CJCE, n° T-6/91, Arrêt du Tribunal, Fred Pfloeschner contre Commission des Communautés européennes, 12 février 1992

  • Statut des fonctionnaires et régime des autres agents·
  • Conditions de recevabilité·
  • Recours juridictionnel·
  • Acte faisant grief·
  • Fonction publique·
  • Fonctionnaires·
  • Exclusion·
  • Fonctionnaire·
  • Commission·
  • Coefficient

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CJUE, Tribunal de première instance, 12 févr. 1992, Pfloeschner / Commission, T-6/91
Numéro(s) : T-6/91
Arrêt du Tribunal de première instance (troisième chambre) du 12 février 1992. # Fred Pfloeschner contre Commission des Communautés européennes. # Recevabilité - Fonctionnaire - Demande de décision anticipée sur le coefficient correcteur qui sera applicable à la liquidation future des droits à pension de l'intéressé. # Affaire T-6/91.
Date de dépôt : 29 janvier 1991
Précédents jurisprudentiels : Cour du 1er février 1979, Deshormes/Commission ( 17/78
Tribunal du 14 décembre 1989, Teissonnière/Commission, point 17, T-119/89
Tribunal du 14 décembre 1989, Teissonnière/Commission, précitée, T-119/89
Solution : Recours de fonctionnaires : rejet pour irrecevabilité
Identifiant CELEX : 61991TJ0006
Identifiant européen : ECLI:EU:T:1992:13
Télécharger le PDF original fourni par la juridiction

Texte intégral

Avis juridique important

|

61991A0006

Arrêt du Tribunal de première instance (troisième chambre) du 12 février 1992. – Fred Pfloeschner contre Commission des Communautés européennes. – Recevabilité – Fonctionnaire – Demande de décision anticipée sur le coefficient correcteur qui sera applicable à la liquidation future des droits à pension de l’intéressé. – Affaire T-6/91.


Recueil de jurisprudence 1992 page II-00141


Sommaire

Parties

Motifs de l’arrêt

Décisions sur les dépenses

Dispositif

Mots clés


++++

Fonctionnaires – Recours – Acte faisant grief – Notion – Refus de fixation anticipée de certaines modalités de calcul des droits à pension, tel le coefficient correcteur – Exclusion

( Statut des fonctionnaires, art . 90 et 91 )

Sommaire


La notion d’ acte faisant grief recouvre à la fois les décisions et les abstentions de prendre une mesure imposée à l’ administration par le statut . Une absence de décision est donc susceptible de faire grief à l’ intéressé, lorsque l’ institution dont il relève s’ est abstenue de prendre soit une décision expressément prévue par une disposition statutaire spécifique, soit une décision implicitement imposée par le statut pour garantir les droits des fonctionnaires .

Ne constitue pas un acte faisant grief, susceptible comme tel de recours, le rejet implicite de la demande d’ un fonctionnaire invitant l’ institution dont il relève à fixer, de manière anticipée, c’ est-à-dire avant son admission à la retraite, certaines modalités de calcul de ses droits à pension . En effet, aucune disposition statutaire n’ impose expressément pareille obligation à l’ administration . Il résulte, au contraire, des articles 10 et 40 de l’ annexe VIII du statut que l’ institution ne peut procéder à la liquidation des droits à pension d’ un fonctionnaire qu’ au moment de la cessation de son activité, les bases de calcul de ces droits étant, en principe, auparavant, indéterminées et susceptibles de variation .

Ce n’ est qu’ à titre exceptionnel, lorsqu’ un élément de ce calcul est d’ ores et déjà déterminé de manière définitive, que l’ administration est tenue d’ adopter une décision, dont l’ exécution est différée, mais qui affecte immédiatement et directement la situation juridique de l’ intéressé, constituant ainsi, à son égard, un acte faisant grief . Dans cette hypothèse, le fonctionnaire concerné possède un intérêt légitime, né et actuel à faire fixer, de manière anticipée, un élément incertain de son état .

