Conseil national de l'ordre des médecins, Chambre disciplinaire nationale, 3 février 1998, n° 6634

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Résumé de la juridiction

A filmé, à l’insu des patientes, des consultations de gynécologie sans leur consentement ni sur le principe de l’enregistrement, ni sur l’utilisation du film destiné à la rédaction d’un mémoire de sexologie. Comportement fautif même en l’absence de préjudice pour les patientes. Grave méconnaissance des articles 30 et 33 du code de déontologie en vigueur. Faits exclus de l’amnistie.

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Sur la décision

Référence :
CNOM, ch. disciplinaire nationale, 3 févr. 1998, n° 6634
Numéro(s) : 6634
Dispositif : Rejet Interdiction temporaire d'exercer

Sur les parties

Texte intégral

Dossier n° 6634
Dr Daniel D
Décision du 3 février 1998
LA SECTION DISCIPLINAIRE DU CONSEIL NATIONAL DE L’ORDRE DES MEDECINS, Vu, enregistrés au secrétariat du Conseil national de l’Ordre des médecins le 23 avril 1997 et le 31 juillet 1997, la requête et le mémoire présentés pour le Dr Daniel D, médecin généraliste, tendant à ce que la section annule une décision, en date du 8 mars 1997, par laquelle le conseil régional de Rhône-Alpes, statuant sur la plainte du conseil départemental de l’Ordre des médecins du Rhône, lui a infligé la peine de l’interdiction d’exercer la médecine pendant six mois, par les motifs que :

1°) la délibération par laquelle le conseil départemental du Rhône a décidé de transmettre au conseil régional la plainte de Mlle Laëtitia F… a eu le caractère d’une plainte ; que le désistement de Mlle Laëtitia F… ne faisait pas obstacle à ce qu’il soit statué sur la plainte en tant qu’elle émanait du conseil départemental ; que, cependant, le conseil régional a, par une décision du 14 septembre 1996, déclaré qu’il n’y avait pas lieu de statuer sur cette affaire ; que ce non lieu vaut aussi bien pour le conseil départemental que pour Mlle Laëtitia F… ; que la décision du conseil régional a l’autorité de la chose jugée ; que, par suite, la nouvelle plainte du conseil départemental en date du 3 octobre 1996 sur laquelle le conseil régional a statué, était irrecevable ; que, pour ce motif, la décision attaquée doit être annulée ;

2°) pour le cas où la nouvelle plainte serait jugée recevable, il convient de tenir compte de ce que le film, certes tourné sans le consentement des patientes, avait pour but de réaliser un travail de recherche ; qu’il importait que les intéressées ne soient pas averties afin d’assurer l’objectivité du film ; que, compte tenu du but poursuivi, seule une erreur de méthodologie peut être reprochée au requérant ; qu’il ignorait qu’il avait l’obligation légale d’obtenir l’accord des personnes filmées ; que l’acte incriminé n’a causé aucun préjudice aux patientes ; que les faits sont amnistiés par la loi du 3 août 1995 ;

Vu la décision attaquée ;

Vu, enregistré comme ci-dessus le 20 août 1997, le mémoire en défense présenté par le conseil départemental du Rhône qui n’a aucune observation particulière à formuler ;

Vu l’ordonnance du 4 décembre 1997 par laquelle le président de la section disciplinaire a décidé qu’il serait statué en audience non publique sur la requête présentée par le Dr Daniel D ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi du 3 août 1995 portant amnistie ;

Vu le décret du 26 octobre 1948 modifié, relatif au fonctionnement des conseils de l’Ordre des médecins, des chirurgiens-dentistes et des sages-femmes et de la section disciplinaire du Conseil national de l’Ordre des médecins ;

Vu le code de déontologie médicale ;

Après avoir entendu :

 – Le Dr SESBOUE en la lecture de son rapport ;

 – Me Thierry LEVY, avocat à la Cour, en ses observations pour le Dr D et le Dr D en ses explications ;

 – Le Dr CHATIN en ses observations pour le conseil départemental du Rhône ;

APRES EN AVOIR DELIBERE, Sur la recevabilité de la plainte :

