Ordre national des chirurgiens-dentistes, Chambre disciplinaire nationale, 9 décembre 2013, n° 2077

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Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Un chirurgien-dentiste, conseil d’une entreprise d’assurance peut donner un avis sur les soins dispensés par un confrère et n’a pas à consulter ce confrère avant d’émettre une opinion – La société d’assurance est libre de donner à cet avis technique les suites qu’elle souhaite – L’avis technique donné ne doit pas avoir un caractère calomnieux.

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Sur la décision

Référence :
ONCD, ch. disciplinaire nationale, 9 déc. 2013, n° 2077
Numéro(s) : 2077
Dispositif : Rejet de la requête (décision de 1ère instance = Rejet de la plainte)
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Sur les parties

Texte intégral

CHAMBRE DISCIPLINAIRE NATIONALE
DE L’ORDRE DES CHIRURGIENS-DENTISTES 16 rue Spontini – 75116 PARIS
JFV/CB/NR
Audience publique du 7 novembre 2013
Décision rendue publique par affichage le 9 décembre 2013
Affaire : Docteur A.B.
Chirurgien-dentiste
Dos. n°2077
LA CHAMBRE DISCIPLINAIRE NATIONALE DE L’ORDRE DES CHIRURGIENS-DENTISTES,
Vu la requête, enregistrée au greffe de la chambre disciplinaire nationale de l’Ordre des chirurgiens-dentistes le 6 juillet 2012, présentée pour le Docteur C.D., chirurgien-dentiste, dont l’adresse est (…) et tendant, d’une part, à l’annulation de la décision, en date du 14 juin 2012, par laquelle la chambre disciplinaire de première instance de l’Ordre des chirurgiens-dentistes d’Ile-deFrance, statuant sur sa plainte à l’encontre du Docteur A.B., chirurgien-dentiste, transmise par le conseil départemental de l’Ordre des chirurgiens-dentistes de Paris, a rejeté ladite plainte et l’a condamnée à verser au Docteur B. la somme de 1 500 € au titre des frais exposés par lui et, d’autre part, à la condamnation du Docteur B. à lui verser la somme de 5 000 € au titre des frais exposés par elle, par les motifs que le Docteur B. a fait une lourde erreur en prétendant dans son rapport à la compagnie d’assurance que les inlays installés par son confrère étaient en composite et non en céramique : que le Docteur Roger DIEVART, professeur à la faculté de chirurgie dentaire et le
Docteur Gabriel SAUVEUR, expert près la cour d’appel de Paris, ont l’un et l’autre souligné les erreurs commises par le Docteur B. ; qu’il est faux, selon le Docteur SAUVEUR, que le Docteur D. ait déposé des amalgames pour les remplacer par des inlays, onlays en résine, qu’elle ait facturé à des tarifs exorbitants les inlays en résine, qu’elle ait entrepris des traitements non justifiés et obturé des dents saines, qu’elle ait transformé des petites caries sur une surface en obturation trois faces et qu’elle ait rédigé des feuilles de soins pour ces actes hors nomenclature ; que le Docteur Michel
SEVALLE a également confirmé l’absence de fautes professionnelles commises par la requérante ;
que le Docteur B. a été non seulement l’inspirateur de la plainte pénale déposée contre le Docteur
D. mais son instigateur ; que cette plainte, qui s’est finalement conclue par un non-lieu, a créé à la requérante un grave traumatisme psychologique et a suscité à son encontre des mesures vexatoires de la part de ses confrères ; que l’avis donné par le Docteur B. a été établi sans rigueur, sans même interroger le Docteur D. et a été volontairement malveillant ; qu’un tel comportement a été anticonfraternel ;
Vu la décision attaquée ;
Vu le mémoire, enregistré le 6 septembre 2013, présenté pour le Docteur B., demeurant (…), et tendant, d’une part, au rejet de la requête et, d’autre part, à ce que le Docteur D. soit condamnée à lui verser la somme de 2 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et la somme de 3 000 € au titre des frais exposés par lui, par les motifs que les conclusions des trois experts judiciaires désignés par le juge d’instruction viennent corroborer et confirmer celles du
Docteur B. ; que le Docteur DIEVART n’a pas été à même d’examiner les patients et n’apport aucun élément de nature à contredire les trois experts judiciaires ; que le Docteur B. n’est ni l’auteur ni l’inspirateur du dépôt de la plainte pénale et que le simple fait qu’une ordonnance de non-lieu ait été rendue ne saurait remettre en cause le bien-fondé des conclusions du Docteur B. ni être la preuve qu’il a manqué à ses obligations déontologiques ; que le Docteur D. a utilisé dans son mémoire d’appel des expressions injurieuses et tout à fait inacceptables à l’égard du Docteur B. ;
qu’elle a déposé une plainte en dissimulant les rapports d’expertises judiciaires ; que son appel est de mauvaise foi et abusif ;
Vu le mémoire, enregistré le 17 septembre 2012, présenté par le conseil départemental de l’Ordre des chirurgiens-dentistes de Paris, dont l’adresse est 27 rue Ginoux, 75015 Paris et tendant 1.

