Tribunal administratif de Nancy, Chambre 2, 6 avril 2023, n° 2103704

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Village Justice · 14 novembre 2023

L'engagement syndical constitue l'un des droits fondamentaux reconnus aux agents publics [1]. En aucun cas cet engagement doit-il être le prétexte à une diminution de sa rémunération qui caractériserait une discrimination prohibée par la loi. Au sommaire de cet article... I. Le régime des primes et indemnités des fonctionnaires bénéficiant d'une DAS ou mis à disposition d'une organisation syndicale. I.1- La situation des agents titulaires bénéficiaires d'une DAS ou d'une mise à disposition d'une OS sur une quotité de travail équivalent à 100% d'un temps plein. I.2- La situation …

 
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Sur la décision

Référence :
TA Nancy, ch. 2, 6 avr. 2023, n° 2103704
Juridiction : Tribunal administratif de Nancy
Numéro : 2103704
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Satisfaction totale
Date de dernière mise à jour : 25 septembre 2023

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 17 décembre 2021 et 11 octobre 2022 Mme B A, représentée par Me Faivre, demande au tribunal :

1°) d’annuler la décision du 20 octobre 2021 par laquelle le directeur du centre hospitalier (CH) Emile Durkheim a refusé de lui verser l’indemnité relative au travail du dimanche et des jours fériés et l’indemnité pour travaux insalubres ;

2°) d’enjoindre au CH Emile Durkheim de lui verser l’indemnité relative au travail du dimanche et des jours fériés et l’indemnité pour travaux insalubres ;

3°) de mettre à la charge du CH Emile Durkheim la somme de 1 200 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— la décision est entachée d’une erreur de droit dès lors qu’elle méconnait les dispositions de l’article 7 du décret n° 2017-1419 du 28 septembre 2017 ;

— la décision est entachée d’une erreur d’appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 janvier 2022, le CH Emile Durkheim, conclut au rejet de la requête et demande qu’une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de Mme A en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient qu’aucun des moyens soulevés n’est fondé.

Par un mémoire en intervention volontaire enregistré le 11 octobre 2022, le syndicat CFDT Santé-Sociaux 88, représenté par Me Faivre, conclut aux même fins que Mme A et demande qu’une somme de 1 500 euros soit mise à la charge du CH Emile Durkheim en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le décret n°2017-1419 du 28 septembre 2017 relatif aux garanties accordées aux agents publics exerçant une activité syndicale ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de Mme Marini, rapporteure ;

— les conclusions de Mme Milin-Rance, rapporteure publique ;

— et les observations de Me Lemelle, substituant Me Faivre et représentant Mme A et le syndicat CFDT Santé-Sociaux 88.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A est aide-soignante titulaire au sein du CH Emile Durkheim. Depuis le 1er janvier 2006, elle est détachée à 100% au titre de ses missions syndicales pour le syndicat CFDT Santé-sociaux 88 puis depuis le 1er mai 2020 pour l’union régionale interprofessionnelle CFDT Grand Est. Le 30 août 2021, elle a sollicité le versement de l’indemnité pour travail le dimanche et jours fériés et l’indemnité pour travaux insalubres. Par une décision du 20 octobre 2021, dont Mme A demande l’annulation, sa demande a été rejetée par le directeur du CH Emile Durkheim.

Sur l’intervention du syndicat CFDT Santé-Sociaux 88 :

2. Eu égard à l’objet du syndicat CFDT Santé-Sociaux 88 défini à l’article 6 de ses statuts, qui lui confèrent la possibilité d’agir pour la défense des intérêts professionnels, économiques et sociaux de ses adhérents, le syndicat CFDT Santé-Sociaux 88 justifie d’un intérêt suffisant pour intervenir à l’instance à l’appui de la demande d’annulation présentée par Mme A, aide-soignante. L’intervention du syndicat CFDT Santé-Sociaux 88 est, par suite, admise.

Sur les conclusions à fin d’annulation :

En ce qui concerne l’indemnité pour travail le dimanche et jours fériés :

3. Aux termes de l’article 23 bis de la loi du 13 juillet 1983, dans sa version alors applicable : « I.- Sous réserve des nécessités du service, le fonctionnaire en position d’activité ou de détachement qui, pour l’exercice d’une activité syndicale, bénéficie d’une décharge d’activité de services ou est mis à la disposition d’une organisation syndicale, est réputé conserver sa position statutaire () ». Aux termes de l’article 7 du décret du 28 septembre 2017 visé ci-dessus, dont les dispositions sont entrées en vigueur le 1er octobre suivant : « L’agent bénéficiant d’une décharge totale ou d’une mise à disposition conserve le montant annuel des primes et indemnités attachées aux fonctions exercées dans son corps ou cadre d’emplois avant d’en être déchargé (). / Sont exclues du champ d’application du présent article les primes et indemnités ()/ 3° Liées à des horaires de travail atypiques lorsqu’elles ne sont pas versées à la majorité des agents de la même spécialité ou, à défaut, du même corps ou cadre d’emplois () ». Aux termes de l’article 2 du décret du 2 janvier 1992 : « Les fonctionnaires et agents des établissements mentionnés à l’article 2 du titre IV du statut général des fonctionnaires susvisés perçoivent, lorsqu’ils exercent leurs fonctions un dimanche ou un jour férié, une indemnité forfaitaire sur la base de huit heures de travail effectif, dont le montant est fixé par arrêté conjoint du ministre du budget et du ministre chargé de la santé ».

