Conseil national de l'ordre des médecins, 29 janvier 2021, n° -- 13910, 13911, 13915

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Résumé de la juridiction

Ophtalmologues, Drs A, B et C, ont tous les trois reçus en consultation le patient M. F entre 2004 et 2014.

Le Dr A a vu à trois reprises M. F en consultation au cours de l’année 2004. Lors de la consultation de janvier, elle lui a prescrit de réaliser un champ visuel des deux yeux auprès du Dr B. Celui-ci a réalisé l’examen demandé en avril 2004. Le Dr A a alors procédé à l’analyse des résultats de cet examen et réalisé un OCT (tomographie de cohérence optique) le 21 avril. Puis, en septembre, elle a, à nouveau, pratiqué un fond d’œil et un OCT. Alors que son état requérait un suivi régulier, M. F n’a consulté le Dr A que six ans plus tard, en juin 2011. A cette occasion, celle-ci a procédé à un fond d’œil et à un OCT. Enfin, M. F est revenu consulter le Dr A plus de trois ans après, en octobre 2014. Lors de cette consultation, le Dr A a procédé à un fond d’œil et à un OCT et a adressé M. F au Dr B afin que celui-ci réalise un champ visuel et une pachymétrie, examens qui ont été effectués par le Dr B en octobre. Au vu des résultats de ces examens, le Dr A a diagnostiqué un glaucome et a adressé M. F au Dr C, spécialiste de cette pathologie, afin d’obtenir son avis. Celle-ci a reçu M. F en consultation en novembre et décembre 2014. Le Dr A a par ailleurs prescrit à M. F un scanner encéphalique.

A chaque consultation effectuée par le Dr A, des examens appropriés ont été réalisés et, quand cela était justifié, le praticien a eut recours à des spécialistes compétents afin de pratiquer les examens complémentaires nécessaires ou de donner un avis sur la pathologie diagnostiquée. Le Dr B a procédé, dans des conditions appropriées, aux examens prescrits par le Dr A et le Dr C a confirmé le diagnostic de glaucome et répondu, autant qu’il lui en était possible, aux questions posées par M. F. Contrairement à ce que celui-ci fait valoir, aucune des pièces versées au dossier ne permet d’affirmer que la pathologie qui lui a été diagnostiquée en 2014, dont l’évolution est plurifactorielle et spécifique à chaque patient, aurait pu l’être plus tôt qu’elle ne l’a été, en tout cas à l’occasion des précédents examens pratiqués en 2004 et en 2011, étant rappelé que M. F n’a pas consulté le Dr A entre juin 2011 et octobre 2014. Aucune de ces mêmes pièces ne permet par ailleurs de penser que d’autres examens auraient dû être réalisés en 2004 ou en 2011 ou que la qualité de certains examens pratiqués par le Dr B ait été susceptible de faire obstacle à leur juste exploitation. Enfin, il n’apparaît pas davantage, en dépit de ce que fait valoir M. F, que ces trois spécialistes lui aient dissimulé des informations sur son affection ou sur les conditions dans lesquelles celle-ci avait pu survenir ou qu’ils aient cherché à modifier certains comptes rendus d’examen, les différences apparaissant entre certaines versions de ces derniers étant liées, non à des questions touchant au diagnostic lui-même, mais à des précisions ou explicitations formelles.

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Sur la décision

Référence :
CNOM, 29 janv. 2021, n° -- 13910, 13911, 13915
Numéro(s) : -- 13910, 13911, 13915
Dispositif : Rejet Rejet de la requête, Rejet de la plainte au fond

