Tribunal administratif de Grenoble, 5ème chambre, 22 novembre 2022, n° 2107860

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Grenoble, 5e ch., 22 nov. 2022, n° 2107860
Juridiction : Tribunal administratif de Grenoble
Numéro : 2107860
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 25 novembre 2022

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 19 novembre 2021, le 15 avril 2022, le 25 mai 2022 et le 4 novembre 2022 (ce dernier non communiqué), le syndicat des copropriétaires de la copropriété 264 avenue Maréchal Leclerc et la SCI du Verney, représentés par Me Fiat, demandent au tribunal, dans le dernier état de leurs écritures :

1°) d’annuler le permis de construire délivré le 26 mai 2021 par le maire de la commune de Chambéry à la SCCV CL 36, la décision implicite de rejet de leur recours gracieux ainsi que le permis modificatif du 31 août 2022 ;

2°) de condamner solidairement la commune de Chambéry et la SCCV CL 36 au versement d’une somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

— il n’est pas justifié de la compétence du signataire de la décision ;

— le dossier est incomplet en ce qu’il ne mentionne pas la surface de plancher destinée à être démolie ;

— il n’est pas justifié du dépôt d’une demande de permis de démolir ;

— il n’est pas justifié de la régularité des places de stationnement situées hors terrain d’assiette au regard de l’article R. 431-26 du code de l’urbanisme ;

— le principe de mixité sociale fixé par l’article UCa3 du règlement n’est pas respecté ;

— les balcons en surplomb du domaine public ne sont pas conformes à l’article UCa4 et n’ont pas fait l’objet d’une autorisation d’occupation du domaine public ;

— une terrasse réalisée à moins de 3 m par rapport à une limite séparative ne respecte pas l’article UCa4 ;

— il n’est pas justifié pour l’application de l’article UCa7 de la distance séparant le tènement du parc de stationnement ;

— le permis modificatif ne vaut toujours pas autorisation de survol du domaine public ;

— il ne pouvait supprimer toute obligation de stationnement pour les véhicules automobiles et il n’est pas motivé sur ce point.

Par des mémoires en défense enregistrés le 25 janvier 2022 et le 15 avril 2022, la SCCV CL 36, représentée par Me Combaret, conclut au rejet de la requête et à la condamnation des requérants à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un mémoire en défense enregistré le 19 avril 2022, la commune de Chambéry, représentée par Me Petit, conclut au rejet de la requête et à la condamnation des requérants à lui verser une somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

— la requête est irrecevable à défaut de production d’un titre de propriété ;

— aucun des moyens soulevés n’est fondé.

Vu :

— les autres pièces du dossier,

— le code de l’urbanisme,

— l’arrêté du 10 novembre 2016 définissant les destinations et sous-destinations de constructions pouvant être réglementées par le règlement national d’urbanisme et les règlements des plans locaux d’urbanisme ou les documents en tenant lieu,

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de M. B,

— les conclusions de Mme A,

— et les observations de Me Fiat pour les requérants, de Me Roussel pour la commune de Chambéry et de Me Combaret pour la SCCV CL 36.

Une note en délibéré présentée par Me Fiat pour les requérants a été enregistrée le 8 novembre 2022.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 26 mai 2021, le maire de Chambéry a délivré un permis de construire une résidence étudiante de 56 studios à la SCCV CL 36. Le syndicat des copropriétaires de la copropriété 264 avenue Maréchal Leclerc et la SCI du Verney demandent l’annulation de cet arrêté, de la décision implicite de rejet de leur recours gracieux et du permis modificatif délivré le 31 août 2022.

Sur la compétence du signataire de l’arrêté :

2. L’arrêté contesté a été signé par M. C D, adjoint délégué à l’urbanisme au bénéfice d’une délégation de fonctions du 21 décembre 2020 régulièrement affichée et transmise à la préfecture. Le moyen tiré de son incompétence doit donc être écarté.