En revanche, un fonctionnaire encore en activité ne saurait justifier d’ un intérêt né et actuel à obtenir une décision relative au coefficient correcteur qui s’ appliquera à sa future pension d’ ancienneté . En effet, la fixation de ce coefficient, qui est conditionnée, d’ une part, par le choix du lieu de résidence du fonctionnaire après la cessation de ses fonctions et, d’ autre part, par la réglementation en vigueur au moment de la liquidation des droits à pension, ne peut faire l’ objet d’ une décision anticipée, affectant immédiatement et directement la situation juridique de l’ intéressé .

Parties


Dans l’ affaire T-6/91,

Fred Pfloeschner, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Bruxelles, représenté par Me G . Vandersanden, avocat au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg en l’ étude de Me A . Schmitt, 62, avenue Guillaume,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M . Joseph Griesmar, conseiller juridique, en qualité d’ agent, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M . Roberto Hayder, représentant du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,

partie défenderesse,

ayant pour objet, au présent stade de la procédure, la recevabilité du recours tendant à l’ annulation de la décision de la Commission du 30 octobre 1990, rejetant la réclamation du requérant visant à faire fixer le montant de ses droits à pension comme étant sans objet, ainsi que de la prétendue décision implicite de la Commission de maintenir à 100 le coefficient correcteur applicable à la pension du requérant au cas où il prendrait sa retraite en Suisse,

LE TRIBUNAL ( troisième chambre ),

composé de MM . B . Vesterdorf, président de chambre, A . Saggio et C . Yeraris, juges,

greffier : Mme B . Pastor

vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 16 octobre 1991,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l’arrêt


Faits et procédure

1 Le requérant, M . Pfloeschner, né en 1928 et de nationalité suisse, a été nommé fonctionnaire à la Commission en 1958, par dérogation à la clause de nationalité, en application de l’ article 28, sous a ), du statut des fonctionnaires des Communautés européennes ( ci-après « statut »).

2 Le 18 juillet 1988, le coefficient correcteur de 145,4, jusqu’ alors applicable aux pensions versées en Suisse, a été réduit par le règlement ( CECA, CEE, Euratom ) n 2175/88 du Conseil, portant fixation des coefficients applicables dans les pays tiers, qui prévoit, en son article 3, que « le coefficient correcteur applicable à la pension dont le titulaire fixe sa résidence dans un pays tiers est égal à 100 » ( JO L 191, p . 1, ci-après « règlement n 2175/88 »).

3 Après l’ entrée en vigueur de la nouvelle réglementation, la Commission a adressé à M . Pfloeschner, à sa demande, un décompte provisoire de ses droits à pension, par note du 16 janvier 1989 . Le 18 septembre 1989, M . Pfloeschner a formé un recours tendant à obtenir l’ annulation de la « décision de la Commission du 16 janvier 1989 établissant le décompte ( de ses ) droits à pension … dans la mesure où le coefficient correcteur applicable à ( sa ) pension … s’ il se retire en Suisse, est fixé à 100 ». Le Tribunal a jugé ledit recours irrecevable au motif, en substance, que l’ analyse du décompte attaqué faisait apparaître qu’ il avait été fourni à titre d’ information et ne présentait donc pas la nature d’ un acte faisant grief au sens de l’ article 90, paragraphe 2, du statut ( arrêt du 3 avril 1990, Pfloeschner/Commission, T-135/89, Rec . p . II-153 ).

4 Le 3 mai 1990, M . Pfloeschner a introduit une demande visant à « obtenir une décision au titre de l’ article 90, paragraphe 1, du statut, concernant la fixation de ( ses ) droits à pension et le détail de ceux-ci, à l’ âge correspondant au taux maximum », compte tenu, précise-t-il, du fait que « ( il prendra ) sa retraite en Suisse, pays dont ( il a ) la nationalité et où ( il a ) été recruté ».

5 Faute de réponse de la Commission dans le délai de quatre mois prescrit, M . Pfloeschner a présenté, le 25 septembre 1990, une réclamation, au sens de l’ article 90, paragraphe 2, du statut, contre la décision implicite de rejet de sa demande .

