Tribunal administratif de Melun, 3 octobre 2013, n° 1102171

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Sur la décision

Référence :
TA Melun, 3 oct. 2013, n° 1102171
Juridiction : Tribunal administratif de Melun
Numéro : 1102171

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE MELUN

N°1102171/2

___________

Mme Z Y et autres

___________

Mme Fullana

Rapporteur

___________

Mme Bruston

Rapporteur public

___________

Audience du 19 septembre 2013

Lecture du 3 octobre 2013

___________

36-08-01

C

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Tribunal administratif de Melun

(2e chambre)

Vu l’ordonnance n°1018374 par laquelle le président du tribunal administratif de Paris a transmis au tribunal administratif de Melun la requête présentée par Mme Z Y, la fédération nationale interco CFDT et le syndicat justice Ile-de-France CFDT ;

Vu la requête, enregistrée le 15 octobre 2010 au greffe du tribunal administratif de Paris, présentée pour Mme Z Y, demeurant XXX à XXX, la fédération nationale interco CFDT, dont le siège est situé XXX à XXX, représentée par sa secrétaire générale, et le syndicat justice Ile-de-France CFDT, dont le siège est XXX à XXX, représenté par sa secrétaire générale, par Me Cayla-Destrem ; Mme Y et autres demandent au Tribunal :

1°) d’annuler la décision du 27 avril 2010 par laquelle le directeur interrégional des services pénitentiaires de Paris a refusé de procéder à une revalorisation de la rémunération de Mme Y, ensemble la décision implicite rejetant son recours hiérarchique formé le 14 juin 2010 ;

2°) d’enjoindre au directeur interrégional des services pénitentiaires de Paris de mettre en place la procédure prévue par l’article 1-3 du décret n°86-83 du 17 janvier 1986 et de procéder à la revalorisation de la rémunération de Mme Y ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 2 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent :

— que le refus du directeur interrégional des services pénitentiaires de Paris viole les dispositions de l’article 1-3 du décret du 17 janvier 1986 telles qu’interprétées par la circulaire du 26 novembre 2007 relative aux dispositions générales applicables aux agents non titulaires de l’Etat dès lors qu’il était tenu de procéder au réexamen de la rémunération de Mme Y ;

— que la décision attaquée est entachée d’erreur de droit en ce qu’elle se fonde sur la circonstance que Mme Y bénéficie d’une décharge d’activité pour raisons syndicales et n’exerce aucune activité effective ;

— que cette décision méconnaît ce faisant les dispositions du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 relatives à la liberté syndicale et celles de l’article 33 de la loi du 11 janvier 1984 ;

— qu’elle viole également le principe d’égalité de traitement entre agents publics ;

Vu la décision du 27 avril 2010 attaquée et le recours hiérarchique du 14 juin 2010, ainsi que son avis de réception ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 avril 2011, présenté par le directeur interrégional des services pénitentiaires de Paris qui conclut au rejet de la requête ;

Il fait valoir :

— que Mme Y est en décharge d’activité de service et n’exerce plus aucune activité effective au sein de la direction interrégionale ;

— qu’un autre agent a été recruté pour exercer les missions qu’elle remplissait avant sa décharge ;

— que le contrat conclu avec Mme Y précise que la revalorisation de la rémunération est une faculté et non une obligation ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 23 mars 2013, présenté pour Mme Y, la fédération nationale interco CFDT et le syndicat justice Ile-de-France CFDT qui concluent aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

Ils soutiennent en outre :

— que les résultats des agents ne sont pas le seul paramètre à prendre en compte dans le cadre du réexamen de la rémunération des agents contractuels ;

— que Mme Y n’a bénéficié d’aucune augmentation de rémunération depuis qu’elle dispose d’une décharge totale d’activité pour raisons syndicales ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 1er juillet 2013, présenté pour le ministre de la justice, garde des Sceaux, qui conclut aux mêmes fins que le mémoire précédent de l’administration ;

Il fait valoir :

— qu’il ne résulte d’aucune disposition législative ou réglementaire ou du contrat conclu avec Mme Y une obligation pour l’administration d’accorder une revalorisation ;

— que l’article 1-3 du décret du 17 janvier 1986 se borne à prévoir une obligation de réexamen de la rémunération ;

— que l’appréciation de l’opportunité d’une revalorisation de la rémunération repose sur plusieurs critères dont les compétences et le niveau de qualification, la spécificité du poste et les résultats professionnels ;

