Ordre national des chirurgiens-dentistes, Chambre disciplinaire nationale, 9 décembre 2013, n° 2098

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Résumé de la juridiction

Plainte et non simples doléances – Un grief nouveau est recevable s’il a été discuté contradictoirement – Il n’y a pas lieu d’examiner à quelle cause juridique se rattache un moyen s’il a été présenté dans le délai d’appel – Soins défectueux – Importance des caries survenues au cours du traitement orthodontique.

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Sur la décision

Référence :
ONCD, ch. disciplinaire nationale, 9 déc. 2013, n° 2098
Numéro(s) : 2098
Dispositif : Interdiction d'exercer pendant huit jours avec sursis (décision de 1ère instance = Rejet de la plainte)
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Sur les parties

Texte intégral

CHAMBRE DISCIPLINAIRE NATIONALE
DE L’ORDRE DES CHIRURGIENS-DENTISTES 16 rue Spontini – 75116 PARIS
JFV/CB/NR
Audience publique du 14 novembre 2013
Décision rendue publique par affichage le 9 décembre 2013
Affaire : Docteur A.B.
Chirurgien-dentiste
Dos. n°2098
LA CHAMBRE DISCIPLINAIRE NATIONALE DE L’ORDRE DES CHIRURGIENS-DENTISTES,
Vu la requête, enregistrée au greffe de la chambre disciplinaire nationale de l’Ordre des chirurgiens-dentistes le 7 novembre 2012, présentée pour le Docteur C.D., chirurgien-dentiste, dont l’adresse est (…), et tendant, d’une part, à l’annulation de la décision, en date du 8 octobre 2012, par laquelle la chambre disciplinaire de première instance de l’Ordre des chirurgiens-dentistes de
Bourgogne, statuant sur sa plainte à l’encontre du Docteur A.B., chirurgien-dentiste, transmise, sans s’y associer, par le conseil départemental de l’Ordre des chirurgiens-dentistes de la Nièvre, a rejeté ladite plainte et a condamné le Docteur D. à payer au Docteur B. la somme de 800 € sur le fondement de l’article L.761-1 du code de justice administrative et, d’autre part, à ce que le
Docteur B. soit condamné à payer au Docteur D. la somme de 3 000 € sur le fondement de l’article
L.761-1 du code de justice administrative, par les motifs que le Docteur D. n’a pas de volonté conflictuelle à l’encontre de son confrère ; qu’il a ressenti un dénigrement de la part de son confrère ; que des excuses présentées par le Docteur B. aurait pu faire cesser cette procédure, au stade de la conciliation ; que lorsque le
Docteur D. a conseillé à Monsieur X de consulter le cabinet d’orthodontie du Docteur B. ce patient ne présentait aucune carie alors que, peu de temps après, ce patient présentait de multiples caries tant sur les dents antérieures que sur les dents postérieures ; qu’il n’est pas admissible qu’en si peu de temps un professionnel de santé ait laissé la situation clinique de son patient, pourtant extrêmement motivé par sa denture, se dégrader à ce point ; que le Docteur B. n’a ainsi pas respecté les dispositions de l’article R.4127-233 du code de la santé publique ; que le Docteur B. ayant conseillé à son patient de revoir le Docteur D. pour le traitement des caries, celui-ci a constaté qu’il ne lui était pas possible de soigner les caries antérieures sans que les bagues ne soient déposées ; que le Docteur
B. a refusé de débaguer le patient ; que cette attitude aboutissait à imposer au Docteur D. de réaliser un traitement inadapté et remettait en cause ses qualités professionnelles ; que, dans le cas contraire, le patient était laissé sans soin avec la possibilité d’une dégradation de son état buccodentaire ; qu’en outre, en inscrivant sa réponse au Docteur D. dans un pli ouvert, le Docteur B.
rendait le patient au courant d’un désaccord entre confrères, alors que la confraternité exigeait de la discrétion sur celui-ci (articles R.4127-2333, R.4127-204, R.4127-225, R.4127-232 et R.4127-261 du code de la santé publique) ; que le Docteur B. a demandé une indemnité financière pour la tentative de conciliation devant le président du conseil départemental de l’Ordre, ce qu’il n’y avait pas lieu de demander ; qu’enfin alors que le Docteur D. avait adressé son patient au Docteur B. et à personne d’autre, le Docteur B. a fait sous-traiter la demande de soin par sa collaboratrice sans en informer le
Docteur D. ; que cette délégation à une tierce personne de la réalisation d’un acte non lucratif constitue une méthode qui ressemble à celles employées dans le commerce (articles R.4127-276 et
R.4127-215 du code de la santé publique) ;
Vu la décision attaquée ;
Vu le mémoire, enregistré le 25 janvier 2013, présenté pour le Docteur A.B., dont l’adresse est (…) et tendant, d’une part, au rejet de la requête et, d’autre part, à ce que le Docteur D. soit condamné au paiement d’une amende de 3 000 € pour recours abusif et à lui verser la somme de 4 000 € au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative par les motifs que, comme l’ont relevé les premiers juges, les doléances du Docteur D. qui désirait obtenir des excuses du
Docteur B. ne relevaient pas de la compétence de la juridiction disciplinaire ; que les moyens nouveaux avancés en appel par le Docteur D. sont, en tant que tels, irrecevables ; qu’ils se 1.

