CJCE, n° T-1/90, Arrêt du Tribunal, Gloria Pérez-Mínguez Casariego contre Commission des Communautés européennes, 20 mars 1991

  • Statut des fonctionnaires et régime des autres agents·
  • Charge de la preuve de la notification 2 . procédure·
  • Identité d' objet et de cause 4 . fonctionnaires·
  • Pouvoir d' appréciation de l' administration·
  • Droits et obligations du fonctionnaire·
  • Réclamation administrative préalable·
  • Cee/ce - contentieux * contentieux·
  • Inadmissibilité 3 . fonctionnaires·
  • Portée du contrôle juridictionnel·
  • Procédures et recours accessoires

Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CJUE, Tribunal de première instance, 20 mars 1991, Pérez-Mínguez Casariego / Commission, T-1/90
Numéro(s) : T-1/90
Arrêt du Tribunal de première instance (cinquième chambre) du 20 mars 1991. # Gloria Pérez-Mínguez Casariego contre Commission des Communautés européennes. # Fonctionnaires - Procédure de concours externe à l'occasion de l'adhésion de l'Espagne et du Portugal - Recevabilité - Intervention forcée - Nomination d'un candidat inscrit sur une liste d'aptitude - Obligation de motivation. # Affaire T-1/90.
Date de dépôt : 2 janvier 1990
Précédents jurisprudentiels : Cour du 14 juillet 1983, Detti/Cour de justice, 144/82
Cour du 14 juin 1972, Marcato/Commission, 44/71
Cour du 19 mars 1964, Raponi/Commission ( 27/63
Cour du 24 octobre 1977, Moli/Commission, précité, et du 9 juin 1983, Verzyck/Commission, 225/82
Cour du 29 octobre 1981, Arning/Commission, 125/80
Cour du 30 mai 1984, Picciolo/Parlement ( 11/83
Tribunal du 13 décembre 1990, Kalavros/Cour
Tribunal du 13 décembre 1990, Kalavros/Cour de justice, T-160/89 et T-161/89
Tribunal du 16 octobre 1990, Brumter/Conseil ( T-128/89
Tribunal du 29 mars 1990, Alexandrakis/Commission ( T-54/89
Solution : Recours de fonctionnaires : non-lieu à statuer, Recours de fonctionnaires : rejet sur le fond, Recours de fonctionnaires : rejet pour irrecevabilité, Demande de mesures d'instruction : rejet sur le fond
Identifiant CELEX : 61990TJ0001
Identifiant européen : ECLI:EU:T:1991:17
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Texte intégral

Avis juridique important

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61990A0001

Arrêt du Tribunal de première instance (cinquième chambre) du 20 mars 1991. – Gloria Pérez-Mínguez Casariego contre Commission des Communautés européennes. – Fonctionnaires – Procédure de concours externe à l’occasion de l’adhésion de l’Espagne et du Portugal – Recevabilité – Intervention forcée – Nomination d’un candidat inscrit sur une liste d’aptitude – Obligation de motivation. – Affaire T-1/90.


Recueil de jurisprudence 1991 page II-00143


Sommaire

Parties

Motifs de l’arrêt

Décisions sur les dépenses

Dispositif

Mots clés


++++

1 . Fonctionnaires – Recours – Délais – Point de départ – Notification – Notion – Charge de la preuve de la notification

( Statut des fonctionnaires, art . 91, § 3 )

2 . Procédure – Intervention forcée – Inadmissibilité

( Règlement de procédure, art . 93 et 97 )

3 . Fonctionnaires – Recours – Réclamation administrative préalable – Identité d’ objet et de cause

( Statut des fonctionnaires, art . 90 et 91 )

4 . Fonctionnaires – Recrutement – Pouvoir d’ appréciation de l’ administration – Contrôle juridictionnel – Limites

5 . Fonctionnaires – Décision individuelle – Communication tardive – Effets

( Statut des fonctionnaires, art . 25, alinéa 2 )

6 . Fonctionnaires – Décision faisant grief – Décision de nomination – Obligation de motivation – Objet – Portée

( Statut des fonctionnaires, art . 25, alinéa 2 )

7 . Fonctionnaires – Décision faisant grief – Obligation de motivation – Non-respect – Régularisation au cours de la procédure contentieuse

( Statut des fonctionnaires, art . 25, alinéa 2 )

8 . Fonctionnaires – Recours – Objet – Injonction à l’ administration – Irrecevabilité

( Traité CEE, art . 176; statut des fonctionnaires, art . 91 )

Sommaire


1 . Il appartient à la partie qui se prévaut de la tardiveté d’ une requête, au regard des délais fixés par l’ article 91 du statut, de faire la preuve de la date à laquelle la décision attaquée a été notifiée .

2 . Ne sont à la disposition des justiciables que les voies procédurales expressément prévues par les textes, au silence desquels le juge ne saurait suppléer, surtout lorsque la protection juridictionnelle des justiciables est déjà assurée dans des conditions appropriées .

L’ intervention forcée n’ étant pas prévue par un texte, le juge ne saurait y recourir . La garantie des droits des tiers, qui n’ ont pas été mis en cause dans une affaire devant le Tribunal, est assurée par le règlement de procédure à travers la voie de l’ intervention volontaire et celle de la tierce opposition .

3 . Un fonctionnaire ne peut présenter devant le Tribunal, d’ une part, que des conclusions ayant le même objet que celles exposées dans la réclamation administrative préalable et, d’ autre part, que des chefs de contestation reposant sur la même cause que ceux invoqués dans la réclamation .

4 . L’ étendue du contrôle du Tribunal sur les décisions prises en matière de procédure de recrutement se limite, compte tenu du pouvoir d’ appréciation conféré à l’ autorité investie du pouvoir de nomination, à l’ examen de la régularité des procédures utilisées par l’ administration, à la vérification de l’ exactitude matérielle des faits sur lesquels l’ administration s’ est fondée pour prendre sa décision et, enfin, à l’ absence d’ erreur manifeste d’ appréciation, d’ erreur de droit et de détournement de pouvoir qui pourraient entacher la décision administrative .

5 . L’ article 25, deuxième alinéa, première phrase, du statut prévoit que toute décision individuelle doit être communiquée par écrit, sans délai, au fonctionnaire . La constatation d’ un retard affectant cette communication ne saurait toutefois, à elle seule, être constitutive d’ une violation de ladite disposition, de nature à entraîner l’ annulation de la décision attaquée .

6 . L’ obligation de motiver toute décision faisant grief, édictée par l’ article 25, deuxième alinéa, du statut, constitue un principe essentiel du droit communautaire auquel il ne saurait être dérogé qu’ en raison de considérations impérieuses .

Lorsque l’ autorité investie du pouvoir de nomination nomme un lauréat de concours figurant sur une liste d’ aptitude établie par ordre de mérite en suivant cet ordre, elle n’ est pas tenue de motiver, envers les candidats non retenus et figurant en moins bonne position sur la liste d’ aptitude que le candidat nommé, sa décision de ne pas procéder à leur nomination, le jury étant censé avoir informé les lauréats de leur rang sur la liste et avoir accompagné cette information d’ une motivation suffisante .

En revanche, si la liste d’ aptitude a été établie sans considération d’ ordre de mérite, par exemple par ordre alphabétique, et que la décision de nomination d’ un des lauréats figurant sur cette liste entraîne l’ extinction immédiate de celle-ci, cette décision affecte de manière directe et immédiate la situation juridique des autres lauréats et doit donc être motivée à leur égard . Il serait en effet déraisonnable, inéquitable et contraire à la lettre et à l’ esprit de l’ article 25, deuxième alinéa, du statut que les candidats les meilleurs, inscrits sur une liste d’ aptitude établie sans considération d’ ordre de mérite, puissent se voir écartés de la procédure de recrutement, sans recevoir le moindre élément de motivation leur permettant de prendre connaissance des raisons pour lesquelles ils n’ ont finalement pas été retenus par l’ autorité investie du pouvoir de nomination et d’ en constater le bien-fondé .

7 . Dans des cas exceptionnels, des explications données au cours de la procédure juridictionnelle peuvent rendre sans objet un moyen tiré de l’ insuffisance de motivation, de sorte qu’ il ne justifie plus l’ annulation de la décision attaquée .

8 . Il n’ appartient pas au Tribunal d’ adresser des injonctions aux institutions communautaires ou de se substituer à ces dernières .

Parties


Dans l’ affaire T-1/90,

Gloria Pérez-Mínguez Casariego, demeurant à Madrid, représentée par Me Miguel Angel Auñón-Auñón, avocat au barreau de Madrid, et par Me Marcel Slusny, avocat au barreau de Bruxelles, ayant tous deux élu domicile à Luxembourg en l’ étude de Me Ernest Arendt, 4, avenue Marie-Thérèse,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM . Miguel Díaz-LLanos la Roche, son conseiller juridique, et Daniel Calleja Crespo, membre de son service juridique, en qualité d’ agents, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M . Guido Berardis, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,

partie défenderesse,

ayant pour objet l’ annulation de la décision de nomination au poste correspondant à l’ emploi n 12 du concours COM/A/537 de la Commission ainsi que la nomination de la requérante à cet emploi,

LE TRIBUNAL ( cinquième chambre ),

composé de MM . C . P . Briët, président de chambre, D . Barrington et J . Biancarelli, juges,

greffier : Mme B . Pastor, administrateur

vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 24 janvier 1991,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l’arrêt


Les faits à l’ origine du recours

1 Le 12 décembre 1985, le Conseil a adopté le règlement ( CEE ) n 3517/85 instituant, à l’ occasion de l’ adhésion de l’ Espagne et du Portugal, des mesures particulières et temporaires concernant le recrutement de fonctionnaires des Communautés européennes ( JO L 335, p . 55 ).

2 Le paragraphe 1 et le premier alinéa du paragraphe 2 de l’ article 1er de ce règlement étaient libellés de la façon suivante :

« 1 . Jusqu’ au 31 décembre 1988, il peut être pourvu à des emplois vacants par la nomination de ressortissants espagnols et portugais, par dérogation à l’ article 4, deuxième et troisième alinéas, à l’ article 5, paragraphe 3, à l’ article 7, paragraphe 1, à l’ article 27, troisième alinéa, à l’ article 29, paragraphe 1, sous a ), b ) et c ), et à l’ article 31 du statut des fonctionnaires des Communautés européennes, dans la limite des emplois prévus à cet effet dans le cadre des délibérations budgétaires au sein des institutions compétentes .