4. Si, étant déchargée de son activité, Mme A n’est plus exposée aux contraintes liées à l’exercice de ses fonctions, il résulte toutefois des dispositions du décret du 28 septembre 2017 citées au point 3 que, depuis leur entrée en vigueur, l’agent bénéficiant d’une décharge syndicale a droit au versement du montant des primes et indemnités liées à des horaires de travail atypiques et attachées à l’emploi qu’il occupait avant d’en être déchargé lorsque celles-ci sont versées à la majorité des agents du corps ou cadre d’emplois dont il relève. Le CH Emile Durkheim ne conteste pas que Mme A percevait l’indemnité en litige avant sa décharge d’activité et ne conteste pas sérieusement que les aides-soignants qu’il emploie bénéficient de la prime en litige. Dès lors, Mme A est fondée à soutenir que le refus qui lui a été opposé est, s’agissant de la période postérieure au 1er octobre 2017, entaché d’illégalité.

En ce qui concerne l’indemnité pour travaux dangereux, insalubres, incommodes ou salissants :

5. Aux termes de l’article 8 de l’arrêté du 18 mars 1981 visé ci-dessus : " Des indemnités spécifiques sont allouées aux agents chargés d’effectuer des travaux pour l’exécution desquels des risques ou des incommodités subsistent malgré les précautions prises et les mesures de protection adoptées. / Les travaux ouvrant droit aux indemnités spécifiques sont rangés dans les trois catégories ci-après : / () 2e catégorie : travaux présentant des risques d’intoxication ou de contamination ; / () / Ces indemnités ne sont pas cumulables entre elles ni avec l’indemnité définie à l’article 9 ci-après, ni avec les indemnités suivantes : / – indemnité allouée aux personnels effectuant des toilettes mortuaires ou des mises en bière ; / – indemnité susceptible d’être allouée au personnel relevant du livre IX du code de la santé publique aidant aux autopsies ".

6. Le fonctionnaire qui bénéficie d’une décharge totale de service pour l’exercice d’un mandat syndical a en principe droit, durant l’exercice de ce mandat, à ce que lui soit maintenu le bénéfice de l’équivalent des montants et droits de l’ensemble des primes et indemnités légalement attachées à l’emploi qu’il occupait avant d’en être déchargé pour exercer son mandat, à l’exception des indemnités représentatives de frais et des indemnités destinées à compenser des charges et contraintes particulières auxquelles il n’est plus exposé. Alors qu’il n’est pas contesté que Mme A bénéficiait de l’indemnité en litige avant sa décharge d’activité, elle est fondée à soutenir que le refus opposé à sa demande tendant au versement de l’indemnité en litige est entaché d’illégalité.

7. Il résulte de ce qui précède, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que la décision du 20 octobre 2021 du directeur du CH Emile Durkheim doit être annulée.

Sur les conclusions à fin d’injonction :

8. Eu égard au motif qui la fonde, l’annulation de la décision du directeur du CH Emile Durkheim implique nécessairement le versement à la requérante du montant correspondant à l’indemnité pour travail des dimanches et jours fériés qu’elle aurait dû percevoir à compter du 1er octobre 2017 ainsi que le versement de l’indemnité pour travaux dangereux, insalubres, incommodes ou salissants à compter du 1er octobre 2017. Dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu d’enjoindre au directeur du CH Emile Durkheim de procéder au calcul des sommes dues à la requérante et de les lui verser dans le délai de deux mois.

Sur les frais du litige :

9. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’il en soit fait application à l’encontre de Mme A, qui n’est pas la partie perdante. Dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de faire application de ces mêmes dispositions et de mettre à la charge du CH Emile Durkheim le versement à Mme A de la somme de 1 000 euros au titre des frais d’instance. Il n’y a pas lieu de mettre à la charge du CH Emile Durkheim la somme demandée par le syndicat CFDT Santé-Sociaux 88 en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : L’intervention du syndicat CFDT Santé-Sociaux 88 est admise.

Article 2 : La décision du 20 octobre 2021 du directeur du centre hospitalier Emile Durkheim est annulée.

Article 3 : Mme A est renvoyée devant le CH Emile Durkheim auquel il est enjoint de procéder dans un délai de deux mois à la liquidation du principal de l’indemnité due au titre de l’indemnité pour travail des dimanches et jours fériés à compter du 1er octobre 2017 et de l’indemnité pour travaux dangereux, insalubres, incommodes ou salissants à compter du 1er janvier 2017.

Article 4 : Le CH Emile Durkheim versera la somme de 1 000 euros à Mme A en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 6 : Le présent jugement sera notifié à Mme B A et au centre hospitalier Emile Durkheim.

Copie en sera adressée au syndicat CFDT Santé-Sociaux 88.

Délibéré après l’audience du 16 mars 2023, à laquelle siégeaient :

M. Marti, président,

M. Durand, premier conseiller,

Mme Marini, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 avril 2023.

La rapporteure,

C. Marini

Le président,

D. Marti

Le greffier,

F. Richard

La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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