Conseil de l'Ordre national des pharmaciens, rapport du rapporteur, Affaire 445 - Tenue de l'officine, n° 1007-D

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Sur la décision

Référence :
ONPH

Texte intégral

Affaire Mme A
Le rapporteur
Document n°1007-R
Le 11 mars 2010, a été enregistrée au greffe du conseil de l’Ordre des pharmaciens de la région
Rhône-Alpes, une plainte formée par le Directeur régional des affaires sanitaires et sociales (DRASS) de Rhône-Alpes, à l’encontre de Mme A, titulaire de l’officine « PHARMACIE A », sise … (ANNEXE I).

I – ORIGINE DE LA PLAINTE
Le DRASS a porté plainte contre Mme A suite aux inspections réalisées dans l’officine de cette dernière les 1er et 23 juillet 2009. Selon le plaignant, ces inspections ont révélé le non respect des dispositions suivantes :
- les articles R.4235-10, R.4235-12 du code de la santé publique (CSP) et L.213-1 du Code de la consommation : commercialisation d’un lait infantile périmé ;
- les articles R.4235-26 et R.5125-36 du CSP : emploi et déclaration d’une étudiante en 6e année de pharmacie validée mais non diplômée en tant que pharmacien adjoint ;
- les articles R.4235-3, R.4235-10, R.4235-13, R.5132-9 et L.4241-4 du CSP : emploi des apprenties lorsque la pharmacie était de garde et transcription par celles-ci des délivrances, notamment des substances vénéneuses, sur les ordonnanciers ;
- l’article R.4235-12 du CSP : mauvaise tenue de l’officine (stockage de coton et compresses dans une cave « sale, empoussiérée », préparatoire non conforme au paragraphe 1.1.10 des
Bonnes pratiques de préparation et utilisé pour un usage alimentaire, encombrement des pièces et des couloirs, détention de nombreuses matières premières périmées ou interdites telles que du sirop de chloral) ;
- les articles R.4235-12 et R.5125-45 du CSP et le paragraphe 3-4.2.7 des Bonnes pratiques de préparation : défaut d’inscription sur le registre des préparations des mentions réglementaires, notamment celles relatives au fournisseur des matières premières, au numéro de lot de ces dernières, à l’adresse des prescripteurs et des patients, et à l’identité de la personne ayant réalisé la préparation ;
- les articles R.4235-12 et R.5132-10 du CSP : défaut d’inscription systématique sur l’ordonnancier informatique de l’identité des prescripteurs hospitaliers, ainsi que de l’adresse des patients ;
- article R.5132-12 du CSP : délivrance, en une seule fois, des médicaments relevant des listes 1 et 2 pour une durée pouvant aller jusqu’à treize mois de traitement.
II – PREMIERE INSTANCE
Le rapport de première instance en date du 6 juin 2011 figure en ANNEXE II.
Dans sa séance du 16 juin 2011, le conseil de l’Ordre des pharmaciens de la région Rhône-Alpes a décidé de traduire Mme A en chambre de discipline (ANNEXE III).
Lors de l’audience du 31 mai 2012, la chambre de discipline du conseil régional de l’Ordre des pharmaciens de Rhône-Alpes a prononcé la sanction de l’interdiction d’exercer la pharmacie pendant une durée de huit semaines dont 6 semaines avec sursis à l’encontre de Mme A (ANNEXE IV).