Texte intégral

CHAMBRE DISCIPLINAIRE NATIONALE
DE L’ORDRE DES MEDECINS 4 rue Léon Jost – 75855 PARIS CEDEX 17
N°s 13910, 13911, 13915 ______________________
Dr A
Dr B
Dr C ______________________
Audience du 27 octobre 2020
Décision rendue publique par affichage le 29 janvier 2021
LA CHAMBRE DISCIPLINAIRE NATIONALE DE L’ORDRE DES MEDECINS,
Vu les procédures suivantes :
I – Sous le n° 13910, par une plainte, enregistrée le 14 février 2017 à la chambre disciplinaire de première instance des Pays-de-la-Loire de l’ordre des médecins, transmise par le conseil départemental de Loire-Atlantique de l’ordre des médecins, M. F a demandé à cette chambre de prononcer une sanction à l’encontre du Dr A, qualifiée spécialiste en ophtalmologie.
Par une décision n° 17.03.1785 du 12 février 2018, la chambre disciplinaire de première instance a rejeté cette plainte et mis à la charge de M. F le versement au Dr A de la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 15 mars et 20 avril 2018, M. F demande à la chambre disciplinaire nationale de l’ordre des médecins :
1° d’annuler cette décision ;
2° de prononcer une sanction à l’encontre du Dr A.
Il soutient que :
- le Dr A a produit, au soutien de ses écritures devant la chambre disciplinaire de première instance, un dossier médical différent de celui qui lui avait été communiqué en 2014, méconnaissant ainsi l’article R. 4127-35 du code de la santé publique ;
- le Dr A n’était pas en mesure d’élaborer un diagnostic éclairé, dès lors qu’il était indiqué que les résultats des examens qu’il avait subis étaient « peu fiables » et « médiocres » ;
- le Dr A aurait dû lui demander de refaire ces examens et lui prescrire des examens complémentaires dès 2004 ;
- le Dr A n’a pas consacré le temps nécessaire à l’élaboration de son diagnostic et a méconnu les articles R. 4127-32 et R. 4127-33 du code de la santé publique ;
- le Dr A n’a jamais répondu à la question qu’il lui a posée durant de nombreuses années consistant à déterminer « quelle est la pathologie causale qui associe une excavation de la petite papille (la structure) à un champ visuel présentant une encoche nasale supérieure (la fonction) révélés par les examens du fond d’œil et du champ visuel réalisés par le Dr B le 21 avril 2004 ».
Par un mémoire, enregistré le 22 mai 2018, le Dr A conclut :

1 CHAMBRE DISCIPLINAIRE NATIONALE
DE L’ORDRE DES MEDECINS 4 rue Léon Jost – 75855 PARIS CEDEX 17
- au rejet de la requête ;
- à ce que M. F soit condamné à lui verser la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
- à ce que soit mis à la charge de M. F le versement de la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
Elle soutient que :
- elle a procédé ou fait procéder par le Dr B à tous les examens requis par l’état de M. F en 2004, époque à laquelle celui-ci ne présentait aucun signe de glaucome ;
- bien que l’état de M. F justifiât un suivi régulier, celui-ci ne l’a ensuite consultée qu’en juin 2011, soit plus de six ans après ;
- elle a procédé aux examens requis en 2011, époque à laquelle M. F ne présentait pas non plus de signe de glaucome ;
- M. F a encore attendu trois ans et demi pour la consulter à nouveau, en octobre 2014 ;
- elle a effectué les examens requis en 2014, a sollicité le Dr B afin qu’il procède à un champ visuel, un fond d’œil et une pachymétrie, examens qui ont révélé la présence d’un glaucome ;
- elle a alors sollicité l’avis du Dr C, spécialiste du glaucome, qui a confirmé l’existence du glaucome ;
- le comportement de M. F depuis ce diagnostic a été inapproprié, celui-ci ne cessant de remettre en cause les diagnostics médicaux de manière insistante et devenant de plus en plus violent dans ses récriminations ;
- il est certain que le glaucome est apparu postérieurement à 2011.
Par une ordonnance du 6 mars 2020, le président de la chambre disciplinaire nationale de l’ordre des médecins a fixé la clôture de l’instruction au 17 avril 2020 à 12h00, prorogée, conformément aux dispositions de l’article 16 de l’ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020, au 23 juin 2020.
Par des courriers du 10 mars 2020, les parties ont été informées de ce que la décision à intervenir était susceptible d’être fondée sur un moyen relevé d’office par le juge, tiré de l’irrecevabilité des conclusions du Dr A tendant à ce que M. F soit condamné à lui verser la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour plainte abusive dès lors que lesdites conclusions ont été enregistrées au greffe après l’expiration du délai d’appel et que l’appel incident n’est pas recevable devant les juridictions disciplinaires.
Un mémoire a été présenté le 5 octobre 2020, soit postérieurement à la clôture de l’instruction, pour M. F.
II – Sous le n° 13911, par une plainte, enregistrée le 14 février 2017 à la chambre disciplinaire de première instance des Pays-de-la-Loire de l’ordre des médecins, transmise par le conseil départemental de Loire-Atlantique de l’ordre des médecins, M. F a demandé à cette chambre de prononcer une sanction à l’encontre du Dr B, qualifié spécialiste en ophtalmologie.
Par une décision n° 17.02.1784 du 12 février 2018, la chambre disciplinaire de première instance a rejeté cette plainte et mis à la charge de M. F le versement au Dr B de la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 15 mars et 20 avril 2018, M. F demande à la chambre disciplinaire nationale de l’ordre des médecins :