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DE L’ORDRE DES CHIRURGIENS-DENTISTES 16 rue Spontini – 75116 PARIS rattachent à une cause juridique nouvelle ; qu’en effet le Docteur D. invoque en appel la violation d’articles du code de la santé publique dont il n’invoquait pas la violation en première instance ; que le Docteur B. a assuré au patient des soins conformes aux données acquises de la science puisque le patient a fait l’objet de soins selon la méthode préconisée par le Docteur D. ; que, par ailleurs, le
Docteur B. rapporte la preuve que son avis était fondé et que le patient pouvait être soigné sans dépose des multi-attaches ; qu’un praticien est en droit d’avoir un avis différent de son confrère en ce qui concerne le traitement d’un patient commun ; qu’un tel avis ne remet pas en cause la compétence du confrère ; que la forme des échanges entre confrères n’est pas réglementée ; que le
Docteur B. n’a pas nui à la santé de son patient et lui a dispensé les conseils nécessaires en ce qui concerne l’hygiène bucco-dentaire ; que ne constitue pas une faute disciplinaire une demande d’indemnité dans le cadre d’une rencontre confraternelle devant le conseil de l’Ordre ; que l’article
R.4127-215 du code de la santé publique est inapplicable en l’espèce ; qu’aucune disposition n’impose d’informer le correspondant du fait que le traitement orthodontique est réalisé par un collaborateur et qu’en outre, en l’espèce, le traitement orthodontique du patient a fait l’objet d’un suivi régulier de la part du Docteur B.; qu’en vertu de l’article R.4126-31 du code de la santé publique l’article R.741-12 du code de justice administrative s’applique bien dans les instances disciplinaires et qu’en l’espèce la plainte est abusive ;
Vu le mémoire, enregistré le 29 octobre 2013, présenté pour le Docteur D. et tendant aux mêmes fins que sa requête et à ce que le Docteur B. soit condamné à verser la somme de 35 € correspondant au timbre fiscal payé par le requérant par les mêmes motifs que ceux exprimé dans la requête et, en outre, par les motifs que tous les griefs du Docteur D. sont les mêmes que ceux exprimés dans sa plainte ; que la juridiction disciplinaire peut examiner d’autres faits reprochés que ceux dénoncés dans la plainte ; que par son attitude le Docteur B. a fait obstacle aux soins urgents que réclamait l’état du patient ;
Vu le mémoire, enregistré le 13 novembre 2013, présenté pour le Docteur B. et tendant aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le décret n° 2007-434 du 25 mars 2007 relatif au fonctionnement et à la procédure disciplinaire des conseils de l’Ordre des médecins, des chirurgiens-dentistes, des sages-femmes, des pharmaciens, des masseurs-kinésithérapeutes et des pédicures-podologues et modifiant le code de la santé publique (dispositions réglementaires) ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu, en audience publique, le rapport du Docteur WAGNER, les observations du
Docteur B., assisté de Maître LAVIOLETTE, avocat, et les observations du Docteur D., assisté de
Maître BESSIS, avocat ;
- le conseil départemental de l’Ordre de la Nièvre, dûment convoqué, ne s’étant pas fait représenter,
- le Docteur B. ayant pu reprendre la parole en dernier ;
Considérant qu’il résulte des pièces du dossier que le Docteur D., chirurgien-dentiste a adressé au
Docteur B., chirurgien-dentiste, spécialiste qualifié en orthopédie dento-faciale, qui était son correspondant habituel pour les soins orthodontiques, un jeune patient pour un traitement orthodontique ; qu’au cours de ce traitement le Docteur B. a, par deux lettres en date des 21 juillet 2011 et 12 octobre 2011, demandé au Docteur D. de traiter les caries affectant les molaires mandibulaires (37 + 47) et les incisives supérieures (11 + 21 + 22) de ce patient ; que le Docteur D.
demanda au Docteur B., par une lettre du 2 novembre 2011, de « bien vouloir débaguer temporairement ce patient pour me permettre d’exécuter les soins », estimant cet acte indispensable pour lui « permettre ce type de soins » ; que le Docteur B. renvoya cette lettre à son confrère en inscrivant en marge : « Il est tout à fait possible d’effectuer les soins avec le XA. Les finitions seront effectuées à la fin du traitement ODF. Merci » ; que, contrairement à ce que soutient 2.