Ordre national des pharmaciens 1 III – APPEL
Cette décision a été notifiée à Mme A le 21 juin 2012. Cette dernière en a interjeté appel et sa requête a été enregistrée au greffe du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens le 6 juillet 2012 (ANNEXE
V).
La requérante indique que les conclusions du rapport d’inspection n’ont pas tenu compte des arguments et justificatifs qu’elle a fournis en réponse aux manquements relevés par les inspecteurs. Mme A considère que la plainte du DRASS est infondée, dès lors qu’elle a apporté des mesures correctives aux manquements reprochés. Elle précise qu’au jour de l’audience, elle n’était pas en mesure d’assurer utilement sa défense car elle venait de subir un accident vasculaire et une hospitalisation consécutive d’une semaine.
Sur l’embauche et la déclaration en tant que pharmacien adjoint d’une étudiante en 6e année de pharmacie validée mais non diplômée, elle justifie ce manquement par sa vulnérabilité psychologique au moment des faits, due à la perte d’un proche et de son ancienne préparatrice. Elle affirme qu’en tout état de cause, une violation de l’article R.5125-36 du CSP ne saurait lui être reprochée, dès lors que ces dispositions ne visent que la capacité du pharmacien adjoint à titre personnel.
Sur la délivrance de médicaments par une apprentie, elle affirme que ce fait n’est pas avéré. Il s’agirait, selon elle, d’une erreur informatique n’ayant aucun rapport avec la délivrance effective du médicament.
Sur les manquements relatifs à la tenue des locaux de l’officine, Mme A estime que l’article L.423512 du CSP, qui vise « expressément les locaux des officines des laboratoires d’analyse de biologie médicale, et d’une manière générale les locaux spécifiques adaptés aux activités », ne lui est pas applicable. Elle ajoute que les faits reprochés concernent un local « accessoire » à l’officine auquel le public n’a pas accès. Elle précise avoir réaménagé ce local suite à l’inspection.
Sur la détention de produits périmés, elle indique avoir conservé les matières premières laissées par son prédécesseur ne sachant pas où les stocker. La détention de lait infantile périmé serait due à la défaillance de l’un de ses employés. Elle considère qu’il s’agit d’une erreur ponctuelle qui ne saurait caractériser la tromperie au sens de l’article L.213-1 du Code de la consommation.
S’agissant de la tenue des registres, elle affirme que leur mauvaise tenue est imputable à une erreur informatique. Elle précise que l’apprentie ouvre le dossier informatique du client sous son code opérateur mais que la délivrance du médicament est assurée par le pharmacien. Elle ajoute que le listing des activités entreprises, versé aux débats, justifie les activités réalisées effectivement par l’apprentie.
S’agissant enfin de la délivrance, en une seule fois, de médicaments relevant des listes 1 et 2 pour une durée pouvant aller jusqu’à treize mois de traitement, Mme A précise avoir délivré ces spécialités dans le respect de la prescription établie par le médecin et ce, dans le seul intérêt du malade pour éviter à ce dernier une interruption du traitement.
Par un mémoire en réponse versé au dossier le 31 août 2012 (ANNEXE VI), le directeur général de l’ARS de Rhône-Alpes indique que Mme A ne peut se dégager de toute responsabilité s’agissant de l’embauche d’une étudiante en 6e année de pharmacie validée mais non diplômée en tant que pharmacien adjoint. Il ajoute que les faits reprochés sont constitutifs d’exercice illégal de la pharmacie et de complicité d’exercice illégal de la pharmacie. S’agissant de la tenue des locaux, il indique verser aux débats des photographies prises lors de l’inspection et communiquées dans le rapport contradictoire démontrant la véracité des faits reprochés. S’agissant de la présence de lait infantile périmé, il rappelle que les inspecteurs ont constaté la présence de 6 boites périmées dans les stocks (pour certaines la péremption remontait à plus d’un an), alors même qu’une patiente avait formulé une réclamation à ce sujet. S’agissant des autres griefs, le directeur général considère que l’acte d’appel de Mme A n’apporte aucune précision nouvelle.
Le 5 novembre 2012, Mme A a versé aux débats un mémoire tenant aux mêmes fins et par les mêmes moyens que ceux précédemment développés (ANNEXE VII). S’agissant de l’embauche d’une
Ordre national des pharmaciens 2 étudiante en tant que pharmacien adjoint, elle précise qu’il s’agit d’un concours de circonstances et qu’elle n’a jamais eu l’intention d’enfreindre la réglementation applicable en la matière. Elle indique que cette étudiante a eu recours à la procédure dérogatoire prévue par les textes en obtenant une autorisation de remplacement. Elle n’a toutefois pas respecté son engagement de soutenir sa thèse pour des raisons personnelles qui ont convaincues Mme A de ne pas mettre un terme à son contrat. Elle considère que la violation des dispositions de l’article R.5125-36 du CSP, qui ne visent que la capacité du pharmacien adjoint à titre personnel, ne peut lui être reprochée, les textes étant d’application stricte.
La complicité d’exercice illégal de la pharmacie ne peut, selon elle, être retenue à son encontre, dès lors que l’élément intentionnel constitutif de cette infraction fait défaut.
J’ai reçu, le 22 avril 2013, Mme A assistée de son conseil, au siège du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens (ANNEXE VIII). Cette dernière indique s’être laissée dépasser par des événements familiaux et personnels graves. Elle rappelle que Mlle B, étudiante en 6e année, a exercé un an et demi après l’échéance de son certificat de remplacement et qu’une rupture conventionnelle de son contrat de travail a eu lieu suite à la deuxième inspection. Elle indique avoir mentionné chaque année, lors de la déclaration obligatoire de son chiffre d’affaires auprès de l’inspection, que cette étudiante n’avait pas encore soutenu sa thèse. Elle précise ne pas avoir mis fin au contrat de cette dernière par souci d’humanité et en aucun cas pour en tirer un avantage financier. Elle précise que, contrairement à ce qui est indiqué dans la décision de la chambre de discipline du conseil régional, les caves de son officine n’étaient pas couvertes de toiles d’araignée. Elle ajoute que tous les articles de conditionnement sont nettoyés deux fois avant leur utilisation. Elle exprime des regrets s’agissant de la présence de produits périmés dans les stocks de l’officine. Elle rappelle que l’employée chargée d’inventorier les produits, était atteinte d’une maladie chronique invalidante. Pour éviter que ces faits ne se reproduisent, elle affirme avoir mis en place les éléments de contrôle suivants :
- logiciel d’alerte Pharmagest LGPI ;
- inventaire de l’ensemble du stock ;
- contrôle physique et effectif à l’entrée de chaque produit ;
- procédure de contrôle lors de chaque délivrance. Mme A verse aux débats les pièces suivantes :
- son livret de famille ;
- une attestation ASSEDIC mentionnant le décès de Mme D, précédemment adjointe de Mme A ;
- une attestation sur l’honneur émise par M. E dans le cadre de la procédure dérogatoire pour prise en charge des médicaments en cas de séjour à l’étranger ;
- un courrier électronique de Mme F en date du 3 avril 2013 indiquant que Mlle B n’a pas soutenu sa thèse.
Compte tenu de ces éléments, il vous appartient de dire la suite devant être réservée à l’appel interjeté par Mme A dans cette affaire.

30 avril 2013
Le rapporteur
Signé
Ordre national des pharmaciens 3

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