Conseil de l'Ordre national des pharmaciens, rapport du rapporteur, Affaire 90 - Absence à l'audience du pharmacien convoqué, n° 222-D

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
ONPH

Texte intégral

AFFAIRE X
RAPPORTEUR – M. R
Document n°222-R
Le 17 mai 2006, a été enregistrée au siège du conseil régional de l’Ordre des pharmaciens de la région Provence, Alpes, Côte d’Azur une plainte formée par le directeur des affaires sanitaires et sociales de la même région à l’encontre de M. X, titulaire d’une officine sise … (ANNEXE I).
I. ORIGINE DE LA PLAINTE
A la suite d’un signalement de la Caisse primaire d’assurance maladie du …, la pharmacie de M. X a subi des inspections respectivement les 15 et 17 septembre 2004. Le signalement de la
CPAM était consécutif à une dénonciation concernant le recyclage par M. X de médicaments non utilisés (MNU) pour préparer les traitements de patients résidant en maison de retraite après reconditionnement sous blister au moyen d’un appareil de type MANREX ®.
Les inspections ont permis d’établir que la préparation des piluliers pour les résidents des maisons de retraite s’effectuait notamment en utilisant les excédents de boîtes de médicaments déjà vendues lors du retour à l’officine desdits médicaments. Le plaignant a retenu dans sa plainte les faits suivants :
« Un stock important de médicaments (613 boîtes) a été trouvé dans des placards du préparatoire de la pharmacie. Un nombre significatif de spécialités pharmaceutiques présentait une anomalie sur la vignette :
vignette estampillée ou absente. Des anomalies dans le conditionnement (numéros de lots mélangés, nombre de comprimés supérieurs à la capacité de la boîte), des mentions manuscrites de posologie ou des noms de patients sont observées sur plusieurs boîtes de médicaments. L’origine de ces médicaments ne peut être que frauduleuse : la seule explication est un détournement de la collecte Cyclamed approvisionnée par des médicaments retournés à la pharmacie par les clients et les maisons de retraite. Ces médicaments ont déjà été vendus et facturés à l’assurance maladie une première fois. L’analyse des bordereaux de commande transmis par la CPAM du … accrédite fortement l’hypothèse que les médicaments destinés à la collecte Cyclamed sont entrés aussi dans le stock informatique de la pharmacie comme une commande ordinaire. La remise en vente et la mise sous blisters de médicaments déjà vendus une première fois et destinés à la collecte Cyclamed est contraire aux dispositions des articles R 4235-2, R 4235-9, R 4235-10 et R 4235-13 du code de la santé publique. Le caractère systématique de la mise en pilulier ne tient pas compte de la volonté du patient de choisir son mode d’administration et ne découle donc pas de l’analyse pharmaceutique décrite à l’article R 4235-48 du code de la santé publique.
 La soumission aux contraintes financières, commerciales et techniques de la maison de retraite est de nature à aliéner l’indépendance du pharmacien (art 4235-18 du même code).La délivrance à des maisons de retraite sans tenir compte de la liberté du patient de choisir son officine et en préparant des piluliers de façon systématique est contraire aux dispositions des art R 4235-21 et 4235-22 du code de la santé publique.

1  Aucune organisation n’est mise en oeuvre pour détecter les erreurs de préparation des piluliers (pas de fiche de fabrication, pas de traçabilité des lots, pas de double contrôle) alors que cette dernière est réalisée par une personne non qualifiée. C’est un manquement à l’art R 4235-12 du code de la santé publique ».

