Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre, 21 mai 1997

  • Article l 716-5 code de la propriété intellectuelle·
  • Deux lettres <c> entrelacees dans un cercle·
  • Appréciation au regard des marques invoquees·
  • Article 378 nouveau code de procédure civile·
  • Reproduction de l'élément caracteristique·
  • Intention de poursuivre l'action civile·
  • Contrefaçon de la marque 1 293 767·
  • Deux lettres <c> entrelacees·
  • Condamnation du premier defendeur·
  • Marque de fabrique et de services

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 3e ch., 21 mai 1997
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Domaine propriété intellectuelle : MARQUE
Marques : No 5;MARQUES FIGURATIVES
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : 1334490;1524958;1123953;1293767
Classification internationale des marques : CL14
Liste des produits ou services désignés : Bijouterie de fantaisie
Référence INPI : M19970309
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Texte intégral

FAITS ET PROCEDURE La Société CHANEL est propriétaire des 3 marques suivantes :

- la marque déposée le 11 Décembre 1985, renouvelée le 8 Décembre 1995, enregistrée sous le numéro 1.334.490.

- la marque déposée le 18 Avril 1989, en renouvellement d’un précédent dépôt, enregistrée sous le numéro 1.524.958.

- la marque déposée le 21 Février 1980, enregistrée sous le numéro 1.123.953 dans laquelle le C à droite est doré et le C inversé à gauche est argenté. La Société CHANEL est également titulaire de la marque « N 5 », déposée le 27 Décembre 1984 et renouvelée le 8 Juillet 1994, enregistrée sous le numéro 1.293.767. Ces 4 marques désignent divers produits relevant des classes de la classification internationale et notamment les articles de bijouterie de fantaisie (classe 14). Autorisée par deux ordonnances sur requête du 29 Avril 1988, la Société CHANEL a fait procéder le même jour, à des saisies-contrefaçon dans les locaux de la Société SODEX et de la Société YVONNE et BENOIT F et CIE. La première saisie révélait que les bijoux litigieux avaient été acquis auprès de la Société ACTIF MOD, de la Société JEAN- CLAUDE DAVID et de la Société YVONNE et BENOIT F. La seconde établissait notamment que les bijoux entreposés dans les locaux de la Société YVONNE et BENOIT F avaient été acquis auprès des Etablissements FARGEON. C’est dans ces circonstances que la Société CHANEL a, par acte du 10 Mai 1988, assigné en contrefaçon de ses marques, la Société SODEX, la Société ACTIF’MOD, la Société CREATIONS JEAN-CLAUDE DAVID, la Société en nom collectif Yvonne et Benoit FARGEON et la Société ETABLISSEMENTS YG FARGEON. Elle a demandé, outre les mesures habituelles d’interdiction et de publication, de condamner in solidum les défenderesses à lui payer la somme de 200.000 F en réparation de l’atteinte portée aux trois marques constituées des C majuscules entrecroisés, la somme de 100.000 F en réparation de l’atteinte portée à la valeur distinctive de la marque « N 5 », la somme de 500.000 F à titre de provision en réparation de son préjudice commercial à déterminer par voie d’expertise et celle de 30.000 F sur le fondement de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. A la demande des Sociétés SODEX, ACTIF’MOD, ETABLISSEMENTS FARGEON et YVONNE et BENOIT F, le Tribunal a, par jugement du 21 Février 1989, sursis à statuer jusqu’à ce qu’il ait été définitivement statué sur la plainte avec constitution de partie civile déposée par la Société CHANEL le 26 Juin 1988.

Par jugement devenu définitif du 5 Février 1996, la 31e chambre correctionnelle du Tribunal de Grande Instance de PARIS a notamment déclaré irrecevable la constitution de partie civile de la Société CHANEL à l’encontre des frères F et a radié la procédure du rôle. Dans des écritures notifiées le 17 Avril 1996, la Société CHANEL a demandé le rétablissement de l’affaire et réitéré ses demandes. L’affaire a été rétablie le 3 Mai 1996. Gérard F exerçant sous l’enseigne ETABLISSEMENTS FARGEON, la Société YVONNE et BENOIT F, la Société ACTIF’MOD ont soulevé l’irrecevabilité de l’action de la Société CHANEL pour prescription. Ils font valoir que le jugement de sursis à statuer n’est pas interruptif de prescription. Sur le fond, ils ont conclu au rejet de la demande : ils exposent d’une part que la Société CHANEL ne peut prétendre à un droit privatif sur toute majuscule C, même inversée et entrecroisée et que l’usage d’arcs de cercles croisé est un élément décoratif banal. Ils ont ajouté, d’autre part, pour s’opposer à l’action en contrefaçon de la marque « N 5 » que celle-ci n’est pas reproduite et que le chiffre 5 ne peut faire l’objet d’une protection. A titre reconventionnel, ils ont sollicité chacun l’allocation d’une somme de 100.000 F à titre de dommages-intérêts et d’une indemnité de 50.000 F sur le fondement de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Avant sa radiation du Registre du Commerce intervenue le 15 Mars 1989, la Société SODEX a conclu au rejet des demandes de la Société CHANEL. Bien que régulièrement assignée en la personne de son gérant, la Société CREATIONS JEAN-CLAUDE DAVID n’a pas constitué avocat de sorte que la présente décision sera réputée contradictoire.