6 Par lettre du directeur général du personnel et de l’ administration, la Commission a répondu à ladite réclamation, le 30 octobre 1990, que le décompte provisoire des droits à pension de M . Pfloeschner lui serait transmis dans les meilleurs délais . Elle a toutefois attiré l’ attention de ce dernier « sur la nature informative et non décisionnelle d’ un tel décompte, sauf s’ il est établi à la suite d’ une demande de ( l’ intéressé ) de mise à la retraite à une date précise ». La Commission a conclu en considérant que la réclamation était devenue sans objet .

Dans une lettre adressée à M . Hay, directeur général du personnel et de l’ administration, le 16 novembre 1990, M . Pfloeschner a contesté que sa réclamation fût devenue sans objet . Il a souligné qu’ il n’ avait pas encore obtenu de réponse à sa demande du 3 mai 1990, susvisée, invitant la Commission à prendre à son égard une décision au sens de l’ article 90, paragraphe 1, du statut .

Le décompte provisoire des droits à pension qui lui seraient servis à compter du 1er janvier 1991 a été transmis à M . Pfloeschner le 18 décembre 1990 . Il avait été établi sur la base d’ un coefficient correcteur égal à 100 pour les pensions servies en Suisse .

7 Dans ces conditions, M . Pfloeschner a demandé, par requête déposée au greffe du Tribunal le 29 janvier 1991, l’ annulation de la « décision de M . Hay en date du 30 octobre 1990, par laquelle celui-ci rejette ( sa ) réclamation visant à faire fixer le montant de ses droits à pension à l’ âge correspondant au taux maximum », et, en conséquence, l’ annulation de la « décision implicite de maintenir à 100 le coefficient correcteur applicable à la pension du requérant prenant sa retraite en Suisse ».

8 Sans avoir déposé de mémoire au fond, la Commission a opposé une exception d’ irrecevabilité au recours en tous ses chefs de demande . Le requérant a déposé des observations tendant au rejet de l’ exception soulevée par la Commission . Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal a décidé, conformément à l’ article 114, paragraphe 3, de son règlement de procédure, d’ ouvrir la procédure orale sur la recevabilité sans mesures d’ instruction préalables . La procédure orale sur l’ exception d’ irrecevabilité s’ est déroulée le 16 octobre 1991 et le président en a prononcé la clôture à la fin de l’ audience .

Conclusions des parties

9 La défenderesse conclut à ce qu’ il plaise au Tribunal :

— rejeter le présent recours comme irrecevable;

— statuer comme de droit sur les dépens .

Le requérant conclut à ce qu’ il plaise au Tribunal :

— rejeter l’ exception d’ irrecevabilité soulevée par la défenderesse ou, à tout le moins, joindre l’ examen de la recevabilité au fond;

— en conséquence, ordonner la réouverture du débat au fond;

— condamner la défenderesse à l’ ensemble des dépens .

Arguments des parties et appréciation en droit

Arguments des parties

10 La Commission excipe de l’ irrecevabilité du recours en ce qu’ il vise l’ annulation, d’ une part, de la prétendue décision implicite de maintenir à 100 le coefficient correcteur qui sera applicable à la pension du requérant s’ il se retire en Suisse, et, d’ autre part, de la lettre du 30 octobre 1990, portant rejet de sa réclamation .

11 A l’ appui de l’ exception d’ irrecevabilité soulevée à l’ égard du premier chef de demande susvisé, la Commission allègue que son refus implicite de faire droit à la demande présentée par le requérant le 3 mai 1990 ne constitue pas un acte faisant grief .

12 La Commission rappelle, liminairement, le cadre juridique du présent litige . Elle observe qu’ un fonctionnaire encore en activité ne saurait prétendre à l’ adoption d’ une décision portant liquidation anticipée de ses droits à pension . En effet, précise-t-elle, les droits à pension ne sont ouverts qu’ à partir de la cessation de l’ activité de l’ intéressé et ne peuvent être liquidés qu’ à cette date . Cela ressortirait de l’ article 40 de l’ annexe VIII du statut, prévoyant que le décompte détaillé de la liquidation des droits à la pension d’ ancienneté est notifié en même temps que la décision portant concession de cette pension, ainsi que de l’ article 10 de cette même annexe, aux termes duquel le droit à la pension d’ ancienneté prend effet à compter du premier jour du mois civil qui suit celui au cours duquel le fonctionnaire est admis, d’ office ou sur sa demande, au bénéfice de cette pension .

