Conseil de l'Ordre national des pharmaciens, rapport du rapporteur, Affaire 60 - Partie à l'instance, n° 148-D

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
ONPH

Texte intégral

Document n°148-R
AFFAIRE M. X
SELAS PHARMACIE X
Rapporteur : M. R
Le 6 décembre 2005, a été enregistrée au siège du conseil régional de l’Ordre des pharmaciens des
Pays de Loire une plainte à l’encontre de M. X, associé professionnel en exercice de la SELAS
Pharmacie X, sise …. Cette plainte rédigée sur le papier à en-tête du conseil régional de l’Ordre des pharmaciens a été formée par M. M, conseiller ordinal. M. M indiquait agir sur délégation de M. LE
RESTE, président du conseil régional, qui lui aurait, par lettre en date du 28 novembre 2005, donné pouvoir de déposer plainte. Une plainte identique a été enregistrée le même jour visant la SELAS
Pharmacie X (ANNEXES I et I bis).
I – ORIGINE DES PLAINTES
Agissant au nom de l’Ordre, M. M, a, sous contrôle d’huissier, procédé, le 28 octobre 2005, à l’achat à la Pharmacie X d’un lot de 2 boîtes de NUROFEN 200 mg ® « scotchées » ensemble et portant une étiquette « Promotion Lot de 2 ». A l’entrée de l’officine, M. M a photographié la mention «changement de propriétaire » figurant de manière répétée et très voyante sur toute la façade de la
Pharmacie ainsi que des panneaux affichant en vitrine le message suivant «Par 2, c’est moins cher».
Ces panneaux portaient l’enseigne de la Pharmacie X, mais aussi celle de la Pharmacie Y. Considérant que ces pratiques publicitaires ne respectaient pas les dispositions du code de la santé publique en la matière et constituaient, de plus, une incitation à la surconsommation de médicaments, M. M a visé dans sa plainte des infractions aux articles L. 5122-2, L 5122-6, L 5122-8, R 5122-3, R 5122-4, R 5125-28, R 5125-29, R 4234-3, R 4235-10, R 4235-22, R 4235-30, R 4235-34, R 4235-48, R 4235-52,
R 4235-53, R 4235-58, R 4235-64 et R 4235-65 du code de la santé publique.
II – PREMIÈRE INSTANCE
Le conseiller rapporteur a été désigné le 6 décembre 2005 par le président du conseil régional. En mars 2006, suite à une communication par le président du conseil régional de l’Ordre des pharmaciens, deux nouveaux griefs ont été ajoutés par le rapporteur à ceux faits à M. X dans les plaintes initiales. L’un concernait l’existence d’une carte de fidélité proposée dans l’officine de M. X, l’autre, l’usage de sacs remis à la clientèle sur lesquels figuraient, d’un côté, les coordonnées et les heures d’ouverture de la
Pharmacie X et sur l’autre, celles de la Pharmacie Y (ANNEXE II).
Le 3 mai 2006, M. X s’étonnait qu’il lui soit reproché, à propos de ces sacs, ce que l’on semblait tolérer pour les pharmacies mutualistes de … et de …, mais il s’engageait à ne plus faire fabriquer lesdits sacs. Il précisait que les cartes privilèges distribuées par les laboratoires ne concernaient que des produits hors monopole et faisait part, constat d’huissier à l’appui, des mesures correctives prises, à savoir la suppression des panneaux publicitaires litigieux et l’abandon de la pratique de vente de médicaments par lot (ANNEXE III).
Le rapporteur a recueilli les explications de M. X le 12 janvier 2006 (ANNEXE IV), ainsi que le témoignage de M. M, plaignant, sur les conditions dans lesquelles lui avait été délivré, à la Pharmacie
X, un lot de 2 NUROFEN 200 mg ® (ANNEXE V). Son rapport figure en ANNEXE VI.
Dans sa séance du 18 mai 2006, le conseil régional de l’Ordre des pharmaciens des Pays de Loire a pris les décisions de traduire en chambre de discipline M. X et la SELAS Pharmacie X (ANNEXES
VII et VII bis).