DECISION
- Sur la prescription – Attendu que la Société ACTIF’MOD, la Société YVONNE et BENOIT F et les Etablissements FARGEON soutiennent que la Société CHANEL est irrecevable à poursuivre l’instance engagée en 1988, par application des dispositions de l’article L 716- 5 du Code de la Propriété Intellectuelle ;

Mais attendu qu’aux termes de l’article 378 du Nouveau Code de Procédure Civile « la décision de sursis suspend le cours de l’instance pour le temps ou jusqu’à la survenance de l’évènement qu’elle détermine » ; Que la suspension de l’instance interrompt la prescription jusqu’à la survenance de l’évènement défini ; Attendu que par jugement du 21 Février 1989, ce Tribunal a sursis à statuer sur l’action de la Société CHANEL jusqu’à ce qu’il ait été définitivement statué sur la plainte avec constitution de partie civile déposée par celle-ci le 26 Juin 1988 ; Que le jugement de la 31e chambre correctionnelle du Tribunal de Grande Instance de PARIS, rendu contradictoirement le 5 Février 1996, est devenu définitif dans les 10 jours de son prononcé ; Attendu que la prescription de l’action publique constatée par la juridiction pénale est sans incidence sur l’action exercée devant la juridiction civile ; Que la Société CHANEL a, par conclusions notifiées le 17 Avril 1996, soit dans les deux mois de la survenance de la décision pénale, manifesté son intention de poursuivre l’instance suspendue ; Attendu que la prescription de 3 ans n’est donc pas acquise ;

- Sur la contrefaçon de marques – * Sur les marques numéros 1.334.490 – 1.524.958 et 1.123.953 – Attendu que les défenderesses soutiennent que la protection résultant des marques déposées ne saurait s’appliquer à l’usage banal de 2 C entrecroisés, en dissociant de l’analyse, les différents éléments d’aspect et de matières des bijoux incriminés ; qu’elles relèvent que les marques MUST de CARTIER et CELINE sont également composées de 2 C ; qu’enfin, l’usage d’arcs de cercles croisés constitue un élément décoratif banal, d’usage courant très ancien ; Mais attendu que ces arguments sont inopérants dès lors que les sociétés défenderesses ne concluent pas à la nullité des marques opposées qui constituent donc des titres valables auxquels provision est due ; Attendu que les défenderesses font valoir, en outre, que les bijoux qu’elles fabriquent et commercialisent ne peuvent se confondre avec les bijoux de la Société CHANEL ; Mais attendu qu’il convient de comparer les bijoux incriminés aux marques appartenant à la Société CHANEL dont la reproduction est alléguée et non comparer les bijoux entre eux ;

Attendu qu’il résulte des deux procès-verbaux de saisie-contrefaçon dressés le 28 Avril 1988 dans les locaux de la Société SODEX et de la Société YVONNE et BENOIT F que les bijoux photographiés, à l’exception de ceux figurant sur les clichés numéro 8048/214 et 8048/105, reproduisent la caractéristique essentielle des marques de la Société CHANEL, les 2 lettres majuscules C entrecroisées dos à dos, entourées ou non d’un cercle ; Attendu qu’en fabriquant, en offrant à la vente et en vendant ces bijoux, la Société SODEX, la Société ACTIF’MOD, la Société CREATIONS JEAN-CLAUDE DAVID, la Société en nom collectif YVONNE et BENOIT FARGEON et la Société ETABLISSEMENTS FARGEON ont commis des actes de contrefaçon des marques numéros 1.334.490, 1.524. 958 et 1.123.953 appartenant à la Société CHANEL ; * Sur la marque N 5 – Attendu que les défenderesses soutiennent qu’aucun des bijoux saisis ne reproduit cette marque et que le chiffre 5 ne peut faire l’objet d’une protection ; Mais attendu que les dénominations sous toutes les formes et notamment les chiffres peuvent constituer un signe susceptible d’être déposé à titre de marque ; Attendu que le chiffre 5 est l’élément essentiel de la marque déposée par la Société CHANEL, qui évoque à lui seul le parfum renommé de cette maison de couture ; Attendu qu’il résulte du procès-verbal de saisie-contrefaçon dressé le 28 Avril 1988, dans les locaux de la Société SODEX, que les bijoux saisis représentés sur les photographies numéros 8048/207 – 208 – 212, reproduisent le chiffre 5, élément caractéristique de la marque N 5, qu’ils en constituent la contrefaçon ;

