Conseil de l'Ordre national des masseurs-kinésithérapeutes, Chambre Disciplinaire Nationale, 21 mai 2014, n° 013-2013

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
ONMK, ch. disciplinaire nationale, 21 mai 2014, n° 013-2013
Numéro(s) : 013-2013
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Sur les parties

Texte intégral

ORDRE NATIONAL DES MASSEURS-KINESITHERAPEUTES
CHAMBRE DISCIPLINAIRE NATIONALE
N°013-2013 Mme P. c. M. D.
Rapporteur: M. François Ducros
Audience publique du 6 mai 2014
Décision rendue publique par affichage le 21 mai 2014
Vu la requête, enregistrée le 6 mai 2013 au greffe de la chambre disciplinaire nationale de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes, présentée pour Mme P., masseur-kinésithérapeute exerçant (…), par Me Lionel Budieu, 15 rue Alexandre Mari, 06300 Nice ; elle demande que soit annulée la décision de la chambre disciplinaire de première instance de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes des régions Provence-Alpes-Côte d’Azur et Corse du 4 avril 2013 en tant qu’elle lui inflige la peine disciplinaire d’avertissement ; elle demande également que M. D. soit condamné à lui verser la somme de 3000 euros au titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et que soit mis à la charge de M. D. le versement de la somme de 3000 euros au titre des frais irrépétibles ;
Elle soutient, après avoir rappelé l’historique de ses relations conflictuelles avec M. D., que, si la décision attaquée a, à juste titre, déclarée irrecevable l’intervention du conseil départemental de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes du Var, elle aurait dû rejeter les prétentions de M. D. pour défaut d’intérêt à agir ; qu’en effet, reconnaître la recevabilité des demandes de M. D. revient à reconnaître le droit pour tout praticien de saisir la chambre disciplinaire à raison des relations entre un autre praticien et sa propre patientèle, ce qui est proscrit par le code de la santé publique qui n’autorise que les revendications formées au titre d’un litige opposant deux praticiens ou un patient à son praticien ; que c’est à tort que M. D.
invoque dans sa plainte l’article R.4321-135 du code de la santé publique et que la chambre disciplinaire de première instance a omis de statuer sur la réclamation de M. D. du chef de la prétendue interdiction d’exercer qu’aurait provoquée Mme P. en demandant en justice le respect de la clause de non-concurrence ; que la plainte du conseil départemental de l’ordre est mal fondée ; que les attestations sur lesquelles s’est fondée la chambre disciplinaire de première instance sont contestées par Mme P. ; que, surtout, les propos prétendument visés ne sauraient être assimilés aux faits de dénigrement prévus par le code de la santé publique ; que la demande de M. D. est abusive ;
Vu la décision attaquée ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 17 juin 2013, présenté pour M. D., exerçant (…), par Me Roberto Do Nascimento, « Le Tertia II », 5, rue Charles Duchesne, 13851 Aix en Provence cedex 03 ; il conclut au rejet de la requête d’appel, à la confirmation de la décision de la chambre disciplinaire de première instance de l’ordre des masseurskinésithérapeutes des régions Provence-Alpes-Côte d’Azur et Corse en ce qu’elle admet la recevabilité de la demande de M. D. et en ce qu’elle condamne Mme P. du chef de dénigrement, à la condamnation de Mme P. à une peine d’interdiction d’exercer, à ce que soit 1 mis à la charge de Mme P. le versement de la somme de 4000 euros sur le fondement de l’article L.761-1 du code de justice administrative et à ce qu’elle soit condamnée aux dépens;
Il soutient, après avoir rappelé l’historique de ses relations avec Mme P., que, contrairement aux allégations de cette dernière, sa demande ainsi que celle du conseil départemental de l’ordre sont recevables ; que, notamment sa plainte est très précisément motivée et assortie d’attestations ; qu’en dehors de ce qui a été sanctionné par la chambre disciplinaire de première instance, Mme P. a commis de nombreux manquements au regard du code de la santé publique qui ne sont pas vraiment contestés et qui doivent être sanctionnés;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 19 août 2013, présenté pour Mme P. par Me
Lionel Budieu, qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ; elle soutient en outre que, par décision du 22 mai 2013, la chambre disciplinaire de première instance de Lorraine a prononcé à l’encontre de M. D., en raison de la méconnaissance du contrat de collaboration, une peine disciplinaire d’avertissement ; que, sur les 25 attestations que produit M. D., seules trois d’entre elles concernent la relation de collaboration et les prétendus actes de dénigrement retenus par la chambre disciplinaire de première instance ; que les attestations de Mme M. émanent de la secrétaire de Mme P., qui a été licenciée pour faute grave requalifiée en licenciement pour faute simple par le conseil des prud’hommes de Draguignan, ce qui fait peser un doute sur la sincérité de ces attestations ; que la décision de la chambre disciplinaire de première instance ne précise pas les attestations sur lesquelles elle se fonde, ni les propos retenus comme étant du dénigrement ; qu’après avoir repris toutes les pièces fournies par M. D., Mme P. retient seulement trois attestations qu’elle avait d’ailleurs contestées et qui rapportent des propos qui ne peuvent être qualifiés de dénigrement ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu l’article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience,
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 6 mai 2014 :
- M. François Ducros, en son rapport ;
- Les observations de Me Lionel Budieu pour Mme P.;
- Les observations de Me Roberto Do Nascimento pour M. D. ;
Me Budieu ayant été invité à reprendre la parole en dernier ;