L’audience disciplinaire ayant été initialement prévue pour le 25 octobre 2007, Me BARRET transmit, par télécopie, un mémoire dans l’intérêt de M. X et de la SELAS, le 23 octobre précédent (ANNEXE
VIII).
Le président de la chambre de discipline a alors pris une ordonnance de réouverture de l’instruction, repoussant la clôture de celle-ci au 28 décembre 2007 (ANNEXE IX).
Finalement la chambre de discipline du conseil régional de l’Ordre des pharmaciens des Pays de Loire a examiné ces affaires le 18 mars 2008. Par deux décisions séparées, mais rédigées en termes identiques, la sanction de l’interdiction d’exercer la pharmacie pour une durée de 5 jours avec sursis fut prononcée à l’encontre de M. X et de la SELAS Pharmacie X. Vous trouverez en ANNEXE X la décision prise à l’encontre de M. X.

III – APPEL
Ces décisions leur ayant été notifiées le 29 mars 2008, M. X et la SELAS Pharmacie X en ont interjeté appel. Leurs requêtes, datées du 11 avril 2008, ont été enregistrées au secrétariat du Conseil national le 16 avril suivant. Par souci de simplification, vous ne trouverez en annexe, lorsqu’elles sont identiques, que la photocopie des pièces extraites du dossier de M. X (ANNEXE XI). Comme il l’avait fait en première instance, le conseil des appelants soutient que la saisine de la chambre de discipline a été irrégulière, que la présence de l’auteur de la plainte, au sein de la formation qui avait décidé le renvoi devant la chambre de discipline, avait méconnu les stipulations de l’article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, le droit à un procès équitable et les droits de la défense, et que l’auteur de la plainte ne pouvait pas plus siéger au sein de la juridiction disciplinaire. Il considère, en effet, que M. M n’a jamais agi en sa seule qualité de pharmacien, mais uniquement au nom de l’Ordre, au titre de la délégation que lui a accordée M. LE
RESTE, président du conseil régional, lequel serait donc le véritable auteur de la plainte. A cet égard, le conseil de M. X et de la SELAS souligne que l’huissier dont le constat a été joint à la plainte a été requis par l’Ordre des pharmaciens représenté par M. M. En outre, ce serait de façon inopportune que la chambre de discipline aurait estimé que M. X n’établissait pas que la présence de M. LE RESTE au sein du conseil en phase administrative «aurait eu une influence sur le sens de la décision».
Un second moyen d’appel repose sur l’irrégularité des conditions dans lesquelles les preuves fondant les poursuites auraient été réunies :
« Il en est ainsi notamment du constat d’huissier établi par Me MAINGOT, en date du 28 octobre 2005 et de toutes les pièces annexées à ce constat, dont un ticket de caisse et des photographies montrant des devantures, enseignes ou étalages. En tête du constat d’huissier, figure l’information selon laquelle l’Officier ministériel a été requis par «l’Ordre des pharmaciens dont le siège est à Nantes (…), agissant poursuites et diligences de son représentant légal, et représenté ce jour par M. M, membre de Conseil régional.» …/… Pour écarter ce moyen d’annulation des preuves, la chambre de discipline, après avoir retenu implicitement que le constat d’huissier, qui avait servi de support à la procédure était entaché d’irrégularité, a jugé que cette circonstance ne faisait pas obstacle à ce qu’il constitue une pièce du dossier et soit retenu à titre d’information. Force est de constater, à la lecture de ces motifs, que la chambre de discipline a méconnu ses propres constatations. En effet, la chambre de discipline ne pouvait, à la fois, convenir de l’irrégularité du constat et n’en tirer aucune conséquence, tant il est vrai qu’au-delà de la terminologie, il n’existe aucune différence entre retenir une pièce à titre de preuve ou à titre d’information, pourvu qu’elle remplisse son office, à savoir emporter la conviction des juges. La distinction 2 opérée, à ce titre, par la juridiction qui ne tire aucune conséquence donc de l’irrégularité constatée, revêt pour cette raison un caractère illusoire. »