2 . Les nominations aux emplois des grades A 3, A 4, A 5, LA 3, LA 4, LA 5, B 1, B 2, B 3 et C 1 seront décidées après un concours sur titres organisé dans les conditions prévues à l’ annexe III du statut …"

3 A cet effet, la Commission a publié, notamment, le 4 novembre 1986, un avis de concours général sur titres, sous la référence COM/A/537, destiné à pourvoir 35 emplois, afin de constituer des listes de réserve de recrutement d’ administrateurs principaux, de nationalité espagnole, dont la carrière portait sur les grades 5 et 4 de la catégorie A ( JO C 278, p . 14 ).

4 L’ avis de concours précisait les points suivants :

— cette liste de réserve était constituée afin de pourvoir les emplois vacants ou nouvellement créés de cette catégorie, par le recrutement de personnes de nationalité espagnole, conformément aux dispositions du règlement n 3517/85 du Conseil, précité;

— les lauréats inscrits sur la liste de réserve pourraient être recrutés au fur et à mesure des besoins des différents services;

— le 31 décembre 1987 au plus tard, l’ autorité investie du pouvoir de nomination ( ci-après « AIPN ») fixerait la date d’ expiration de la validité de la liste de réserve en fonction de l’ état d’ exploitation de cette dernière .

5 Comme suite à des questions posées par écrit par le Tribunal, le 27 novembre 1990, la Commission a précisé, le 5 décembre 1990, en premier lieu, que, pour la plupart des emplois faisant l’ objet du concours COM/A/537, dont l’ emploi n 12, il a été établi une liste d’ aptitude propre à chaque emploi; en second lieu, que, pour cet emploi n 12, la nomination du candidat retenu par l’ AIPN a entraîné l’ extinction immédiate de la liste d’ aptitude correspondante et, en troisième lieu, qu’ il n’ était pas possible, pour un lauréat inscrit sur une liste d’ aptitude afférente à un emploi déterminé, d’ être nommé à un autre emploi du même concours .

6 Il était annexé à l’ avis de concours COM/A/537 la liste des 35 emplois à pourvoir, assortie d’ un descriptif des fonctions correspondant à chacun d’ entre eux et, pour certains, de conditions particulières à satisfaire en matière de formation universitaire, de connaissances linguistiques et d’ expérience professionnelle .

7 Le descriptif de l’ emploi n 12 était libellé de la façon suivante :

« DG IX – Personnel et administration

Assistance au chef de la bibliothèque centrale dans la gestion et le développement de son service :

— organisation et contrôle de divers travaux administratifs et techniques,

— exécution de recherches bibliographiques,

— élaboration de rapports,

— développement des relations avec les services de documentation, des directions générales et avec l’ extérieur .

Ce poste requiert une formation professionnelle complémentaire ainsi qu’ une expérience pratique de plusieurs années dans le domaine en cause, et une aptitude à l’ organisation ."

8 La requérante a présenté, dans les délais, sa candidature à l’ emploi n 12 à la DG IX .

9 Le 14 mai 1987, le chef de la division « sélection du personnel » a adressé à la requérante une lettre dans laquelle il l’ informait qu’ elle remplissait les conditions d’ admission requises par l’ avis de concours et que le jury avait établi la liste des candidats répondant à ces conditions . Il précisait également que « le jury procédera prochainement à un examen comparatif des titres respectifs des différents candidats inscrits sur cette liste en tenant compte, en particulier, de la nature et de l’ importance de l’ expérience professionnelle ».

10 Le 30 septembre 1987, le jury du concours COM/A/537, statuant sur l’ emploi n 12, a rendu son rapport motivé . Il y était précisé, en premier lieu, que le jury a dressé une liste des six candidats répondant aux conditions fixées par l’ avis de concours; en second lieu, qu’ il a eu des entretiens avec ces six candidats afin d’ approfondir l’ examen de leurs qualifications, de comparer leurs mérites en tenant compte, notamment, des exigences spécifiques afférentes à la nature des fonctions, de procéder à un examen complémentaire de leurs diplômes, de leurs références et de leurs déclarations relatives aux qualifications requises; en troisième lieu, que, suite à l’ examen comparatif des mérites des candidats, le jury a inscrit deux lauréats, par ordre alphabétique, sur la liste d’ aptitude : la requérante et Mme Maria Gutiérrez Díaz . Cette liste d’ aptitude a été transmise le 2 octobre 1987 au chef de la division « carrières ».

11 Le 2 octobre 1987, le chef de la division « sélection du personnel » a adressé à la requérante une lettre par laquelle il l’ informait que le jury avait décidé d’ inscrire son nom sur la liste d’ aptitude des candidats à l’ emploi n 12 d’ administrateur principal, dans le cadre du concours COM/A/537, et que cette liste avait été communiquée à l’ AIPN afin qu’ elle puisse nommer le candidat de son choix .

12 Les deux candidates inscrites sur la liste d’ aptitude ont été convoquées à Bruxelles et ont eu des entretiens, les 9 et 10 novembre 1987, avec M . Gaskell, chef de la bibliothèque, M . Hay, directeur général de la DG IX, et M . de Torres-Simo, assistant du directeur général de la DG IX . A cette occasion, elles ont été soumises à l’ examen médical prévu à l’ article 33 du statut des fonctionnaires des Communautés européennes ( ci-après « statut »).

13 Le 10 novembre 1987, M . Ristori, assistant du directeur général de la DG IX, a adressé une note à M . Valsesia, directeur du personnel, dont les termes étaient les suivants :

« Je vous saurais gré de bien vouloir entamer la procédure officielle de recrutement au bénéfice de Mme Gutiérrez Díaz, lauréate du concours COM/A/537 ( A/5-4 ES ), ayant fait l’ objet de l’ emploi 12 – DG IX .

Cette décision est prise en accord avec la direction IX-E ainsi que la direction générale, le profil de l’ intéressée répondant le mieux aux besoins du service compte tenu, au-delà de ses connaissances dans le domaine, de son expérience en matière de gestion et d’ informatique ."

14 Le 16 décembre 1987, M . Malhotra, fonctionnaire affecté à la division « carrières », a adressé une lettre à Mme Gutiérrez Díaz, dans laquelle il lui confirmait qu’ elle pourrait prendre ses fonctions à la Commission à compter du 1er février 1988 .

15 Le 12 avril 1988, M . Arendt, chef de la division « carrières », a adressé à la requérante une lettre dans laquelle il l’ informait que, suite à l’ entretien du 9 novembre 1987, il avait été décidé de ne pas retenir sa candidature pour le poste d’ administrateur principal auprès de la DG IX, emploi n 12 . La requérante déclare ne pas avoir reçu cette lettre .

16 Le 21 février 1989, la requérante a adressé une lettre, qualifiée de « demande », fondée sur le paragraphe 1 de l’ article 90 du statut, aux fins :

— de se voir communiquer officiellement le résultat du concours et de savoir si Mme Gutiérrez Díaz a été nommée fonctionnaire, en lui en exposant les motifs;

— au cas où Mme Gutiérrez Díaz aurait été nommée administrateur principal, de voir sa nomination annulée et déclarée de nul effet;

— d’ obtenir sa nomination en qualité de fonctionnaire, au motif qu’ elle satisfaisait à toutes les conditions essentielles et possédait l’ ensemble des titres pouvant être exigés dans le cadre du concours d’ administrateur principal en cause;

— subsidiairement, au cas où sa demande précédente serait rejetée, de voir annulé et déclaré de nul effet le concours, « depuis l’ admission au concours de Mme Gutiérrez Díaz ou depuis que la procédure a été entachée d’ un autre vice ».

17 En outre, dans cette même lettre, elle précisait que les entretiens des 9 et 10 novembre 1987 qu’ elle avait eus avec MM . Gaskell et Hay se seraient bien passés, puisqu’ on l’ aurait informée qu’ elle réunissait « toutes les conditions requises en surclassant les autres candidats » et qu’ elle serait « certainement la candidate retenue pour le poste ». A l’ inverse, la discussion qu’ elle aurait eue avec M . de Torres-Simo se serait plutôt mal passée, puisque ce dernier lui aurait manifesté « une animosité et une aversion surprenantes », alors que cet entretien, d’ ailleurs non prévu, n’ aurait porté sur aucun aspect important relatif au concours . Elle rappelait, également, que, suite à une information officieuse, elle avait été surprise d’ apprendre qu’ il semblait que le concours avait abouti à la nomination de Mme Gutiérrez Díaz au poste en cause . Enfin, elle fondait sa « demande » sur les moyens de droit suivants : violation des articles 5, paragraphe 3, 25 et 28 du statut, violation de la procédure prévue à l’ annexe III du même statut, erreur manifeste d’ appréciation, violation du principe d’ égalité de traitement et détournement de pouvoir .

18 Le 13 septembre 1989, la requérante a présenté une réclamation dirigée contre le rejet implicite de sa « demande » du 21 février 1989, et tendant, à titre principal, à l’ annulation de la décision de nomination de Mme Gutiérrez Díaz au poste d’ administrateur principal en cause et à sa propre nomination à ce poste ainsi que, à titre subsidiaire, à l’ annulation et à la reprise de la procédure du concours . Elle rappelait, tout d’ abord, que les personnes n’ ayant pas la qualité de fonctionnaire communautaire sont recevables à introduire une action contentieuse à l’ encontre des institutions communautaires, lorsqu’ elles ont un intérêt à agir, s’ appuyant à cet égard sur les arrêts de la Cour du 19 mars 1964, Raponi/Commission ( 27/63, Rec . p . 247 ), et du 10 juillet 1975, Kuester/Parlement ( 77/74, Rec . p . 949 ). Elle faisait ensuite valoir, en premier lieu, une violation de l’ article 25, deuxième et troisième alinéas, du statut, ainsi que des termes de l’ avis de concours, puisque l’ AIPN aurait dû lui communiquer les résultats du concours; en second lieu, une violation de l’ article 27 du statut, tel qu’ interprété par la Cour de justice, notamment dans son arrêt du 21 avril 1983, Ragusa/Commission ( 282/81, Rec . p . 1245 ), puisque la nomination de Mme Gutiérrez Díaz découlerait d’ erreurs manifestes d’ appréciation, et non de l’ examen des conditions prévues à l’ article 27; en troisième lieu, une violation de l’ article 33 du statut, dès lors qu’ un examen médical favorable devrait obligatoirement être suivi de la nomination du candidat retenu; en quatrième lieu, une violation de l’ article 5 de l’ annexe III du statut ainsi que des articles 28, sous d ), et 30, paragraphe 2, du statut, puisque la candidate finalement nommée ne figurait pas, selon elle, sur la liste des candidats arrêtée par le jury de concours; en cinquième lieu, un détournement de pouvoir constitué par les irrégularités de la procédure et l’ absence de prise en compte des titres et compétences de la requérante, se fondant, à cet égard, sur l’ arrêt de la Cour du 6 octobre 1982, Williams/Cour des comptes ( 9/81, Rec . p . 3301 ); en sixième lieu, une violation de l’ article 5, paragraphe 3, du statut et du principe de l’ égalité de traitement, tel qu’ interprété notamment dans les arrêts de la Cour du 23 janvier 1975, de Dapper/Parlement ( 29/74, Rec . p . 35 ), et du 13 février 1979, Martin/Commission ( 24/78, Rec . p . 603 ).

