Tribunal de grande instance de Bordeaux, 1re chambre, 26 mai 1998

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  • Procédure abusive·
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Sur la décision

Référence :
TGI Bordeaux, 1re ch., 26 mai 1998
Juridiction : Tribunal de grande instance de Bordeaux
Domaine propriété intellectuelle : BREVET
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : FR9112852
Titre du brevet : PROCEDE DE FIXATION DE NAPPES DE FILETS, EN RELIANT LES EXTREMITES DES MAILLES
Classification internationale des brevets : A01K
Référence INPI : B19980081
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Texte intégral

FAITS ET PROCEDURE La Société Anonyme Etablissement ARMAND MONDIET est titulaire du brevet d’invention français déposé à l’INPI le 14 octobre 1991, enregistré sous le n 91 12852 et publié sous le numéro 2 682 261, ayant pour objet un procédé de fixation de nappes de filet en reliant les extrémités des mailles. Elle a fait procéder le 10 juillet 1996 à une saisie contrefaçon au siège de la SARL PHAP FISHING NET, qui commercialise des filets tramails à soles, constitués de trois nappes reliées ensemble, en parties hautes et basses des mailles, par des rubans adhésifs. Elle a assigné cette Société le 24 juillet 1996 aux fins de :

- voir dire et juger qu’en important, en détenant, en offrant à la vente et en vendant des filets reproduisant notamment les caractéristiques couvertes par les revendications 1, 2 et 3 du brevet n 91 12852, la Société PHAP FISHING NET s’est rendue coupable d’actes de contrefaçon au sens de l’article L 615-1 du Code de la propriété Industrielle,
- voir interdire à la Société PHAP FISHING NET de fabriquer, d’importer, de détenir, d’offrir en vente et de vendre ledit matériel sous astreinte définitive de 10.000 FF par infraction constatée, le Tribunal se réservant la liquidation de l’astreinte,
- voir ordonner une expertise aux fins de déterminer son préjudice,
- voir condamner la Société défenderesse à lui verser dès à présent la somme de 200.000 FF à titre de dommages et intérêts provisionnels,
- voir ordonner la publication du jugement à intervenir dans 5 journaux ou revues à concurrence de 20.000 FF H.T par insertion,
- voir ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir,
- voir condamner la Société défenderesse à lui payer la somme de 50.000 FF sur le fondement de l’article 700 du N.C.P.C. et tous les dépens. La société PHAP FISHING NET a conclu les 7 février et 3 septembre 1997, et la société Ets ARMAND M les 4 juin et 18 décembre 1997. L’ordonnance de clôture a été rendue le 5 mars 1998. La société PHAP FISHING NET conclut au débouté de la Société ARMAND MONDIET de toutes ses prétentions, et demande reconventionnellement au Tribunal de déclarer nul le brevet d’invention invoquée, de condamner la société demanderesse à lui verser les sommes de 200.000 FF en réparation de son préjudice moral et de 100.000 FF pour procédure abusive, d’ordonner une expertise aux fins de déterminer son préjudice financier en réparation duquel elle sollicite à titre provisionnel la somme de 300.000 FF.

Elle réclame en outre 50.000 FF sur le fondement de l’article 700 du N.C.P.C., l’exécution provisoire de la décision et la condamnation de la Société demanderesse aux dépens. La Société ARMAND MONDIET soutient que les filets commercialisés par la société défenderesse ont été réalisés selon un procédé reproduisant les caractéristiques protégées par les revendications 1, 2 et 3 du brevet n 91 12852 ainsi rédigées : 1 – Procédé pour relier des nappes de filets de pêche ensemble, caractérisé en ce que les nappes de filets sont reliées aux extrémités hautes et basses des mailles, 2 – Procédé selon la revendication 1, caractérisé en ce que les mailles peuvent être reliées à l’aide d’un ruban adhésif ou fil textile, 3 – Ce procédé selon la revendication 1 ou la revendication 2 caractérisé en ce qu’il puisse être mis en oeuvre grâce à un dispositif manuel ou mécanique. La Sté PHAP FISHING NET estime ce brevet entaché de nullité pour défaut de nouveauté et d’activité inventive. elle verse aux débat ;