Après en avoir délibéré, 1- Considérant qu’à la suite de la transmission de la plainte déposée le 8 février 2012 par M. D. à l’encontre de Mme P. par le conseil départemental de l’ordre des masseurskinésithérapeutes du Var, qui s’y est associé, la chambre disciplinaire de première instance de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes des régions Provence-Alpes-Côte d’Azur et Corse a, par décision du 4 avril 2013, écarté les fins de non-recevoir soulevées par Mme P., rejeté les conclusions tendant à la mise en jeu de la responsabilité disciplinaire de Mme P. sur le fondement des articles R.4321-53, R.4321-54, R.4321-59, R.4321-67, R.4321-77, R.4321-80, 2 R.4321-88, R.4321-89, R.4321-114, R.4321-124, R.4321-125, R.4321-126 du code de la santé publique ainsi que sur le fondement des articles R.4321-110 et R.4321-135 du même code ; qu’en revanche, elle a retenu un manquement aux dispositions de l’article R.4321-99 du code de la santé publique, et a, en conséquence, infligé à Mme P. la peine disciplinaire d’avertissement et a mis à sa charge le versement d’une somme de 1000 euros au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative ; que, dans cette mesure, Mme P. fait appel de cette décision ;
Sur la régularité de la décision attaquée 2- Considérant que, contrairement à ce que soutient Mme P., la décision de la chambre disciplinaire de première instance répond au moyen tiré du non-respect de l’article R.4321135 du code de la santé publique pour d’ailleurs le rejeter;
3- Considérant que si Mme P. entend soutenir que la décision attaquée est insuffisamment motivée en ce qu’elle ne vise pas les attestations retenues, ni ne cite les propos considérés comme du dénigrement, ni en quoi les propos sont entachés de dénigrement, il ressort de cette décision que la réponse apportée par la chambre qui n’avait pas à citer les propos retenus est suffisamment précise pour que le juge d’appel puisse exercer son office ;
Sur la recevabilité de la demande de première instance 4- Considérant que la chambre disciplinaire de première instance a rejeté comme irrecevable la demande du conseil départemental de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes du
Var ; que le moyen tiré de ce que cette demande est irrecevable est donc dénué d’objet ;
5- Considérant qu’ainsi qu’il a été rappelé ci-dessus, la décision attaquée a seulement retenu la violation de l’article R.4321-99 du code de la santé publique ; que les moyens tirés de l’irrecevabilité de la plainte ne sont donc recevables qu’au regard de ce motif ; que la décision attaquée étant fondée uniquement sur les rapports entre praticiens, les moyens tirés de ce que la plainte est irrecevable pour défaut d’intérêt à agir en ce que nul ne plaide par procureur et que la chambre n’est pas compétente pour statuer sur un litige entre un praticien et un autre praticien au titre de sa relation avec les malades ne peuvent qu’être rejetés ;
6- Considérant enfin que, contrairement à ce que soutient Mme P., la plainte de M. D.
comporte des conclusions, des moyens et des pièces ; qu’elle est ainsi recevable dans la mesure où l’a jugé la chambre disciplinaire de première instance ;
Sur le bien-fondé de la décision 7- Considérant qu’aux termes de l’article R.4321-99 du code de la santé publique :
« Les masseurs-kinésithérapeutes entretiennent entre eux des rapports de bonne confraternité.
Il est interdit à un masseur-kinésithérapeute d’en calomnier un autre, de médire de lui ou de se faire l’écho de propos capables de lui nuire dans l’exercice de sa profession (…)» ;
8- Considérant qu’à l’appui de sa plainte, M. D. a produit plusieurs attestations (pièces n°4, 5, 29 et 32) émanant de patients qui rapportaient des propos que leur avait tenus Mme P.
et qui mettaient en cause son comportement professionnel ; que devant la chambre disciplinaire de première instance, Mme P. n’a pas contesté ces attestations ; que si devant la 3 chambre disciplinaire nationale, elle met en cause la fiabilité de certaines de ces attestations et tente d’en minimiser la portée, elle le fait de façon imprécise, les faits exposés dans ces attestations n’étant pas vraiment contestés ; que les nouvelles pièces produites par Mme P. à l’appui de son mémoire en réplique (pièces 52, 53 et 54) sont rédigées en termes trop généraux pour remettre en cause les propos rapportés dans les attestations produites par M. D.; qu’ainsi, les propos figurant dans ces attestations doivent être considérés comme établis ;
que, compte tenu de leur teneur, ils constituent une violation des dispositions sus rappelées comme l’a, à bon droit, jugé la chambre disciplinaire de première instance ;
9- Considérant qu’ainsi qu’il a été rappelé, la chambre disciplinaire de première instance a prononcé la peine de l’avertissement ; que, contrairement aux conclusions de M. D., qui, en matière disciplinaire, est irrecevable à présenter un recours incident, la chambre disciplinaire nationale ne peut retenir à l’encontre de Mme P. une peine plus lourde que celle retenue par la chambre disciplinaire de première instance ;
10- Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ce qui précède que c’est à bon droit que la chambre disciplinaire de première instance a retenu la peine disciplinaire de l’avertissement ;
Sur les conclusions de Mme P. tendant à la condamnation de M. D. au paiement de dommages-intérêts 11- Considérant que les conclusions indemnitaires ne peuvent être présentées qu’à titre reconventionnel dans l’instance ouverte par l’action principale dont elles ne sont pas détachables ; qu’ainsi, les conclusions présentées par Mme P. devant le juge d’appel et tendant à l’octroi de dommages-intérêts en raison de la procédure de première instance ne sont pas recevables ;
Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L.761-1 du code de justice administrative 12- Considérant qu’aux termes de l’article 75-1 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991, applicable en l’espèce, faute pour les dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative d’avoir été étendues aux masseurs-kinésithérapeutes : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation (…)» ;
13- Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. D. la somme que demande Mme P. au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de mettre à la charge de Mme P. la somme que demande M. D. au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Sur les dépens 14- Considérant qu’aux termes de l’article L.4126-3 du code de la santé publique :
« Les dépens sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances de 4 l’affaire justifient qu’ils soient partagés entre les parties» ; que, dans les circonstances de l’affaire, il n’y a pas lieu de mettre les dépens à la charge de Mme P. ;

