ADLC, Décision 08-D-32 du 16 décembre 2008 relative à des pratiques mises en oeuvre dans le secteur du négoce des produits sidérurgiques

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Sur la décision

Référence :
Cons. conc., déc. n° 08-D-32 du 16 déc. 2008
Numéro(s) : 08-D-32
Textes appliqués :
420-1, 81 TCE, L. 464-2, L. 464-2 IV, L. 464-2 III
Identifiant ADLC : 08-D-32
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Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Décision n° 08-D-32 du 16 décembre 2008 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur du négoce des produits sidérurgiques Le Conseil de la concurrence (section III A), Vu le courrier du 7 juillet 2005, enregistré le 8 juillet 2005 sous le numéro 05/0045 F, par lequel le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie a saisi le Conseil de la concurrence de la situation de la concurrence dans le secteur du négoce de produits sidérurgiques ; Vu la demande de la société Descours & Cabaud SA et de ses filiales formulée au rapporteur général du Conseil de la concurrence le 25 octobre 2006, enregistrée sous le numéro 06/0074AC et tendant à obtenir le bénéfice du IV de l’article L. 464-2 du code de commerce ; Vu l’avis conditionnel de clémence n° 07-AC-03 du 14 mars 2007 ; Vu les articles 81 et 82 du traité instituant la Communauté européenne ; Vu le livre IV du code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence ; Vu les décisions de secret des affaires n° 07-DSA-192 du 1er octobre 2007, n° 08-DSA-01, 08-DSA-02, 08-DSA-03, 08-DSA-04, 08-DSA-05, 08-DSA-06, 08-DSA-07, 08-DSA-08, 08-DSA-09, 08-DSA-10, 08-DSADEC-01, 08-DSADEC-02 et 08-DSADEC-03 du 7 janvier 2008, n° 08-DSA-22 et 08-DSADEC-08 du 5 février 2008, n° 08-DSA-111 et 08- DSA-112 du 22 juillet 2008, n° 08-DSA-165 et 08-DSADEC-77 du 13 octobre 2008 et les décisions n° 08-DEC-03, 08-DEC-04, 08-DEC-05, 08-DEC-06, 08-DEC-07 du 27 février 2008, n° 08-DEC-13, 08-DECR-14, 08-DECR-15, 08-DECR-16 du 28 février 2008 autorisant l’utilisation de pièces classées en annexe confidentielle ; Vu les procès-verbaux des 11, 14 et 25 avril 2008 par lesquels les sociétés Produits d’Usines Métallurgiques PUM Station Service Acier, Arcelor Profil et AMD Sud Ouest pour le premier, KDI pour le deuxième et la Fédération Française de Distribution des Métaux venant aux droits de France Négoce Aciers pour le troisième ont déclaré ne pas contester le grief qui leur avait été notifié et ont demandé le bénéfice des dispositions du III de l’article L. 464-2 du code de commerce ;

Vu les observations présentées par les sociétés Produits d’Usines Métallurgiques PUM Station Service Acier, Arcelor Profil et AMD Sud Ouest, KDI, Descours & Cabaud SA, Etablissements Maisonneuve, Etablissements Marc Morel et Fils, SA Clisson Métal, Liametho, Comptoir de Distribution Professionnelle, Ferren Fers, par la Fédération Française de Distribution des Métaux venant aux droits de France Négoce Aciers et par le commissaire du Gouvernement ; Vu les autres pièces du dossier ; Le rapporteur, le rapporteur général, le commissaire du Gouvernement, les représentants des sociétés Descours & Cabaud SA, Comptoir de Distribution Professionnelle, Ferren Fers, SA Clisson Métal, Liametho, Etablissements Maisonneuve, Etablissements Marc Morel et Fils, la Fédération Française de Distribution des Métaux venant aux droits de France Négoce Aciers, les sociétés KDI, Produits d’Usines Métallurgiques PUM Station Service Acier, Arcelor Profil et AMD Sud Ouest entendus lors de la séance du 29 octobre 2008 ; Vu la note en délibéré présentée le 29 octobre 2008 par la Fédération Française de Distribution des Métaux.

Adopte la décision suivante :

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SOMMAIRE

I. CONSTATATIONS ………………………………………………………………………………………. 7 A. LA SAISINE DU MINISTRE CHARGÉ DE L’ÉCONOMIE ……………………………………………….. 7 B. LA DEMANDE DE CLÉMENCE DU GROUPE DESCOURS & CABAUD…………………………….. 7 C. LE SECTEUR CONCERNÉ…………………………………………………………………………………….. 8 1. Les produits sidérurgiques…………………………………………………………………………………. 8 a) Le secteur de l’acier……………………………………………………………………………………….. 8 b) L’évolution du secteur……………………………………………………………………………………. 9 La crise de la sidérurgie …………………………………………………………………………………… 9 L’explosion de la demande en 2004 ………………………………………………………………….. 9 c) Les principaux produits concernés …………………………………………………………………. 10 Les produits longs …………………………………………………………………………………………. 10 Les poutrelles …………………………………………………………………………………………….. 10 Les tubes……………………………………………………………………………………………………. 10 Les laminés marchands ……………………………………………………………………………….. 10 Les ronds à béton ……………………………………………………………………………………….. 10 Les produits plats ………………………………………………………………………………………….. 10 2. Le négoce des produits sidérurgiques………………………………………………………………… 11 3. Les volumes et valeurs de vente ……………………………………………………………………….. 12 D. LES ENTREPRISES CONCERNÉES………………………………………………………………………… 15 1. Le groupe PUM/ Arcelor …………………………………………………………………………………. 15 2. Le groupe KDI……………………………………………………………………………………………….. 15 3. Le groupe Descours & Cabaud…………………………………………………………………………. 16 4. Le groupe Morel Duferco ………………………………………………………………………………… 16 5. La société Maisonneuve ………………………………………………………………………………….. 16 6. La société Liametho………………………………………………………………………………………… 17 7. La société Clisson Métal………………………………………………………………………………….. 17 8. La société CODIP …………………………………………………………………………………………… 17 9. La société Ferren Fers……………………………………………………………………………………… 18 10. France Négoce Aciers……………………………………………………………………………………. 18 E. LES PRATIQUES RELEVÉES……………………………………………………………………………….. 18 1. Les éléments relevés au niveau national…………………………………………………………….. 19 a) Les réunions nationales et leurs participants ……………………………………………………. 19 Le club poutrelles………………………………………………………………………………………….. 19 La commission tubes……………………………………………………………………………………… 20 La commission produits plats …………………………………………………………………………. 20 Le bureau du FNA…………………………………………………………………………………………. 20 La réunion des présidents de région…………………………………………………………………. 20 b) L’objet des réunions et le contenu des dispositifs mis en place ………………………….. 21 L’objet des commissions produits……………………………………………………………………. 21 Le dispositif produits longs…………………………………………………………………………….. 22 Le contenu du dispositif produits longs …………………………………………………………. 22 La tarification : barèmes de base et remises……………………………………………………. 23 Les classements de clients……………………………………………………………………………. 24 Le suivi des parts de marché ………………………………………………………………………… 27

