CEDH, Cour (troisième section), AFFAIRE D.I. c. ITALIE, 23 octobre 2001, 44533/98

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CEDH, Cour (Troisième Section), 23 oct. 2001, n° 44533/98
Numéro(s) : 44533/98
Type de document : Arrêt
Jurisprudence de Strasbourg : Bottazzi c. Italie [GC], n° 34884/97, § 22, § 30, CEDH 1999-V
Niveau d’importance : Importance faible
Opinion(s) séparée(s) : Non
Conclusions : Violation de l'art. 6-1 ; Préjudice moral - réparation pécuniaire ; Remboursement frais et dépens - procédure de la Convention ; Dommage matériel - demande rejetée
Identifiant HUDOC : 001-64317
Identifiant européen : ECLI:CE:ECHR:2001:1023JUD004453398
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Texte intégral

TROISIÈME SECTION

AFFAIRE D.I. c. ITALIE

(Requête n° 44533/98)

ARRÊT

STRASBOURG

23 octobre 2001

DÉFINITIF

23/01/2002

Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.


En l’affaire D.I. c. Italie,

La Cour européenne des Droits de l’Homme (troisième section), siégeant en une chambre composée de :

MM.J.-P. Costa, président,
W. Fuhrmann,
P. Kūris,
MmeF. Tulkens,
MM.K. Jungwiert,
K. Traja, juges,
MmeM. del Tufo, juge ad hoc,
et de M. T.L. Early, greffier adjoint de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 2 octobre 2001,

Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

PROCÉDURE

1.  A l’origine de l’affaire se trouve une requête dirigée contre la République italienne et dont un ressortissant italien, M. G. D.I. (« le requérant »), avait saisi la Commission européenne des Droits de l’Homme le 25 septembre 1997 en vertu de l’ancien article 25 de la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales (« la Convention »). La requête a été enregistrée le 13 novembre 1999 sous le numéro de dossier 44533/98. Le gouvernement italien (« le Gouvernement ») est représenté par son agent, M. U. Leanza, et par son coagent, M. V. Esposito.

2.  La Cour a déclaré la requête recevable le 26 septembre 2000.

EN FAIT

3.  Par un jugement du 27 février 1979, dont le texte fut déposé au greffe le 6 mars 1979, le tribunal de Santa Maria Capua Vetere prononça la faillite du requérant. Le tribunal fixa l’établissement de l’état des créances au 26 avril 1979.

4.  Parallèlement à la procédure de faillite, le 22 mars 1979, le requérant fit opposition à ce jugement. Par un jugement du 14 avril 1981, dont le texte fut déposé au greffe le 29 avril 1981, le tribunal rejeta l’opposition. Le 23 juin 1981, le requérant interjeta appel devant la cour d'appel de Naples. Par un arrêt du 6 janvier 1982, dont le texte fut déposé au greffe le 6 février 1982, la cour d'appel rejeta l’appel.

5.  Le 25 mars 1982 il fut procédé à la vente aux enchères d’un immeuble appartenant au requérant ; la propriété fut transférée au nouvel acquéreur le 29 mars 1983.

6.  Le 8 juillet 1982, un des créanciers exposa qu’ayant racheté les autres créances il était devenu le seul créancier et demandait la possibilité de racheter une partie du matériel figurant sur l’inventaire sous certaines conditions. Le 15 juillet 1982, le juge commissaire fit droit à sa demande.

7.  A l’audience du 3 avril 1984 le juge approuva le compte rendu de gestion. Le même jour, et le 15 décembre 1987, le juge prit deux ordonnances par lesquelles il ordonna le paiement d’acomptes audit créancier.

