Tribunal administratif de Rennes, 20 mai 2019, n° 1704335

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Rennes, 20 mai 2019, n° 1704335
Juridiction : Tribunal administratif de Rennes
Numéro : 1704335

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE RENNES

N° 1704335 RÉPUBLIQUE FRANÇAISE ___________


M. A X

___________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


Mme C Y

Rapporteur

___________ Le tribunal administratif de Rennes
M. David Bouju (4ème Chambre) Rapporteur public

___________

Audience du 23 mai 2019 Lecture du 20 juin 2019 ___________

36-10-06 D

Vu la procédure suivante :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 27 septembre 2017, 13 novembre, 21 novembre et 23 novembre 2018, M. A X représenté par Me Dubourg, demande au tribunal :

1°) d’annuler la décision du 26 juillet 2017 par laquelle le président de la chambre de commerce et d’industrie (CCI) d’Ille-et-Vilaine a mis fin à son contrat de travail ;

2°) de mettre à la charge de la CCI d’Ille-et-Vilaine la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision attaquée méconnaît l’article L. 212-1 du code des relations entre le public et l’administration en ce qu’elle ne mentionne pas la personne morale représentée par son signataire ;

- la décision attaquée est entachée d’un vice de procédure en ce que son licenciement se fonde sur les dispositions de l’article 43-6 du statut du personnel administratif des chambres de commerce et d’industrie, sans qu’il ait été mis en mesure de faire valoir ses observations, d’obtenir communication de son dossier administratif, et sans que la commission mixte de conciliation ait été saisie pour avis ;

- la décision attaquée méconnaît les droits de la défense : certains des manquements qui lui ont été reprochés n’ont pas été évoqués lors de l’entretien préalable au licenciement



N°1704335 2 qui s’est tenu le 21 juillet 2017 ; les manquements retenus dans la décision attaquée ne permettent pas de comprendre à quels faits ils se rapportent ;

- la décision attaquée est entachée d’un détournement de procédure en ce que la CCI d’Ille-et-Vilaine a mis fin à ses fonctions sur le fondement de l’article 43-5° du statut du personnel administratif des chambres de commerce et d’industrie, afin de s’exonérer de son obligation de solliciter l’avis de la commission mixte de conciliation ;

- la décision attaquée est entachée d’erreur de fait en ce qu’aucun des reproches formulé à son encontre n’est caractérisé.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 8 décembre 2017, 16 novembre, 22 novembre et 5 décembre 2018, la CCI d’Ille-et-Vilaine, représentée par Me Michel, conclut au rejet de la requête, à la condamnation de M. X à lui rembourser la somme totale de 104 789, 81 euros au titre des salaires perçus depuis la fin de son préavis jusqu’en novembre 2018 ainsi que toutes les rémunérations à percevoir jusqu’au jugement, et à ce que soit mise à sa charge la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- M. X ne pouvait se méprendre sur l’auteur de la décision attaquée, qui émane du président de la CCI d’Ille-et-Vilaine ;

- la décision attaquée, même fondée sur les dispositions de l’article 43-5° du statut du personnel des chambres de commerce et d’industrie, devait être motivée ; l’absence de saisine de la commission mixte de conciliation n’a pas été de nature à exercer une influence sur le sens de la décision attaquée ni à priver M. X d’une garantie ;

- les manquements reprochés à M. X lui ont tous été explicités lors de l’entretien préalable au licenciement ;

- le moyen tiré d’un détournement de procédure n’est pas fondé, en ce que le licenciement est intervenu sur le fondement de l’article 43 5° du statut du personnel des CCI ;

- la décision attaquée n’est pas entachée d’erreur de fait : les motifs contestés par M. X sont ceux qui ont conduit le président de la CCI Bretagne à ne pas le nommer directeur général de la CCI d’Ille-et-Vilaine ; dès lors qu’il ne pouvait occuper ce poste et qu’il n’a pas signé la lettre d’engagement qui lui a été proposé pour le poste de directeur des infrastructures pour le compte de la CCI d’Ille-et-Vilaine, le président de cette CCI était en droit de procéder à son licenciement ;

- la décision de licenciement devant être considérée comme acquise à la date de fin du préavis, soit le 28 janvier 2018 M. X doit être condamné à rembourser la somme de 104 789, 81 euros, correspondant aux sommes perçues de cette date jusqu’au mois de novembre 2018, outre les sommes perçues à compter de cette date ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- l’arrêté du 25 juillet 1997 relatif au statut du personnel de l’assemblée des chambres françaises de commerce et d’industrie, des chambres régionales de commerce et d’industrie et des groupements interconsulaires ;

- le code de justice administrative.