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L’évolution de la concertation et le renforcement du dispositif produits longs en 2003………………………………………………………………………………………………………….. 29 Le dispositif produits plats……………………………………………………………………………… 35 L’activité du bureau du FNA ………………………………………………………………………….. 36 L’activité de la réunion des présidents de région……………………………………………….. 37 c) Les autres contacts bilatéraux ou multilatéraux………………………………………………… 38 Les déjeuners des directeurs commerciaux……………………………………………………….. 38 Les dîners des présidents………………………………………………………………………………… 39 Les contacts téléphoniques et autres contacts bilatéraux …………………………………….. 39 d) Le suivi des dispositifs nationaux…………………………………………………………………… 40 La diffusion des décisions prises et des conditions concertées…………………………….. 40 Le suivi régulier par les négociants………………………………………………………………….. 40 La gestion des consultations par les pilotes et points centraux…………………………….. 41 Les notions de pilote et de point central…………………………………………………………. 41 Les fonctions des pilotes et points centraux……………………………………………………. 42 Les tournantes et les rotations des deltas ………………………………………………………….. 44 Les commissions poutrelles régionales…………………………………………………………….. 45 Les parrains ………………………………………………………………………………………………….. 46 2. Les éléments relevés au niveau régional ……………………………………………………………. 47 a) L’organisation générale des régions ……………………………………………………………….. 47 b) Les réunions au niveau régional et leur contenu ………………………………………………. 50 L’évocation des barèmes………………………………………………………………………………… 53 L’évocation des classements…………………………………………………………………………… 54 La surveillance des affaires récentes et le respect du dispositif……………………………. 55 c) La diffusion de documents relatifs à la mise en place du dispositif …………………….. 58 Les barèmes régionaux…………………………………………………………………………………… 58 Le contenu des barèmes ………………………………………………………………………………. 58 La réalisation et la diffusion des barèmes ………………………………………………………. 59 L’utilisation des barèmes …………………………………………………………………………….. 61 Les listes de classements de clients………………………………………………………………….. 61 Les classements par produit …………………………………………………………………………. 62 Les classements généraux ……………………………………………………………………………. 62 Les tableaux récapitulatifs et les instructions ……………………………………………………. 63 d) La mise en place d’actions coercitives ……………………………………………………………. 66 Les systèmes de contrôle et de sanctions internes ……………………………………………… 66 Le système formalisé constaté dans la 7e région…………………………………………… 66 Les sanctions relevées dans les régions …………………………………………………………. 69 Les mécanismes de pression et de coercition à l’encontre d’acteurs extérieurs ……… 70 3. Les informations échangées……………………………………………………………………………… 71 F. LES GRIEFS NOTIFIÉS………………………………………………………………………………………. 72 G. LA MISE EN ŒUVRE DU III DE L’ARTICLE L. 464-2 DU CODE DE COMMERCE ……………. 73 1. Les engagements souscrits par les sociétés du groupe PUM/ Arcelor ……………………. 74 2. Les engagements souscrits par la société KDI ……………………………………………………. 78 3. Les engagements souscrits par la FFDM……………………………………………………………. 81 II. DISCUSSION ……………………………………………………………………………………………… 83 A. SUR LA PROCÉDURE ……………………………………………………………………………………….. 83 1. Sur la recevabilité des éléments issus de la procédure de clémence ………………………. 83 2. Sur la prétendue atteinte aux droits de la défense………………………………………………… 83

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3. Sur la prétendue déloyauté de l’instruction ………………………………………………………… 84 B. SUR LE DROIT APPLICABLE ……………………………………………………………………………… 85 1. Le contexte juridique du secteur de l’acier…………………………………………………………. 85 2. L’applicabilité du droit communautaire …………………………………………………………….. 85 C. SUR LE BIEN FONDÉ DES GRIEFS ……………………………………………………………………….. 86 1. Sur le marché pertinent……………………………………………………………………………………. 86 2. Sur le grief d’entente complexe et continue ……………………………………………………….. 87 a) Sur la notion de pratique complexe et continue………………………………………………… 87 b) Sur la participation des entreprises mises en cause à l’entente …………………………… 88 Sur le standard de preuve de la participation à une entente horizontale complexe et continue……………………………………………………………………………………………………….. 89 Sur le standard de preuve de l’adhésion à une entente complexe et continue ………. 89 Sur le standard de preuve de l’accord de volonté à une entente horizontale en droit communautaire…………………………………………………………………………………………… 90 Sur le standard de preuve de l’accord de volonté à une entente horizontale en droit national……………………………………………………………………………………………………… 92 Sur le standard de preuve applicable à la présente affaire ………………………………… 93 Sur l’objet anticoncurrentiel des pratiques ………………………………………………………… 94 Sur l’objet anticoncurrentiel des réunions nationales et régionales ……………………. 94 Sur l’objet anticoncurrentiel des échanges d’informations ……………………………….. 94 Sur les arguments communs à plusieurs entreprises contestant les griefs ……………… 95 Sur la participation prétendument partielle, passive ou forcée ………………………….. 95 Sur l’absence prétendue d’adhésion à la mise en œuvre de l’entente …………………. 98 Sur la participation de Morel et sa durée ………………………………………………………….. 99 Sur la participation de Maisonneuve………………………………………………………………. 100 Sur la participation de Liametho……………………………………………………………………. 101 Sur la participation de Clisson Métal……………………………………………………………… 102 Sur la participation de CODIP ………………………………………………………………………. 102 Sur la participation de Ferren Fers…………………………………………………………………. 103 Sur les effets des pratiques……………………………………………………………………………. 104 D. SUR LES SANCTIONS ……………………………………………………………………………………… 108 a) Le plafond légal …………………………………………………………………………………………. 108 b) Les critères de détermination de la sanction…………………………………………………… 110 c) Sur la gravité des pratiques………………………………………………………………………….. 111 Sur la gravité générale des pratiques………………………………………………………………. 111 L’emprise des pratiques sur le marché …………………………………………………………. 111 La persistance des pratiques……………………………………………………………………….. 112 L’étendue géographique des pratiques …………………………………………………………. 112 Le champ matériel de l’entente …………………………………………………………………… 112 La sophistication des pratiques …………………………………………………………………… 112 Sur le contexte de crise et l’intervention des pouvoirs publics…………………………… 113 Sur la caractérisation du comportement respectif des entreprises en cause………….. 114 Sur le degré d’implication dans la pratique complexe ……………………………………. 114 Sur le rôle de meneur ………………………………………………………………………………… 115 Sur les prétendues pressions……………………………………………………………………….. 116 Sur la prétendue inapplication des mesures concertées ………………………………….. 117 Sur l’arrêt immédiat des pratiques ………………………………………………………………. 120 Sur le cas particulier du syndicat ………………………………………………………………… 121 d) Sur l’importance du dommage à l’économie…………………………………………………… 122

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Sur les éléments quantitatifs caractérisant l’importance du dommage à l’économie 123 Les arguments relatifs à la comparaison de l’évolution des taux de marge……….. 123 L’étude économique présentée par les sociétés du groupe PUM/ Arcelor ………… 124 Les évaluations présentées en séance par la société Descours & Cabaud …………. 126 Les arguments relatifs à l’exploitation de la déclaration de M. Y… …………………. 127 Sur les éléments qualitatifs caractérisant l’importance du dommage à l’économie .. 127 Les caractéristiques du négoce de produits sidérurgiques ………………………………. 128 La taille du marché……………………………………………………………………………………. 129 L’effet de diffusion sur les marchés aval ……………………………………………………… 129 La perturbation profonde et durable du processus concurrentiel ……………………… 129 e) Sur la réitération…………………………………………………………………………………………. 130 Sur l’existence d’un constat d’infraction antérieur ……………………………………………. 131 Sur le caractère définitif, à la date de la présente décision, du constat d’infraction . 132 Sur l’identité ou la similitude des pratiques …………………………………………………….. 132 Sur l’identité des normes applicables …………………………………………………………… 132 Sur l’identité des entreprises……………………………………………………………………….. 133 Sur le délai écoulé entre les pratiques…………………………………………………………….. 134 f) Sur la situation individuelle des entreprises……………………………………………………. 134 Sur l’autonomie alléguée des filiales du groupe PUM/ Arcelor………………………….. 134 Sur l’effet d’exemplarité du comportement de certaines entreprises …………………… 135 Sur la situation des plus petites entreprises sur le marché …………………………………. 136 Sur l’absence d’infraction antérieure ……………………………………………………………… 136 Sur l’absence de bénéfice économique ou financier tiré de la pratique……………….. 136 Sur l’imputabilité à des sociétés…………………………………………………………………….. 137 Sur l’imputabilité de pratiques anticoncurrentielles à un syndicat ……………………… 138 Sur la situation financière des sociétés en cause………………………………………………. 139 Sur le contexte économique à la date de la décision…………………………………………. 140 g) Sur les procédures conduisant à une exonération partielle ou à une réduction des sanctions……………………………………………………………………………………………………….. 142 Sur la procédure de clémence et la situation de Descours & Cabaud………………….. 142 Sur la procédure de non contestation des griefs……………………………………………….. 144 Sur la situation procédurale de Maisonneuve ……………………………………………….. 144 Sur l’appréciation des engagements proposés……………………………………………….. 144 h) Sur le montant des sanctions ……………………………………………………………………….. 146 Pour PUM Service Acier………………………………………………………………………………. 146 Pour Arcelor Profil………………………………………………………………………………………. 146 Pour AMD Sud/ Ouest …………………………………………………………………………………. 146 Pour KDI ……………………………………………………………………………………………………. 146 Pour Descours & Cabaud SA………………………………………………………………………… 147 Pour Morel …………………………………………………………………………………………………. 147 Pour Maisonneuve……………………………………………………………………………………….. 147 Pour Clisson Métal………………………………………………………………………………………. 147 Pour Liametho…………………………………………………………………………………………….. 147 Pour CODIP ……………………………………………………………………………………………….. 147 Pour Ferren Fers………………………………………………………………………………………….. 148 Pour la FFDM …………………………………………………………………………………………….. 148 i) Sur l’obligation de publication ……………………………………………………………………… 148 DISPOSITIF …………………………………………………………………………………………………….. 150