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DE L’ORDRE DES CHIRURGIENS-DENTISTES 16 rue Spontini – 75116 PARIS le Docteur B., la lettre que le Docteur D. a adressée à son encontre au conseil départemental de l’Ordre ne faisait pas état de simples doléances mais avait le caractère d’une plainte ; qu’à l’occasion de l’instance à laquelle cette plainte a donné lieu, il peut être tenu compte du moyen nouveau soulevé par le Docteur D. et relatif à la qualité des soins dispensés par le Docteur B., dès lors que, comme en l’espèce, ce moyen a été soumis au débat contradictoire ; qu’enfin il n’y a pas lieu d’examiner à quelle cause juridique se rattache ce moyen dès lors qu’il a été présenté dans le délai d’appel ;
Considérant, en premier lieu, que le fait pour le Docteur B. de s’être borné, pour répondre à la demande du Docteur D. tendant à ce que le patient soit débagué, à une simple mention manuscrite en marge du courrier du Docteur D. a pu être désagréablement relevé par ce dernier mais ne peut être regardé comme constituant une faute déontologique ; que, de même, la divergence d’opinions entre les deux praticiens sur les conditions de réalisation des soins nécessités par les caries a été exprimée d’une manière qui a pu être ressentie comme désobligeante par le Docteur D., au regard de l’information donnée à ce sujet au patient, mais ne constitue pas non plus une faute sanctionnable ; que, par ailleurs, le fait que le Docteur B. ait demandé à sa collaboratrice d’effectuer tout ou partie du traitement endodontique sans en avertir le Docteur D. n’est pas susceptible de lui être reproché ; qu’enfin le Docteur B., ayant fait l’objet d’une plainte, n’a pas commis une faute déontologique en incluant au nombre de ses prétentions, lors de la tentative de conciliation, le versement par le Docteur D. d’une indemnité pour une procédure qu’il estimait abusive ;
Considérant, en revanche, qu’aux termes de l’article R.4127-233 du code de la santé publique : « Le chirurgien-dentiste qui a accepté de donner des soins à un patient s’oblige (…) à lui assurer des soins éclairés et conformes aux données acquises de la science (…) » ; que l’importance des caries survenues au cours du traitement orthodontique du jeune patient en cause, traitement qui n’avait pu débuter qu’en l’absence de carie, prouve que le Docteur B. n’a pas pris durant ce traitement les dispositions nécessaires pour éviter une telle dégradation et qu’il a donc méconnu l’obligation déontologique relative à la qualité des soins, rappelée par les dispositions précitées ; qu’une telle faute justifie d’être sanctionnée ; qu’il y a lieu, en conséquence, d’annuler la décision attaquée et d’infliger au
Docteur B. la sanction de l’interdiction d’exercer la profession de chirurgien-dentiste pendant huit jours avec sursis ;
- Sur les frais exposés par les parties :
Considérant, d’une part, que les dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le Docteur D., qui n’est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer au Docteur B. la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui ;
Considérant, d’autre part, qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de condamner le
Docteur B. à verser au Docteur D. la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui ;
- Sur l’amende pour recours abusif :
Considérant qu’il résulte de ce qui a été dit ci-dessus et sans qu’il y ait lieu d’examiner la recevabilité de la demande du Docteur B. tendant à ce que le Docteur D. soit condamné au paiement d’une amende de 3 000 € pour recours abusif qu’une telle demande ne peut qu’être rejetée ;
DECIDE :
Article 1er :

La décision, en date du 8 octobre 2012, de la chambre disciplinaire de première instance de l’Ordre des chirurgiens-dentistes de Bourgogne est annulée.

3.

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DE L’ORDRE DES CHIRURGIENS-DENTISTES 16 rue Spontini – 75116 PARIS
Article 2 :

Il est infligé au Docteur A.B. la sanction de l’interdiction d’exercer la profession de chirurgien-dentiste pendant huit jours avec sursis.

Article 3 :

Les conclusions du Docteur A.B. et le surplus des conclusions de la requête du Docteur
C.D. sont rejetés.

Article 4 :

La présente décision sera notifiée :
- au Docteur A.B., chirurgien-dentiste,
- à Maître LAVIOLETTE, avocat,
- au Docteur C.D., auteur de la plainte,
- à Maître BESSIS, avocat,
- au conseil départemental de l’Ordre de la Nièvre,
- à la chambre disciplinaire de première instance de l’Ordre de Bourgogne,
- au conseil national de l’Ordre,
- au ministre chargé de la santé,
- au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Nevers,
- au directeur de l’ARS de Bourgogne.

Délibéré en son audience du 14 novembre 2013, où siégeaient Monsieur de VULPILLIÈRES, conseiller d’Etat honoraire, président, les Docteurs BIAS, LUGUET, MIRISCH, ROULLET RENOLEAU,
VOLPELIÈRE et WAGNER, chirurgiens-dentistes, membres de la chambre disciplinaire nationale.
Décision rendue publique par affichage le 9 décembre 2013.
LE CONSEILLER D’ETAT (H)
Président de la chambre disciplinaire nationale de l’Ordre des chirurgiens-dentistes
LA GREFFIERE de la chambre disciplinaire nationale de l’Ordre des chirurgiens-dentistes
J.F. de VULPILLIERES
C. BOURGOUIN
La République mande et ordonne au ministre chargé de la santé en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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