- Sur les mesures réparatrices – Attendu qu’il résulte de l’extrait du Registre du Commerce et des Sociétés versé aux débats que la Société SODEX a, à la suite d’une clôture des opérations de liquidation, fait l’objet d’une radiation le 15 Mars 1989 ; Que cette société n’ayant plus d’existence légale, aucune condamnation ne peut être prononcée à sn encontre ; Attendu, en revanche, qu’aucun élément n’est produit au dossier pour justifier la dissolution et la radiation de la Société Yvonne et Benoit F ; Attendu qu’il sera fait droit aux mesures d’interdiction et de publication dans les termes qui seront précisés au dispositif ; Attendu que les actes de contrefaçon ont porté atteinte à la valeur distinctive des marques de la Société CHANEL, dont la renommée est incontestable ; que le préjudice subi de ce

chef par la Société CHANEL sera fixé à la somme de 100.000 F pour les 3 marques figuratives et à celle de 50.000 F pour la marque N 5 ; Attendu que la perte partielle du marché résultant pour la Société CHANEL de la vente des bijoux litigieux est constitutive d’un préjudice commercial qui doit être évalué à 150.000 F, sans qu’il soit nécessaire de recourir à une mesure d’expertise ; Attendu que l’exécution provisoire assortira les seules mesures d’interdiction ; Attendu que la demande principale ayant été déclarée fondée, les Sociétés défenderesses seront déboutées de leur demande reconventionnelle ; Attendu que l’équité commande d’allouer à la Société CHANEL la somme de 15.000 F sur le fondement de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; PAR CES MOTIFS Statuant par jugement réputé contradictoire, Rejette la fin de non recevoir tirée de la prescription. Dit que les bijoux fabriqués, offerts en vente et vendus par la Société SODEX, la Société ACTIF’MOD, la Société CREATIONS JEAN-CLAUDE DAVID, la Société en nom collectif YVONNE et BENOIT FARGEON et les Etablissements FARGEON constituent des contrefaçons des marques numéros 1.334.490, 1.524.958, 1.123.953 et 1.293.767 dont est titulaire la Société CHANEL. En conséquence, Interdit aux Sociétés défenderesses à l’exception de la Société SODEX de faire usage de ces marques, pour des articles de bijouterie, sous astreinte de MILLE FRANCS (1.000 F) par infraction constatée, passé un délai de 15 jours à compter de la signification du présent jugement et ce, pendant un délai de 3 mois au-delà duquel cette chambre pourra être à nouveau saisie. Condamne in solidum la Société ACTIF’MOD, la Société CREATIONS JEAN- CLAUDE DAVID, la Société en nom collectif YVONNE et BENOIT FARGEON, les Etablissements FARGEON à payer à la Société CHANEL les sommes suivantes :

- la somme de CENT MILLE FRANCS (100.000 F) à titre de dommages-intérêts en réparation de l’atteinte portée aux 3 marques figuratives constituées des C majuscules entrecroisés,
- la somme de CINQUANTE MILLE FRANCS (50.000 F) à titre de dommages-intérêts en réparation de l’atteinte portée à la marque N 5,

— la somme de CENT CINQUANTE MILLE FRANCS (150.000 F) à titre de dommages- intérêts en réparation de son préjudice commercial. Autorise la Société CHANEL à faire publier le dispositif du présent jugement dans 3 journaux ou revues de son choix, aux frais in solidum des sociétés défenderesses à l’exception de la Société SODEX, sans que ceux-ci puissent excéder la somme globale de SOIXANTE MILLE FRANCS (60.000 F). Déboute les sociétés défenderesses de leur demande reconventionnelle. Déboute la Sociét

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