19 Par décision du 27 septembre 1989, adressée à la requérante le 4 octobre 1989, la Commission a rejeté cette réclamation .

La procédure

20 Par requête enregistrée au greffe du Tribunal le 2 janvier 1990, Mme Pérez-Mínguez Casariego a introduit le présent recours .

21 Le 6 juin 1990, la requérante a déposé une demande tendant à pouvoir utiliser une langue autre que la langue de procédure . La Commission, après y avoir été invitée, n’ a pas présenté d’ observations sur cette demande .

22 Le 6 juillet 1990, le Tribunal a rendu, conformément aux dispositions de l’ article 29, paragraphe 2, sous c ), du règlement de procédure de la Cour, applicable mutatis mutandis à la procédure devant le Tribunal en vertu de l’ article 11, troisième alinéa, de la décision du Conseil du 24 octobre 1988 instituant un Tribunal de première instance des Communautés européennes ( ci-après « règlement de procédure de la Cour »), une ordonnance autorisant les parties à poursuivre la procédure en langue française .

23 Le 27 novembre 1990, le Tribunal ( cinquième chambre ) a posé à la partie défenderesse, par lettre du greffe, des questions relatives à la nature des différentes listes d’ aptitude du concours COM/A/537, à la procédure de nomination effectuée par l’ AIPN et à ses effets sur les listes d’ aptitude aux emplois y afférents et, enfin, aux possibilités offertes aux candidats figurant sur une liste d’ aptitude et non retenus par l’ AIPN . La Commission a répondu à ces questions le 5 décembre 1990 .

24 La requérante conclut à ce qu’ il plaise au Tribunal :

— annuler en tous ses effets la nomination de Mme Maria Gutiérrez Díaz en qualité d’ administrateur principal;

— procéder à la nomination de Mme Gloria Pérez-Mínguez Casariego en tant qu’ administrateur principal, en ce qu’ elle a satisfait à toutes les conditions de forme et de titres requises dans le cadre du concours organisé pour que lui soit attribué ce poste;

— subsidiairement, annuler la décision nommant Mme Maria Gutiérrez Díaz à un poste d’ administrateur principal, en ce qu’ elle ne répond pas aux conditions requises pour le vice de forme constitué par le fait qu’ elle ne figure pas dans la liste d’ aptitude et en ce qu’ elle ne satisfait pas aux conditions exigées dans l’ avis de concours, ou bien en ce que ses titres sont inférieurs à ceux de la requérante, et annuler toute la procédure depuis l’ élaboration de la liste d’ aptitude, en ordonnant une reprise de la procédure du concours assortie de toutes les garanties d’ impartialité, en informant les concurrents des résultats du concours et des décisions qui les concernent .

25 Dans son mémoire en réplique, la requérante a déposé les conclusions additionnelles suivantes :

— condamner la partie adverse aux frais et dépens de la procédure;

— subsidiairement, enjoindre à la partie adverse de produire les documents relatifs à la nomination de Mme Gutiérrez Díaz, rien retenu ni réservé . Et notamment :

— si la décision de nomination émane de la Commission, ladite décision,

— si M . Hay, directeur général du personnel et de l’ administration, était compétent pour la prendre, la décision prise par lui,

— ainsi que les notes adressées par MM . Hay, Gaskell et de Torres-Simo à la Commission, ou par ces derniers à M . Hay;

— enjoindre à la partie adverse de donner toutes explications au Tribunal quant aux circonstances dans lesquelles M . Ristori a été amené, dès le 10 novembre 1987, à établir la note figurant comme annexe 7 au mémoire en défense;

— conformément aux articles 45, paragraphe 1, et 47, paragraphe 5, du règlement de procédure, ordonn(er ) la vérification par témoins des faits qu’ il estimera devoir être vérifiés, afin de faire la lumière sur les circonstances qu’ il estimera devoir être établies .

Elle a, en outre, précisé qu’ elle « ne soutient plus que l’ annulation de la procédure doit entraîner nécessairement sa propre nomination ».

26 La Commission conclut à ce qu’ il plaise au Tribunal :

— déclarer le recours irrecevable,

— subsidiairement, rejeter le recours comme non fondé,

— statuer sur les dépens ainsi qu’ il convient en droit .

27 Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal ( cinquième chambre ) a décidé d’ ouvrir la procédure orale .

Sur la recevabilité

28 La Commission soulève trois moyens d’ irrecevabilité, fondés respectivement sur la tardiveté du recours, sur l’ absence, dans la présente procédure, de Mme Gutiérrez Díaz et sur le défaut de correspondance entre les demandes formulées dans le cadre de la procédure précontentieuse et celles exposées dans la requête introductive d’ instance .

Sur le premier moyen d’ irrecevabilité, tiré de la tardiveté du recours

29 La défenderesse précise, liminairement, qu’ il convient de déduire des conclusions de la requête que celle-ci vise, en fait, l’ annulation de la décision de nomination de Mme Gutiérrez Díaz, ainsi que de la décision du jury de concours qui a approuvé l’ inscription de celle-ci sur la liste d’ aptitude . Or, la requérante n’ aurait pas attaqué dans les délais ces deux décisions, bien qu’ elles lui aient été communiquées, respectivement, par lettre du 12 avril 1988 et par lettre du 2 octobre 1987 . En conséquence, ces deux décisions seraient devenues définitives, puisque non attaquées dans les délais et dans les formes requis .

30 La défenderesse ajoute que, en admettant même que la lettre du 12 avril 1988 n’ ait pas été reçue par la requérante, le recours resterait hors délais . En effet, en vertu des termes de l’ article 90, paragraphe 2, du statut, le délai d’ introduction d’ une réclamation court à partir du jour de la notification de la décision à son destinataire et, en tout cas, au plus tard du jour où l’ intéressé en a eu connaissance, s’ il s’ agit d’ une mesure de caractère individuel . Or, selon la Commission, la requérante admet qu’ elle connaissait la nomination de Mme Gutiérrez Díaz au poste litigieux, au moins à la date de l’ introduction de sa « demande » du 21 février 1989 . De plus, elle avait connaissance de la « date butoir » du 31 décembre 1988, précisée dans le règlement n 3517/85 du Conseil, précité . Elle en conclut que la requérante devait déposer une réclamation soit à compter du 31 décembre 1988, soit à compter du 21 février 1989, et non une simple demande à cette dernière date .

31 La défenderesse soutient encore que, même si l’ on devait analyser en une « réclamation » la lettre de la requérante du 21 février 1989, le recours, enregistré le 2 janvier 1990, n’ en serait pas moins irrecevable, puisque déposé après l’ expiration du délai de trois mois qui suit le délai de quatre mois, au terme duquel intervient une décision implicite de rejet, prévu à l’ article 90, paragraphe 2, deuxième alinéa, du statut . En outre, la décision du 27 septembre 1989 n’ aurait pu avoir pour effet de réouvrir les délais, puisque, en tout état de cause, elle serait intervenue en dehors du délai de recours, prévu à l’ article 91, paragraphe 3, in fine, du statut . Sur ce dernier point, la Commission s’ appuie sur l’ arrêt du 13 juillet 1989, Olbrechts/Commission ( 58/88, Rec . p . 2643 ).

32 Enfin, la défenderesse rappelle la jurisprudence constante de la Cour selon laquelle les délais de recours, impératifs et d’ ordre public, ne constituent pas un moyen à la discrétion des parties ou des juges . Selon elle, la légalité des décisions administratives ne peut être remise en cause indéfiniment sans enfreindre les exigences de la sécurité juridique des tiers et affecter les droits acquis . Elle s’ appuie, à cet égard, sur les arrêts de la Cour suivants : arrêt du 17 novembre 1965, Lens/Cour de justice ( 55/64, Rec . p . 1033 ), arrêt du 17 novembre 1965, Collotti/Cour de justice ( 20/65, Rec . p . 1043 ), et arrêt du 12 décembre 1967, Muller/Commission ( 4/67, Rec . p . 469 ).

33 La requérante fait, tout d’ abord, valoir qu’ elle n’ a jamais reçu la lettre du 12 avril 1988 et que la lettre du 2 octobre 1987, l’ informant de son inscription sur la liste d’ aptitude en cause, ne contenait aucune indication, ni sur l’ inscription de Mme Gutiérrez Díaz sur cette liste ni, a fortiori, sur son éventuelle nomination . Elle relève, ensuite, que la date du 12 avril 1988 retenue par la Commission pour la communication qui lui aurait été adressée est soit tardive, puisque cette communication aurait dû indiquer la même date ou, à tout le moins, une date rapprochée de celle figurant sur la lettre du 16 décembre 1987, précitée, adressée à Mme Gutiérrez Díaz, soit prématurée, puisque Mme Gutiérrez Díaz a dû entrer en fonctions au début de l’ année 1988 et qu’ il était alors nécessaire d’ attendre le délai de neuf mois de stage, pour savoir si elle satisfaisait aux exigences requises pour l’ exercice de l’ emploi en cause . En effet, si tel n’ avait pas été le cas, il restait possible de faire appel à la requérante .

34 Tout en insistant sur l’ absence de toute communication officielle, la requérante explique, ensuite, comment elle a eu progressivement connaissance de la nomination de Mme Gutiérrez Díaz . En effet, elle connaissait l’ existence de sa candidature et l’ aurait très certainement rencontrée lors des entretiens des 9 et 10 novembre 1987, mais elle attendait une information officielle de la part de la Commission . Elle aurait, ensuite, appris officieusement que Mme Gutiérrez Díaz occupait le poste en cause, mais aurait estimé que cette information pouvait ne pas avoir de conséquences vis-à-vis de sa propre candidature, puisque le poste pouvait être occupé en qualité d’ agent auxiliaire, temporaire ou contractuel . Lorsque ces informations se seraient précisées, elle aurait alors introduit la demande en date du 21 février 1989 . En tout état de cause, elle n’ aurait appris la nomination officielle de sa concurrente qu’ à la lecture de la réponse de la Commission à sa réclamation, qui lui a été adressée le 4 octobre 1989, et la preuve formelle de cette nomination ne lui serait apparue que dans les annexes au mémoire en défense du 16 février 1990 .