2 CHAMBRE DISCIPLINAIRE NATIONALE
DE L’ORDRE DES MEDECINS 4 rue Léon Jost – 75855 PARIS CEDEX 17 1° d’annuler cette décision ;
2° de prononcer une sanction à l’encontre du Dr B.
Il soutient que :
- le Dr B a produit au soutien de ses écritures devant la chambre disciplinaire de première instance un dossier médical différent de celui qui lui avait été communiqué en 2014, méconnaissant ainsi l’article R. 4127-35 du code de la santé publique ;
- le Dr B n’était pas en mesure d’élaborer un diagnostic éclairé, dès lors qu’il avait indiqué que les examens qu’il avait réalisés étaient « peu fiables » et « médiocres » ;
- le Dr B aurait dû lui demander de refaire ces examens ;
- les résultats du champ visuel étaient incohérents, s’agissant de l’œil gauche ;
- le Dr B n’a jamais répondu à la question qu’il lui a posée durant de nombreuses années consistant à déterminer « quelle est la pathologie causale qui associe une excavation de la petite papille (la structure) à un champ visuel présentant une encoche nasale supérieure (la fonction) révélés par les examens du fond d’œil et du champ visuel qu’il a réalisés le 21 avril 2004 » ;
- le glaucome qui lui a été diagnostiqué en 2014, eu égard à sa gravité, était nécessairement déjà présent depuis plus de quinze ans.
Par un mémoire, enregistré le 22 mai 2018, le Dr B conclut :
- au rejet de la requête ;
- à ce que M. F soit condamné à lui verser la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
- à ce que soit mis à la charge de M. F le versement de la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
Il soutient que :
- il n’est pas l’ophtalmologiste traitant de M. F et n’est pas détenteur de son dossier médical ;
- il a souligné la fiabilité et la coopération médiocres, lors du champ visuel réalisé en 2004 ;
- bien que l’état de M. F justifiât un suivi régulier, celui-ci n’est revenu consulter le Dr A qu’en juin 2011 puis en octobre 2014 ;
- il a, à nouveau, été sollicité par le Dr A afin de procéder à un champ visuel, un fond d’œil et une pachymétrie, examens qui ont révélé la présence d’un glaucome ;
- le comportement de M. F depuis ce diagnostic a été inapproprié, celui-ci ne cessant de remettre en cause les diagnostics médicaux de manière insistante et devenant de plus en plus violent dans ses récriminations ;
- il n’a commis aucune faute déontologique ;
- il a répondu à toutes les questions qui lui ont été posées lors de la conciliation.
Par une ordonnance du 6 mars 2020, le président de la chambre disciplinaire nationale de l’ordre des médecins a fixé la clôture de l’instruction au 17 avril 2020 à 12h00, prorogée, conformément aux dispositions de l’article 16 de l’ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020, au 23 juin 2020.