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I. Constatations A. LA SAISINE DU MINISTRE CHARGÉ DE L’ÉCONOMIE 1. Le 25 mai 2004, des opérations de visites et saisies ont été diligentées par la DGCCRF dans les locaux d’un certain nombre de négociants en produits sidérurgiques français. Elles faisaient suite à une ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Bobigny en date du 12 mai 2004, prise sur le fondement de l’article L. 450-4 du code de commerce, qui a autorisé le recours à ces opérations aux fins de rechercher la preuve de pratiques anticoncurrentielles présumées dans le secteur des produits sidérurgiques. Cette autorisation avait elle-même été demandée après que des clients de négociants en produits sidérurgiques s’étaient plaints de similitudes suspectes dans les offres reçues à l’occasion de consultations. 2. A la suite de ces investigations et d’autres visites et saisies, effectuées notamment au siège de France Négoce Aciers le 20 juillet 2004, un rapport administratif d’enquête accompagné de 83 annexes a été établi le 10 mars 2005.

3. Sur la base de ce rapport, le ministre de l’économie des finances et de l’industrie a saisi, par courrier du 7 juillet 2005, enregistré le 8 juillet 2005 sous le numéro 05/0045F, le Conseil de la concurrence de la situation de la concurrence dans le secteur du négoce de produits sidérurgiques.

B. LA DEMANDE DE CLÉMENCE DU GROUPE DESCOURS & CABAUD 4. Le 25 octobre 2006, la société Descours & Cabaud SA, qui est l’une des entreprises visées par l’enquête, et ses filiales ont formulé une demande de mise en œuvre du IV de l’article L. 464-2 du code de commerce, à l’appui de laquelle elles ont apporté des déclarations et des documents. 5. Le 14 mars 2007, le Conseil de la concurrence a rendu un avis n° 07-AC-03 accordant à la société Descours & Cabaud SA et à ses filiales « le bénéfice conditionnel de la clémence, avec une exonération de la sanction encourue comprise entre 10 % et 30 %, qui prend en compte le rang et la date à laquelle la demande a été présentée ainsi que la mesure dans laquelle les éléments apportés constituent à ce stade une valeur ajoutée significative par rapport aux éléments dont disposent déjà les autorités de concurrence, et subordonne l’exonération aux conditions suivantes :

- les éléments apportés par la société Descours & Cabaud SA et ses filiales devront avoir effectivement contribué à établir la réalité des pratiques dénoncées, présentées comme étant anticoncurrentielles, et à en identifier les auteurs ;

- la société Descours & Cabaud SA et ses filiales devront apporter au Conseil de la concurrence et, le cas échéant, aux services d’enquête du ministre de l’économie, des finances et de l’industrie, une coopération totale, permanente et rapide tout au long de la procédure d’enquête et d’instruction et leur fournir tout élément de preuve qui viendrait en leur possession ou dont elles disposent sur les infractions suspectées ;

- elles devront mettre fin à leur participation aux activités illégales présumées, sans délai et au plus tard à compter de la notification du présent avis ;

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- elles ne devront pas avoir pris de mesures pour contraindre d’autres entreprises à participer aux infractions ;

- elles ne devront pas avoir informé de leur demande les entreprises susceptibles d’être mises en cause dans le cadre des pratiques dénoncées ». C. LE SECTEUR CONCERNÉ 1. LES PRODUITS SIDÉRURGIQUES a) Le secteur de l’acier 6. L’acier est un alliage de minerai de fer et de carbone, fréquemment utilisé en tant que matière première dans l’industrie (notamment automobile) et, au même titre que le béton, dans la construction. C’est, selon la Commission européenne, « un des matériaux les plus importants utilisés dans notre société. Il est présent dans les bâtiments où nous vivons et travaillons, dans les transports que nous utilisons, et joue un rôle fondamental dans la fabrication et la distribution des produits alimentaires que nous consommons. Il constitue en outre une matière première indispensable à la grande majorité, sinon à la totalité, des autres branches de l’industrie manufacturière » (décision de la Commission du 21 novembre 2001, affaire COMP/CECA.1351 – Usinor/Arbed/Aceralia, point 11). 7. La composition de l’acier peut varier compte tenu des usages auxquels il est destiné mais aussi des besoins de pallier certains de ses défauts (notamment sa mauvaise résistance à l’oxydation) ou de renforcer ses qualités (notamment la dureté et la résistance mécanique). Ainsi, la « première différenciation importante au sein de la sidérurgie est celle qui se fonde principalement sur la chimie de l’acier. On distingue trois grandes catégories d’acier : l’acier au carbone, l’acier inoxydable et les aciers spéciaux ou alliés. L’acier au carbone est celui qui nous est le plus familier : il est utilisé dans une gamme d’applications très large, y compris les carrosseries, les boîtes pour les boissons, les poutrelles, les matériaux de renforcement dans le secteur de la construction, et ainsi de suite. L’acier inoxydable contient de fortes proportions de chrome et de nickel et est de ce fait beaucoup plus coûteux que l’acier au carbone. Il est par conséquent utilisé en priorité dans les applications qui nécessitent une résistance à la corrosion et/ou à des températures élevées. Les propriétés physiques des aciers peuvent être modifiées par des changements dans l’analyse chimique ou par le traitement qu’ils reçoivent au cours de leur production ou des processus de fabrication ultérieurs. Par exemple, les boîtes pour les boissons et les couteaux sont deux produits fabriqués à partir d’aciers au carbone différents, car les premiers requièrent un matériau très ductile, alors qu’il faut utiliser pour les seconds un matériau très dur (pour qu’ils conservent leur tranchant) » (décision Usinor/Arbed/Aceralia précitée, points 13 à 15). 8. Il existe deux modes (ou filières) principaux de production de l’acier : la filière fonte (ou filière intégrée) et la filière électrique. La filière fonte représente un peu plus de 60 % de la production d’acier. Elle consiste en une fusion oxydante de fonte (dans un convertisseur à oxygène), elle-même obtenue à partir de minerai de fer et de coke. La filière électrique représente un peu moins de 40 % de la production d’acier. De la ferraille (le recyclage assurant 30 % de la filière électrique) est fondue dans des fours électriques à arc. 9. L’acier liquide obtenu est ensuite coulé en continu puis refroidi pour former des demi- produits en billettes et en blooms (c’est-à-dire en barres d’acier) pour les produits longs et en brames pour les produits plats. Il est, dans une minorité des cas, coulé en lingots.