35 Dans son mémoire en réplique, la requérante revient sur la qualification première de la procédure précontentieuse . En effet, elle admet que la lettre du 21 février 1989, qu’ elle avait initialement qualifiée de « demande », constituerait, en réalité, une « réclamation contre la nomination éventuelle de Mme Gutiérrez Díaz ». Selon elle, « ce texte ne constitue pas une demande, puisqu’ il ne tend pas à voir l’ AIPN prendre une décision à l’ égard de la requérante ». Cependant, l’ administration, malgré le devoir de sollicitude dont elle devait faire preuve à son égard, ne l’ avait pas informée que sa demande constituait une réclamation, puisque dirigée contre une décision ( arrêt du 13 juillet 1989, Olbrechts/Commission, précité ). De plus, dans sa réponse adressée le 4 octobre 1989 à la réclamation, la Commission elle-même a qualifié la lettre du 13 septembre 1989 de la requérante de « réclamation ». Il conviendrait, par conséquent, d’ en déduire que le recours a été déposé dans les délais . La requérante ajoute que, même si la lettre du 21 février 1989 devait être considérée comme une demande, le recours serait recevable, puisque les délais statutaires, dans le cadre de la procédure précontentieuse, ont bien été respectés .

36 Le Tribunal constate, liminairement, que le présent recours vise avant tout l’ annulation de la décision de nomination de l’ autre candidate inscrite sur la liste d’ aptitude de l’ emploi n 12, et non l’ annulation de la décision du jury du concours de l’ inscrire sur cette liste . En effet, d’ une part, la requérante a renoncé expressément, dans son mémoire en réplique, au moyen tiré de l’ absence d’ inscription de Mme Gutiérrez Díaz sur la liste d’ aptitude et, d’ autre part, la décision du jury de concours précitée n’ est pas visée dans les conclusions de la requête .

37 Il convient, ensuite, d’ examiner le problème de la réception, par la requérante, de la lettre du 12 avril 1988 que la Commission affirme lui avoir adressée . A cet égard, il résulte d’ une jurisprudence constante de la Cour qu’ « il appartient à la partie qui se prévaut de la tardiveté d’ une requête de faire la preuve de la date à laquelle la décision a été notifiée » ( arrêt du 5 juin 1980, Belfiore/Commission, 108/79, Rec . p . 1769, arrêt du 11 mai 1989, Maurissen/Cour des comptes, 194/87, Rec . p . 1045, et arrêt du 13 juillet 1989, Olbrechts/Commission, précité ). Or, dans la présente espèce, la Commission n’ a apporté aucune preuve, telle qu’ un accusé de réception postal, permettant de certifier que la requérante a bien reçu le document litigieux . En absence d’ une telle preuve, le Tribunal ne peut que considérer que la requérante n’ a pu prendre connaissance du contenu de cette lettre du 12 avril 1988, et donc de la nomination effective de Mme Gutiérrez Díaz, que lors de la réponse à sa « réclamation » du 13 septembre 1989, que la Commission lui a adressée le 4 octobre 1989 .

38 Par ailleurs, la qualification juridique de la lettre du 21 février 1989 de la requérante, qui relève de la seule appréciation du juge, dépend de la connaissance qu’ avait la requérante du résultat de la procédure de recrutement, au moment de la rédaction de cette lettre . A cet égard, la Commission fait valoir une prétendue connaissance acquise, à tout le moins officieuse, par la requérante, de la nomination de Mme Gutiérrez Díaz au poste en cause, en s’ appuyant sur les termes de cette lettre du 21 février 1989 . Cependant, le Tribunal, au vu de l’ ensemble des circonstances de l’ espèce et des termes mêmes de la lettre précitée, estime qu’ il est impossible d’ affirmer que la requérante disposait, en février 1989, d’ une connaissance suffisamment certaine et précise de la nomination de Mme Gutiérrez Díaz au poste correspondant à l’ emploi n 12 du concours COM/A/537 .

39 En conséquence, il était tout à fait logique et justifié, de la part de la requérante, de saisir l’ AIPN d’ une demande fondée sur l’ article 90, paragraphe 1, du statut, l’ invitant à prendre à son égard une décision sur l’ issue de la procédure de recrutement à laquelle elle avait participé . Elle a utilisé la voie de droit prévue à cet effet pour lui permettre de demander de recevoir une décision la concernant, c’ est-à-dire, en l’ espèce, la ou les décisions finales relatives à la procédure de recrutement litigieuse à laquelle elle avait participé . A cet égard, la circonstance que le règlement n 3517/85, précité, ait prévu une date limite de nomination fixée au 31 décembre 1988 est sans aucune incidence sur le caractère légitime du dépôt d’ une demande, au sens de l’ article 90, paragraphe 1, du statut, dans le contexte de la présente espèce où la requérante cherchait, par cette voie, à être informée des résultats de la procédure de recrutement . De plus, et en tout état de cause, la Commission a, elle-même, dans sa réponse du 4 octobre 1989 à la réclamation de la requérante, qualifié la lettre du 21 février 1989 de « demande au titre de l’ article 90, paragraphe 1, du statut » et de « réclamation R/96/89 », la réclamation dont elle avait été saisie le 13 septembre 1989, et qui était dirigée contre la décision implicite de rejet de la demande .

40 Il convient donc, sans même qu’ il soit besoin d’ examiner les obligations qu’ imposait à la Commission le respect du devoir de sollicitude dans le déroulement de la procédure contentieuse, de constater que la lettre du 21 février 1989 de la requérante, en raison des circonstances particulières de l’ espèce, doit être qualifiée de demande, au sens de l’ article 90, paragraphe 1, du statut et que le moyen d’ irrecevabilité fondé sur la tardiveté du présent recours ne saurait être accueilli . En effet, la décision implicite de rejet de la demande est intervenue le 22 juin 1989 . La réclamation, en date du 13 septembre 1989, a été introduite dans le délai de trois mois prévu à l’ article 90, paragraphe 2, et le recours, enregistré le 2 janvier 1990, a été formé dans le délai de trois mois, prévu par l’ article 91, paragraphe 3, contre la décision expresse du 4 octobre 1989 rejetant la réclamation .

Sur le deuxième moyen d’ irrecevabilité, tiré de l’ absence de Mme Gutiérrez Díaz dans la procédure

41 La défenderesse affirme qu’ indépendamment des procédures d’ intervention et de tierce opposition Mme Gutiérrez Díaz dispose d’ un droit fondamental d’ accéder à la justice pour faire valoir ses droits et intérêts légitimes et qu’ elle ne peut, en aucun cas, être privée de moyens de défense . Selon elle, ce moyen concerne l’ ordre public procédural, et il aurait été nécessaire d’ ordonner la citation de Mme Gutiérrez Díaz et de lui communiquer l’ ensemble des documents de procédure . Lors de l’ audience, tout en confirmant ce moyen et en reconnaissant qu’ il ne s’ agissait pas, à proprement parler, d’ une « exception d’ irrecevabilité au sens strict du terme », la Commission a précisé qu’ il convenait, au vu des circonstances de l’ espèce, que le Tribunal se prononce sur cette voie procédurale que le règlement de procédure de la Cour n’ interdit pas explicitement ou, à tout le moins, sur une éventuelle notification du recours, en parallèle à sa publication au Journal officiel des Communautés européennes, au fonctionnaire dont la nomination est mise en cause .

42 Pour la requérante, l’ intervention forcée est une procédure inconnue dans le système juridique communautaire et se trouve en l’ espèce superflue, puisque Mme Gutiérrez Díaz n’ a pas estimé utile de déposer, dans les délais, une requête en intervention, estimant, sans doute, que la Commission assurerait suffisamment la défense de ses droits .

43 Le Tribunal estime qu’ il y a lieu de rappeler l’ arrêt de la Cour du 10 décembre 1969 dans lequel il a été jugé que « le recours est irrecevable en tant qu’ il conclut à l’ intervention forcée du Sieur Arning, cette voie de droit n’ étant pas prévue par le règlement de procédure » ( Wonnerth/Commission, 12/69, Rec . p . 577 ). En outre, les droits des tiers n’ ayant pas été mis en cause dans une affaire sont garantis par le règlement de procédure de la Cour, qui ouvre, tout à la fois, la voie de l’ intervention volontaire, à laquelle aurait pu recourir Mme Gutiérrez Díaz, qui devait avoir connaissance du recours par le résumé qui en a été publié au Journal officiel des Communautés européennes, et celle de la tierce opposition . De plus, et en tout état de cause, les règles procédurales, pour être utilisées par les justiciables, doivent être expréssement prévues par un texte et ne sauraient être déduites par le Tribunal, alors surtout que la protection juridictionnelle des justiciables est déjà assurée dans des conditions appropriées .

44 Ce moyen doit donc être également rejeté .

Sur le troisième moyen d’ irrecevabilité, tiré de l’ absence de concordance entre les demandes formulées dans les actes de la procédure administrative précontentieuse et celles constituant l’ objet de la requête introductive d’ instance

45 La défenderesse fait valoir que la demande et la réclamation sont dirigées contre le concours COM/A/470, alors que la requête introductive d’ instance vise la nomination de Mme Gutiérrez Díaz intervenue à la suite du concours COM/A/537 . Cette contradiction rendrait le recours irrecevable, puisque non conforme aux dispositions de l’ article 91, paragraphe 2, du statut .

46 La requérante reconnaît qu’ elle a, en effet, commis des « erreurs vénielles » dans la rédaction des actes précontentieux et de la requête, en faisant, parfois, référence à l’ avis de concours COM/A/470, mais elle soutient que ces erreurs ne revêtent aucune importance, puisque la réponse de la Commission du 4 octobre 1989 à sa réclamation concerne bien le concours COM/A/537 et a été annexée à la requête introductive d’ instance . A cet égard, elle invoque l’ arrêt du Tribunal du 29 mars 1990, Alexandrakis/Commission ( T-54/89, Rec . p . II-143 ), où il aurait été jugé que, « lorsqu’ un requérant a commis une erreur vénielle qui n’ a pu abuser … la Commission en tant que plaideur, il y a lieu d’ admettre les corrections nécessaires, pour que la requête ait une portée et un sens ».