Sur le dossier de permis de construire :

3. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l’ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l’urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n’est susceptible d’entacher d’illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l’appréciation portée par l’autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

4. En premier lieu, aux termes de l’article R. 431-21 du code de l’urbanisme : " Lorsque les travaux projetés nécessitent la démolition de bâtiments soumis au régime du permis de démolir, la demande de permis de construire ou d’aménager doit : a) Soit être accompagnée de la justification du dépôt de la demande de permis de démolir ; b) Soit porter à la fois sur la démolition et sur la construction ou l’aménagement ". En l’espèce, si la notice précisait initialement qu’une demande de permis de démolir serait déposée, le formulaire Cerfa a été modifié le 15 février 2021 pour mentionner une démolition totale des bâtiments existants. Les plans PC.1.2 et PC.2.1 font apparaître les constructions existantes et le document PC.7 contient deux vues de la maison à démolir. Ces éléments permettaient au maire de Chambéry de statuer sur les démolitions prévues, quand bien même la surface de plancher des constructions à démolir n’était pas indiquée, de sorte qu’il a pu légalement autoriser celles-ci par l’arrêté attaqué au vu d’un dossier qui n’était pas insuffisant sur ce point.

5. En second lieu, s’agissant de la complétude du dossier, les requérants ne peuvent sérieusement soutenir qu’il n’est pas justifié de la localisation du parc Cassine, en cours de réalisation, où étaient initialement prévues des places de stationnement dédiées à l’opération.

6. Il résulte de ce qui précède que le dossier de demande de permis de construire est exempt des insuffisances invoquées.

Sur la violation invoquée de l’article UCa3 du règlement du PLUi de Grand Chambéry :

7. Aux termes de cet article : « Les constructions neuves () créant plus de 10 logements ou plus de 700 m² de surface de plancher doivent intégrer une part minimum de 30% de logements locatifs sociaux ordinaires (financés en PLS, PLUS et PLAI), en nombre et arrondi à l’entier le plus proche, ou, le cas échéant, à l’entier supérieur ».

8. L’article R. 151-29 du code de l’urbanisme renvoie les définitions et le contenu des sous-destinations mentionnées à l’article R. 151-28 à un arrêté du ministre chargé de l’urbanisme. L’article 2 de l’arrêté du 10 novembre 2016 prévoit que la destination de construction « habitation » comprend les deux sous-destinations « logement » et « hébergement » et que la sous-destination « hébergement » recouvre les constructions destinées à l’hébergement dans des résidences ou foyers avec service, notamment les résidences universitaires. En conséquence, les dispositions de l’article UCa3, qui ne visent que la sous-destination « logement » ne sont pas applicables au projet.

Sur l’implantation par rapport à la voie publique :

9. L’article UCa4 du règlement permet, pour les éléments de modénatures et les balcons, un surplomb du domaine public jusqu’à 0,8 m depuis l’alignement, s’ils se situent à plus de 4,3 m de haut à partir du niveau de la rue sous réserve d’obtention d’une autorisation d’occupation du domaine public.

10. En l’espèce, il existe un surplomb minime sur la rue Lamartine dont il n’est pas contesté qu’elle appartient au domaine public communal. Si le permis de construire initial ne comportait pas de demande d’autorisation du domaine public, cette carence a été corrigée par le permis modificatif accordé pour un projet qui comporte une telle demande. Dès lors, le moyen doit être écarté.

Sur l’implantation par rapport à la limite séparative sud-est :

11. L’article UCa4 du règlement impose une implantation en limite séparative ou à 3 mètres minimum de celle-ci. Les requérants soutiennent que cette règle est méconnue du fait de la présence d’une terrasse en prolongement de la façade sud-est qui ne serait pas conforme à cette règle d’implantation.

12. En l’espèce, il ne ressort pas des plans que la terrasse initialement prévue en prolongement de la façade sud-est émergerait du terrain naturel et aurait dû être prise en compte pour l’application de la règle énoncée au point précédent. En tout état de cause, cette terrasse a été supprimée par le permis de construire modificatif du 31 août 2022. Dès lors, le moyen doit être écarté.

Sur l’aspect du bâtiment :

13. En premier lieu, l’article UCa5 du règlement dispose que « les projets ne doivent pas porter atteinte au caractère ou à l’intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu’à la conservation des perspectives monumentales » et que « les nouvelles constructions doivent s’inscrire en cohérence avec la hauteur des constructions environnantes, les formes urbaines, caractéristiques de la zone et contribuer à la cohérence urbaine, architecturale et paysagère de celle-ci ».

14. Il ressort des pièces du dossier que les bâtiments implantés à proximité ne présentent pas une unité architecturale marquée et notamment que certains d’entre eux ont des hauteurs comparables à celles du projet, comme en témoignent les plans de coupe de profil au niveau de l’îlot. Dans ces conditions, le projet ne peut être regardé comme méconnaissant les dispositions citées au point précédent.