DECIDE :
Article 1 :
La requête de Mme P. est rejetée.
Article 2 :
Les conclusions de M. D. tendant à l’aggravation de la sanction, à l’application des dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative et à la condamnation de Mme P. aux dépens sont rejetées.
Article 3 :
La présente décision sera notifiée à Mme P., à M. D., à Me Budieu, à Me Do Nascimento, au conseil départemental de l’Ordre des masseurs-kinésithérapeutes du Var, au procureur de la
République près le tribunal de grande instance de Draguignan, au directeur général de l’Agence régionale de santé de Provence-Alpes-Côte d’Azur, à la chambre disciplinaire de première instance de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes des régions Provence-Alpes-Côte d’Azur et Corse, au conseil national de l’Ordre des masseurs-kinésithérapeutes et au Ministre chargé de la santé.

Ainsi fait et délibéré par Mme CAMGUILHEM, Conseillère d’Etat honoraire, Présidente et Mme TURBAN, MM. DUCROS, RABEJAC, DEBIARD, PELCA, membres assesseurs de la chambre disciplinaire nationale.

Anne-Marie CAMGUILHEM
Conseillère d’Etat honoraire
Présidente
Aurélie VIEIRA
Greffière
La République mande et ordonne au ministre chargé de la santé en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision 5

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Conseil de l'Ordre national des masseurs-kinésithérapeutes, Chambre Disciplinaire Nationale, 21 mai 2014, n° 013-2013