A fortiori, selon la Commission, un fonctionnaire encore en activité ne peut prétendre à l’ adoption d’ une décision portant de manière isolée sur une opération, en l’ occurrence la fixation du coefficient correcteur, qui fait partie intégrante des opérations de liquidation de la pension .

13 Au vu de ces règles statutaires, la Commission dénonce l’ interprétation proposée par le requérant, selon laquelle l’ absence de réponse à sa demande du 3 mai 1990 constituerait une décision anticipée de maintenir à 100 le coefficient correcteur applicable à sa future pension, si elle est versée en Suisse . La Commission est d’ avis que cette absence de réponse peut uniquement signifier qu’ aucune décision sur la détermination du coefficient correcteur qui sera applicable à la liquidation des droits à pension du requérant ne peut être prise aussi longtemps qu’ il n’ a pas été admis à la retraite .

14 La Commission souligne que, dans la mesure où elle ne s’ est pas abstenue de prendre une mesure imposée par le statut, son refus implicite d’ adopter une décision portant fixation anticipée des droits à pension du requérant ne constitue pas un acte faisant grief, susceptible en tant que tel de faire l’ objet d’ une réclamation et d’ un recours ( ordonnance du Tribunal du 14 décembre 1989, Teissonnière/Commission, point 17, T-119/89, Rec . 1990, p . II-7 ). Elle allègue que le requérant ne fait état d’ aucune circonstance particulière, dans laquelle serait imposée, à titre dérogatoire, une liquidation anticipée des droits à pension non encore ouverts et, en particulier, la fixation anticipée par voie décisionnelle du coefficient correcteur appelé à affecter des droits futurs .

15 Au soutien de l’ exception d’ irrecevabilité opposée à la demande en annulation de la lettre de M . Hay, en date du 30 octobre 1990, la Commission fait valoir que, « par cette lettre, il a été annoncé au requérant qu’ il serait donné suite à brève échéance à sa demande de voir fixer ses droits à pension, étant précisé que le décompte qui serait transmis ne pourrait que conserver une portée informative, tant que l’ intéressé n’ aurait pas été admis à la retraite ». Et, en tout état de cause, il serait – estime la Commission – « vain et sans intérêt » d’ examiner si ladite lettre constitue une décision portant rejet de la réclamation du 25 septembre 1990, dans la mesure où cette réclamation était dirigée, précise-t-elle, contre un acte qui n’ existait pas . En effet, selon l’ institution défenderesse, la réclamation visait la prétendue décision implicite de maintenir à 100 le coefficient correcteur applicable à la pension du requérant s’ il se retire en Suisse, et non la décision implicite de ne pas liquider sa pension par anticipation, qui seule est susceptible de découler de l’ absence de réponse à la demande du 3 mai 1990 et, par conséquent, de donner lieu à réclamation et recours . En outre, l’ irrecevabilité des conclusions tendant à l’ annulation de la décision implicite précitée entraînerait l’ irrecevabilité de la demande en annulation de la lettre du 30 octobre 1990 .

16 Le requérant prétend, pour sa part, que le recours est recevable . Il observe, d’ abord, qu’ il a expressément et formellement demandé à la Commission, le 3 mai 1990, en application de l’ article 90, paragraphe 1, du statut, d’ adopter une décision sur le montant du coefficient correcteur qui sera applicable à ses droits à pension, à la suite de l’ entrée en vigueur du règlement n 2175/88 du Conseil, et compte tenu de son intention de prendre sa retraite en Suisse, pays dont il a la nationalité et où il a été recruté .