De nombreux autres dysfonctionnements ont été constatés :
- L’exercice personnel de M. X, pharmacien titulaire a été pris en défaut les deux fois où les pharmaciens inspecteurs se sont présentés dans son officine, ces faits étant contraires aux articles L 5125-20 et L 5125-21 du code de la santé publique.
- M. X ne s’était pas assuré de l’inscription ordinale de ses pharmaciens adjoints. Il ne respectait donc pas les dispositions de l’article L 5125-20 du code de la santé publique et l’arrêté du 6 février 2006 relatif au nombre de pharmaciens dont les titulaires d’officine doivent se faire assister en raison de l’importance de leur chiffre d’affaires – JO n° 39 du 15 février 2006. De plus, M. X n’employait au moment des inspections aucun préparateur en pharmacie breveté.
- Il fut également constaté que M. X ne possédait aucune formation complémentaire en orthèse, mais utilisait l’agrément de son ex-associée pour fournir ses patients. Cette situation datait de juillet 2004 et perdurait depuis lors. M. X savait pertinemment qu’il ne possédait pas d’agrément personnel et tentait de le dissimuler à l’autorité administrative et aux organismes de prise en charge. En raison des risques encourus par les patients lors de ces délivrances d’orthèses par du personnel non qualifié, ces pratiques enfreignaient les articles R 4235-10 et 4235-13 du code de la santé publique.
- Lors des inspections, des médicaments étaient à disposition du public dans l’espace clientèle, (Percutafeine gel ®, Mitosyl ®, Hydralyn ®) ce qui contrevenait aux dispositions des art R 4235-13 et R 4235-55 du code de la santé publique ;
- Dans le préparatoire, des produits appartenant aux listes I et II étaient mélangés dans les armoires. La balance n’était pas révisée annuellement par un organisme agréé. Les matières premières n’étaient ni identifiées, ni contrôlées par le pharmacien. Les dates de réception n’étaient pas indiquées sur le contenant. Les adresses des patients n’étaient pas toutes enregistrées sur l’ordonnancier des préparations magistrales (infraction à l’art R 5125 du code de la santé publique).
- Des gélules de DHEA étaient préparées à l’avance et conditionnées en flacon ce qui était contraire à la définition de la préparation magistrale prévue dans le 1er de l’article L 51251 du code de la santé publique.
- En cas de sous traitance, le nom, l’adresse et le numéro d’ordre du pharmacien soustraitant n’étaient pas transcrits sur l’ordonnancier. Les produits chimiques périmés n’avaient pas été éliminés. Enfin la traçabilité des retraits de lots ou de produits n’était pas effective.
II – PREMIERE INSTANCE
Le conseiller rapporteur désigné s’est rendu à l’office de M. X à plusieurs reprises (le 25 octobre 2006 et en février 2007). M. X a rappelé qu’il avait tout d’abord exploité la Grande
Pharmacie … en association avec Mme Y de mai 2001 à juillet 2004 puis était ensuite devenu le seul titulaire. Il a expliqué au rapporteur que, s’il était absent lors des inspections, c’est que les deux fois elles avaient eu lieu pendant sa pause à l’heure du déjeuner. M. X a déclaré assurer la totalité des jours d’ouverture de la pharmacie, soit de 8 h à 20 h, du lundi au samedi. En ce qui concerne les fournitures de médicaments aux résidents des deux maisons de retraites (à … et à …), celles-ci avaient cessé début 2005. Le rapporteur a constaté qu’en effet le système servant à la mise sous pilulier rangé dans un coin du préparatoire ne semblait pas 2 avoir été utilisé depuis longtemps. M. X a déclaré qu’en fait, c’était son associée qui s’était investie dans la fourniture des médicaments aux maisons de retraite et qu’il avait mis un terme à cette activité lors du départ de Mme Y. Le rapport de 1re instance figure en (ANNEXE II).
Dans sa séance du 8 février 2001, le CROP de PACA a décidé la traduction de M. X en chambre de discipline (ANNEXE III).
Lors de son audience du 4 octobre 2007, la chambre de discipline du CROP PACA a prononcé à l’encontre de M. X la peine d’interdiction d’exercer la pharmacie pour une durée de 3 ans (ANNEXE IV).
III – APPEL
Cette décision lui ayant été notifiée le 16 octobre 2007, M. X en a interjeté appel le 5 novembre 2007, sa requête étant enregistrée au secrétariat du conseil national le 9 novembre suivant (ANNEXE V). M. X, estime que la peine prononcée en première instance est disproportionnée à plus d’un titre :
- il n’a jamais eu à gérer directement les rapports avec les maisons de retraite et la faute professionnelle retenue l’a été peu de temps après le départ de son associée, Mme Y, qui n’a jamais été entendue dans cette affaire afin qu’un éventuel partage de responsabilité ne soit envisagé ;
- les premiers juges n’ont tenu aucun compte de la régularisation de la plupart des infractions relevées.
Un mémoire du DRASS de PACA a été enregistré comme ci-dessus le 4 janvier 2008 (ANNEXE VI). Concernant un éventuel partage de responsabilité dans le dysfonctionnement de l’officine, le plaignant indique que, tant la chronologie des faits que l’obligation d’exercice personnel, ôtent tout sérieux à cet argument. Les points suivants sont rappelés : M. X a racheté la Grande Pharmacie … en 2001, avec Mme Y. Ils l’ont exploitée sous forme de
SARL jusqu’en juillet 2004. A compter de cette date, M. X est devenu seul titulaire de l’officine qu’il exploite sous forme d’EURL. Il était donc seul responsable du fonctionnement de l’officine lorsque, suite à un signalement de la CPAM du …, elle a été inspectée le 15 septembre 2004, puis le 17 septembre 2004 pour des investigations complémentaires. Tous les dysfonctionnements constatés par l’inspecteur visaient des pratiques et une organisation directement imputable au titulaire de l’officine, dont la responsabilité ne saurait être allégée par une éventuelle mise en cause de Mme Y.
Après avoir rappelé les griefs reprochés, le plaignant indique qu’il considère purement et simplement mensongère l’allégation de M. X selon laquelle il n’aurait jamais eu à gérer directement les rapports avec les maisons de retraites et, à cet effet, rappelle les précédentes déclarations de celui-ci :
« En réponse aux remarques sur les dysfonctionnements là encore observés, M. X se justifie, reconnaissant ainsi l’existence de cette activité au moment de l’inspection :
- « Les ordonnances sont sorties par les pharmaciens, la mise sous blister est faite par une personne de qualité de plus de 15 ans de présence dans cette officine ».
- (A propos de la mise en pilulier systématique) : « Ce mode de préparation est décidé uniquement par la maison de retraite ».