3 CHAMBRE DISCIPLINAIRE NATIONALE
DE L’ORDRE DES MEDECINS 4 rue Léon Jost – 75855 PARIS CEDEX 17
Par des courriers du 10 mars 2020, les parties ont été informées de ce que la décision à intervenir était susceptible d’être fondée sur un moyen relevé d’office par le juge, tiré de l’irrecevabilité des conclusions du Dr B tendant à ce que M. F soit condamné à lui verser la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour plainte abusive dès lors que lesdites conclusions ont été enregistrées au greffe après l’expiration du délai d’appel et que l’appel incident n’est pas recevable devant les juridictions disciplinaires.
Un mémoire a été présenté le 5 octobre 2020, soit postérieurement à la clôture de l’instruction, pour M. F.
III – Sous le n° 13915, par une plainte, enregistrée le 14 février 2017 à la chambre disciplinaire de première instance des Pays-de-la-Loire de l’ordre des médecins, transmise par le conseil départemental de Loire-Atlantique de l’ordre des médecins, M. F a demandé à cette chambre de prononcer une sanction à l’encontre du Dr C, qualifiée spécialiste en ophtalmologie.
Par une décision n° 17.04.1786 du 12 février 2018, la chambre disciplinaire de première instance a rejeté cette plainte, mis à la charge de M. F le versement au Dr C de la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens et condamné M. F à verser à ce praticien une somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts pour plainte abusive.
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 16 mars et 20 avril 2018, M. F demande à la chambre disciplinaire nationale de l’ordre des médecins :
1° d’annuler cette décision ;
2° de prononcer une sanction à l’encontre du Dr C.
Il soutient que :
- le Dr C aurait dû lui dire la vérité, à savoir que le glaucome ne pouvait être apparu après 2011 ;
- le Dr C aurait dû relever que les Drs A et B avaient modifié leurs comptes rendus ;
- le Dr C n’a pas répondu à la question qu’il lui a posée consistant à déterminer « quelle est la pathologie causale qui associe une excavation de la petite papille (la structure) à un champ visuel présentant une encoche nasale supérieure (la fonction) révélés par les examens du fond d’œil et du champ visuel qu’il a réalisés le 21 avril 2004 » ;
- le glaucome qui lui a été diagnostiqué en 2014, eu égard à sa gravité, était nécessairement déjà présent depuis plus de quinze ans.
Par un mémoire, enregistré le 22 mai 2018, le Dr C conclut :
- au rejet de la requête ;
- à ce que M. F soit condamné à lui verser la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
- à ce que soit mis à la charge de M. F le versement de la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
Elle soutient que :
- elle a toujours répondu à M. F et communiqué de manière transparente avec lui ;
- M. F s’est montré physiquement agressif à son endroit lors de la réunion de conciliation ;
- M. F cherche uniquement à ce qu’elle mette en cause les soins et examens réalisés par les
Drs A et B ;
- M. F a déclaré lors de la conciliation ne rien avoir à lui reprocher ;