- la traduction d’un brevet hollandais de 1944 déposé pour la fabrication d’un filet de pêche renforcé par la fixation d’un second filet aux mailles plus grandes,
- des attestations de professionnels en vente de matériel de pêche, des factures, des commandes et un article de presse danois, destinés à établir que bien avant 1991, des filets constitués de nappes reliées entre elles, ou tramails prémontés étaient déjà largement diffusés. Or la technique décrite dans le brevet à la fois simple et évidente n’est pas différente de celle qui servait à la fabrication de ces produits commercialisés antérieurement. La Société PHAP FISHING NET soutient en outre que les filets mis en vente par elle ne constituent pas une contrefaçon, la fixation des nappes n’étant pas effectuée sur les extrémités hautes et basses des nappes, mais sur les mailles elles-mêmes, ce qui facilite le montage. Elle estime avoir subi, du fait de la procédure intentée à tort par la société demanderesse :

- une perte de crédibilité auprès de ses clients informés de l’action en contrefaçon par la Société ARMAND MONDIET, justifiant selon elle ses demandes de 200.000 FF au titre du préjudice moral et de 100.000 FF pour procédure abusive ;

- un manque à gagner résultant de sa renonciation à la commercialisation des filets contestés pendant le cours de la procédure, et calculés sur la base de son chiffre d’affaires d’avril 1996, soit 84.870 FF, et du chiffre d’affaires qu’elle aurait réalisé avec FISHING

NET FACTORY si elle avait donné suite à des commandes comme celle du 13/12/95, soit 117.750 FF, représentant 1000 filets par mois. La Société ARMAND MONDIET soutient en réplique que le brevet hollandais ne constitue pas une antériorité pertinente. En effet l’objet de l’invention est le renforcement d’un filet de pêche classique, alors que celui du brevet contesté est de faciliter le montage d’un filet tramail en réalisant un pré-assemblage des trois nappes le constituant. La technique décrite par le brevet hollandais consiste à lier les mailles de renfort à tous les points d’intersection avec les mailles du filet classique, alors que les nappes des filets, dans le brevet litigieux, ne sont reliées qu’aux extrémités hautes et basses des mailles, ce qui diminue le nombre de points de liaison. La Société demanderesse estime que les diverses, attestations versées aux débats ne permettent pas davantage de rapporter la preuve d’une antériorité certaine quant à sa date et son contenu, les montages auxquels il y est fait allusion n’étant pas précisément décrits. Elle affirme que le procédé inventé par elle, présente l’avantage, outre sa rapidité de mise en oeuvre, de permettre de faire coulisser les mailles sur les fils de liaison du kit et de permettre une possibilité d’ajustement du filet sur les ralingues ce qui était totalement jusqu’alors. La Société ARMAND MONDIET estime que la contrefaçon est établie, le fait que les rubans adhésifs soient placés à 18 millimètres des extrémités des mailles sur les filets vendus par la Société défenderesse ne constituant qu’une différence de détail. Elle ajoute que la société PHAP FISHING NET ne justifie de la réalité d’aucun des préjudices qu’elle allègue.

DECISION Sur la validité des revendications 1. 2 et 3 du brevet d’invention n 91 12852 Ne sont brevetables que les inventions nouvelles impliquant une activité inventive Les documents versés aux débats par la société PHAP FISHING NET sont les suivants :

- traduction d’un brevet hollandais de 1944 portant sur un procédé visant à renforcer un filet de pêche en liant le fil du filet de renforcement au fil du filet de pêche au moyen d’un simple enfilage ou par tissage ou d’une autre manière équivalente, pas seulement aux noeuds du filet de renforcement mais aussi à des endroits intermédiaires,

— attestations de Monsieur MOGENS F, PDG de la Société danoise IRON STRAND, et de Monsieur SURACHA S, exécutive Director de la Société DECHAPANICH FISHING NET FACTORY, qui certifient que leurs sociétés respectives importaient et fabriquaient des kits de tramails à soles (filets tramails prémontés) avant 1990, et que les nappes de filets étaient reliées aux extrémités hautes et basses des mailles à l’aide d’un fil textile ou d’un scotch.