— qu’il a bien été procédé au réexamen de la rémunération de Mme Y ;

— qu’en refusant de revaloriser sa rémunération en raison de l’absence de service effectif et des contraintes budgétaires, l’administration n’a commis aucune erreur manifeste d’appréciation ;

— que la nécessité de recruter un agent pour assurer les missions normalement confiées à Mme Y a des effets sur l’examen de la revalorisation de la rémunération de l’intéressée ;

Vu le mémoire, enregistré le 18 juillet 2013, présenté pour Mme Y, la fédération nationale interco CFDT et le syndicat justice Ile-de-France CFDT qui persistent dans leurs écritures ;

Ils soutiennent :

— que le dossier de Mme Y n’a fait l’objet d’aucun réexamen et la décision de rejet de sa demande est intervenue sans évaluation préalable ;

— que la revalorisation de la rémunération d’un agent contractuel est indépendante de l’appréciation de la technicité du poste et de la responsabilité des fonctions exercées ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’Etat ;

Vu le décret n°86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents non titulaires de l’Etat pris pour l’application de l’article 7 de la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’Etat ;

Vu le code de justice administrative ;

La requête ayant été renvoyée en formation collégiale par le magistrat délégué en application de l’article R. 222-19 du code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 19 septembre 2013 :

— le rapport de Mme Fullana, rapporteur ;

— les conclusions de Mme Bruston, rapporteur public ;

— et les observations de Mme X, pour le fédération nationale interco CFDT ;

1. Considérant que Mme Y a été recrutée en 1998 par contrat à durée déterminée à la direction régionale des services pénitentiaires de Paris pour exercer les fonctions de chef d’unité de formation professionnelle des détenus ; qu’elle a conclu, à compter du 28 juillet 2005, un contrat à durée indéterminée ; qu’elle bénéficie, depuis le 2 novembre 2005, d’une décharge totale d’activité pour raisons syndicales ; que, par lettre du 19 avril 2010, Mme Y a demandé à bénéficier d’une revalorisation de sa rémunération avec effet rétroactif au 27 juillet 2008 ; que sa demande a été rejetée par une décision du directeur interrégional des services pénitentiaires de Paris du 27 avril 2010 ; que Mme Y, la fédération nationale interco CFDT et le syndicat justice Ile-de-France demandent l’annulation de cette décision, ensemble la décision implicite du garde des Sceaux rejetant le recours hiérarchique formé par Mme Y le 14 juin 2010 ;

2. Considérant qu’aux termes de l’article 1-3 du décret du 17 janvier 1986 susvisé : « La rémunération des agents employés à durée indéterminée fait l’objet d’un réexamen au minimum tous les trois ans, notamment au vu des résultats de l’évaluation prévue à l’article 1-4. » ; qu’aux termes de l’article 1-4 du même décret : « Les agents employés à durée indéterminée font l’objet d’une évaluation au moins tous les trois ans. / Cette évaluation, qui donne lieu à un compte rendu, comporte un entretien, qui porte principalement sur leurs résultats professionnels au regard des objectifs qui leur ont été assignés et des conditions d’organisation et de fonctionnement du service dont ils relèvent. L’entretien peut également être élargi aux besoins de formation des agents en rapport avec leurs missions, leurs projets professionnels, et notamment leurs projets de préparation aux concours d’accès aux corps et cadres d’emplois de la fonction publique. » ; qu’aux termes de l’article 3 du contrat à durée indéterminée conclu par le directeur régional des services pénitentiaires de Paris avec Mme Y : « (…) La revalorisation du contrat pourra faire l’objet d’une négociation entre les deux parties tous les trois ans. » ;