Un troisième moyen d’appel concerne l’extension faite par le rapporteur lui-même de la saisine en interrogeant M. M sur les conditions dans lesquelles lui avait été délivré le NUROFEN 200 mg ® et notamment sur l’absence de conseil lors de cette délivrance. Sur ce point, Me BARRET considère que :
«M. M ne pouvait être entendu comme témoin dès lors qu’il avait, par ailleurs, la qualité de mandataire du plaignant ; cette confusion entre le plaignant et le témoin rend d’autant plus suspectes les déclarations faites par celui-ci au rapporteur, que ces déclarations sont intervenues après qu’il ait été démontré par l’avocat du concluant (rapport p. 5) que les griefs articulés dans la plainte initiale n’étaient pas fondés, ce qui peut ou aurait pu justifier le besoin, de la part du plaignant, de soutenir de nouvelles accusations à partir de ses seules déclarations, par hypothèse incontrôlables, et dont le caractère de nouveauté, à ce stade de la procédure, conduit nécessairement à la suspicion.»
Sur le fond, il est soutenu que la pratique de prix bas, lorsque le prix des médicaments, est libre n’est pas en elle-même considérée comme une incitation à la consommation des médicaments et qu’il doit en être de même de la vente par lot dans certains cas. En l’espèce :
«Il ne semble pas discutable que le médicament « NUROFEN 200 mg » soit un médicament à prix libre dont la publicité est ainsi autorisée. La vente subordonnée de médicaments, ici par lot promotionnel de 2 boîtes, n’est prohibée par aucune réglementation, dès lors, naturellement que l’acquéreur demeure libre de n’acquérir qu’une boîte et de renoncer à la réduction corrélative de prix, et que ce prix, précisément, fait l’objet d’une information claire au profit du client. C’est pourquoi, pour mieux asseoir la plainte, l’auteur du rapport a échafaudé l’idée que la vente par lot de deux boîtes, ou bien pouvait être assimilée à une incitation à une surconsommation de médicaments, ou bien pouvait correspondre à la vente d’une boîte unique d’un médicament à dosage supérieur, lequel était, dès lors, soumis à prescription. Il est cependant impossible de considérer que la vente de 2 boîtes de NUROFEN 200 mg équivaudrait à la vente d’une boîtes de NUREFLEX 400 mg (soumis à prescription), au prétexte que la dose finale de la molécule vendue serait identique ; ou bien alors, cela reviendrait à condamner toute vente par un pharmacien de 2 boîtes de ce médicament, pratique qu’il est pourtant à chacun loisible de constater dans n’importe quelle pharmacie, rien n’interdisant, en effet, à tout pharmacien de vendre deux boîtes au même patient au cours de la même vente, que ce soit sous forme de lot ou non. Le grief, à cet égard, revêt même un caractère spécieux car c’est le raisonnement qui, en lui-même, est faux. Aucune réglementation ne conditionne la non prescription de ce médicament dosé à 200 mg au nombre de boîtes vendues. La notice contenue dans la boîte du médicament NUROFEN 200 mg, qui comporte 20 comprimés, mentionne expressément les démarches à effectuer si, en cas de douleurs, les symptômes à l’origine de la prise n’ont pas disparu après 5 jours. Par ailleurs, cette même notice comporte l’information que le patient peut prendre jusqu’à 6 comprimés par jour. Pour parvenir à atteindre la durée totale du traitement préconisé avant examen, il faut donc nécessairement 2 boîtes.
J’ai reçu le 15 décembre 2008 au siège du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens M. X, assisté de Me BARRET. Il m’a dit n’avoir rien à ajouter aux explications déjà fournies. Exprimant ses regrets sur la tournure prise par les évènements, il a déclaré ne jamais avoir souhaité être considéré comme un mauvais confrère, en insistant sur le fait qu’il avait cessé toutes les pratiques à l’origine de ce litige (ANNEXE XII).