CHAMBRE DISCIPLINAIRE NATIONALE
DE L’ORDRE DES CHIRURGIENS-DENTISTES 16 rue Spontini – 75116 PARIS au rejet de la requête par les motifs que la décision des premiers juges est fondée ; que ce n’est pas le Docteur B. qui a déposé une plainte pénale à l’encontre du Docteur D. mais une compagnie d’assurance ; que le Docteur B. s’est borné à donner un avis technique sur les dossiers qui lui étaient soumis et que cet avis a été rédigé en termes mesurés ; que les dossiers étaient particulièrement complexes puisque le juge d’instruction a dû s’entourer de l’avis de trois experts pour prendre sa décision ; que les faits relevés à l’encontre du Docteur D. dans l’ordonnance de non-lieu rendue le 15 juillet 2009 par le juge d’instruction sont assez accablants sur le plan déontologique ; qu’il est ainsi indiqué que des soins effectués par le Docteur D. l’ont été sans nécessité thérapeutique ou en nonconformité avec les connaissances médicales avérées ;
Vu le mémoire, enregistré le 14 octobre 2013, présenté par le conseil départemental de l’Ordre des chirurgiens-dentistes de Paris et par lequel celui-ci indique qu’il s’en remet pour la décision à intervenir à la sagesse de la juridiction ;
Vu le mémoire, enregistré le 18 octobre 2013, présenté pour le Docteur D. et tendant aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens et, en outre, par les motifs que les rapports produits en contre-expertises ont expliqué par des faits scientifiques reconnus les erreurs graves et les conclusions hâtives formulées par le Docteur B. et par le Docteur E. ; que des fiches de traçabilité ont prouvé la haute qualité du matériau céramique employé ; que les propos critiqués ont été tenus par le
Docteur DIEVART et non par le Docteur D. ; que la qualité des soins en cause a été prouvée et que le tarif était justifié ; que le conseil départemental s’est érigé en juge et partie et n’avait pas à critiquer les termes employés par un avocat qui bénéficie d’une immunité juridictionnelle ; que les observations du conseil départemental doivent donc être écartées ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le décret n° 2007-434 du 25 mars 2007 relatif au fonctionnement et à la procédure disciplinaire des conseils de l’Ordre des médecins, des chirurgiens-dentistes, des sages-femmes, des pharmaciens, des masseurs-kinésithérapeutes et des pédicures-podologues et modifiant le code de la santé publique (dispositions réglementaires) ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu, en audience publique, le rapport du Docteur VUILLAUME, les observations du
Docteur D., assistée de Maître QUEMOUN, avocat et les observations du Docteur B., assisté de Maître
WENGER, avocat ;
- le conseil départemental de l’Ordre de Paris, dûment convoqué, ne s’étant pas fait représenter ;
Considérant qu’il résulte des pièces du dossier que la société d’assurance « (…) », qui a conclu avec la société (…) un contrat d’assurance de groupe couvrant les frais de santé des salariés de cette société, a demandé au Docteur A.B. de lui donner son avis sur les notes d’honoraires établies par le
Docteur C.D. à l’occasion des soins donnés par celle-ci à six salariés de ladite société ; que le
Docteur B. a remis le 20 mars 2004 ses conclusions à la société d’assurance ; que celle-ci a le 5 mai 2004 déposé une plainte avec constitution de partie civile à l’encontre du Docteur D. ;
Considérant que le Docteur D. reproche au Docteur B. les erreurs et fausses affirmations contenues, selon elle, dans le rapport de celui-ci, critique le fait que ce rapport ait été établi sans qu’elle soit interrogée, invoque à l’appui de ses griefs l’avis d’un certain nombre de praticiens, dénonce le caractère prétendument calomnieux de ce rapport et soutient que le Docteur B. a été l’instigateur de la plainte pénale déposée contre elle, plainte qui, en définitive, a été conclue par un non-lieu ;
Considérant qu’aux termes de l’article R.4127-259 du code de la santé publique : « Les chirurgiensdentistes doivent entretenir entre eux des rapports de bonne confraternité (…) », qu’aux termes de l’article R. 4127-261 du même code : « (…) Il est interdit de calomnier un confrère, de médire de lui 2.