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L’étape suivante est le laminage (c’est-à-dire une déformation permanente faite à partir d’un laminoir, qui peut se faire à chaud ou à froid) en produits finis dits plats (tôles, en feuille ou en bobine) ou longs (poutrelles, barres, rails,…). 10. La production annuelle mondiale d’acier était en 2005 d’environ 1 130 millions de tonnes (dont un peu plus de 160 millions dans l’Union européenne, soit 14 %, et un peu moins de 20 millions en France). La Chine en était en 2005 le principal producteur (350 millions environ, soit un peu moins de 31 %) et le principal consommateur (un peu moins de 28 %, l’Union européenne en consommant un peu plus de 17 %). 11. En Europe, les débouchés sont diversifiés ; la construction (structures d’immeubles ou d’ouvrages tels que ponts ou tunnels) représente 24 % des volumes, l’automobile (structure de carrosseries ou moteurs) 18 %. Les autres débouchés sont la construction mécanique, la fabrication de tubes, les articles en métal et les parties métalliques structurales. Dans les produits de consommation courante, on notera que l’acier est utilisé dans l’électroménager ainsi que dans les emballages (boissons,…). Les débouchés du négoce sont plus ciblés, notamment vers les professionnels du BTP. b) L’évolution du secteur La crise de la sidérurgie 12. La sidérurgie européenne a connu une chute de la demande qui a engendré des problèmes d’offre excédentaire et de surcapacité et, par conséquent, un faible niveau des prix au milieu des années 70 à 1988, avec des variations selon les produits. La Commission européenne a dès lors mis en place un certain nombre de mesures destinées à protéger le secteur. 13. En 1977, elle a adopté, en vertu de l’article 46 du traité CECA le « plan Simonet » selon lequel chaque entreprise prenait des engagements volontaires unilatéraux d’adapter ses fournitures aux niveaux proposés par la Commission chaque trimestre dans son programme prévisionnel. Le « plan Davignon » est entré en vigueur en 1978. Ce nouveau régime ajoutait aux engagements volontaires unilatéraux des prix indicatifs et minimaux. 14. Le 31 octobre 1980, la Commission a adopté une décision par laquelle elle constatait un état de crise manifeste au sens de l’article 58 du traité CECA et imposait des quotas de production obligatoires pour la plupart des produits sidérurgiques. La Commission fixait un objectif général de production communautaire par trimestre pour les différentes catégories de produits et chaque entreprise se voyait attribuer un quota de production obligatoire et un quota de livraison à l’intérieur du marché commun. Ces quotas ont été complétés, entre 1984 et 1986, par un système de prix minimaux pour les poutrelles et autres produits et par un « système de surveillance » selon lequel chaque entreprise était tenue de déclarer ses fournitures par pays à la Commission. Ce seul système de surveillance a perduré après 1988, ce jusqu’en 1990. L’explosion de la demande en 2004 15. L’année 2004 a été une année très profitable pour le secteur de l’acier. Cette année-là, la production mondiale d’acier a augmenté de 9 % et a dépassé pour la première fois le milliard de tonnes. Cette croissance a été principalement provoquée par l’explosion de la demande en provenance de Chine et des pays émergents. Cette forte demande et une demande subséquente dans les matières premières entrant dans le cycle de fabrication de l’acier ont conduit à une situation de pénurie et à une hausse des prix de l’acier au niveau mondial : entre décembre 2003 et novembre 2004, l’augmentation a été d’un peu moins de

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30 % pour les produits sidérurgiques tous aciers et d’un peu plus de 50 % pour les poutrelles. c) Les principaux produits concernés 16. Il existe un grand nombre de produits sidérurgiques différents, chacun se déclinant en plusieurs formes, tailles, coupes voire qualités. Ces produits sont homogènes et normalisés. Sont présentées ci-dessous les cinq principales catégories concernées par les pratiques examinées ci-après, mais la présente affaire concerne un nombre plus important de produits aciers normaux au carbone. Les produits longs Les poutrelles 17. Les poutrelles sont des produits longs, issus du laminage à chaud de billettes ou d’ébauches sur un train à cages universelles permettant de réaliser tous les profils classiques (en I, U, H,…). Le négoce occupe environ 90 % dans la distribution de poutrelles, les commandes traditionnelles des utilisateurs n’étant pas assez importantes pour intéresser les producteurs. Les poutrelles sont principalement utilisées pour la construction métallique (bâtiments industriels de stockage et bâtiments agricoles) et les travaux publics (soutènement, pieux, ponts). La clientèle sur ces produits est ainsi faite de charpentiers métalliques, métalliers, serruriers, entreprises de travaux publics ainsi que de maçons, services d’entretien, etc. Les tubes 18. Les tubes sont des corps creux déterminés par un diamètre ou des côtés extérieurs. Ils sont en fait issus des produits plats et composés d’une très large gamme de produits. Leur clientèle est composée de serruriers, métalliers, constructeurs métalliques ainsi que d’industriels qui s’approvisionnent directement auprès des producteurs. Les laminés marchands 19. Les laminés marchands sont les produits longs laminés à chaud autres que les poutrelles et tubes. La part du négoce dans la distribution de ces produits est aussi très importante et de l’ordre de 90 %. Sa clientèle est composée de serruriers, métalliers, PME industrielles et charpentiers métalliques. Les ronds à béton 20. Les ronds à béton (ou ronds) sont des tiges d’acier, généralement de basse qualité, servant d’armatures pour béton armé. La part du négoce dans la distribution de ronds est d’environ 40 %. Sa clientèle est composée de grandes entreprises de BTP et de maçons. Les produits plats 21. Les produits plats sont composés des tôles et des plaques, qui diffèrent par leur mode de fabrication (les tôles sont déroulées à partir de bobines à la différence des plaques, qui peuvent donc être plus épaisses et plus larges). La part du négoce dans la distribution de plaques est relativement faible, de l’ordre de 10 à 15 %. La clientèle sur ces produits est nombreuse et variée, beaucoup se fournissant directement auprès des usines. Elle se compose d’entreprises dans l’automobile, l’électroménager, le mobilier métallique ainsi que de tous les utilisateurs traditionnels de produits longs.

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2. LE NÉGOCE DES PRODUITS SIDÉRURGIQUES 22. Le négoce de produits sidérurgiques représente environ 15 à 20 % de l’acier vendu en France (entre 2,6 et 3,3 millions de tonnes sur la période concernée par les griefs). Le négoce traite une clientèle très hétérogène et très nombreuse (le nombre de clients des grands groupes de négoce se compte en milliers voire en dizaine de milliers), qui n’achète pas suffisamment de volume pour pouvoir être directement livrée par les producteurs, notamment la construction métallique, la serrurerie et la chaudronnerie. 23. Le négoce se différencie de la fabrication et des ventes directes par un certain nombre de facteurs (décision de la Commission M. 1329 Usinor/Cockerill du 4 février 1999) : • la diversité de ses clients : par rapport aux clients de la filière directe, ceux qui se procurent de l’acier par les canaux de distribution sont généralement des clients différents, dont les besoins ne sont pas les mêmes ; • la taille plus réduite des commandes : si les ventes des aciéries sont généralement effectuées en dizaines de tonnes, celles des centres de service acier le sont en tonnes et les ventes de stockistes habituellement en centaines de kilogrammes ; • la capacité des distributeurs à répondre rapidement aux besoins du client : les délais de livraison des aciéries sont d’ordinaire mesurés en semaines, voire en mois, tandis que les négociants travaillent en heures ou en jours ; les centres de service acier offrent normalement des livraisons juste-à-temps et s’engagent sur un jour, parfois même sur un créneau horaire ; • le caractère local de l’activité : les points de distribution desservent généralement les clients dans un périmètre limité par rapport à leur emplacement ; • le grand nombre d’entreprises associées à cette activité, des distributeurs intégrés appartenant aux entreprises sidérurgiques aux petites entreprises indépendantes. 24. Les négociants remplissent la fonction de vente en gros, c’est-à-dire qu’ils procèdent à des achats massifs auprès des producteurs, pour revendre ensuite en plus petites quantités. Leur activité de stockage consiste en particulier à détenir une grande diversité de produits sidérurgiques dans des endroits appropriés pour approvisionner, essentiellement, mais pas exclusivement, des clients de taille petite et moyenne, en quantités d’acier qui ne sont pas suffisamment importantes pour justifier de traiter directement avec les producteurs sidérurgiques ou les centres de service acier. En outre, les stockistes ont à leur disposition de l’acier qu’ils peuvent livrer immédiatement et sont donc en mesure de fournir un service que n’offrent pas les producteurs sidérurgistes. Ils ont également développé leurs propres installations de traitement, afin d’ajouter de la valeur à leurs produits et d’améliorer leur service à la clientèle. Ce traitement comprend la coupe à longueur, le refendage, le cisaillage et le polissage. Les activités des négociants couvrent presque toute la gamme des produits sidérurgiques. 25. Compte tenu de l’homogénéité des produits et du caractère diffus de la clientèle, le négoce des produits sidérurgiques est le type de marché sur lequel la concurrence devrait s’effectuer principalement en prix, les autres considérations pouvant entrer en jeu étant la gamme de produits en stock, la disponibilité de ces produits, le délai de livraison et éventuellement les services accessoires.