4 CHAMBRE DISCIPLINAIRE NATIONALE
DE L’ORDRE DES MEDECINS 4 rue Léon Jost – 75855 PARIS CEDEX 17
- le comportement de M. F a été inapproprié, celui-ci ne cessant de remettre en cause les diagnostics médicaux de manière insistante et devenant de plus en plus violent dans ses récriminations ;
- elle n’a commis aucune faute déontologique ;
- l’absence de diagnostic plus précoce est liée au fait que M. F n’a pas consulté entre 2011 et 2014.
Par une ordonnance du 6 mars 2020, le président de la chambre disciplinaire nationale de l’ordre des médecins a fixé la clôture de l’instruction au 17 avril 2020 à 12h00, prorogée, conformément aux dispositions de l’article 16 de l’ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020, au 23 juin 2020.
Par des courriers du 10 mars 2020, les parties ont été informées de ce que la décision à intervenir était susceptible d’être fondée sur un moyen relevé d’office par le juge tiré de l’irrecevabilité des conclusions du Dr C tendant à l’aggravation du montant des dommages et intérêts pour plainte abusive alloué en première instance, dès lors que lesdites conclusions ont été enregistrées au greffe après l’expiration du délai d’appel et que l’appel incident n’est pas recevable devant les juridictions disciplinaires.
Un mémoire a été présenté le 5 octobre 2020, soit postérieurement à la clôture de l’instruction, pour M. F.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code de la santé publique, notamment le code de déontologie médicale figurant aux articles R. 4127-1 à R. 4127-112 ;
- le code de justice administrative ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, notamment le I de l’article 75.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.
Ont été entendus au cours de l’audience publique du 27 octobre 2020 :
- les rapports du Dr Blanc ;
- les observations de Me Riou pour M. F et celui-ci en ses explications ;
- les observations de Me Julienne pour les Drs Hermouet-Leclerc, B et C et les Drs
Hermouet-Leclerc et B en leurs explications.
Les Drs A et B ont été invités à reprendre la parole en dernier.
APRES EN AVOIR DELIBERE,
Considérant ce qui suit :
1. M. F a été reçu en consultation par le Dr A, ophtalmologiste, les 27 janvier, 21 avril et 21 septembre 2004, le 23 juin 2011 ainsi que le 14 octobre 2014. En 2004, le Dr B a, sur prescription du Dr A, réalisé un champ visuel des deux yeux de M. F, examen réitéré en 2014 et complété par un fond d’œil et une pachymétrie. A la suite de ces derniers examens, le Dr A a diagnostiqué un glaucome chez M. F et l’a orienté vers le Dr C, ophtalmologiste, spécialiste du glaucome. Par les trois requêtes visées précédemment, M. F fait appel des 5 CHAMBRE DISCIPLINAIRE NATIONALE
DE L’ORDRE DES MEDECINS 4 rue Léon Jost – 75855 PARIS CEDEX 17 décisions du 12 février 2018 par lesquelles la chambre disciplinaire de première instance des
Pays-de-la-Loire de l’ordre des médecins a rejeté les plaintes qu’il a introduites contre ces trois médecins. Les trois litiges portant sur les mêmes faits, il y a lieu de les joindre pour statuer par une unique décision.
2. Aux termes de l’article R. 4127-32 du code de la santé publique : « Dès lors qu’il a accepté de répondre à une demande, le médecin s’engage à assurer personnellement au patient des soins consciencieux, dévoués et fondés sur les données acquises de la science, en faisant appel, s’il y a lieu, à l’aide de tiers compétents ». Aux termes de l’article R. 4127-33 du même code : « Le médecin doit toujours élaborer son diagnostic avec le plus grand soin, en y consacrant le temps nécessaire, en s’aidant dans toute la mesure du possible des méthodes scientifiques les mieux adaptées et, s’il y a lieu, de concours appropriés ». Enfin, aux termes de l’article R. 4127-35 de ce code : « Le médecin doit à la personne qu’il examine, qu’il soigne ou qu’il conseille une information loyale, claire et appropriée sur son état, les investigations et les soins qu’il lui propose. Tout au long de la maladie, il tient compte de la personnalité du patient dans ses explications et veille à leur compréhension (…) ».
3. Le Dr A a vu à trois reprises M. F en consultation au cours de l’année 2004. Lors de la consultation du 27 janvier, elle lui a prescrit de réaliser un champ visuel des deux yeux auprès du Dr B. Celui-ci a réalisé l’examen demandé le 21 avril 2004. Le Dr A a alors procédé à l’analyse des résultats de cet examen et réalisé un OCT (tomographie de cohérence optique) le 21 avril. Puis, le 21 septembre, elle a, à nouveau, pratiqué un fond d’œil et un OCT. Alors que son état requérait un suivi régulier, M. F n’a consulté le Dr A que six ans plus tard, le 23 juin 2011. A cette occasion, celle-ci a procédé à un fond d’œil et à un
OCT. Enfin, M. F est revenu consulter le Dr A plus de trois ans après, le 14 octobre 2014.
Lors de cette consultation, le Dr A a procédé à un fond d’œil et à un OCT et a adressé M. F au Dr B afin que celui-ci réalise un champ visuel et une pachymétrie, examens qui ont été effectués par le Dr B le 20 octobre suivant. Au vu des résultats de ces examens, le Dr A a diagnostiqué un glaucome et a adressé M. F au Dr C, spécialiste de cette pathologie, afin d’obtenir son avis. Celle-ci a reçu M. F en consultation les 13 novembre et 18 décembre 2014. Le Dr A a par ailleurs prescrit à M. F un scanner encéphalique.
4. Il résulte de l’instruction que chaque consultation effectuée par le Dr A a donné lieu aux examens requis et, quand cela était justifié, au concours des spécialistes compétents afin de pratiquer les examens complémentaires nécessaires ou de donner un avis sur la pathologie diagnostiquée. Il résulte également de l’instruction que le Dr B a procédé, dans des conditions appropriées, aux examens prescrits par le Dr A et que le Dr C a confirmé le diagnostic de glaucome et répondu, autant qu’il lui en était possible, aux questions posées par M. F. Contrairement à ce que celui-ci fait valoir, aucune des pièces versées au dossier ne permet d’affirmer que la pathologie qui lui a été diagnostiquée en 2014, dont l’évolution est plurifactorielle et spécifique à chaque patient, aurait pu l’être plus tôt qu’elle ne l’a été, en tout cas à l’occasion des précédents examens pratiqués en 2004 et en 2011, étant rappelé que M. F n’a pas consulté le Dr A entre juin 2011 et octobre 2014. Aucune de ces mêmes pièces ne permet par ailleurs de penser que d’autres examens auraient dû être réalisés en 2004 ou en 2011 ou que la qualité de certains examens pratiqués par le Dr B ait été susceptible de faire obstacle à leur juste exploitation. Enfin, il n’apparaît pas davantage, en dépit de ce que fait valoir M. F, que ces trois spécialistes lui aient dissimulé des informations sur son affection ou sur les conditions dans lesquelles celle-ci avait pu survenir ou qu’ils aient cherché à modifier certains comptes rendus d’examen, les différences apparaissant entre certaines versions de ces derniers étant liées, non à des questions touchant au diagnostic lui-même, mais à des précisions ou explicitations formelles.