47 Le Tribunal estime qu’ il convient de rappeler qu’ en vertu d’ une jurisprudence constante de la Cour, relative à la correspondance entre les actes de la procédure administrative précontentieuse et la requête introductive d’ instance, « il suffit que le fonctionnaire … présente devant la Cour, d’ une part, des conclusions ayant le même objet que celles exposées dans la réclamation et, d’ autre part, des chefs de contestation reposant sur la même cause que ceux invoqués dans la réclamation » ( voir, notamment, l’ arrêt du 23 octobre 1986, Schwiering/Cour des comptes, 142/85, Rec . p . 3178 ).

48 Dans la présente espèce, la requérante a, certes, commis, à plusieurs reprises, dans ses écrits, des confusions entre le concours COM/A/470 et le concours COM/A/537 . Cependant, il résulte de l’ examen de la demande du 21 février 1989, de la réclamation du 13 septembre 1989 et de la requête introductive d’ instance que ces documents ont bien, d’ une part, un même objet, à savoir la nomination de la requérante au poste litigieux et l’ annulation corrélative de la nomination de Mme Gutiérrez Díaz à ce même poste, et, d’ autre part, une même cause, à savoir que c’ est à tort que la requérante n’ a pas été choisie par l’ AIPN pour exercer les fonctions correspondantes à l’ emploi n 12, visé par l’ avis de concours COM/A/537 . En outre, le concours COM/A/537 est toujours cité au moins une fois dans chacun de ces documents, soit dans le texte même, soit dans les annexes jointes . De plus, le Tribunal constate que la requérante n’ a pas visé, dans les conclusions de sa requête, le concours COM/A/470 . Enfin, il y a lieu de souligner que ces erreurs matérielles n’ ont, en aucun cas, été de nature à induire en erreur la Commission, dont la réponse à la réclamation comme le mémoire en défense démontrent clairement qu’ elle avait parfaitement compris que l’ objet du litige était relatif à la suite réservée au concours COM/A/537, et non au concours COM/A/470 .

49 Il résulte de ce qui précède que ce moyen doit également être rejeté . Par voie de conséquence, le présent recours doit être déclaré recevable .

Sur le fond

50 Outre les conclusions exposées dans la requête, la requérante a présenté, dans son mémoire en réplique, de nouvelles demandes visant à ce que le Tribunal enjoigne la défenderesse de produire des documents, de fournir certaines explications et de procéder à des vérifications par témoins . Il convient donc d’ examiner successivement les conclusions tendant à l’ annulation de la décision de nomination de Mme Gutiérrez Díaz et de la procédure de recrutement qui a suivi l’ établissement de la liste d’ aptitude, les conclusions tendant à ce que le Tribunal ordonne qu’ il soit procédé à la nomination de la requérante ou à la reprise de la procédure du concours, et enfin les conclusions tendant à ce qu’ il soit procédé à certaines mesures d’ instructions .

Sur les conclusions tendant à l’ annulation de la nomination de Mme Gutiérrez Díaz et de la procédure de recrutement qui a suivi l’ établissement de la liste d’ aptitude

51 A l’ appui de ces conclusions, la requérante a, initialement, invoqué les six moyens suivants : violation de l’ article 25 du statut et des dispositions de l’ avis de concours, erreur manifeste d’ appréciation constitutive d’ une violation de l’ article 27 du statut, violation de l’ article 33 du statut, violation de l’ article 5 de l’ annexe III du statut, détournement de pouvoir et violation du principe de l’ égalité de traitement .

52 La Commission a précisé qu’ il convient de considérer comme intégralement reproduits, dans son mémoire en défense, les motifs et arguments exposés dans sa réponse adressée le 4 octobre 1989 à la réclamation de la requérante .

53 La requérante s’ étant expréssement désistée, lors de l’ audience, des moyens tirés, d’ une part, d’ une méconnaissance de l’ article 33 du statut et, d’ autre part, d’ une violation de l’ article 5 de l’ annexe III du statut, il convient, dans un souci d’ articulation logique du raisonnement, d’ examiner successivement le moyen tiré d’ une erreur manifeste d’ appréciation constitutive d’ une violation de l’ article 27 du statut, le moyen tiré d’ une violation du principe de l’ égalité de traitement, le moyen tiré d’ un détournement de pouvoir et, enfin, le moyen tiré d’ une violation de l’ article 25 du statut .

Sur le moyen tiré d’ une erreur manifeste d’ appréciation constitutive d’ une violation de l’ article 27 du statut

54 La requérante affirme que la candidature de Mme Gutiérrez Díaz ne répondait pas aux conditions prescrites par l’ avis de concours et que, de plus, ses titres et son curriculum vitae étaient d’ un niveau inférieur aux siens . Par conséquent, les appréciations « subjectives et erronées » de l’ AIPN auraient méconnu l’ article 27 du statut, suivant lequel « le recrutement doit viser à assurer à l’ institution le concours de fonctionnaires possédant les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’ intégrité », tel qu’ interprété par la Cour dans son arrêt du 21 avril 1983, Ragusa/Commission, précité .

55 La défenderesse expose que la requérante n’ avance aucun argument et ne fait aucune offre de preuve susceptible d’ étayer ses affirmations . En outre, ni la requérante, ni l’ AIPN, ni même le Tribunal et la Cour ne pourraient contester le bien-fondé des jugements de valeur et appréciations émis par un jury de concours ( arrêt de la Cour du 14 juillet 1983, Detti/Cour de justice, 144/82, Rec . p . 2436 ). A cet égard, elle s’ appuie sur la jurisprudence de la Cour suivant laquelle « l’ examen des aptitudes auxquelles doit procéder un jury de concours est, avant tout, de nature comparative et, de ce fait, couvert par le secret inhérent aux délibérations » ( arrêt du 14 juin 1972, Marcato/Commission, 44/71, Rec . p . 427; arrêt du 9 octobre 1974, Capogrande e.a./Commission, 112/73 et 114/73 à 145/73, Rec . p . 981 ). Enfin, dans son arrêt du 27 octobre 1977, Moli/Commission ( 121/76, Rec . p . 1971 ), la Cour aurait déclaré ne pas être compétente pour décider, en lieu et place de l’ AIPN, de la nomination d’ un fonctionnaire . A cet égard, la Commission rappelle, également, les termes de l’ arrêt du Tribunal du 16 octobre 1990, Brumter/Conseil ( T-128/89, Rec . p . II-545 ), suivant lesquels, lorsque l’ AIPN dispose d’ un large pouvoir d’ appréciation, le contrôle du juge « doit se limiter à la question de savoir si, eu égard aux voies et moyens qui ont pu conduire l’ administration à son appréciation, celle-ci s’ est tenue dans des limites non critiquables et n’ a pas usé de son pouvoir de manière manifestement erronée ».

56 Le Tribunal estime qu’ il convient, liminairement, de citer l’ arrêt du 9 octobre 1974, Capogrande e.a./Commission, précité, dans lequel la Cour a jugé que « l’ examen des aptitudes auquel doit procéder un jury de concours est, avant tout, de nature comparative et, de ce fait, couvert par le secret inhérent aux délibérations, de sorte que celles-ci ne sauraient être soumises au contrôle ( du Tribunal ) qu’ en cas de violation évidente des règles qui président aux travaux du jury ». En outre, le Tribunal est d’ avis qu’ il importe de rappeler l’ étendue de son contrôle sur les décisions prises en matière de procédure de recrutement, compte tenu du pouvoir d’ appréciation conféré à l’ AIPN . Ce contrôle se limite à l’ examen de la régularité des procédures utilisées par l’ administration, à la vérification de l’ exactitude matérielle des faits sur lesquels l’ administration s’ est fondée pour prendre sa décision et, enfin, à l’ absence d’ erreur manifeste d’ appréciation, d’ erreur de droit et de détournement de pouvoir qui pourraient entacher la décision administrative .

57 En l’ espèce, il y a lieu pour le Tribunal de constater que le moyen tiré d’ une prétendue erreur manifeste d’ appréciation, tel qu’ il a été présenté par la requérante, n’ est assorti d’ aucun élément permettant d’ en apprécier le bien-fondé . En effet, il s’ appuie sur des affirmations péremptoires non étayées, par exemple, par des informations précises et comparatives sur la situation de la requérante et sur celle de Mme Gutiérrez Díaz . En outre, la requérante n’ a ni contesté ni même discuté la motivation de la décision de nomination attaquée, qui figure dans la lettre du 10 novembre 1987 de M . Ristori, dont elle a pris connaissance à la suite de la communication du mémoire en défense . Par conséquent, aucun élément du dossier ne permet de conclure à une quelconque erreur manifeste d’ appréciation, constitutive d’ une violation de l’ article 27 du statut .

58 Il en résulte que ce moyen ne saurait être retenu .

Sur le moyen tiré d’ une violation du principe de l’ égalité de traitement

59 La requérante estime que l’ examen des irrégularités qui auraient entaché la procédure du concours COM/A/537 révèle une attitude arbitraire de la part de l’ AIPN, « contraire aux intérêts des institutions communautaires et de la justice en général ». En effet, la personne finalement nommée l’ aurait été sans qu’ il ait été procédé à une prise en compte ou à une vérification de ses titres et de ses compétences . A cet égard, elle s’ appuie tout à la fois sur l’ arrêt de la Cour du 6 octobre 1982, Williams/Cour des comptes, précité, et sur la réponse de la Commission, du 4 octobre 1989, à sa réclamation dans laquelle cette dernière soulignait, que « les éléments de cette appréciation, ( dépendent ) non seulement de la compétence et de la valeur professionnelle des intéressés, mais aussi de leur caractère, de leur comportement et de l’ ensemble de leur personnalité, échappant ainsi à une motivation ». Selon elle, le recours à de tels critères, pour justifier une nomination, ne serait pas admissible, puisqu’ une procédure de concours devrait avoir pour objet la nomination du meilleur candidat, sans qu’ il soit besoin de faire usage de critères subjectifs .

60 Selon la requérante, l’ ensemble de ces éléments constituerait une violation du principe de l’ égalité de traitement, exprimé à l’ article 5, paragraphe 3, du statut, selon lequel « les fonctionnaires appartenant à une même catégorie ou à un même cadre sont soumis respectivement à des conditions identiques de recrutement et de déroulement de carrière ». Dans un concours, l’ application de critères objectifs permettant de choisir le meilleur candidat devrait se fonder exclusivement sur une appréciation équitable, impartiale et non discriminatoire des qualifications des candidats . A cet égard, elle invoque les arrêts du 23 janvier 1975 et du 13 février 1979, de Dapper/Parlement et Martin/Commission, précités .

61 La défenderesse fait valoir qu’ il ressort des pièces du dossier que l’ AIPN et le jury du concours COM/A/537 ont voulu, dans la procédure de recrutement litigieuse, sélectionner le candidat le plus qualifié pour occuper le poste correspondant à l’ emploi n 12 du concours COM/A/537 .