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26. D’un point de vue tarifaire, les négociants interrogés ont présenté trois types de relations avec les clients. Des petits clients, notamment locaux, peuvent commander sans véritablement demander de prix. Des clients font des consultations, notamment pour les commandes importantes, auprès de plusieurs négociants et scindent le cas échéant ligne par ligne. Quelques rares et gros clients ont des tarifs personnalisés nets. La proportion de ce type de relations dans le portefeuille de clients varie selon les négociants. 3. LES VOLUMES ET VALEURS DE VENTE 27. France Négoce Aciers a fourni les données suivantes sur les volumes de ventes par le négoce : Tableau n° 1 : Volumes de ventes via le négoce en tonnes sur les cinq principaux produits

2001 2002 2003 2004 2005 2006 Poutrelles 756 315 688 073 647 210 643 306 593 775 626 155 Laminés 456 111 409 984 372 095 354 820 337 260 355 068 Ronds béton 179 181 174 337 163 919 163 305 154 903 154 554 Produits plats 1 530 567 1 364 796 1 242 074 1 144 149 1 239 631 1 342 029 Tubes 394 741 373 142 362 139 368 480 409 205 415 871 Total 3 316 915 3 010 332 2 787 437 2 674 060 2 734 774 2 893 677

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Tableau n° 2 : Détail des parts de marché en volume sur les cinq principaux produits pour les cinq plus gros négociants

2001 2002 2003 2004 2005 2006 PUM/ Arcelor [25-35] [25-35] [25-35] [25-35] [25-35] [25-35] KDI [25-35] [25-35] [25-35] [25-35] [25-35] [25-35] D&C [15-25] [15-25] [15-25] [15-25] [15-25] [15-25]

utrelles Maisonneuve [0-5] [0-5] [0-5] [0-5] [0-5] [0-5] Po Morel [5-15] [5-15] [5-15] [5-15] [5-15] [5-15] Autres [15-25] [15-25] [5-15] [15-25] [5-15] [5-15] PUM/ Arcelor [15-25] [15-25] [15-25] [15-25] [15-25] [15-25] KDI [25-35] [25-35] [25-35] [25-35] [25-35] [25-35] D&C [15-25] [15-25] [25-35] [25-35] [25-35] [25-35]

minés Maisonneuve [0-5] [0-5] [0-5] [5-15] [5-15] [5-15] La Morel [0-5] [0-5] [0-5] [0-5] [0-5] [0-5] Autres [15-25] [15-25] [15-25] [15-25] [15-25] [15-25] PUM/ Arcelor [5-15] [5-15] [5-15] [5-15] [5-15] [5-15] KDI [25-35] [25-35] [25-35] [25-35] [25-35] [25-35] D&C [25-35] [25-35] [25-35] [25-35] [25-35] [25-35]

Maisonneuve [0-5] [0-5] [0-5] [0-5] [0-5] [0-5] Ronds béton Morel / / / / / / Autres [25-35] [25-35] [25-35] [25-35] [25-35] [25-35] PUM/ Arcelor [35-45] [45-55] [45-55] [45-50] [35-45] [35-45]

KDI [5-15] [5-15] [5-15] [5-15] [5-15] [5-15] ats D&C [5-15] [5-15] [5-15] [5-15] [5-15] [5-15]

uits Pl Maisonneuve [0-5] [0-5] [0-5] [5-15] [0-5] [0-5] Prod Morel [0-5] [0-5] [0-5] [0-5] [0-5] [0-5] Autres [35-45] [15-25] [15-25] [15-25] [25-35] [25-35] PUM/ Arcelor / [15-25] [15-25] [15-25] [15-25] [15-25] KDI / [25-35] [15-25] [15-25] [15-25] [15-25] D&C / [15-25] [15-25] [15-25] [15-25] [15-25]

Tubes Maisonneuve / [0-5] [0-5] [5-15] [0-5] [5-15] Morel / / / / / [0-5] Autres / [25-35] [25-35] [25-35] [35-45] [35-45]

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Tableau n° 3 : Cumul des parts de marché en volume des trois plus grands groupes de négociants (PUM/Arcelor – KDI – Descours & Cabaud)

2001 2002 2003 2004 2005 2006 Poutrelles [70-80] [70-80] [70-80] [70-80] [70-80] [70-80] Laminés [70-80] [70-80] [70-80] [70-80] [70-80] [70-80] Ronds béton [60-70] [60-70] [60-70] [60-70] [60-70] [60-70] Produits plats [50-60] [70-80] [70-80] [70-80] [60-70] [60-70] Tubes / [60-70] [60-70] [60-70] [50-60] [50-60] 28. Pour la quasi-totalité des produits, les groupes PUM/ Arcelor, KDI et Descours & Cabaud représentaient ainsi ensemble de 60 à 80 % des volumes distribués par les adhérents de FNA entre 2001 et 2006. 29. Concernant les valeurs des ventes, les chiffres des différentes entreprises en cause disponibles au dossier sont en partie incertains ou incomplets : les informations recueillies lors de l’instruction concernaient tout d’abord la plupart du temps uniquement les cinq principaux produits et non pas l’intégralité des produits concernés par les pratiques, tels que figurant par exemple dans le récapitulatif présenté ci-dessous au paragraphe 159. Les entreprises Morel et Ferren Fers n’ont ensuite pas fait l’objet de demande de renseignements sur ce point, tout comme Clisson Métal, qui a cependant fourni des renseignements similaires dans ses écritures. De manière plus générale, les chiffres globaux communiqués par les parties ne précisent pas quels sont les produits inclus. En outre, les valeurs précises sont pour certaines protégées par le secret des affaires. Enfin, les montants communiqués par les parties ont parfois varié au cours de l’instruction. 30. Sur la base des différents documents au dossier, des estimations par les parties de la part de leur chiffre d’affaires dédiée aux produits concernés ou des comptes sociaux des sociétés, il est néanmoins possible d’estimer les ordres de grandeur de valeur des ventes suivants (pour la dernière année complète avant la fin des pratiques) : Tableau n° 4 : Chiffres d’affaires des négociants en cause (tous produits aciers normaux au carbone)

Entreprise Année Chiffre d’affaires approximatif (en millions d’euros) Groupe PUM /Arcelor 2003 [550-650] PADF 2001 [30-60] Métal Pyrénées 2002 [1-5] KDI 2003 [300-400] Descours & Cabaud 2003 [200-300] Morel 2003 [20-40] Maisonneuve 2003 [45-60] Clisson Métal 2003 [10-15] Liametho 2003 [5-10] CODIP 2003 [5-10] Ferren Fers 2003 [1-5]

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D. LES ENTREPRISES CONCERNÉES 1. LE GROUPE PUM/ ARCELOR 31. L’actuel groupe ArcelorMittal est le résultat d’une série d’opérations de fusion et de rachat entre sidérurgistes. En 1999, Usinor, qui possédait déjà en France en matière de négoce les sociétés D’Huart et SLPM, a acquis le groupe de droit belge Cockerill Sambre et ses filiales de distribution dont PUM. En 2002, Usinor (et donc Cockerill), Aceralia et Arbed ont fusionné pour créer Arcelor. Le groupe Arcelor a ainsi intégré la composante distribution du groupe ProfilArbed Distribution France (ci-après, « PADF »), qui s’était notamment constituée par le rachat de Champion Profil. En 2003, PADF et D’Huart, qui étaient deux sociétés de négoce spécialisées dans les grands comptes poutrelles, ont fusionné pour créer Arcelor Profil. En 2006, la Mittal Steel Company a acquis Arcelor pour créer ArcelorMittal. Après cette opération, la branche distribution du groupe s’est progressivement regroupée en intégrant dans une même entité les sociétés d’une même région. Une série de fusions et de changements de noms a alors eu lieu. 32. L’activité de négoce du groupe Arcelor est, depuis 1999, organisée avec à sa tête la société Produits d’Usines Métallurgiques PUM Station Service Acier (ci-après, « PUM Service Acier » ou « PUM »). PUM est possédée à 100 % par Usinor, société détenue depuis 2002 à 100 % par Arcelor. Elle possède la totalité des parts de quasiment toutes les vingt-et-une filiales de négoce du groupe également concernées par la présente affaire, dont les sociétés Arcelor Profil et Arcelor Négoce Distribution (ci-après, « AND ») depuis leur création en 2003. Les sociétés PADF et Métal Pyrénées ont été respectivement absorbées par Arcelor Profil en 2003 et PMSO (devenue AMD Sud/ Ouest en 2007) en 2002, mais participaient aux pratiques examinées dès avant ces dates. 33. M. Jacques X… est président directeur général d’AND et de PUM. Ces deux sociétés avaient la même adresse jusqu’en 2007. A propos de leurs liens, M. X… a indiqué en 2004 : « La PUM existe en tant qu’enseigne commerciale » et « le négoce de PUM est intégré dans AND ». L’organigramme d’AND relève l’existence de postes attribués à des personnes occupant des fonctions dans des sociétés de négoce du groupe (notamment Arcelor Profil et SLPM). Certaines de ces personnes occupent des postes de direction ou d’administrateur dans plusieurs sociétés du groupe. Le chiffre d’affaires total consolidé des sociétés du périmètre de PUM s’est élevé en 2007 à plus d’1 milliard d’euros. Le chiffre d’affaires consolidé mondial d’ArcelorMittal en 2007 s’est élevé à 76,7 milliards d’euros. 2. LE GROUPE KDI 34. L’actuel groupe KDI est issu du regroupement d’une série de négociants. En 1994, Nozal et Hardy Tortuaux, deux sociétés ayant racheté une série de petits négociants et appartenant elles-mêmes respectivement à Usinor Sacilor et Arbed, ont créé Arus. Entre 1996 et 1998, la société Klöckner a acheté 90 % des parts de la société Arus, Usinor et Arbed en conservant respectivement 5 %. La société a alors pris la dénomination KDI et est encore à ce jour détenue par le groupe ArcelorMittal à hauteur de 10 %. Entre mai et juillet 1999, la société KDI, principale société d’exploitation du groupe dans la branche du négoce, a absorbé l’intégralité des 40 à 50 sociétés de négoce du groupe. Parmi les enseignes actuelles, KDI CM est spécialisée dans les grands comptes pour les poutrelles.