N°1704335 3 Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

- le rapport de Mme Y,

- les conclusions de M. Bouju, rapporteur public,

- et les observations de Me Dubourg, représentant M. X et les observations de Me Michel, représentant la chambre de commerce et d’industrie de Saint Malo-Fougères.

Considérant ce qui suit :

1. M. X a été employé par la chambre de commerce et d’industrie (CCI) de Saint Malo-Fougères pour exercer à compter du 4 mars 2013 les fonctions de directeur général. Par la décision attaquée du 26 juillet 2017 le président de la CCI d’Ille-et-Vilaine a procédé à son licenciement.

Sur les conclusions à fin d’annulation :

2. Aux termes de l’article 43 de l’annexe à l’arrêté du 25 juillet 1997 susvisé : « La cessation de fonctions de directeur général intervient dans les cas suivants : (…) 5° Licenciement à la discrétion du président de la chambre. Ce licenciement résulte de la dénonciation de la convention par mesure unilatérale du président, sans que ce dernier invoque un motif tiré de la capacité ou du comportement du directeur général. (…) 6° Licenciement pour raisons professionnelles. Ce licenciement est motivé par une inaptitude professionnelle ou un comportement de l’intéressé de nature à faire obstacle au bon accomplissement de sa tâche et au bon fonctionnement de la chambre. (…) ». Aux termes de son article 44 : « Les cessations de fonctions visées aux 4°, 5°, 6° et 7° de l’article 43 ci-dessus ne peuvent intervenir, sauf accord exprès du directeur général, qu’après avis du bureau de la chambre. Les cessations de fonctions visées aux 6° et 7° du même article ne peuvent intervenir qu’après que l’intéressé a été mis à même d’avoir communication de son dossier et après avis de la commission prévue à l’article 45 ci-dessous. (…) ». Aux termes de l’article 45 : « Il est créé une commission mixte de conciliation, composée de deux membres titulaires et de deux membres suppléants désignés parmi les présidents de chambre par l’assemblée des chambres françaises de commerce et d’industrie et de deux membres titulaires et de deux membres suppléants désignés parmi les directeurs généraux par l’organisme représentatif des directeurs généraux des chambres de commerce et d’industrie. Ces membres sont nommés pour une durée de trois ans par arrêté du ministre chargé de la tutelle administrative des chambres de commerce et d’industrie. (…) La commission saisie en application de l’article 44 ci-dessus se prononce dans le délai d’un mois sur la réalité et la gravité des faits invoqués et leurs conséquences en matière d’indemnisation. Les avis de la commission sont aussitôt communiqués au ministre chargé de la tutelle administrative des chambres de commerce et d’industrie. Ils sont notifiés à chacune des parties. (…) ».

3. Il ressort des pièces du dossier, que dans le cadre d’une restructuration des CCI de la région Bretagne, les CCI de Rennes et de Saint Malo-Fougères ont été fusionnées pour devenir la CCI d’Ille-et-Vilaine, dont M. Z, ancien directeur général de la CCI de Rennes a été nommé directeur général. M. X a alors été destinataire d’un courrier mentionnant en objet « lettre d’engagement » lui confirmant son engagement dans les services de la CCI région Bretagne en qualité de cadre directeur niveau 8 titulaire au 1er janvier 2017, en substitution de son engagement en qualité de directeur général de la CCI de Saint Malo-Fougères, avec mise à



N°1704335 4 disposition de la CCI d’Ille-et-Vilaine comme directeur des infrastructures. Il n’est toutefois pas établi que cet engagement ait été signé par le président de la CCI Bretagne et M. X, qui indique sans contestation que le poste qui lui a été proposé n’a jamais été créé a, par un courrier du 19 décembre 2016 réceptionné le même jour, été informé par le président de la CCI d’Ille-et-Vilaine qu’il était dispensé d’exercer son activité, avec maintien de sa rémunération.

