Tribunal administratif de Caen, 2ème chambre, 30 décembre 2022, n° 2100555

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Sur la décision

Référence :
TA Caen, 2e ch., 30 déc. 2022, n° 2100555
Juridiction : Tribunal administratif de Caen
Numéro : 2100555
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Non-lieu
Date de dernière mise à jour : 8 septembre 2023

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

I. Sous le n° 2100555, par une requête et un mémoire enregistrés les 15 mars et 22 juin 2021, la société Autocars Delcourt, représentée par le cabinet d’avocats Cap Juris, demande au tribunal :

1°) d’annuler la décision du 17 janvier 2021 par laquelle l’inspecteur du travail a implicitement refusé le licenciement de M. C ;

2°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 1 500 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— dès lors que l’inspecteur n’a pas communiqué les motifs de la décision implicite, cette dernière est illégale ;

— la demande est fondée sur des faits établis.

Par des mémoires enregistrés les 21 avril, 9 juillet et 25 octobre 2021, M. C conclut au rejet de la requête.

Par une ordonnance du 9 novembre 2022, la clôture d’instruction a été fixée au 24 novembre 2022.

II. Sous le n° 2101993, par une requête et un mémoire enregistrés les 13 septembre et 16 décembre 2021, la société Autocars Delcourt, représentée par le cabinet d’avocats Cap Juris, demande au tribunal :

1°) de constater le retrait de la décision implicite de l’inspecteur du travail en date du 17 janvier 2021 ;

2°) d’annuler la décision du 15 juillet 2021 par laquelle le ministre du travail a refusé le licenciement de M. C ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 1 500 euros en application de l’article L. 761 1 du code de justice administrative.

Elle soutient que la demande est fondée sur des faits établis.

Par un mémoire enregistré le 29 octobre 2021, M. C conclut au rejet de la requête.

Par une ordonnance du 9 novembre 2022, la clôture d’instruction a été fixée au 24 novembre 2022.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de M. B,

— les conclusions de M. Blondel, rapporteur public,

— et les observations de Me Yalvac, représentant la société des autocars Delcourt.

Considérant ce qui suit :

1. M. C, qui occupait au sein de la société Autocars Delcourt un poste de conducteur receveur, détenait les mandats de délégué syndical et de délégué du personnel au comité social et économique. Par courrier du 13 novembre 2020, son employeur a demandé à l’inspecteur du travail l’autorisation de le licencier pour avoir agressé un autre conducteur de cars de l’entreprise. L’inspecteur du travail a implicitement refusé d’autoriser le licenciement. Par une décision du 15 juillet 2021, la cheffe du bureau du statut protecteur du ministère du travail a annulé cette décision implicite et a refusé le licenciement de M. C.

Sur la jonction :

2. Les requêtes n°s 2100555 et 2101993 présentant à juger la même situation, il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul jugement.

Sur l’étendue du litige :

3. Par une lettre du 12 mars 2021, la société Autocars Delcourt a demandé au ministre du travail d’annuler la décision implicite de rejet de sa demande tendant au licenciement de M. C, qui avait été implicitement refusée par l’inspecteur du travail. Par une décision du 15 juillet 2021, la cheffe du bureau du statut protecteur du ministère du travail a prononcé le retrait de la décision implicite qui était née le 17 janvier 2021. Par suite, il n’y a pas lieu de statuer sur les conclusions dirigées contre cette décision implicite.

Sur les conclusions à fin d’annulation :

4. La société Autocars Delcourt a souhaité licencier M. C au motif qu’il avait agressé verbalement et physiquement M. A, conducteur de cars et salarié de la société, sur le parking du lycée Leverrier de Saint-Lô le 13 octobre 2020 vers 7 heures 30. Il ressort des pièces du dossier que M. A est monté, par erreur selon lui, dans le car de M. C. A cette occasion, il lui a demandé pourquoi il ne l’avait pas salué le matin même. La société Autocars Delcourt soutient que M. C a reconnu les faits qui lui sont reprochés, au cours des entretiens des 16 octobre et 4 novembre 2020. Elle fait valoir que M. C avait insulté son collègue mais elle n’apporte aucune précision sur les propos tenus ni sur la nature des insultes.

5. Si la réalité de l’altercation n’est pas remise en cause, il n’est pas établi par le seul témoignage du salarié se déclarant victime que M. C l’aurait empoigné par le col et plaqué contre le mur du lycée. D’une part, la société n’apporte aucune explication sur la configuration des lieux où se serait produit l’agression alors que M. C fait valoir qu’à proximité des emplacements des cars, ne se trouve qu’un muret contre lequel il est impossible de plaquer une personne. D’autre part, alors que l’agression aurait eu lieu à une heure de forte affluence dans un lycée et que M. A mentionne dans son témoignage que des lycéens ont été témoins de la scène, voire même que certains auraient pu la filmer, la société requérante ne produit aucun témoignage. Si elle soutient que M. A a été très affecté par l’agression qu’il a subie, elle ne justifie pas qu’il aurait été immédiatement placé en arrêt maladie. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que l’altercation du 13 octobre 2020 n’a été déclarée que le 27 janvier 2021. Selon une lettre du 3 août 2021, M. A, qui avait eu des différends avec d’autres salariés de la société, a été « déclaré inapte dans tous les postes de l’entreprise » et cette décision mentionne la « nécessité d’une réorientation professionnelle vers un autre emploi dans une autre entreprise ». Ces documents, qui n’établissent pas le lien de causalité entre l’incident du 13 octobre 2020 et l’état de santé de M. A, n’apportent aucune précision sur la matérialité des faits reprochés à M. C.

6. Dans ces conditions, l’administration a pu constater à bon droit, afin de refuser d’autoriser le licenciement de M. C, que, même si celui-ci avait repoussé M. A en dehors de son autocar, il n’avait pas exercé sur lui des violences physiques caractérisées. Par suite, sans qu’il soit besoin de statuer sur le caractère discriminatoire de la décision de licenciement qui n’est pas fondée sur ce motif, le moyen tiré d’une erreur matérielle doit être écarté.

7. Il résulte de tout ce qui précède que les requêtes de la société Autocars Delcourt doivent être rejetées en toutes leurs conclusions.

D E C I D E :

Article 1er : Il n’y a pas lieu de statuer sur les conclusions dirigées contre la décision implicite de l’inspecteur du travail.

Article 2 : Le surplus des conclusions des requêtes de société autocars Delcourt est rejeté.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à la société autocars Delcourt, au ministre du travail, de l’emploi et de l’insertion ainsi qu’à M. C.

Copie pour information en sera adressée à la direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités de Normandie.

Délibéré après l’audience du 1er décembre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Mondésert, président,

M. Berrivin, premier conseiller,

Mme Silvani, conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 décembre 2022.

Le rapporteur,

Signé

A. B

Le président,

Signé

X. MONDÉSERT La greffière,

Signé

A. LAPERSONNE

La République mande et ordonne au ministre du travail, de plein emploi et de l’insertion en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

la greffière,

A. Lapersonne

N°s 2100555 – 2101993

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Textes cités dans la décision

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Tribunal administratif de Caen, 2ème chambre, 30 décembre 2022, n° 2100555