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35. L’activité de distribution ne se limite pas aux produits sidérurgiques, mais s’étend également aux autres produits pondéreux, à l’outillage et aux accessoires industriels. La société KDI est contrôlée et présidée par la société Klöckner Distribution Industrielle SA. Le président du directoire de cette société est M. Philippe Y…. Le chiffre d’affaires total consolidé de KDI s’est élevé en 2007 à 980 millions d’euros. Le chiffre d’affaires consolidé mondial de Klöckner en 2007 s’est élevé à 6,3 milliards d’euros. 3. LE GROUPE DESCOURS & CABAUD 36. Le groupe Descours & Cabaud (en abrégé, D&C) est un groupe de négoce fondé au 18e siècle. Il s’est diversifié dans de nombreux secteurs (produits non ferreux et plastiques, transport de fluides, plastiques industriels, quincaillerie, outillage et fournitures industrielles, équipement de protection individuelle, chauffage – sanitaire,…), l’acier représentant actuellement 10 % de son chiffre d’affaires. Le groupe est à l’origine familial et l’actionnariat est aujourd’hui composé à 65 % par les familles d’origine, 20 % par des financiers et 15 % par des collaborateurs du groupe ou la famille d’anciens collaborateurs. Il est composé de deux réseaux, le réseau Dexis (négoce technique) et le réseau Prolians, dont dépendent les négociants en produits sidérurgiques. 37. Il est contrôlé par la société Descours & Cabaud SA (ci-après, « Descours & Cabaud ») dont le président directeur général est M. Pierre Z…, qui détient 100 % des parts de la société SOGEDESCA et de la société Decaber, cette dernière détenant 100 % des parts des sociétés filiales concernées. Le chiffre d’affaires total consolidé des sociétés du périmètre de Descours & Cabaud s’est élevé en 2007 à 3,2 milliards d’euros. 4. LE GROUPE MOREL DUFERCO 38. Les sociétés de l’ensemble régional de distribution Morel ont été rachetées en 1999 par un producteur et « trader » d’acier italo-suisse, le groupe Duferco. Les sociétés françaises de négoce du groupe distribuent des produits longs (notamment des poutrelles) et des produits plats via la société Etablissements Marc Morel et Fils (ci-après, « Morel » ) et sa filiale Morel Duferco Produits Plats, dont les locaux, les comptabilités et les dirigeants sont identiques. Les documents au dossier font pour la plupart référence à l’appellation « Etablissements Morel » ou « Morel », même concernant les produits plats. Ces sociétés sont basées à Saint Jean d’Ardières et elles interviennent dans le sud et l’est de la France. Le chiffre d’affaires de la société Etablissements Marc Morel et Fils s’est élevé en 2007 à 55,2 millions d’euros et celui de la société Morel Duferco Produits Plats à 19,6 millions d’euros. Le chiffre d’affaires mondial consolidé de Duferco s’est élevé en 2007 à 6,7 milliards d’euros. 5. LA SOCIÉTÉ MAISONNEUVE 39. La société Etablissements Maisonneuve (ci-après, « Maisonneuve » ) est l’un des plus importants négociants d’acier ne couvrant pas l’ensemble du territoire national, car elle opère principalement dans le grand ouest de la France. Elle a été créée en 1936 et a été cédée à Patrice A…, actuel président, en 1971. Sa clientèle va de Brest à la région parisienne, de Cherbourg à Poitiers et La Rochelle. Son équipe commerciale est d’environ 25 personnes et négocie dans l’année (chiffres 2006) à peu près 160 000 tonnes d’aciers

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pour un chiffre d’affaires de l’ordre de 100 millions d’euros. Le chiffre d’affaires de la société Maisonneuve s’est élevé en 2007 à 121 millions d’euros. 6. LA SOCIÉTÉ LIAMETHO 40. La société Liametho existe depuis 1988 et résulte de la reprise par quatre de ses anciens cadres de la société familiale Liabastre. Son activité consiste dans le négoce des aciers, inox, aluminiums et des armatures pour béton sur plan. Elle est basée à Honfleur et a une activité dans des départements de la Normandie et depuis peu vers les DOM-TOM. Elle fait partie du groupement d’achat SOCODA. La société Liametho a des participations dans le capital d’une autre société de négoce, Clisson Métal, et possédait avec cette société une filiale, la société COMET. Son président a ainsi déclaré : « Nous avons racheté le fonds de commerce d’Auto Distribution à La Flèche, qui avait lui-même racheté une entreprise de négoce d’acier et de fournitures industrielles. Nous avons racheté, en partenariat avec Clisson Métal, le fonds de commerce de négoce d’acier et nous avons créé Comet (70 pour nous/ 30 pour Clisson). Auparavant, en 1996, nous avions pris une participation chez Clisson Métal (34 %). De fait, il existe une synergie entre nous et Clisson Métal (notamment pour des dépannages) ». Le chiffre d’affaires de la société Liametho s’est élevé en 2007 à 15,6 millions d’euros. 7. LA SOCIÉTÉ CLISSON MÉTAL 41. L’entreprise Clisson Métal exerce une activité depuis les années 20 et a pris une forme sociale en 1968. Elle s’est développée tout au long des années 90 pour arriver à un volume d’activité stable dans une fourchette de 20 à 22 000 tonnes. La société SA Clisson Métal (ci-après, « Clisson Métal » ) a des activités de négoce des aciers, inox et aluminiums, de découpes de tubes et profils ouverts et de fabrications d’armatures façonnées sur plan. Elle est basée à Moncoutant et exerce son activité dans des départements des Pays de la Loire, du Poitou Charentes et du Centre. Elle fait partie du groupement d’achat SOCODA. Le chiffre d’affaires de la société Clisson Métal s’est élevé en 2007 à 30,2 millions d’euros. 8. LA SOCIÉTÉ CODIP 42. La société Comptoir de Distribution Professionnelle (ci-après, « CODIP » ) a été créée en février 1993, sous forme de société coopérative d’anciens salariés d’une société de quincaillerie du groupe DOMO finances mise en redressement judiciaire en 1991. L’administrateur a nommé M. B…, l’actuel président de CODIP, directeur général avec pour charge de vendre les sociétés du groupe. Un groupe marseillais a racheté les activités de la quincaillerie mais n’a pas acquis les actifs représentant le négoce d’acier qui après la mise en liquidation ont fait l’objet d’une reprise par les salariés. CODIP est devenue une société par action simplifiée en 2004. Elle est basée à Aix-en Provence et a une activité dans certains départements du sud-est de la France. Son chiffre d’affaires pour l’exercice clos au 30 juin 2008 s’est élevé à 21,2 millions d’euros.