62 Le Tribunal constate que la requérante n’ a assorti ce moyen d’ aucune précision permettant d’ en apprécier le bien-fondé . En effet, elle se borne à affirmer, en termes imprécis et généraux, que les titres et compétences de Mme Gutiérrez Díaz n’ ont été ni vérifiés ni pris en compte, alors qu’ il ressort du rapport final du 3 septembre 1987 du jury du concours que ce dernier a procédé à un examen complet, y compris au moyen d’ entretiens, des qualifications et titres des six candidats qui répondaient aux conditions fixées par l’ avis de concours . Il ne ressort d’ aucune pièce du dossier que la Commission aurait méconnu l’ article 5, paragraphe 3, du statut et ainsi porté atteinte au principe de l’ égalité de traitement .

63 Par conséquent, ce moyen ne saurait être retenu .

Sur le moyen tiré d’ un détournement de pouvoir

64 A l’ appui de ce moyen, la requérante développe les mêmes arguments que ceux avancés au soutien du moyen susanalysé tiré d’ une violation du principe de l’ égalité de traitement . Elle a ajouté, au cours de l’ audience, qu’ au regard de la rapidité du processus de prise de décision de nomination la concertation entre les personnes qui ont procédé aux entretiens n’ avait pu avoir lieu et qu’ il fallait en déduire que la décision avait été prise à l’ avance .

65 En réponse à ce moyen, la défenderesse invoque non seulement l’ argumentation qu’ elle a développée sous le moyen tiré d’ une violation du principe de l’ égalité de traitement, mais, en outre, qu’ il est étonnant de lui voir reprocher sa propre diligence, alors que son souci de rapidité et d’ efficacité était justifié par le contexte spécifique du recrutement, en l’ espèce, des fonctionnaires de nationalité espagnole et par l’ intérêt du service .

66 Le Tribunal ayant déjà répondu aux arguments communs au moyen examiné précédemment et au présent moyen, il y a lieu de répondre au seul argument relatif à la rapidité prétendument excessive du processus de prise de décision par l’ AIPN . A cet égard, dans sa note du 10 novembre 1987, M . Ristori précise que la décision de nomination a été « prise en accord avec la direction IX-E ainsi que la direction générale ». La requérante ne peut, par conséquent, se prévaloir d’ une soi-disante absence de concertation entre les personnes qu’ elle a rencontrées lors des entretiens . De plus, le délai d’ environ une journée qui s’ est écoulé entre l’ achèvement des entretiens et l’ élaboration de la note précitée de M . Ristori, n’ apparaît, compte tenu du nombre très restreint de candidats et du fait que toutes les personnes ayant participé aux entretiens appartenaient à la même direction générale, nullement constitutif d’ un détournement de pouvoir . Bien au contraire, il témoigne d’ un souci de régler, dans les meilleurs délais, les problèmes relatifs au pourvoi des postes vacants à la Commission .

Sur le moyen tiré d’ une violation de l’ article 25 du statut et des dispositions de l’ avis de concours

67 La requérante fait valoir que l’ obligation, d’ une part, de communiquer par écrit les décisions individuelles faisant grief et, d’ autre part, de les motiver, résulte à la fois des dispositions des deuxième et troisième alinéas de l’ article 25 du statut ainsi que des termes même de l’ avis de concours en cause . Par conséquent, la défenderesse aurait méconnu ces dispositions en ne lui notifiant pas le résultat du concours et les conclusions motivées la concernant . De plus, l’ absence de toute information sur le résultat du concours, pendant plus de deux ans, aurait entraîné, pour la requérante, une situation ambiguë « la maintenant constamment dans l’ expectative et … l’ empêchant d’ exercer les actions qu’ elle aurait pu engager afin de défendre ses intérêts légitimes ».

68 La défenderesse affirme, tout d’ abord, en ce qui concerne l’ obligation de communication, que le résultat du concours général COM/A/537 a bien été notifié à la requérante par la lettre du 2 octobre 1987 du chef de la division « recrutement » et que la décision finale de l’ AIPN, l’ informant que sa candidature n’ avait pas été retenue, lui a également été notifiée par la lettre du 12 avril 1988 . Elle précise, dans son mémoire en duplique, que cette dernière lettre « n’ a rien à voir avec l’ exigence d’ informer les candidats sur les conclusions les concernant qui est prévue dans l’ avis de concours » et que la requérante a bien été informée des conclusions du jury de concours la concernant . Elle ajoute que, même si la réception de cette dernière lettre devait être considérée comme insuffisamment démontrée, une telle circonstance ne pourrait avoir pour effet d’ entraîner une nomination automatique de la requérante, ainsi qu’ une annulation de tous les actes antérieurs relatifs à la procédure du concours . De plus, selon la Commission, l’ article 25 du statut se réfère à la communication « par écrit ». Or, il aurait été prouvé que cette obligation a bien été respectée, puisque la Commission a adressé à la requérante la lettre du 12 avril 1988 .

69 La Commission fait ensuite valoir, en ce qui concerne l’ obligation de motivation de la décision finale de nomination par l’ AIPN, que la Cour, dans un arrêt du 31 mars 1965, a jugé, dans une espèce où la requérante, figurant sur une liste d’ aptitude, n’ avait finalement pas été nommée par l’ AIPN, "que cette dernière décision ( celle de nomination du candidat finalement retenu ) n’ avait pas besoin d’ être motivée à l’ égard de son destinataire à laquelle elle ne faisait pas grief; que l’ exigence de la requérante reviendrait à obliger ( l’ AIPN ) à motiver le fait de n’ avoir pas pris une autre décision; que la procédure de concours tend précisément à rendre superflue une telle motivation, dont les effets risqueraient, d’ ailleurs, d’ être préjudiciables au candidat évincé" ( Rauch/Commission, 16/64, Rec . p . 191; voir également Raponi/Commission, précité ). Selon elle, cet arrêt doit être interprété en ce sens qu’ « une fois les candidats informés des résultats du concours ( la Commission ) n’ est pas tenue de communiquer chaque nomination effectuée aux candidats qui n’ ont pas été sélectionnés pour cet emploi » et que, de plus, les candidats inscrits sur la liste d’ aptitude établie par le jury du concours sauraient que, pendant la période de validité de cette liste et jusqu’ à son expiration, ils peuvent recevoir une offre d’ emploi de la Commission .

70 Au cours de l’ audience, la Commission a ajouté que les candidats inscrits sur une liste d’ aptitude ne peuvent se prévaloir d’ aucun droit à une nomination et qu’ une éventuelle obligation de les informer de la nomination d’ un ou de plusieurs des autres candidats inscrits sur la même liste d’ aptitude, assortie d’ une motivation suffisante à leur égard, ne paraît pas concevable . En effet, d’ une part, elle serait difficile à gérer administrativement, plus particulièrement pour les concours à participation nombreuse, pour lesquels il est prévu des listes d’ aptitude comprenant de nombreux candidats, et, d’ autre part, une telle obligation aurait pour conséquence de rendre très complexe la rédaction de la motivation de telles « décisions » par l’ AIPN, compte tenu du large pouvoir d’ appréciation dont elle dispose lors de cette dernière étape de la procédure de recrutement et du fait que, selon le jury de concours, tous les candidats inscrits sur une liste d’ aptitude mériteraient d’ être nommés . La Commission a enfin précisé qu’ il lui semblerait délicat de moduler une obligation de motivation des décisions de nomination, à l’ égard des candidats inscrits sur la liste d’ aptitude et finalement non retenus par l’ AIPN, selon que la procédure de recrutement en cause serait à participation restreinte ou nombreuse .

71 S’ agissant de l’ obligation de communication édictée par l’ article 25, deuxième alinéa, du statut, et, au surplus en l’ espèce, par l’ avis de concours, le Tribunal relève que le résultat du concours, tel qu’ arrêté par le jury, a bien été communiqué à la requérante par la lettre du 2 octobre 1987 de la défenderesse, jointe à la requête . Par conséquent, il apparaît clairement que la requérante n’ est pas fondée à se prévaloir d’ une prétendue violation de la disposition particulière de l’ avis de concours, selon laquelle les candidats devaient être informés individuellement du résultat du concours les concernant . Quant à l’ argument selon lequel la requérante serait restée dans l’ expectative du fait du comportement de la Commission, il convient de remarquer qu’ il lui suffisait d’ adresser sa demande à la Commission dans un délai plus bref et que l’ incertitude dont elle se plaint n’ est que la conséquence de sa propre inaction .

72 Par ailleurs, il y a lieu de constater que la décision de l’ AIPN concernant la requérante, c’ est-à-dire la décision de ne pas procéder à sa nomination, lui a bien été communiquée par écrit au moyen de la lettre du 12 avril 1988, dont elle a eu connaissance au plus tard en recevant la réponse de la Commission à sa réclamation . A cet égard, la constatation d’ un retard affectant cette communication ne saurait, à elle seule, être constitutive d’ une violation de l’ article 25, deuxième alinéa, première phrase, du statut, de nature à entraîner l’ annulation de l’ acte attaqué ( arrêts de la Cour du 29 octobre 1981, Arning/Commission, 125/80, Rec . p . 2539, et du 30 mai 1984, Picciolo/Parlement, 111/83, Rec . p . 2723 ).

73 S’ agissant de l’ obligation de motivation prescrite par l’ article 25, deuxième alinéa, du statut, le Tribunal constate, en premier lieu, qu’ elle ne constitue que la reprise de l’ obligation générale édictée à l’ article 190 du traité CEE, cette disposition du statut précisant que « toute décision individuelle prise en application du présent statut doit être communiquée par écrit, sans délai, au fonctionnaire intéressé . Toute décision faisant grief doit être motivée ». Dans son arrêt du 26 novembre 1981, Michel/Parlement ( 195/80, Rec . p . 2861 ), la Cour a jugé que « l’ obligation de motiver une décision faisant grief a pour but de permettre à la Cour d’ exercer son contrôle sur la légalité de la décision et de fournir à l’ intéressé une indication suffisante pour savoir si la décision est bien fondée ou si elle est entachée d’ un vice permettant d’ en contester la légalité ». L’ obligation de motivation ainsi édictée constitue donc un principe essentiel du droit communautaire, auquel il ne saurait être dérogé qu’ en raison de considérations impérieuses .