3 Un mémoire au soutien des intérêts du président du conseil régional de l’Ordre des pharmaciens des
Pays de Loire a été enregistré le 20 mai 2009 (ANNEXE XIII). Dans celui-ci, Me BOSSELET réaffirme que le président du conseil régional n’est, en aucune façon, l’auteur des plaintes portées contre M. X et la SELAS Pharmacie X puisque celles-ci n’ont pas été formées par M. M «en sa qualité de conseiller ordinal», mais en son nom personnel. Il soutient que ces plaintes doivent être considérées comme régulières. En effet, selon lui :
« En vertu de l’article R 4234-1 du code de la santé publique, l’action disciplinaire contre un pharmacien peut être introduite par un pharmacien inscrit à l’Ordre ou même par un particulier. En conséquence, toute plainte déposée par un pharmacien ou par un particulier est régulière (CNOP – aff. … du 26 avril 1955 ; CNOP – aff. … et … du 15 octobre 1973). A fortiori, la plainte déposée par un conseiller ordinal l’est aussi ! L’appelant estime que le fait que M. M ait rédigé sa plainte sur un papier à lettre portant les mentions et sigles du conseil de l’Ordre confirme qu’il entendait agir au nom de l’Ordre. M. M a utilisé ce papier à lettre en sa qualité de conseiller ordinal et cette utilisation n’engage en rien l’Ordre. La plainte commence en ces termes : « Monsieur le Président : Je souhaite porter à votre connaissance … ».
Toute la plainte est d’ailleurs rédigée à la première personne du singulier et ne fait jamais référence à l’Ordre. Enfin, la plainte est signée « M. M, conseiller ordinal». M. M est donc l’unique auteur de la plainte qui a été déposée en sa qualité de conseiller ordinal. »
Il est également soutenu que le rapporteur était parfaitement en droit de ne pas se limiter au seul examen des faits dénoncés dans la plainte dans la mesure où il avait été informé de l’existence de nouveaux griefs et où ceux-ci avaient été formulés avec une précision suffisante pour permettre aux intéressés d’en apprécier la portée et de présenter utilement leurs observations en défense. Sur le fond,
Me BOSSELET relève que les faits à l’origine des poursuites disciplinaires sont bien établis et ont été reconnus par les appelants eux-mêmes puisqu’ils avaient fait constater par huissier la cessation de la vente de NUROFEN 200 mg ® par lot de 2 et l’enlèvement des panneaux publicitaires litigieux. Au sujet de la vente par lot du NUROFEN ®, il entend souligner que :
« … par arrêté du ministre chargé de la santé, du 8 mars 1972, pris en application des dispositions de l’article R 5132-1, l’IBUPROFÈNE a été inscrite à la section II des tableaux des substances vénéneuses ; que, par arrêté du ministre chargé de la santé, pris en application des dispositions précitées de l’article R 5132-2, la quantité maximum d’IBUPROFÈNE remise au public a été fixée à 6 gr pour ses formes solides ; qu’il résulte de ce qui précède que les délivrances au public d’IBUPROFÈNE, sous forme solide, sont exonérées de délivrance sur prescription dès lors qu’elles ne dépassent pas la quantité maximale de 6 gr. » et, qu’à contrario, la promotion du lot de 2 boîtes de NUROFEN 200 mg ®, entraînant nécessairement la remise au public, en une seule fois de 8 mg d’IBUPROFÈNE, ne pouvait se faire en l’absence de présentation d’une ordonnance.
Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, il vous appartient de dire la suite devant être réservée aux appels interjetés dans cette affaire par M. X et par la SELAS Pharmacie X.

23 juin 2009
Le rapporteur 4

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Textes cités dans la décision

  1. Code de la santé publique
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