Tribunal administratif de Montpellier, 2ème chambre, 26 décembre 2022, n° 2004177

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Montpellier, 2e ch., 26 déc. 2022, n° 2004177
Juridiction : Tribunal administratif de Montpellier
Numéro : 2004177
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Tribunal administratif de Montpellier, 2 septembre 2018
Dispositif : Satisfaction partielle
Date de dernière mise à jour : 8 septembre 2023

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par un jugement en date du 3 septembre 2018, le tribunal administratif de Montpellier a ordonné avant dire droit une expertise en vue d’apprécier, notamment, si et dans quelle mesure, les préjudices dont se prévaut M. A ont connu une aggravation depuis le 18 décembre 2014, date de l’arrêt de la cour administrative d’appel de Marseille.

L’expert désigné par le tribunal a remis son rapport le 11 décembre 2018.

Par une requête, enregistrée le 22 septembre 2020, M. B A, représenté par Me Pons-Serradeil, doit être regardé comme demandant au tribunal :

1°) de condamner l’office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à lui verser la somme de 88 648 euros en réparation des préjudices subis en raison de l’aggravation de son état de santé imputable aux conséquences de la vaccination obligatoire contre l’hépatite B qu’il a reçue dans le cadre de son activité de sapeur-pompier volontaire ;

2°) de mettre à la charge de l’ONIAM la somme de 2 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de le condamner aux entiers dépens.

Il soutient que :

— son état de santé s’est aggravé depuis l’arrêt du 18 décembre 2014 de la cour administrative d’appel de Marseille confirmant le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 28 décembre 2012, et condamnant l’ONIAM à lui verser la somme de 18 000 euros en réparation de ses préjudices ;

— les préjudices résultant de l’aggravation de son état de santé doivent être évalués comme suit :

—  25 000 euros au titre d’un déficit fonctionnel permanent ;

—  2 000 euros au titre des souffrances endurées ;

—  3 000 euros au titre du préjudice sexuel ;

—  3 000 euros au titre du préjudice esthétique ;

—  5 000 euros au titre du préjudice d’agrément ;

—  50 000 euros au titre de l’incidence professionnelle ;

—  648 euros au titre des frais et honoraires d’avocat liés à la demande indemnitaire préalable.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 novembre 2020, l’ONIAM, représenté par Me Welsch, conclut à ce que l’indemnisation du déficit fonctionnel permanent, des souffrances endurées et du préjudice sexuel soit réduite à de plus justes proportions, au rejet des demandes d’indemnisation du préjudice esthétique, du préjudice d’agrément et de l’incidence professionnelle, et au rejet du surplus des conclusions.

Il soutient que :

— il ne conteste pas le principe d’indemnisation des préjudices de M. A en lien avec l’aggravation de son état de santé, qui devraient être indemnisés comme suit :

—  24 675 euros au titre du déficit fonctionnel permanent ;

—  2 000 euros au titre des souffrances endurées ;

—  2 000 euros au titre du préjudice sexuel ;

— l’aggravation du préjudice esthétique et du préjudice d’agrément n’est pas établie et ne peut être indemnisée ;

— l’abandon définitif de sa profession n’est pas établie, l’incidence professionnelle ne peut être indemnisée.

Par ordonnance du 4 janvier 2019 les frais d’expertise ont été liquidés et taxés à la somme de 2 160 euros.

La procédure a été communiquée à la caisse primaire d’assurance maladie de Haute-Garonne qui n’a pas présenté d’observations.

Vu :

— les autres pièces du dossier ;

Vu :

— le jugement n° 1000300 du tribunal administratif de Montpellier en date du 28 décembre 2012 ;

— l’arrêt n° 13MA00893 de la cour administrative d’appel de Marseille en date du 18 décembre 2014 ;

— le code de la santé publique ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de Mme Viallet, rapporteure ;

— les conclusions de M. Baccati, rapporteur public ;

— et les observations de Me Pons-Serradeil, représentant M. A.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l’article L. 3111-9 du code de la santé publique: « Sans préjudice des actions qui pourraient être exercées conformément au droit commun, la réparation d’un dommage imputable directement à une vaccination obligatoire pratiquée dans les conditions mentionnées au présent chapitre, est supportée par l’Etat ». L’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales a été condamné, par un jugement du tribunal administratif de Montpellier en date du 28 décembre 2012, confirmé par un arrêt de la cour administrative d’appel de Marseille du 18 décembre 2014, à indemniser les conséquences de la mono-neuropathie présentée par M. A dont il a été retenu le lien avec la vaccination obligatoire contre l’hépatite B reçue dans le cadre de son activité de sapeur-pompier volontaire, par le biais de trois injections réalisées entre 1996 et 1997. M. A demande réparation de l’aggravation des préjudices en résultant.

Sur l’aggravation de l’état de santé de M. A et la charge de la réparation :

2. Il résulte de l’instruction, et notamment du rapport d’expertise ordonné en référé par le tribunal administratif de Montpellier le 3 septembre 2018, que M. A est suivi depuis le mois de février 2014 par un professeur du centre hospitalier universitaire de Montpellier. Ce praticien a noté le 30 août 2016 une aggravation de l’état de santé du patient avec une amyotrophie du membre inférieur gauche, du sterno-cléido-mastoïdien gauche et du membre supérieur gauche, des troubles de l’équilibre, ainsi que des douleurs à la jambe gauche, au bras gauche à type de crampes et de paresthésies. Il souligne également qu’il n’avait pas noté cette amyotrophie lors de l’examen réalisé en janvier 2014. L’expert a fixé une nouvelle date de consolidation au 15 octobre 2018. Dans ses conditions, il appartient à l’ONIAM de réparer l’ensemble des conséquences dommageables liées à l’aggravation de l’état de santé du requérant.