4. La décision attaquée qui indique se fonder sur les dispositions de l’article 43-5° du statut du personnel administratif des chambres de commerce et d’industrie est motivée comme suit : « le choix de ne pas vous retenir sur le poste de directeur général repose sur plusieurs constats au rang desquels se trouvent des divergences de point de vue dans la façon de conduire le rapprochement entre les ex-CCI de Rennes et de Saint Malo-Fougères, vos manquements managériaux dans l’animation de vos équipes et enfin les difficultés dans la gestion des projets que vous avez eu à conduire. De plus, selon l’article R.711-70 du code de commerce : les services des chambres de commerce et d’industrie sont dirigées par un directeur général (…). En l’espèce, la CCI d’Ille-et-Vilaine est dirigée par Monsieur D Z nommé en qualité de Directeur Général. ». Il ressort de cette motivation, que le licenciement de M. X repose sur des éléments en lien avec son aptitude professionnelle. Si la CCI d’Ille-et-Vilaine soutient qu’elle n’a fait qu’expliciter dans la décision attaquée les raisons qui ont conduit le président de la CCI Bretagne à ne pas retenir M. X dans les fonctions de directeur général de la CCI d’Ille-et-Vilaine, il ressort des termes de cette décision que ces mêmes motifs fondent également la décision de licenciement de M. X, dont il n’est pas établi qu’il aurait refusé une affectation sur un autre poste comme le soutient la CCI d’Ille-et-Vilaine, et auquel de nouvelles fonctions n’ont pas été attribuées. Le requérant est donc fondé à soutenir que le licenciement prononcé à son encontre résulte de l’application du 6° de l’article 43 du statut du personnel des CCI et non pas du 5° de cet article.

5. Il est constant que le licenciement de M. X n’a pas été précédé de l’avis de la commission mixte de conciliation prévue par l’article 45 du statut du personnel des CCI et ce, en méconnaissance des dispositions précitées de l’article 44 de ce même statut. Cette irrégularité a été susceptible d’exercer, en l’espèce, une influence sur le sens de la décision attaquée et à priver M. X d’une garantie. Dès lors, il y a lieu d’en prononcer l’annulation.

6. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête, que la décision du 26 juillet 2017 doit être annulée.

Sur les conclusions pécuniaires :

7. Compte tenu de ce qui a été dit au point 6, les conclusions présentées par la CCI d’Ille-et-Vilaine tendant au remboursement par M. X des salaires qu’il a perçus depuis la fin de son préavis doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de la CCI d’Ille-et-Vilaine la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. X et non compris dans les dépens. En revanche, les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. X, qui n’est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que la CCI d’Ille-et-Vilaine demande sur ce fondement.



N°1704335 5

D E C I D E :

Article 1er : La décision du 26 juillet 2017 du président de la CCI d’Ille-et-Vilaine est annulée.

Article 2 : La CCI d’Ille-et-Vilaine versera à M. X la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions présentées par la CCI d’Ille-et-Vilaine sont rejetées.

Article 4 : Le présent jugement sera notifié à M. A X et à la chambre de commerce et d’industrie d’Ille-et-Vilaine.

Délibéré après l’audience du 23 mai 2019, où siégeaient :

M. Sudron, président, Mme Y, première conseillère, Mme Dupuy-Bardot, conseillère,

Lu en audience publique le 20 juin 2019.

Le rapporteur, Le président,

signé signé

A. Y A. SUDRON

La greffière,

signé

C. SALLADAIN

La République mande et ordonne au préfet d’Ille-et-Vilaine en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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Tribunal administratif de Rennes, 20 mai 2019, n° 1704335