8.  Par une ordonnance du 15 juillet 1986, le mandat du syndic fut révoqué et un nouveau syndic fut nommé. A compter du 1er mars 1991 jusqu’au 20 novembre 1991, le président du tribunal prit trois ordonnances par lesquelles il somma le syndic d’exécuter ses obligations. Pour le même motif, le juge adopta trois ordonnances au courant de l’année 1992 et une quatrième le 13 mai 1997. Par la suite, le 1er juillet 1998, à la demande du juge, le syndic fut révoqué de ses fonctions, en raison du non accomplissement de ses obligations. Le nouveau syndic nommé déposa, entre le 23 octobre 1998 et le 10 juin 1999, cinq comptes rendus sur la base desquels la responsabilité du précédent syndic fut mise en cause en raison des fautes commises dans la gestion de la procédure de faillite. Selon les informations fournies par le requérant le 12 février 2001, la procédure était à cette date encore pendante.

EN DROIT

I.  SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 6 § 1 DE LA CONVENTION

9.  Le requérant allègue que la durée de la procédure a méconnu le principe du « délai raisonnable » tel que prévu par l’article 6 § 1 de la Convention, ainsi libellé :

« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue (...) dans un délai raisonnable, par un tribunal (…) qui décidera (…) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (…) »

10.  Le Gouvernement s’oppose à cette thèse.

11.  La période à considérer a débuté le 27 février 1979 et était encore pendante au 12 février 2001.

12.  Elle avait à cette date déjà duré plus de vingt et un ans et onze mois pour une instance.

13.  La Cour rappelle avoir constaté dans de nombreux arrêts (voir, par exemple, Bottazzi c. Italie [GC], n° 34884/97, § 22, CEDH 1999-V) l’existence en Italie d’une pratique contraire à la Convention résultant d’une accumulation de manquements à l’exigence du « délai raisonnable ». Dans la mesure où la Cour constate un tel manquement, cette accumulation constitue une circonstance aggravante de la violation de l’article 6 § 1.

14.  Ayant examiné les faits de la cause à la lumière des arguments des parties et compte tenu de sa jurisprudence en la matière, la Cour estime que la durée de la procédure litigieuse ne répond pas à l’exigence du « délai raisonnable » et qu’il y a là encore une manifestation de la pratique précitée.

Partant, il y a eu violation de l’article 6 § 1.

II.  Sur l’application de l’article 41 DE LA Convention

15.  Aux termes de l’article 41 de la Convention,

« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »

A.  Dommage

16.  Le requérant réclame 4 000 000 000 lires italiennes (ITL) au titre du préjudice matériel et moral qu’il aurait subi.

17.  La Cour n’aperçoit pas de lien de causalité entre la violation constatée et le dommage matériel allégué et rejette cette demande. En revanche, elle considère qu’il y a lieu d’octroyer au requérant 70 000 000 ITL au titre du préjudice moral.

B.  Frais et dépens

18.  Le requérant demande également 525 500 ITL pour les frais et dépens encourus devant la Cour.

19.  Selon la jurisprudence de la Cour, un requérant ne peut obtenir le remboursement de ses frais et dépens que dans la mesure où se trouvent établis leur réalité, leur nécessité et le caractère raisonnable de leur taux (voir, par exemple, l’arrêt Bottazzi précité, § 30). En l’espèce et compte tenu des éléments en sa possession et des critères susmentionnés, la Cour estime raisonnable la somme demandée, à savoir 525 500 ITL, et l’accorde au requérant.

C.  Intérêts moratoires

20.  Selon les informations dont dispose la Cour, le taux d’intérêt légal applicable en Italie à la date d’adoption du présent arrêt était de 3,5 % l’an.

Par ces motifs, la Cour, à l’unanimité,

1.  Dit qu’il y a eu violation de l’article 6 § 1 de la Convention ;

2.  Dit

a)  que l’Etat défendeur doit verser au requérant, dans les trois mois à compter du jour où l’arrêt est devenu définitif conformément à l’article 44 § 2 de la Convention, 70 000 000 (soixante-dix millions) lires italiennes pour dommage moral et 525 500 (cinq cent vingt-cinq mille cinq cent) lires italiennes pour frais et dépens ;

b)  que ces montants seront à majorer d’un intérêt simple de 3,5 % l’an à compter de l’expiration de ce délai et jusqu’au versement ;

3.  Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.

Fait en français, puis communiqué par écrit le 23 octobre 2001, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.

T.L. EarlyJ.-P. Costa
Greffier adjointPrésident


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