74 Il convient de rappeler, en second lieu, comment s’ articule une procédure de recrutement prévoyant l’ intervention d’ un jury de concours, organisée en vertu des dispositions de l’ article 29, paragraphe 1, du statut et de son annexe III, telles qu’ elles ont été appliquées dans la présente espèce . Cette procédure comprend trois stades, faisant intervenir successivement le jury de concours puis l’ AIPN . Les deux premiers, effectués sous la responsabilité du jury de concours, consistent, pour le premier, à vérifier la conformité des candidatures avec les conditions exigées par l’ avis de concours et, pour le deuxième, à sélectionner les candidats préalablement admis à concourir, au moyen soit d’ un examen comparatif de leurs titres, qualifications et expérience professionnelle, soit de notes obtenues à des épreuves, soit, enfin, de l’ application cumulée de ces critères de sélection, en fonction de la nature du concours en cause . Cette deuxième étape se concrétise, pour le jury, par l’ inscription des candidats qu’ il considère comme étant les meilleurs sur la liste d’ aptitude proposée à l’ AIPN . Cette liste est établie soit par ordre de mérite, soit, comme en l’ espèce, par ordre alphabétique . La nomination par l’ AIPN d’ un ou de plusieurs des candidats inscrits sur cette liste d’ aptitude constitue le troisième et dernier stade de la procédure de recrutement, étant fait observer que l’ AIPN ne peut s’ écarter de l’ ordre de mérite éventuellement arrêté par le jury que pour des raisons impérieuses liées au bon fonctionnement du service et dûment motivées ( arrêt du Tribunal du 13 décembre 1990, Kalavros/Cour de justice, T-160/89 et T-161/89, Rec . p . II-871 ).

75 Certes, dans son arrêt du 31 mars 1965, Rauch/Commission, précité, où il s’ agissait d’ une décision intervenant au niveau du troisième stade de la procédure de recrutement précédemment décrite, la Cour a jugé : "Attendu qu’ il n’ y a pas eu de décision formelle 'de ne pas nommer’ la requérante, mais seulement une décision de nommer Mlle Kurtz . Que cette dernière décision n’ avait pas besoin d’ être motivée à l’ égard de son destinataire, à laquelle elle ne faisait pas grief; que l’ exigence de la requérante reviendrait à obliger l’ AIPN à motiver le fait de n’ avoir pas pris une autre décision; que la procédure de concours tend précisément à rendre superflue une telle motivation, dont les effets risqueraient, d’ ailleurs, d’ être préjudiciables aux candidats évincés ."

76 Cependant, il convient de préciser que, dans cette affaire Rauch, la liste d’ aptitude, composée également de deux noms, comportait un classement par ordre de mérite, à la différence de la présente espèce, et que l’ AIPN avait procédé à la nomination de la candidate figurant en première place sur la liste d’ aptitude . Le jury du concours avait donc normalement dû informer les deux lauréats de leur rang et accompagner cette information d’ une motivation appropriée . Dans une telle hypothèse, et comme l’ a relevé la Cour, c’ est le principe même du concours qui joue pleinement le rôle d’ une motivation suffisante à l’ égard des candidats, puisqu’ il est clair que l’ AIPN n’ a pas à motiver, vis-à-vis des candidats non retenus et figurant en moins bonne place que le candidat nommé sur la liste d’ aptitude arrêtée par ordre de mérite, sa décision de ne pas procéder à leur nomination . C’ est la raison pour laquelle, dans cette hypothèse très précise, la Cour a jugé que « la procédure de concours tend précisément à rendre superflue une telle motivation ». Par contre, en l’ espèce, la situation est totalement différente, puisque, d’ une part, les lauréats n’ ont pas été classés par ordre de mérite et, d’ autre part, la lauréate finalement écartée n’ a reçu aucun élément de motivation lui permettant de prendre connaissance, même sommairement, des raisons pour lesquelles elle n’ a finalement pas été retenue par l’ AIPN .

77 Dans un tel contexte, où la procédure du concours n’ a pas été de nature à constituer, en elle-même, une motivation suffisante et où la décision de nomination d’ un candidat affecte de manière directe et immédiate la situation juridique de l’ autre candidat inscrit sur la liste d’ aptitude, le Tribunal estime que l’ obligation de motivation retrouve pleinement à s’ appliquer à l’ égard de ce dernier . En effet, il serait véritablement déraisonnable, inéquitable et contraire à la lettre même et à l’ esprit des dispositions précitées de l’ article 25, deuxième alinéa, du statut que les candidats ayant été écartés lors des deux premières étapes de la procédure de recrutement puissent bénéficier de décisions motivées à leur égard et être ainsi en mesure de faire valoir pleinement leurs droits, comme il résulte d’ une jurisprudence constante de la Cour ( voir, notamment, les arrêts de la Cour du 14 juin 1972, Marcato/Commission, 44/71, Rec . p . 427, et du 26 novembre 1981, Michel/Parlement européen, précité ), alors que les candidats les meilleurs, ayant réussi à accéder à la troisième étape de la procédure du concours et à être inscrits sur une liste d’ aptitude, établie sans considération d’ ordre de mérite, pourraient se voir écartés de la procédure de recrutement, sans recevoir le moindre élément de motivation leur permettant de prendre connaissance des raisons pour lesquelles ils n’ ont finalement pas été retenus par l’ AIPN et d’ en constater éventuellement le bien-fondé .

78 Dans une procédure de recrutement telle que celle en cause, il apparaît clairement que, si l’ on décompose le raisonnement de l’ AIPN décidant, au stade final, de procéder à une nomination d’ un candidat figurant sur une liste d’ aptitude pour le pourvoi d’ un seul poste, cette décision de nomination s’ accompagne inévitablement et concomitamment de la prise de décision, à tout le moins implicite mais nécessaire, de ne pas nommer le ou les autres candidats figurant sur la liste d’ aptitude . La Commission l’ a d’ ailleurs reconnu expressément, dans sa réponse à la réclamation de la requérante, où elle a affirmé que « la décision, insérée dans la note du 12 avril 1988 par laquelle l’ administration a communiqué à la réclamante que le choix ne s’ était pas porté sur elle, affecte sans conteste la situation juridique de la réclamante de manière directe et immédiate ». En outre, dans la présente espèce, et à la différence des procédures « générales » de recrutement où les candidats inscrits sur une liste de réserve ont vocation à être nommés, de façon échelonnée dans le temps, à des postes différents, la décision de l’ AIPN de ne pas nommer la requérante au poste correspondant à l’ emploi n 12 lui fait bien grief, puisque, comme la Commission l’ a confirmé dans sa réponse aux questions écrites du Tribunal, la décision de nomination de Mme Gutiérrez Díaz a eu pour conséquence immédiate l’ extinction de la liste d’ aptitude sur laquelle était inscrite la requérante . De ce fait, cette dernière ne pouvait plus prétendre à une quelconque nomination et se trouvait exclue de toute procédure de recrutement .

79 Par ailleurs, le Tribunal estime que l’ argument selon lequel la motivation de la décision finale de l’ AIPN pourrait porter préjudice aux candidats écartés n’ est pas pertinent . En premier lieu, parce que la motivation de toute décision faisant grief comporte, par essence, une appréciation relativement négative sur les intéressés qu’ elle concerne . En second lieu, parce que le souci du respect des principes de légalité et de la protection des droits des justiciables doit l’ emporter sur la prise en compte des réactions supposées des candidats non retenus lors de la réception d’ une telle motivation . Enfin, parce que ces derniers sont les seuls à avoir connaissance de cette motivation qui n’ est et ne doit être, en aucun cas, rendue publique ( arrêt du Tribunal du 13 décembre 1990, Kalavros/Cour de justice, précité ).

80 Enfin, le Tribunal estime que l’ argumentation de la Commission relative à une prétendue modulation de l’ obligation de motivation, en fonction de la participation plus ou moins nombreuse aux concours, est dénuée de fondement . En effet, et sous réserve du respect de l’ ordre de mérite arrêté par le jury, il est clair que les candidats inscrits sur une liste de réserve importante et valable pendant une durée relativement prolongée ne voient pas leur situation juridique affectée directement et immédiatement par une nomination effectuée par l’ AIPN, à partir de cette liste de réserve, puisqu’ ils conservent vocation à être nommés sur un emploi qui se trouverait vacant ou nouvellement créé pendant toute la durée de validité de la liste de réserve, même si, comme la Commission l’ a souligné à juste titre, il s’ agit d’ une simple vocation à être nommé, et non pas d’ un droit à nomination . De ce fait, l’ argument de la Commission tiré d’ une prétendue surcharge de travail qu’ imposeraient de telles motivations ne saurait être retenu, en premier lieu, parce que de telles motivations seront finalement peu nombreuses, en second lieu, parce que, dans un premier stade, elles pourront être rédigées en termes clairs mais relativement succincts, quitte à être développées à la demande des intéressés, et, enfin, parce qu’ il convient de relever que le suivi des contentieux provoqués par l’ absence ou par l’ insuffisance de motivation des décisions administratives implique certainement, pour l’ administration, un travail bien supérieur à celui qu’ aurait exigé la rédaction de motivations appropriées et suffisantes, permettant d’ éviter de tels contentieux .

81 En l’ espèce, le Tribunal constate que, sans qu’ il soit besoin d’ examiner avec précision les conditions de sa réception, la lettre du 12 avril 1988 a informé la requérante de la décision de ne pas la nommer au poste en cause . Le caractère décisionnel de cet acte est confirmé par son libellé même : « … il a été décidé de ne pas vous retenir … » Si besoin en était, ce caractère décisionnel a été confirmé expressément dans la réponse, précitée, de la Commission à la réclamation de la requérante . Par ailleurs, il est clair et non contesté par la Commission que cette décision ne contient strictement aucun élément de motivation de nature à éclairer la requérante sur les raisons qui ont conduit l’ AIPN à ne pas retenir sa candidature . Or, il résulte de ce qui vient d’ être dit que cette décision lui fait grief, puisqu’ elle a pour conséquence d’ affecter immédiatement et directement sa situation juridique, en l’ écartant de façon définitive de la procédure de recrutement, du fait de l’ extinction simultanée de la liste d’ aptitude sur laquelle elle était inscrite .

82 Dans ces conditions, le Tribunal estime que la défenderesse était légalement tenue de motiver sa réponse à l’ égard de la requérante et qu’ elle n’ a pas satisfait à cette obligation essentielle édictée à l’ article 25, deuxième alinéa, du statut .

83 Cependant, à ce stade du raisonnement, il convient de constater qu’ en l’ espèce la défenderesse a communiqué au Tribunal, lors de la procédure écrite, la motivation de la décision attaquée qui figure dans la note précitée de M . Ristori en date du 10 novembre 1987 . En outre, lors de l’ audience orale, en réponse à une question posée par un membre du Tribunal, le représentant de la Commission a affirmé que la défenderesse confirmait que cette motivation était bien celle qui l’ avait conduite à écarter la candidature de la requérante et que la Commission s’ appropriait les termes mêmes de cette motivation .