6 CHAMBRE DISCIPLINAIRE NATIONALE
DE L’ORDRE DES MEDECINS 4 rue Léon Jost – 75855 PARIS CEDEX 17 5. Il résulte de ce qui précède que M. F a bénéficié de soins consciencieux de la part des trois spécialistes qui ont, à des titres divers, participé à son suivi et qu’aucun manquement à leurs obligations déontologiques ne saurait être caractérisé en l’espèce. Les griefs tirés de la méconnaissance des exigences posées par les articles R. 4127-32, R. 4127-33 et R. 412735 du code de la santé publique doivent, par suite, être écartés et M. F n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par les trois décisions attaquées, la chambre disciplinaire de première instance des Pays-de-la-Loire de l’ordre des médecins a rejeté les plaintes qu’il a introduites contre ces médecins.
6. Si le Dr A, le Dr B et le Dr C présentent, dans le cadre de leurs écritures en défense, des conclusions tendant respectivement, pour les deux premiers, à ce que M. F soit condamné à leur verser des dommages et intérêts pour plainte abusive et, pour la troisième, à ce que le montant des dommages et intérêts pour plainte abusive qui lui a été alloué en première instance soit augmenté, de telles conclusions ne peuvent toutefois qu’être rejetées, dès lors qu’elles ont été enregistrées au greffe de la chambre disciplinaire nationale après l’expiration du délai d’appel et que l’appel incident n’est pas recevable devant les juridictions disciplinaires. En ce qui concerne les conclusions présentées au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de M. F une somme de 1 000 euros à verser à chacun des médecins défendeurs dans la présente instance au titre du I de l’article 75 de la loi du 10 juillet 1991.
PAR CES MOTIFS,
DECIDE:
Article 1er : Les requêtes de M. F sont rejetées.
Article 2 : M. F versera aux Dr A, B et C une somme de 1 000 euros chacun au titre du I de l’article 75 de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : Le surplus des conclusions des Drs A, B et C est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au Dr A, au Dr B, au Dr C, à M. F, au conseil départemental de Loire-Atlantique de l’ordre des médecins, à la chambre disciplinaire de première instance des Pays-de-la-Loire de l’ordre des médecins, au directeur général de l’agence régionale de santé des Pays-de-la-Loire, au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Nantes, au conseil national de l’ordre des médecins et au ministre chargé de la santé.

7 CHAMBRE DISCIPLINAIRE NATIONALE
DE L’ORDRE DES MEDECINS 4 rue Léon Jost – 75855 PARIS CEDEX 17
Ainsi fait et délibéré par : Mme Bourgeois-Machureau, conseiller d’Etat, président ; Mme le Dr Kahn-Bensaude, M. le Pr Besson, MM. les Drs Blanc, Bouvard,
Ducrohet, Théron, membres.
Le conseiller d’Etat, président de la chambre disciplinaire nationale de l’ordre des médecins
Béatrice Bourgeois-Machureau
Le greffier en chef
François-Patrice Battais
La République mande et ordonne au ministre chargé de la santé en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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