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DE L’ORDRE DES CHIRURGIENS-DENTISTES 16 rue Spontini – 75116 PARIS (…) » et qu’aux termes de l’article R.4127-213 dudit code, relatif aux devoirs généraux des chirurgiens-dentistes : « Il est interdit d’établir un rapport tendancieux (…) » ;
Considérant que les dispositions précitées n’ont pas pour but et ne sauraient avoir pour effet d’interdire à un chirurgien-dentiste de porter, à la demande d’une entreprise d’assurance, un avis sur des soins dont celle-ci est appelée à contribuer au règlement ; qu’il ne peut, par suite, être retenu déontologiquement à l’encontre du Docteur B. le fait d’avoir émis des critiques, quelles que soient leur pertinence, sur les actes réalisés par la requérante ; que le Docteur B. n’avait pas à consulter le Docteur D. avant d’émettre son opinion ; que la société d’assurance était libre de donner à l’avis technique qu’elle avait recueilli du Docteur B. les suites qu’elle désirait et qu’il ne peut, en tout état de cause, être fait grief à celui-ci du dépôt par cette société d’une plainte pénale ; que si le Docteur D. a exprimé son désaccord sur le rapport du Docteur B., elle n’établit pas par ses affirmations, d’ailleurs en partie outrancières, et par l’ensemble des documents qu’elle produit que ce rapport aurait eu, à son égard, un caractère calomnieux ; qu’elle n’est pas fondée, par suite, à soutenir que c’est à tort que, par la décision attaquée, les premiers juges ont rejeté sa plainte ; qu’il y a lieu, en conséquence, de rejeter sa requête ;
- Sur les frais exposés par le Docteur B. :
Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de condamner le Docteur D., sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, à payer au
Docteur B. la somme de 3 000 € au titre des frais exposés par lui ;
- Sur la demande du Docteur B. tendant à ce que le Docteur D. soit condamnée à lui payer la somme de 2 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive :
Considérant qu’il n’y a pas lieu de donner suite à une telle demande ;
DECIDE :
Article 1er :

La requête du Docteur C.D. est rejetée.

Article 2 :

Le Docteur C.D. est condamnée à verser au Docteur A.B. la somme de 3 000 € sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 :

Les conclusions du Docteur A.B. tendant à ce que le Docteur C.D. soit condamnée à lui payer 2 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive sont rejetées.

Article 4 :

La présente décision sera notifiée :
- au Docteur A.B., chirurgien-dentiste,
- à Maître WENGER, avocat,
- au Docteur C.D., chirurgien-dentiste,
- à Maître QUEMOUN, avocat,
- au conseil départemental de l’Ordre de Paris,
- à la chambre disciplinaire de première instance de l’Ordre d’Ile-de-France,
- au conseil national de l’Ordre,
- au ministre chargé de la santé,
- au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris,
- au directeur de l’ARS d’Ile-de-France.

Délibéré en son audience du 7 novembre 2013, où siégeaient Monsieur de VULPILLIÈRES, conseiller d’Etat honoraire, président, les Docteurs BIAS, LUGUET, ROULLET RENOLEAU, VOLPELIÈRE et VUILLAUME, chirurgiens-dentistes, membres de la chambre disciplinaire nationale.
Décision rendue publique par affichage le 9 décembre 2013.
3.

CHAMBRE DISCIPLINAIRE NATIONALE
DE L’ORDRE DES CHIRURGIENS-DENTISTES 16 rue Spontini – 75116 PARIS
LA GREFFIERE de la chambre disciplinaire nationale de l’Ordre des chirurgiens-dentistes
LE CONSEILLER D’ETAT (H)
Président de la chambre disciplinaire nationale de l’Ordre des chirurgiens-dentistes
J.F. de VULPILLIERES
C. BOURGOUIN
La République mande et ordonne au ministre chargé de la santé en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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