Sur l’évaluation des préjudices :

En ce qui concerne le préjudice patrimonial :

3. Le préjudice résultant de l’incidence professionnelle du dommage a vocation à indemniser ses incidences périphériques touchant à la sphère professionnelle, en raison notamment de la dévalorisation de la victime sur le marché du travail et de l’obligation dans laquelle elle s’est trouvée d’abandonner sa profession.

4. Il résulte de l’instruction, et notamment du rapport d’expertise, que M. A, né en 1969 et reconnu travailleur handicapé, se trouve dans l’impossibilité de reprendre son activité antérieure de maçon, même si une activité plus sédentaire demeure envisageable. Toutefois, le requérant, qui se borne à indiquer qu’il est contraint de renoncer définitivement à son emploi de maçon, n’apporte aucun justificatif relatif à sa situation professionnelle permettant d’apprécier le préjudice allégué. Dès lors, sa demande d’indemnisation de l’incidence professionnelle ne pourra qu’être rejetée.

En ce qui concerne les préjudices extra-patrimoniaux :

5. En premier lieu, il résulte de l’instruction et notamment du rapport d’expertise, que M. A présente une hémiparésie gauche, prédominant au niveau de la main gauche avec

une amyotrophie diffuse, une baisse de la force musculaire diffuse, une hypoesthésie

hémicorporelle gauche intéressant le visage, des douleurs très intenses du côté gauche et du dos pratiquement permanentes, une difficulté pour marcher plus de trois-cents mètres et des troubles visuels intermittents. Ce faisant, et malgré l’absence d’évaluation initiale du déficit fonctionnel permanent lors de l’expertise pratiquée en 2008, il y a lieu de retenir un taux d’aggravation de 15% de ce chef de préjudice, estimé globalement à 30% par l’expert à la date de consolidation. Compte tenu de l’âge du requérant, 49 ans à la date de sa consolidation, il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en l’évaluant à la somme de 24 675 euros.

6. En deuxième lieu, il résulte de l’instruction, et il n’est pas contesté que l’aggravation des souffrances endurées par M. A est évaluée à 2 sur une échelle de 0 à 7. Par suite, il sera fait une juste appréciation de ces souffrances en lui allouant la somme de 2 000 euros.

7. En troisième lieu, il sera fait une juste appréciation du préjudice sexuel, chef de préjudice nouveau en lien direct et certain avec le dommage, en allouant au requérant la somme de 1 000 euros.

8. En quatrième lieu, il résulte de l’instruction, et notamment du rapport d’expertise retenant un taux de 2 sur une échelle de 0 à 7, que le préjudice esthétique initial du patient n’a pu qu’être aggravé par le développement de l’amyotrophie dont il souffre, laquelle induit, notamment, des différences de mensuration au niveau des biceps, triceps, et quadriceps. Dès lors, il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en lui allouant la somme de 2 000 euros.

9. En dernier lieu, si le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 28 décembre 2012 a retenu le préjudice d’agrément de M. A compte tenu de son obligation de mettre fin à sa pratique d’activités sportives, le requérant n’établit pas ce en quoi son préjudice d’agrément se serait aggravé. Dès lors, il ne sera pas fait droit à sa demande d’indemnisation de ce chef de préjudice.

10. Il résulte de tout ce qui précède que l’ONIAM doit être condamné à verser la somme de 29 675 euros à M. A, au titre des préjudices subis en raison de l’aggravation de son état de santé imputable aux conséquences de la vaccination obligatoire contre l’hépatite B.

Sur les frais d’expertise :

11. Aux termes de l’article R. 761-1 du code de justice administrative : « Les dépens comprennent les frais d’expertise (). Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute personne perdante sauf si les circonstances particulières de l’affaire justifient qu’ils soient mis à la charge d’une autre partie ou partagés entre les parties. ».

12. Il convient, dans les circonstances de l’affaire, de mettre les frais d’expertise, soit 2 160 euros, à la charge définitive de l’ONIAM.

Sur les frais liés au litige :

13. Aux termes de l’article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. ».

14. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’ONIAM le versement au requérant d’une somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, en ce compris les frais liés à la demande indemnitaire préalable.

DECIDE :

Article 1er : L’office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales est condamné à verser la somme de 29 675 euros à M. A.

Article 2 : Les frais d’expertise, 2 160 euros, sont mis à la charge définitive de l’office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.

Article 3 : L’office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales versera à M. A la somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions du recours est rejeté.

Article 5 : Le présent jugement sera notifié à M. B A, à l’office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et à la caisse primaire d’assurance maladie de Haute-Garonne.

Copie en sera transmise à l’expert.

Délibéré après l’audience du 5 décembre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Rabaté, président,

Mme Pater, première conseillère,

Mme Viallet, conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 décembre 2022.

La rapporteure,

ML. VialletLe président,

V. Rabaté

Le greffier,

F. Balicki

La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Montpellier, le 4 janvier 2023.

Le greffier,

F. Balicki

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Tribunal administratif de Montpellier, 2ème chambre, 26 décembre 2022, n° 2004177