17 Le requérant fait valoir que le refus de la Commission – d’ abord implicite en raison de l’ absence de réponse à sa demande de décision fondée sur l’ article 90, paragraphe 1, du statut, puis explicite à travers le décompte de ses droits à pension qui lui a été adressé le 18 décembre 1990 – d’ appliquer le coefficient correcteur à la liquidation de ses droits à pension, constitue une décision claire et inconditionnelle de l’ autorité compétente, fixant, dès à présent, le montant de ses droits à pension et faisant apparaître qu’ il ne bénéficiera pas d’ un coefficient correcteur supérieur à 100 . Peu importerait, à cet égard, que l’ effet de ce droit soit suspendu jusqu’ au jour de sa mise à la retraite effective, dès lors qu’ il est dès à présent certain . Cette certitude serait accentuée par la proximité de l’ âge de la retraite et la très forte probabilité que la réglementation contestée par voie d’ exception ne soit pas modifiée dans l’ intervalle . De plus, la fixation de la date de sa mise à la retraite n’ aurait aucune incidence sur le montant de ses droits à pension, calculés au taux maximal . Le requérant relève enfin que la forme dans laquelle la décision attaquée lui a été transmise est sans incidence sur sa nature d’ acte faisant grief .

18 Afin d’ étayer sa thèse, le requérant fait valoir qu’ il n’ est pas logique d’ exiger d’ un fonctionnaire qu’ il fixe la date de sa retraite ou celle de son départ, pour quelque raison que ce soit, avant de lui permettre de connaître sa situation administrative et financière à cette date . Se fondant sur l’ arrêt de la Cour du 1er février 1979, Deshormes/Commission ( 17/78, Rec . p . 189 ), il allègue qu’ il possède un « intérêt légitime, né et actuel, suffisamment caractérisé à faire fixer judiciairement, dès maintenant, un élément incertain de son état ». Il ajoute, à cet égard, qu’ il remplit déjà les conditions nécessaires pour demander sa mise à la retraite et que « la date à laquelle ( il ) voudra prendre sa retraite dépend essentiellement de la connaissance préalable de la liquidation des droits à pension qui lui seront alloués ».

19 Le requérant souligne qu’ il a d’ autant plus intérêt à la fixation de sa situation juridique que la décision attaquée modifie sa situation initiale . En effet, précise-t-il, dans un précédent décompte de ses droits à pension établi en 1988, avant l’ entrée en vigueur du règlement n 2175/88 supprimant l’ application du coefficient au montant des pensions servies dans un pays tiers, il avait été fait application du coefficient correcteur de 145,4 au montant de la pension qui lui serait versée en Suisse .

20 En ce qui concerne la lettre de la Commission du 30 octobre 1990, le requérant soutient que, malgré son caractère volontairement ambigu, cette lettre constitue bien un rejet de la réclamation introduite le 25 septembre 1990 contre la décision implicite rejetant sa demande .

Appréciation en droit

21 En vue de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la Commission, il convient de vérifier, comme l’ exige l’ article 91, paragraphe 1, du statut, si les actes attaqués sont susceptibles de faire grief au requérant au sens de l’ article 90, paragraphe 2 .

22 Selon cette dernière disposition, la notion d’ acte faisant grief recouvre à la fois les décisions et les abstentions de prendre une mesure imposée par le statut . Une absence de décision est donc susceptible de faire grief à l’ intéressé, lorsque l’ institution dont il relève s’ est abstenue de prendre soit une décision expressément prévue par une disposition statutaire spécifique, soit une décision implicitement imposée par le statut pour garantir les droits des fonctionnaires .

23 Il y a lieu, dès lors, d’ établir si, en observant le silence à la suite de la demande du requérant du 3 mai 1990, visant à obtenir une décision relative au coefficient correcteur applicable à sa future pension d’ ancienneté s’ il s’ installe en Suisse, la Commission s’ est abstenue de prendre une mesure à laquelle le requérant était en droit de prétendre en vertu du statut .

24 A cet égard, le Tribunal rappelle qu’ aucune disposition statutaire n’ impose expressément à l’ institution dont relève un fonctionnaire de fixer de manière anticipée, c’ est-à-dire avant son admission à la retraite, certaines modalités de calcul du montant de ses droits à pension . Au contraire, les dispositions pertinentes du statut prévoient que la liquidation des droits à pension d’ un fonctionnaire s’ effectue au moment de son admission au bénéfice de la retraite . En effet, aux termes de l’ article 40 de l’ annexe VIII du statut, relative aux modalités du régime de pensions, « la liquidation des droits à pension d’ ancienneté … incombe à l’ institution dont relevait le fonctionnaire au moment de la cessation de son activité . Le décompte détaillé de cette liquidation est notifié au fonctionnaire … en même temps que la décision portant concession de cette pension ». L’ article 10 de cette même annexe précise que « le droit à pension d’ ancienneté prend effet à compter du premier jour du mois civil qui suit celui au cours duquel le fonctionnaire est admis … au bénéfice de cette pension ».