84 Or, ni dans son mémoire en réplique ni lors de la procédure orale, la requérante n’ a contesté le bien-fondé de cette motivation qui était la suivante : « … le profil de l’ intéressée ( Mme Gutiérrez Díaz ) répondant le mieux aux besoins du service compte tenu, au-delà de ses connaissances dans le domaine, de son expérience en matière de gestion et d’ informatique . »

85 Parvenu à ces conclusions, le Tribunal estime qu’ il convient d’ analyser la portée exacte du moyen tiré d’ un défaut de motivation de la décision prise par l’ AIPN, écartant la candidature de la requérante au stade final de la nomination à l’ emploi en cause, et d’ examiner si la requérante a conservé un intérêt à ce qu’ il soit statué sur ce moyen .

86 S’ agissant, en premier lieu, de la portée du moyen tiré du défaut de motivation entachant la décision de l’ AIPN de ne pas procéder à la nomination de la requérante, le Tribunal constate que la circonstance que, comme en l’ espèce, ce moyen est fondé n’ est certainement de nature, à elle seule, à entraîner l’ annulation de la décision de nomination de Mme Gutiérrez Díaz, non plus d’ ailleurs que l’ annulation de la procédure de recrutement qui a suivi l’ établissement de la liste d’ aptitude . En réalité, la constatation d’ une telle méconnaissance de l’ article 25 du statut serait uniquement susceptible d’ entraîner l’ annulation, pour défaut de motivation, de la décision de l’ AIPN de ne pas procéder à la nomination de la requérante . Dès lors, elle imposerait à la Commission, en vertu de l’ article 176 du traité CEE, de tirer toutes les conséquences de l’ arrêt du Tribunal et de prendre les mesures que comporterait son exécution, au nombre desquelles pourrait figurer, par exemple, la confirmation de ladite décision, assortie d’ une motivation appropriée . Il y a donc lieu, pour le Tribunal, d’ estimer que ce moyen, tiré d’ un défaut de motivation de la décision de ne pas nommer la requérante, doit être regardé, en réalité, et compte tenu des autres conclusions du recours, comme une conclusion tendant à l’ annulation de cette seule décision .

87 S’ agissant, en second lieu, de la question de savoir si la requérante a conservé un intérêt à ce qu’ il soit statué sur ce moyen, il convient, tout d’ abord, de se référer, par analogie, à l’ arrêt de la Cour du 30 mai 1984, Picciolo/Parlement ( 11/83, Rec . p . 2323 ), où il a été jugé que, « comme l’ ensemble des griefs du requérant à l’ encontre de la décision de l’ AIPN rejetant sa candidature au poste vacant s’ est avéré mal fondé, le requérant n’ a aucun intérêt légitime à voir annuler la nomination d’ un autre candidat à ce poste, auquel il ne peut valablement prétendre lui-même ». Il importe également de se référer à l’ arrêt du 8 mars 1988, Sergio/Commission ( 64/86, 71/86, 72/86, 73/86 et 78/86, Rec . p . 1399 ), où la Cour a jugé que « des explications données en cours de procédure peuvent, dans des cas exceptionnels, rendre sans objet un moyen tiré de l’ insuffisance de la motivation, de sorte qu’ ils ne justifient plus l’ annulation de la décision en cause . »

88 Or, en l’ espèce, il résulte de l’ ensemble de ce qui précède, en premier lieu, que la requérante n’ a présenté aucun moyen de nature à entraîner l’ annulation de la décision de nomination du candidat finalement retenu par l’ AIPN pour le poste litigieux; en second lieu, qu’ il n’ a pas été davantage présenté de moyen susceptible de conduire à l’ annulation de la procédure de recrutement ayant suivi l’ établissement de la liste d’ aptitude; enfin, que la requérante s’ est abstenue, alors qu’ elle était en mesure de le faire, de contester l’ exactitude des motifs qui ont conduit l’ AIPN à écarter sa candidature, quelle que soit la tardiveté avec laquelle ces motifs lui ont été communiqués et même si la décision initiale écartant sa candidature était entachée d’ un défaut de motivation .

89 Dans ces conditions, le Tribunal constate que les conclusions de la requête tendant à l’ annulation de la décision de la Commission portant nomination au poste correspondant à l’ emploi n 12 du concours COM/A/537 ainsi qu’ à l’ annulation de la procédure de recrutement ayant suivi l’ établissement de la liste d’ aptitude doivent être rejetées et que les conclusions tendant à l’ annulation de la décision de l’ AIPN écartant la candidature de la requérante en raison d’ un défaut de motivation entachant la dite décision sont devenues sans objet .

Sur les conclusions tendant à ce que le Tribunal ordonne qu’ il soit procédé à la nomination de la requérante et, subsidiairement, à la reprise de la procédure de concours

90 Le Tribunal estime qu’ il convient de rappeler les termes de l’ article 176, premier alinéa, du traité instituant la Communauté économique européenne, applicable au Tribunal en vertu de l’ article 4 de la décision du Conseil du 24 octobre 1988 instituant un Tribunal de première instance des Communautés européennes, suivant lequel l’ institution dont émane l’ acte annulé « est tenue de prendre les mesures que comporte l’ exécution de l’ arrêt » du Tribunal .

91 Dès lors, il y a lieu de relever que les conclusions de la requérante tendant à ce que le Tribunal ordonne qu’ il soit procédé à la nomination de la requérante et, subsidiairement, à la reprise de la procédure de concours sont irrecevables, dès lors qu’ il n’ appartient pas au Tribunal, sans empiéter sur leurs prérogatives, d’ adresser des injonctions aux institutions ou de se substituer à ces dernières ( arrêts de la Cour du 24 octobre 1977, Moli/Commission, précité, et du 9 juin 1983, Verzyck/Commission, 225/82, Rec . p . 1991 ).

Sur les conclusions de la requérante tendant à ce que le Tribunal ordonne la production de documents, impose à la Commission de donner certaines explications et procède à des vérifications par témoins

92 La requérante s’ appuie sur l’ article 42, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, relatif aux offres de preuves, pour demander, dans son mémoire en réplique, que soient précisées les conditions dans lesquelles Mme Gutiérrez Díaz a été nommée . En effet, ce serait seulement par le mémoire en défense de la Commission qu’ elle aurait pu disposer des éléments d’ information relatifs à cette nomination .

93 La défenderesse fait remarquer que la requérante n’ a pas réussi à démontrer l’ existence d’ irrégularités dans la procédure suivie et que la célérité ainsi que l’ efficacité avec lesquelles l’ administration a procédé à la nomination du candidat correspondant le mieux à l’ emploi en cause ne sauraient lui être reprochées, alors surtout que la validité de cette procédure de recrutement était limitée dans le temps .

94 Le Tribunal constate que les conclusions de la requérante tendent, en substance, à ce que le Tribunal ordonne des mesures d’ instruction ayant pour objet, notamment, la production de certains documents relatifs à la procédure de recrutement litigieuse . A cet égard, il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’ article 45, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, le Tribunal « fixe les mesures qu’ ( il ) juge convenir par voie d’ ordonnance articulant les faits à prouver ». Il ressort clairement de cette disposition que c’ est au Tribunal qu’ il appartient d’ apprécier l’ utilité d’ une telle mesure . Dans la présente espèce, il résulte, au vu, d’ une part, des éléments du dossier et, d’ autre part, de l’ ensemble de ce qui vient d’ être dit, que les mesures d’ instruction sollicitées par la requérante ne présentent aucune utilité pour le Tribunal, qui s’ estime suffisamment éclairé par l’ ensemble de la procédure .

95 Par conséquent, ces conclusions doivent également, en tout état de cause, être rejetées .

Décisions sur les dépenses


Sur les dépens

96 En vertu de l’ article 69, paragraphe 3, deuxième alinéa, du règlement de procédure de la Cour, le Tribunal peut condamner une partie, même gagnante, à rembourser à l’ autre partie les frais d’ une procédure occasionnés par son propre comportement .

97 Dans son arrêt du 30 mai 1984, Picciolo/Parlement, précité, la Cour a jugé que : "Si le requérant a ainsi succombé en tous ses moyens, il convient, toutefois, de tenir compte, pour le règlement des dépens, des considérations qui précèdent quant à la motivation succincte de la décision de l’ AIPN rejetant la candidature du requérant; en effet, ce n’ est qu’ à la suite des réponses fournies par le Parlement aux questions de la Cour qu’ il a été possible au requérant d’ apprécier pleinement le contenu de la motivation donnée . Or, dans ces circonstances, on ne saurait tenir rigueur au requérant d’ avoir saisi la Cour en vue d’ un contrôle de la légalité de la décision de l’ AIPN en question" ( voir également l’ arrêt du Tribunal du 13 décembre 1990, Kalavros/Cour de justice, précité ).

98 Dans la présente affaire, il convient de constater que le même raisonnement trouve à s’ appliquer, en raison, d’ une part, de l’ absence de preuve de la communication, à la requérante, de la décision la concernant, telle qu’ elle a été alléguée par la Commission, et, d’ autre part, et surtout, de l’ absence de toute motivation de cette même décision de la Commission adressée à la requérante .

99 Dans ces conditions, il convient de faire application des dispositions précitées de l’ article 69, paragraphe 3, deuxième alinéa, du règlement de procédure de la Cour et de faire supporter à la Commission l’ ensemble des dépens .

Dispositif


Par ces motifs,

LE TRIBUNAL ( cinquième chambre )

déclare et arrête :

1 ) Les conclusions tendant à l’ annulation de la décision de la Commission portant nomination au poste correspondant à l’ emploi n 12 du concours COM/A/537 ainsi qu’ à l’ annulation de la procédure de recrutement ayant suivi l’ établissement de la liste d’ aptitude sont rejetées .

2 ) Les conclusions tendant à ce que le Tribunal ordonne qu’ il soit procédé à la nomination de la requérante et, subsidiairement, à la reprise de la procédure du concours sont rejetées comme irrecevables .

3 ) Il n’ y a pas lieu de statuer sur les conclusions tendant à l’ annulation de la décision de la Commission écartant la candidature de la requérante .

4 ) Les conclusions tendant à ce que le Tribunal ordonne des mesures d’ instruction sont rejetées .

5 ) La Commission des Communautés européennes supportera l’ ensemble des dépens, y compris ceux de la requérante .

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CJCE, n° T-1/90, Arrêt du Tribunal, Gloria Pérez-Mínguez Casariego contre Commission des Communautés européennes, 20 mars 1991