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9. LA SOCIÉTÉ FERREN FERS 43. La société Ferren Fers a été rachetée en 2001 par la société CODIP. Elle est gérée par M. B…, qui en est le président délégué et à qui un directeur d’exploitation et un directeur commercial rendent des comptes. La société COFER, holding dont M. B… est le principal actionnaire, détient les parts de la société CODIP et la majorité des parts de la société Ferren Fers. Cette dernière est basée à Carpentras et a une activité dans certains départements du sud-est de la France, qui chevauche partiellement celle de CODIP. M. B… a ainsi déclaré, sur les relations entre CODIP et Ferren Fers : « Les deux sociétés ont pour moi des zones d’influence naturelles qui résultent de leur zone de chalandise historique. Elles sont dans deux rayons d’actions qui se chevauchent partiellement (le Vaucluse). Dans ces zones frontalières, il n’y a pas d’entente entre nous : c’est une libre concurrence totale entre les deux sociétés et je ne donne aucune directive lorsque les deux sont consultées. Il est par contre à mon sens préférable que les deux sociétés restent dans leur secteur d’influence respectif (…).Au niveau de la vente, FERREN et CODIP ont leur propre logique (elles sont séparées juridiquement et financièrement), mais au niveau des achats, je suis l’interlocuteur des usines pour les deux. C’est pour cela que CODIP a gardé 25 % du capital de FERREN pour justifier le cas échéant au fisc les croisements au niveau des achats ». Le chiffre d’affaires de la société Ferren Fers s’est élevé en 2007 à 7,8 millions d’euros. 10. FRANCE NÉGOCE ACIERS 44. France Négoce Aciers (en abrégé, FNA) est le syndicat majoritaire de la profession du négoce de produits sidérurgiques. Il est issu de la réunion en 2000 de deux syndicats principaux, le SNCPS et le SNIPS, qui regroupaient respectivement les négociants nationaux et les indépendants régionaux. Plus généralement, il est le résultat de regroupements successifs de syndicats de négociants dont le plus ancien remonterait à 1911, généralement constitués par produits (par exemple le SNCTR, pour les tubes et raccords, a fusionné avec le FNA en 2003). FNA a changé de raison sociale au début de l’année 2008, devenant la Fédération Française de la Distribution des Métaux (en abrégé, FFDM). Il a à cette occasion intégré des syndicats relatifs à l’inox (UNAS), au cuivre (SNCM) et à l’aluminium (AFDA). Les statuts du FNA prévoyaient à l’époque des faits une assemblée générale, un conseil d’administration, un bureau ainsi qu’un collège national et un collège régional. Il a, par agrément du SESSI, une mission de remontée de chiffres concernant les tonnages distribués sur le marché à des fins statistiques. E. LES PRATIQUES RELEVÉES 45. Les pièces au dossier, saisies ou apportées par le demandeur de clémence, et les déclarations recueillies révèlent l’existence d’une concertation entre concurrents sur des conditions commerciales : barèmes, classement des clients en fonction de leur potentiel, taux de remise maximum, procédures de suivi des affaires et de contrôle, etc. Les comportements constatés reposent sur des habitudes nationales et régionales anciennes et ont été développés sous l’impulsion des trois principaux groupes nationaux de négoce.

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46. Des barèmes et autres conditions étaient définis au niveau national. La concertation allait jusqu’à « coter » les affaires des clients les plus importants, à prévoir un référentiel de cotation pour les affaires moins importantes et à adapter les consignes nationales au niveau de chaque région. Ces décisions étaient prises lors de réunions nationales réunissant les grands groupes nationaux de négociants et les plus importants des indépendants, sur la base d’informations remontées depuis les régions. 47. Les décisions prises, les conditions fixées et les barèmes ainsi mis en place au niveau national étaient transmis aux « présidents » désignés des 11 régions divisant l’intégralité du territoire français et définies dans le cadre du FNA (Île-de-France, Nord, Normandie, Bretagne et Pays de la Loire, Centre, Aquitaine, Midi-Pyrénées, PACA et Languedoc Roussillon, Rhône-Alpes et Auvergne, Bourgogne et Franche-Comté et Est) puis aux négociants. Ils étaient ensuite appliqués ou adaptés et complétés dans l’intégralité des régions, sous la direction des présidents. Étaient ainsi organisées des réunions de diffusion et de remontée des informations, de définition des conditions tarifaires adaptées du niveau national au niveau régional ou départemental et de contrôle de l’application des dispositifs ainsi que des propositions commerciales faites par les négociants lors des consultations en cours ou récentes. Etaient également mises en place des instances en charge du suivi pratique des consultations et des dispositifs de défense de la concertation (mesures cœrcitives à l’encontre des négociants extérieurs ou mesures de sanction à l’égard des négociants déviants). 1. LES ÉLÉMENTS RELEVÉS AU NIVEAU NATIONAL a) Les réunions nationales et leurs participants 48. Les éléments au dossier révèlent l’existence d’une série de réunions organisées sous couvert du syndicat FNA dans le cadre de la semaine dite « des forges » depuis au moins 1999. Au moins cinq réunions, réparties sur deux jours, avaient ainsi lieu la deuxième ou troisième semaine de chaque mois. Lors de ces réunions étaient définies des mesures et des conditions commerciales, dites des « dispositifs », pour les différents produits sidérurgiques. Le club poutrelles 49. La commission produits longs (ou « commission poutrelles » ou « club poutrelles » ou « Club P ») était prévue le lundi après-midi des semaines des forges. En 2004, en étaient membres, d’après des documents du FNA, MM. C… (président FNA), D… (délégué général FNA), E… (D&C), F… (KDI) qui en assurait la direction selon ses propres déclarations, G… (D&C), H… (D&C), I… (AND), J… (Morel) et K… (Arcelor Profil) (cotes 19492, 19497 et 23095). 50. Les déclarations de Descours & Cabaud indiquent qu’y participaient également les sociétés D’Huart et Maisonneuve. Des cahiers de notes saisis dans les locaux de la société Maisonneuve comportent des comptes rendus de plusieurs « Club P » à Paris, dont trois (16 septembre 2002, 1er octobre 2002 et 16 décembre 2002) comportent la liste des personnes présentes. Parmi celles-là, figuraient les trois fois MM. A… (Maisonneuve), C… et D… (FNA), L… et F… (KDI), H… (D&C), I… (AND), M… (Morel) et P… (D’Huart), deux fois (en 2002) M. N… (PADF) et une fois (en 2003) M. J… (Morel). Les agendas