- télécopie adressée le 02/08/1996 par Monsieur J, de la Société DANFISHEQUIP, ainsi rédigée « je vous signale que ma société-mère TH. FRYDENDAHL-PEDERSEN A/S importait des »kits« (filet trémails prémontés) déjà en 1990. Je vous transmets la copie d’une confirmation de vente de cette époque. La même usine DECHAPANICH en avait déjà fait pour un de nos concurrents danois bien avant la date du premier achat de FRYDENDAHL-PEDERSEN. Si l’on veut parler de l’inventeur de la méthode, c’est plutôt à ce concurrent là que l’honneur revient. »
- télécopie adressée le 7/11/88 par SEAMAR FRANCE à FISHERNET APS, passant commande notamment de « Trémail : 1000 mètres montés », sur laquelle figure un schéma de montage avec la mention « une grande maille toutes les 5 petites mailles »,
- un article paru dans la presse danois le 20 septembre 1990, et sa traduction, faisant état de l’idée d’un importateur de filets de pêche, Ole Dahl, consistant à prémonter les grandes mailles sur les trémails avant de les commercialiser. Il est précisé dans l’article : « aujourd’hui il vend presque uniquement ces trémails prémontés asiatiques »,
- le courrier des lecteurs paru dans le même hebdomadaire daté du 27 septembre 1990, et sa traduction, dans lequel Monsieur P, directeur d’une Société G & O NET, indique qu’en fabriquant japonais, Monsieur N, lui a livré dès 1986 des trémails prémontés, qu’il estime donc avoir été précurseur dans ce domaine, et qu’il fournit toujours des filets nagaura de haute qualité avec grandes mailles prémontées. Ces extraits de la presse danoise confirment de manière irréfutable les indications contenues dans les diverses attestations et copies de commandes versées aux débats : l’idée de prémonter des nappes de filets avait été décrite et mise en oeuvre bien avant 1990, et n’était donc pas nouvelle lors du dépôt, les 14 octobre 1991, du brevet d’invention litigieux. Quant au procédé technique lui-même, il ne fait l’objet dans les revendications dudit brevet, que des précisions suivantes : « procédé caractérisé en ce que les nappes de filets sont reliées aux extrémités hautes et basses des mailles, … à l’aide d’un ruban adhésif ou fil textile…, grâce a un dispositif manuel ou mécanique ». Tout homme de métier ne mettant en oeuvre que ses connaissances et capacités professionnelles, voire l’homme de la rue lui-même était capable d’utiliser un tel procédé qui découle de manière évidente non seulement de l’état de la technique mais de la pure logique, et n’implique donc aucune activité inventive.

Le brevet d’invention déposé par la SA ARMAND M doit être déclaré nul pour défaut de nouveauté et d’activité inventive. L’ensemble des prétentions de la Société demanderesse sera donc rejeté. Sur les demandes reconventionnelles La Société PHAP FISHING NET argue d’un préjudice moral et d’un préjudice commercial dus au fait qu’elle a du renoncer provisoirement à vendre les filets incriminés par la SA ARMAND M. Elle ne verse ce. pendant aux débats, à l’exception de courriers écrits par elle, aucun élément de nature à établir la pression dont elle-même et ses clients auraient fait l’objet, et reconnait d’ailleurs que la décision de cesser cette vente résultait d’un choix personnel. Ces demandes de dommages et intérêts seront donc rejetées. Le caractère abusif de la procédure intentée par le demandeur n’est pas établi, il n’y a donc pas lieu de faire droit à la demande de dommages et intérêts présentée de ce chef. Il serait inéquitable de laisser à la charge de la Société PHAP FISHING NET les frais exposés par elle et non compris dans les dépens. La SA ARMAND M devra donc lui payer la somme de 15.000 FF en application de l’article 700 du N.C.P.C., et supporter les dépens. PAR CES MOTIFS Statuant publiquement par jugement contradictoire et en premier ressort,
- DECLARE nul pour défaut de nouveauté et d’activité inventive le brevet déposé par la SA ARMAND M enregistré sous le numéro 91 12852,
- DEBOUTE la SA ARMAND M de l’ensemble de ses demandes.

- REJETTE les demandes reconventionnelles en dommages et intérêts de la Société PHAP FISHING NET,
- CONDAMNE la SA ARMAND M à payer à la Société PHAP FISHING NET la somme de 15.000 FF (quinze mille francs) en application de l’article 700 du N.C.P.C.,
- CONDAMNE la SA ARMAND M aux dépens.

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