25 La règle statutaire précitée, selon laquelle une institution peut uniquement procéder à la liquidation des droits à pension d’ un fonctionnaire lorsqu’ il cesse son activité, est dictée par les exigences propres à un droit en cours de formation, dont les bases de calcul sont, en principe, indéterminées et susceptibles de variations aussi longtemps que l’ intéressé n’ a pas été admis à la retraite . L’ ensemble des éléments du calcul du montant des droits à pension d’ un fonctionnaire ne peut donc, en règle générale, être fixé avant la cessation de son activité .

26 Toutefois, une telle règle ne se justifie plus lorsque, à titre exceptionnel, un élément de ce calcul est d’ ores et déjà déterminé de manière définitive . Dans cette hypothèse, les dispositions statutaires doivent être interprétées en ce sens qu’ elles imposent de façon implicite à l’ institution concernée d’ adopter immédiatement une décision . La Cour en a jugé ainsi, dans son arrêt du 1er février 1979, Deshormes/Commission, précité, 17/78, points 10 à 12, en ce qui concerne une décision relative à la prise en compte des périodes d’ activité antérieures au recrutement d’ un fonctionnaire pour le calcul des annuités d’ ancienneté . En effet, cet arrêt fait apparaître que, lorsqu’ une décision à exécution différée, susceptible d’ affecter immédiatement et directement la situation juridique d’ un fonctionnaire, peut être adoptée sur la base d’ éléments déterminés et invariables, l’ intéressé possède un intérêt légitime, né et actuel, à faire fixer, de manière anticipée, un élément incertain de son état ( voir également l’ ordonnance du Tribunal du 14 décembre 1989, Teissonnière/Commission, précitée, T-119/89, point 19 ).

27 En ce qui concerne la présente espèce, le Tribunal relève que le coefficient correcteur applicable est conditionné, d’ une part, par le lieu de résidence de l’ intéressé après la cessation de ses fonctions et, d’ autre part, par la réglementation en vigueur au moment de la liquidation . A cet égard, il est à noter que le choix du lieu de résidence doit être effectué par l’ intéressé, lorsqu’ il demande à être admis ou est admis d’ office à la retraite . Il en résulte donc qu’ un fonctionnaire encore en activité ne saurait justifier d’ un intérêt né et actuel à obtenir une décision sur le coefficient correcteur qui s’ appliquera à sa future pension d’ ancienneté . En effet, en raison de la condition susvisée, liée au choix du pays de résidence et uniquement vérifiable lors de la cessation d’ activité de l’ intéressé, la fixation du coefficient correcteur ne peut pas faire l’ objet d’ une décision anticipée, affectant immédiatement et directement la situation juridique de l’ intéressé .

28 Pour l’ ensemble de ces motifs, le Tribunal constate que, en omettant de répondre à la demande du 3 mai 1990, la Commission ne s’ est pas abstenue de prendre une mesure expressément ou implicitement imposée par le statut .

29 Il s’ ensuit que la décision implicite de rejet résultant, en vertu de l’ article 90, paragraphe 1, du statut, du défaut de réponse de la Commission à sa demande du 3 mai 1990, à l’ expiration d’ un délai de quatre mois à partir de l’ introduction de cette demande, ne saurait faire grief au requérant . Le recours doit donc être déclaré irrecevable .

Décisions sur les dépenses


Sur les dépens

30 Aux termes de l’ article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’ il est conclu en ce sens . Toutefois, selon l’ article 88 du même règlement, les frais exposés par les institutions dans les recours des agents des Communautés restent à la charge de celles-ci .

Dispositif


Par ces motifs,

LE TRIBUNAL ( troisième chambre )

déclare et arrête :

1 ) Le recours est rejeté comme irrecevable .

2 ) Chacune des parties supportera ses propres dépens .

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
CJCE, n° T-6/91, Arrêt du Tribunal, Fred Pfloeschner contre Commission des Communautés européennes, 12 février 1992