lequel la cour administrative d’appel de Versailles a, sur appel de l’EPS de Ville-Evrard, annulé ce jugement et rejeté ses conclusions.

2. Aux termes du premier alinéa de l’article L. 6152-77 du code de la santé publique : « Dans l’intérêt du service, le praticien qui fait l’objet d’une procédure disciplinaire peut être immédiatement suspendu par le directeur général du Centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière pour une durée maximale de six mois. Toutefois, lorsque l’intéressé fait l’objet de poursuites pénales, la suspension peut être prolongée pendant toute la durée de la procédure ». Pour annuler la décision du 18 mars 2018, le tribunal administratif de Montreuil s’est fondé, par la voie de l’exception, sur l’illégalité de la décision du 14 novembre 2017 au regard de ces dispositions, en jugeant, d’une part, que la directrice de l’établissement n’était pas compétente pour suspendre Mme A et, d’autre part, qu’aucune procédure disciplinaire n’avait été engagée à l’encontre de l’intéressée. Pour annuler ce jugement, la cour administrative d’appel de Versailles a jugé que la directrice de l’établissement ne s’était pas, pour prendre la décision du 14 novembre 2017, fondée sur cet article, mais sur ses pouvoirs propres de chef d’établissement. Saisie de l’ensemble du litige par l’effet dévolutif de l’appel, elle a ensuite jugé qu’en tout état de cause, le moyen tiré de l’illégalité de la décision du 14 novembre 2017 était inopérant à l’encontre de la décision du 18 mars 2018.

3. En premier lieu, en estimant qu’il ressortait des pièces du dossier, notamment de la décision du 14 novembre 2017, que la directrice du centre hospitalier, qui avait entendu mettre en œuvre le pouvoir de suspension qu’elle tirait de sa qualité de chef d’établissement, ne s’était pas fondée sur la procédure définie par l’article L. 6152-77 du code de la santé publique pour la prendre, la cour administrative d’appel ne s’est pas méprise sur la portée de cette décision. En en déduisant que le tribunal administratif de Montreuil s’était à tort fondé sur une méconnaissance des dispositions de l’article L 6152-77 du code de la santé publique pour annuler la décision du 14 novembre 2017, elle n’a pas commis d’erreur de droit.

4. En deuxième lieu, la décision de suspension d’un praticien hospitalier, décision individuelle qui devient définitive à l’expiration du délai de recours contentieux que fait naître sa notification, ne forme pas, avec la décision susceptible d’être prononcée pour y mettre fin, une opération administrative unique comportant entre ces deux décisions un lien tel que les illégalités susceptibles d’affecter la décision initiale puissent, malgré le caractère définitif que celle-ci aurait acquis, être invoquées à l’appui de conclusions dirigées contre la décision ultérieure. La cour administrative d’appel n’a, par suite, pas commis d’erreur de droit en écartant comme inopérant le moyen tiré, par voie d’exception, de l’illégalité de la décision de suspension du 14 novembre 2017.

5. En troisième lieu, si Mme A soutient que, par courriel du 29 septembre 2017, elle a informé la directrice du centre hospitalier de son souhait d’exercer des fonctions non médicales au sein de l’établissement, les dispositions de l’article 30 de la loi du 13 juillet 1983 dont elle se prévaut, et qui prévoient que le fonctionnaire faisant l’objet d’une suspension à titre disciplinaire peut être affecté provisoirement dans un emploi compatible avec les obligations de son contrôle judiciaire ou, à défaut, être détaché d’office, à titre provisoire, dans un autre corps ou cadre d’emplois pour occuper un emploi compatible avec de telles obligations, ne sont pas applicables aux praticiens hospitaliers à temps plein, aucun autre texte ni principe de droit ne faisant au surplus obligation à l’employeur d’un praticien hospitalier auquel une mesure de contrôle judiciaire interdit de poursuivre l’exercice de ses fonctions de médecin au sein de l’établissement de l’affecter dans d’autres fonctions. Par suite, la cour administrative d’appel n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant que Mme A ne pouvait se prévaloir de sa demande de reclassement pour demander l’annulation de la décision contestée.

6. Il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de Mme A doit être rejeté, ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de Mme A la somme de 3 000 euros à verser à l’établissement public de santé de Ville-Evrard au titre des mêmes dispositions.

D E C I D E :

— -------------

Article 1er : Le pourvoi de Mme A est rejeté.

Article 2 : Mme A versera la somme de 3 000 euros à l’établissement public de santé de Ville-Evrard au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme B A et à l’établissement public de santé de Ville-Evrard.

Délibéré à l’issue de la séance du 16 juin 2022 où siégeaient : M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre, présidant ; M. Olivier Yeznikian, conseiller d’Etat et M. Jean-Dominique Langlais, conseiller d’Etat-rapporteur.

Rendu le 15 juillet 2022.

Le président :

Signé : M. Jean-Philippe Mochon

Le rapporteur :

Signé : M. Jean-Dominique Langlais

La secrétaire :

Signé : Mme Anne-Lise Calvaire

Pour expédition conforme,

La secrétaire

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