15. En deuxième lieu, l’article UCa5 dispose que « les murs pignons aveugles visibles depuis la voie ou l’espace public doivent faire l’objet d’un traitement architectural en cohérence avec les caractéristiques des constructions avoisinantes et contribuer à l’ambiance urbaine globale à l’échelle de la rue ou du projet ».

16. Le mur pignon aveugle sud-ouest, visible de la voie publique, doit être tramé et végétalisé. Ce traitement suffit à assurer le respect des dispositions citées au point précédent.

17. Enfin, si l’article UCa5 prévoit que « la toiture des constructions principales (hors annexes) doit comporter au moins deux pans », il contient également des dispositions relatives au toitures terrasses et, de par sa rédaction, ne limite pas celles-ci aux seuls volumes secondaires et aux constructions annexes qui ne seraient pas accolées à une construction principale. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le bâtiment, qui présente une toiture terrasse, méconnaîtrait ces dispositions.

Sur le stationnement :

18. Le projet, dans sa version issue du permis de construire modificatif du 31 août 2022, ne comporte plus de places de stationnement automobile mais uniquement deux aires de stationnement vélos d’une surface totale de 109,84 m². Le projet a été autorisé par application de l’article L. 152-6-1 du code de l’urbanisme aux termes duquel : « En tenant compte de la nature du projet et de la zone d’implantation, l’autorité compétente pour délivrer le permis de construire peut, par décision motivée, lorsque le règlement du plan local d’urbanisme ou du document en tenant lieu impose la réalisation d’aires de stationnement pour les véhicules motorisés, réduire cette obligation à raison d’une aire de stationnement pour véhicule motorisé en contrepartie de la création d’infrastructures ou de l’aménagement d’espaces permettant le stationnement sécurisé d’au moins six vélos par aire de stationnement ».

19. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, la « réduction » prévue par ces dispositions peut aller jusqu’à une compensation totale des places de stationnement pour véhicules motorisés par des espaces permettant le stationnement sécurisé des vélos.

20. Sans faire application de l’article L. 152-6-1 du code de l’urbanisme, le projet qui comporte 56 studios, aurait dû prévoir, en vertu de l’article UCa7, 9 places de stationnement automobile et 42 m² de locaux clos et couverts pour le stationnement des deux roues non motorisés sur la base de 0,75 m² par logement. Une surface supplémentaire de 54 m² dédiée au stationnement des vélos était donc requise. Le projet, qui comprend 109,84 m² de telles surfaces respecte donc cette règle. Par ailleurs, le permis de construire modificatif, qui est suffisamment motivé sur ce point, n’a pas fait une inexacte application de l’article L. 152-6-1 compte tenu de la nature du projet et de son implantation en centre-ville desservi par les transports en commun.

21. Du fait de cette nouvelle version du projet, les requérants ne peuvent plus utilement soutenir que le projet était illégal en ce qu’il prévoyait la disposition de places de stationnement dans le parc Cassine et non leur réalisation sur le terrain même.

22. Enfin, si l’article UCa7 prévoit, en règle générale que les constructions doivent disposer de places (arceaux) en libre-accès destinées aux visiteurs, aux clients et au public, visibles, accessibles facilement depuis l’espace public et proches de l’entrée, le même article dispose également que « les dispositions liées au stationnement visiteur ne s’appliquent pas aux constructions dont l’implantation à l’alignement est obligatoire », ce qui est le cas du bâtiment en litige. Cette branche du moyen doit donc également être écartée.

23. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions à fin d’annulation doivent être rejetées.

Sur les frais d’instance :

24. En vertu des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, le tribunal ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l’autre partie des frais qu’elle a exposés à l’occasion du litige soumis au juge. Les conclusions présentées à ce titre par les requérants doivent dès lors être rejetées.

25. Dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la commune de Chambéry et de la SCCV CL 36 tendant à la condamnation des requérants à ce même titre.

D E C I D E :

Article 1er  :La requête est rejetée.

Article 2  :Les conclusions de la commune de Chambéry et de la SCCV CL 36 présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3  :Le présent jugement sera notifié au syndicat des copropriétaires de la copropriété 264 avenue Maréchal Leclerc, à la SCI du Verney, à la commune de Chambéry et à la SCCV CL 36.

Délibéré après l’audience du 8 novembre 2022 à laquelle siégeaient :

M. Sogno, président,

Mme Bedelet, première conseillère,

Mme Holzem, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 novembre 2022.

Le président, rapporteur,

C. B

La première assesseure,

A. Bedelet

Le greffier,

P. Muller

La République mande et ordonne au préfet de la Savoie en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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