3. Considérant, en premier lieu, que les dispositions précitées du décret du 17 janvier 1986, ainsi que les stipulations du contrat conclu par Mme Y, se bornent à imposer un réexamen tous les trois ans de la rémunération des intéressés et n’instituent à leur profit aucun droit à revalorisation ; que, par ailleurs, contrairement à ce qu’allèguent les requérants, la décision attaquée du 27 avril 2010, qui refuse de procéder à la revalorisation de la rémunération sollicitée par Mme Y au double motif qu’elle n’exerce aucune activité effective au sein de la direction, d’une part, et que les contraintes budgétaires de la direction y font obstacle, d’autre part, résulte bien d’un réexamen de la situation de l’intéressée ; qu’à cet égard, est sans influence sur la légalité de cette décision la circonstance, à la supposer établie, que le directeur interrégional des services pénitentiaires de Paris n’aurait pas procédé au réexamen de la rémunération de Mme Y au terme d’un délai de trois ans à compter du 27 juillet 2005, date à laquelle son contrat à durée indéterminée a pris effet ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que si l’administration ne conteste pas qu’elle n’a pas organisé l’entretien préalable prévue à l’article 1-4 du décret du 17 janvier 1986 précité, cette circonstance n’est, en tout état de cause, pas de nature, compte tenu de l’objet de cet entretien qui vise à apprécier la valeur professionnelle de l’intéressé, et de la situation de Mme Y qui bénéficie d’une décharge totale d’activité, à entacher la décision attaquée du 27 avril 2010 d’un vice de procédure ;

5. Considérant, en dernier lieu, qu’aux termes de l’alinéa 6 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 : « Tout homme peut défendre ses droits et ses intérêts par l’action syndicale et adhérer au syndicat de son choix. » ; qu’aux termes de l’article 33 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée : « (…) Le fonctionnaire qui bénéficie d’une décharge de service pour l’exercice d’un mandat syndical est réputé être en position d’activité. » ;

6. Considérant qu’il ressort des motifs de la décision attaquée que le directeur interrégional des services pénitentiaires de Paris s’est fondé pour refuser la revalorisation sollicitée par Mme Y sur la circonstance qu’elle bénéficiait d’une décharge totale d’activités pour raisons syndicales et qu’elle n’exerçait en conséquence aucune activité effective au sein de ses services ; que, ce faisant, il a méconnu les dispositions précitées de l’article 33 du 11 janvier 1984 et entaché sa décision d’une erreur de droit ;

7. Considérant, néanmoins, que, dans le cas où un seul des motifs de la décision administrative est entaché d’illégalité, il y a lieu de procéder à la neutralisation du motif illégal s’il apparaît que la considération du ou des seuls motifs légaux aurait suffi à déterminer l’administration à prendre la même décision ; que le directeur interrégional des services pénitentiaires de Paris s’est également fondé pour refuser la revalorisation de la rémunération de Mme Y sur le motif tiré des contraintes budgétaires qui étaient les siennes ; qu’à cet égard, si les requérants soutiennent que Mme Y était régulièrement augmentée avant de bénéficier d’une décharge totale d’activité et qu’elle n’a plus bénéficié d’aucune augmentation depuis, il ne ressort pas des pièces du dossier que la rémunération dont elle bénéficie soit devenue, depuis 2005, largement inférieure à celle d’autres agents non titulaires placés dans une situation comparable ; que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, ce motif n’est, par suite, entaché d’aucune erreur manifeste d’appréciation ; qu’il résulte de l’instruction que le directeur interrégional des services pénitentiaires de Paris aurait pris la même décision en se fondant uniquement sur ce motif tiré de contraintes budgétaires ; qu’il y a lieu, par suite, de neutraliser le motif illégal de la décision litigieuse fondé sur le bénéfice par l’intéressée d’une décharge totale d’activités pour raisons syndicales ;

8. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que les conclusions présentées par Mme Y, la fédération nationale interco CFDT et le syndicat justice Ile-de-France CFDT tendant à l’annulation de la décision du 27 avril 2010 par laquelle le directeur interrégional des services pénitentiaires de Paris a refusé de procéder à la revalorisation de la rémunération perçue par Mme Y, ainsi que de la décision implicite du garde des Sceaux rejetant le recours hiérarchique formé par l’intéressée, doivent être rejetées ; que doivent également être rejetées, ensemble et par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d’injonction, ainsi que celles tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme Y, de la fédération nationale interco CFDT et du syndicat justice Ile-de-France CFDT est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à Mme Z Y, à la fédération nationale interco CFDT, au syndicat justice Ile-de-France CFDT et au garde des Sceaux, ministre de la justice.

Délibéré après l’audience du 19 septembre 2013, à laquelle siégeaient :

M. Jarrige, président,

Mme Fullana, conseiller,

Mme Tocut, conseiller.

Lu en audience publique le 3 octobre 2013.

Le rapporteur, Le président de la 2e chambre,

Signé : M. FULLANA Signé : A. JARRIGE

Le greffier,

Signé : V. VAN HOOTEGEM

La République mande et ordonne au garde des Sceaux, ministre de la justice, en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier

V. VAN HOOTEGEM



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