3 – « Les informations sont à la disposition des résidents de maison de retraite mais je n’ai jamais eu la moindre demande. »(de conseils nécessaires au bon usage des médicaments).
- « Le double contrôle est assuré par la présence de personnes différentes au moment de la délivrance et la mise sous blister ».
- « Pour des problèmes budgétaires la maison de retraite voulait utiliser les spécialités excédentaires et je m’y suis toujours opposé. Voir courrier ».
- (A propos de la détention de stock de spécialités en partie déconditionnées et hors de la collecte Cyclamed) : « La maison de retraite ne voulait pas garder de médicaments, elle nous les envoyait systématiquement pour être mis en réserve. Voir courrier. »
- « Je n’étais pas le seul pharmacien à servir la maison de retraite (problème d’urgence) mais elle me renvoyait pour la mise en réserve toutes les spécialités qu’elle détenait, d’où la présence de vignettes barrées et des annotations sur les boîtes ».
- (A propos de l’origine des spécialités pharmaceutiques dont le conditionnement secondaire est annoté ou dont les blisters sont entamés) : « Médicaments comme indiqué plus haut, rendus par la maison de retraite pour mise en réserve. Pour preuve complémentaire M. G est inscrit sur mon fichier client uniquement à la maison de retraite.
- (A propos de mélanges de numéros de lots et de nombre de comprimés dépassant la capacité officielle du conditionnement) : « Médicaments de retour non triés par nous ayant pu être mélangés par la maison de retraite ».

En conséquence, sur ce point, le plaignant conclut :
Je demande donc à votre Conseil de constater que, contrairement à ses allégations, M. X s’est impliqué dans les gestions des rapports avec les maisons de retraite (ce qui ressort d’ailleurs de la responsabilité d’un pharmacien titulaire). Vous noterez simplement que pour cette activité, son mode de défense a changé : au lieu de reporter la responsabilité des dysfonctionnements sur les maisons de retraite elles-mêmes (comme il l’a fait systématiquement dans ses réponses au rapport initial d’inspection), il tente désormais de la faire endosser par son exassociée ».

Quant la « régularisation » des infractions par M. X, le DRASS relève :
« Il ressort de Mme R, membre du conseil régional, qui s’est rendue à l’officine le 25 octobre 2006, soit deux ans, après l’inspection, que subsistaient les dysfonctionnements suivants :
Affichage ostentatoire de l’appartenance de M. X au groupement de M. F (pharmacies …) ;
Personnel pharmacien diplômé insuffisant ;
Pas de justificatif des diplômes des préparatrices ;
Pas d’agrément pour l’activité d’orthèse ;
Température du réfrigérateur non relevée ;
Préparatoire en désordre et mal entretenu ;
Périmés en stock ;
Matières premières liste I et II non séparées ;
Dépassement de l’échéance de validité du contrôle de la balance électronique ;

4 -
Pas de mention du n° d’ordre du sous-traitant sur l’ordonnancier.
Lors du second passage de Mme R, en février 2007, subsistaient les dysfonctionnements suivants :
Personnel pharmacien diplômé insuffisant (pas d’évolution à ce jour) ;
Pas d’agrément pour l’activité d’orthèse.
J’observe qu’il a donc fallu plus de deux ans, deux inspections et deux visites du conseiller de l’Ordre pour que M. X remédie à la plupart des critiques qui lui étaient faites, hors l’insuffisance de personnel diplômé.
Quoi qu’il en soit, ces points d’amélioration, qui portent le fonctionnement de l’officine à un niveau presque normal, ne peuvent atténuer en rien les infractions passées, qui sont constituées et en grande partie reconnues par l’intéressé. Votre conseil ne saurait donc, sans remettre en cause l’existence même d’un code de déontologie, les laisser impunies ».

Depuis le 1er février 2008, il a été demandé au conseil de M. X de produire un mémoire en réplique dans l’intérêt de son client. Après plusieurs échanges de correspondances accordant les délais sollicités, aucune observation complémentaire n’est parvenue au siège conseil national. A ce jour, il n’a pas davantage été donné suite à la proposition d’audition faite le 30 octobre 2008 (ANNEXE VII). M. X a cessé son activité (radiation du tableau de la section A le 1er novembre 2008).
C’est dans l’état de ce dossier qu’il vous appartient de dire la suite qu’il convient de réserver à l’appel interjeté par M. X.

30 janvier 2009 M. R 5

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Textes cités dans la décision

  1. Code de la santé publique
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