Considérant que, saisi d’une plainte de Mlle Laëtitia F… contre le Dr Daniel D, le conseil départemental du Rhône a, comme l’imposent les dispositions de l’article L 395 du code de la santé publique, transmis cette plainte au conseil régional de Rhône-Alpes sans cependant s’y associer ; que l’auteur de la plainte ayant retiré celle-ci, le conseil régional a, par une décision du 14 septembre 1996, déclaré qu’il n’y avait pas lieu de statuer ; qu’une telle décision ne lie pas le conseil départemental qui était certes présent dans l’instance mais n’était pas l’auteur de la plainte ; que le non lieu prononcé par le conseil régional avait pour seule cause le retrait de la plainte de Mlle Laëtitia F… d’user du pouvoir qu’il tient de l’article L 417 du code de la santé publique et que, par suite, le requérant n’est fondé à soutenir ni qu’en décidant, après le retrait de la plainte de Mlle Laëtitia F…, de porter plainte contre le Dr D par une délibération du 3 octobre 1996, le conseil départemental du Rhône aurait porté atteinte à la chose prétendument jugée le 14 septembre 1996, ni qu’en statuant sur cette plainte par la décision attaquée, le conseil régional de Rhône-Alpes aurait, lui-même, méconnu cette autorité et se serait ainsi prononcé sur une requête irrecevable ;

Sur le fond :

Considérant qu’il résulte de l’instruction que le Dr D a filmé, à leur insu, à l’aide d’un caméscope, au moins trois des patientes qui s’étaient confiées à lui pour une consultation gynécologique ; qu’il ne saurait justifier une telle atteinte à la dignité des patientes et à la confiance qu’elles lui avaient accordée par une prétendue ignorance de la nécessité d’obtenir au préalable le consentement des personnes filmées, tant sur le principe de l’enregistrement que sur l’utilisation qui sera faite du film, ni par le fait que ces enregistrements étaient destinés à la rédaction d’un mémoire de sexologie ; qu’en admettant que, comme le soutient le requérant, les patientes n’aient pas subi de préjudice du fait de ses agissements, ceux-ci n’en demeurent pas moins fautifs ; que c’est à bon droit que, par la décision attaquée, le conseil régional a jugé que ce médecin a gravement méconnu les dispositions des articles 33 et 35 du code de déontologie médicale dans leur rédaction en vigueur à la date des faits ;

Considérant que les faits sont contraires à l’honneur et sont ainsi exclus du bénéfice de l’amnistie édictée par les dispositions de l’article 14 de la loi susvisée du 3 août 1995 ;

Considérant que, même en tenant compte de l’âge et de l’inexpérience du Dr D, le conseil régional n’a pas fait une appréciation trop sévère de la faute commise par ce médecin en lui infligeant la peine de l’interdiction d’exercer la médecine pendant six mois ;

PAR CES MOTIFS,
D E C I D E :

Article 1 : La requête du Dr Daniel D est rejetée.

Article 2 : La peine d’interdiction d’exercer la médecine pendant six mois infligée au Dr D prendra effet le 1er juillet 1998 et cessera de porter effet le 31 décembre 1998 à minuit.

Article 3 : Les frais de la présente instance, s’élevant à 1 163 francs, sont mis à la charge du Dr D et devront être réglés dans le mois suivant la notification de la présente décision.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au Dr Daniel D, au conseil départemental du Rhône, au conseil régional de Rhône-Alpes, au directeur départemental des affaires sanitaires et sociales du Rhône, au directeur régional des affaires sanitaires et sociales de Rhône-Alpes, au préfet du Rhône, préfet de région Rhône-Alpes, au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Lyon, au ministre chargé de la santé, au ministre chargé de la sécurité sociale et à tous les conseils départementaux.

Ainsi fait et jugé, en audience non publique, le 3 février 1998 par : M. MORISOT, Conseiller d’Etat honoraire, président ; MM. les Drs LEBATARD-SARTRE, NATTAF, SESBOUE, membres titulaires, Mme le Pr DUSSERRE, membre suppléant.


LE CONSEILLER D’ETAT HONORAIRE
PRESIDENT DE LA SECTION DISCIPLINAIRE DU
CONSEIL NATIONAL DE L’ORDRE DES MEDECINS

M. MORISOT
LE SECRETAIRE DE LA
SECTION DISCIPLINAIRE I. LEVARD

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