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2002 et 2003 de M. Y…, président de KDI, indiquent qu’il était présent à certains clubs ou réunions poutrelles (cotes 19687, 19688, 14649, 14654, 14666, 8924, 8970, 9026, 9027, 9058, 9072, 9166 et 9167). 51. Un courrier d’invitation et la liste des présents indiquent qu’assistaient à un « Club P » en septembre 1999 MM. E… et H… (D&C), F… et L… (KDI), I… (Champion Profil), O… et P… (D’Huart), Q…, R… et N… (PADF), S… (PUM), K… (Morel) et T… (FNA), ce qui est confirmé par des déclarations (cotes 19158, 19159 et 19822 à 19827). La commission tubes 52. La commission tubes était prévue le lundi matin des semaines des forges. En 2004, étaient membres, d’après des documents du FNA, MM. C…, (président FNA), D… (délégué général FNA), E… (D&C), F… (KDI), U… (EXMA), G… (D&C), H… (D&C), I… (AND), V… (Van Leuwen Tubes), W… (Ets Dubocage) et K… (Arcelor Profil) (cotes 19492 et 19495). 53. Les pièces au dossier indiquent que les questions relatives aux tubes pouvaient éventuellement être traitées par la commission produits longs, dont l’objet principal reste les poutrelles. Elles renvoient sans la moindre ambiguïté à une concertation (barèmes nationaux et régionaux) portant également sur les tubes, ainsi d’ailleurs que sur les laminés marchands et larges plats, profils à froid et étirés et pour les produits bétons, traités ci-après avec le reste du dispositif produits longs. La commission produits plats 54. La commission produits plats était prévue le lundi des semaines des forges, avant ou après la commission poutrelles selon les périodes. En 2004, en étaient membres, d’après des documents du FNA MM. C… (président FNA), D… (délégué général FNA), 1… (Duferco France), 2… (Ets Champion), 3… (Unitol), J… (Morel) et 4… (AND). Selon la société Descours & Cabaud, participaient également à cette commission MM. E… et H… (D&C), S… (PUM, jusqu’en 2003), 5… (SLPM, groupe PUM/ Arcelor) et 6… (Cofrafer) (cote 19492, 19496 et 19685). Le bureau du FNA 55. Le bureau du FNA était prévu le mardi matin des semaines des forges. En 2004, étaient membres du bureau, d’après des documents du FNA, MM. C…, (président FNA), 7… (Clisson Métal), E… (D&C), F… (KDI), G… (D&C), I… (AND), S… (Berton Sicard), W… (Ets Dubocage), Y… (KDI), 4… (AND) et 8… (Liametho). Des convocations à des réunions du bureau FNA de 2002 et 2003 indiquent qu’en étaient alors membres MM. 7…, E…, F…, 5… (en 2002 uniquement), I…, S…, W…, Y… et 8… (cotes 19492 à 19494, 16123 et 16154). La réunion des présidents de région 56. La réunion des présidents de région était prévue le mardi matin, après le bureau. La liste des présidents de région FNA est présente au dossier pour les années 2000, 2001, 2002 et 2004, ainsi que celle des présidents de régions du SNCPS de 1994 à 2000. En 2004, étaient présidents de région MM. 9… (1re, indépendant), W… (2e, Dubocage), 10… (3e, KDI), 11… (4e Celtique, CMB-D&C), 12… (4e et 4e Océane, KDI), A… (4e Maine), 13… (5e, KDI), 14… (6e, KDI), 15… (7e, KDI), 16… (8e, Berton Sicard – groupe PUM/Arcelor), 17… (9e, KDI), 18… (10e, KDI), 19… (11e et 11e Alsace/ Lorraine, KDI) et 20… (11e Champagne/ Ardennes, SMH). Certains documents au dossier révèlent

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par ailleurs l’existence de vice-présidents de régions, parmi lesquels figuraient MM. 8… (Liametho, en 3e), C… (en 4e) et 7… (Clisson Métal, en 6e). Un responsable régional de KDI a déclaré, sur cette réunion : « Je suis président de la 4e région au sein de la FNA. J’ai pris cette fonction en 1991 ou 1992. A ce titre, je me rends au syndicat tous les mois à Paris (le 2e mardi du mois de 10h à 13 h) pour rencontrer les 10 autres présidents de régions ». Selon le demandeur de clémence, un certain nombre d’indépendants et les directeurs commerciaux des grands groupes y assistaient également régulièrement, ces réunions étant ouvertes à tous les adhérents voulant obtenir directement les informations, ce qui est confirmé par les déclarations recueillies lors de l’enquête administrative et notamment des déclarations de M. A… (Maisonneuve) (cotes 19492, 19125, 19126, 19123, 19124, 17922, 17923, 19812 à 19816, 19127 à 19145, 14160, 359, 19694 à 19697 et 23076). b) L’objet des réunions et le contenu des dispositifs mis en place L’objet des commissions produits 57. De manière générale, il ressort des éléments du dossier que les trois commissions produits du FNA avaient pour fonction, selon une pratique ancienne, de définir et modifier des barèmes de référence nationaux. 58. En substance, sur la base d’un modèle ou de propositions d’une société leader pour le produit concerné, la commission produit discutait et actait un nouveau barème de prix ou des modifications du barème de la période précédente, ainsi que la date d’application de la modification. Le dossier comporte des déclarations concordantes et similaires des différents acteurs interrogés sur ce point (cotes 23088 à 23100, 21926 à 21939, 225 à 232, 670 à 674, 1828 à 1838 et 898 à 904) : • M. Y… (KDI) : « Les commissions poutrelles, produits plats et produits bétons proposaient de faire évoluer le barème de référence en vigueur. Les modifications proposées étaient communiquées aux présidents de région qui déterminent les façons dont ils souhaitent la mettre en œuvre dans leur région » ; • M. H… (Descours & Cabaud) : « Les barèmes étaient définis de façon concertée en commissions produits (FNA) et en club poutrelles. Ils reposaient sur des barèmes proposés par l’un des grands groupes nationaux (KDI pour les poutrelles, PUM devenu Arcelor Distribution pour les produits plats notamment), le niveau des différentes tranches du barème étant ensuite débattu en réunion. Même s’il y a beaucoup de références pour les poutrelles, il n’y a que peu de catégories différentes de profils. Les variations de prix en fonction des déclinaisons de produits sont ensuite automatiques. La dernière colonne, celle des affaires les plus importantes, était la plus largement débattue. Il en était de même pour les autres produits sidérurgiques, pour lesquels il existe également de nombreuses références » et

« S’agissant du dispositif national poutrelles, les barèmes négociés étaient des barèmes de vente, à appliquer rigoureusement. C’était un outil de cotation, définissant en lecture directe précisément le prix de vente à pratiquer en fonction du produit concerné, du potentiel du client et du tonnage de la commande. Les tranches de tonnage ont varié suivant les périodes. Pour les autres produits achetés par les constructeurs métalliques étaient prévus au niveau national des tendances, des taquets (prix minimaux) ou certaines tranches de barémation. Pour que les prix pratiqués au niveau régional correspondent à ces conditions, je déterminais ensuite pour le groupe des instructions complémentaires à appliquer sur les barèmes DC. De manière

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générale, il n’y avait aucune possibilité pour les membres de l’accord, que ce soit au niveau national ou au niveau régional, de modifier les prix déterminés au niveau national. Pour les prix arrêtés au niveau régional, cela dépendait du dispositif mis en place dans la région » ;

• M. A… (Maisonneuve) : « les barèmes sont établis par la FNA » et « C’est le syndicat national qui établit les tarifs et selon les clients, il y a un classement par importance d’entreprises. Ce sont les clients que l’on appelle monitorés. Des tarifs sont recommandés en fonction de l’importance et le potentiel de ces sociétés (en volume de tonnage). Selon cette classification, nous savons quels tarifs leur appliquer » ; • M. 8… (Liametho) : « Ce sont les commissions par produit qui élaboraient les barèmes taquets. Aux réunions de présidents de régions, le représentant des producteurs était là. C’est là qu’étaient diffusés les barèmes taquets » ; • M. D… (FNA) : « une société leader d’un produit élaborait une proposition de barème de référence afin qu’elle soit examinée en commission. FNA le diffusait à leur demande aux membres du syndicat » et « C’est le club poutrelles qui édite ce barème. Le FNA diffuse ensuite l’information. Pour ce qui est du barème poutrelle, c’est KDI qui le réalise. Pour les produits plats, c’est Arcelor qui réalise le barème. Descours & Cabaud édite les barèmes pour les profils à froid et les produits béton » ; • M. B… (CODIP) : « M. D… a participé à cette réunion. Il nous a annoncé de nouveaux barèmes nationaux poutrelles ». 59. L’existence et le mécanisme de barèmes de la profession discutés lors des commissions produits tels qu’ils sont décrits par les personnes interrogées lors de l’enquête sont confirmés par les déclarations du demandeur de clémence, les multiples références qui y sont faites dans les pièces évoquant les différents dispositifs décrits ci-après ainsi que les notes prises par M. A… (Maisonneuve) à l’occasion de clubs poutrelles

les 2 septembre 2002, 16 septembre 2002, 1er octobre 2002, 21 octobre 2002, 16 décembre 2002 et 14 avril 2003, par M. D… (FNA) à l’occasion d’un club poutrelles le 12 janvier 2004 et par M. H… (Descours & Cabaud) à l’occasion d’un club poutrelles le 19 avril 2004, d’une commission tubes le 19 avril 2004 et d’une commission produits plats le 20 avril 2004 (cotes 19709, 14646, 14649, 14658, 14659, 14666, 14674, 19350, 11182, 11183 et 11188). Le dispositif produits longs Le contenu du dispositif produits longs 60. Sur le contenu du dispositif, M. A… (Maisonneuve) a déclaré : « Le dispositif, c’est les barèmes d’orientation qui sont donnés. Ils étaient définis dans l’objectif d’être appliqués strictement. Après cela, je demandais à mon collaborateur de me faire des comptes-rendus sur les affaires de la semaine parties hors du dispositif. Selon le volume du client, il pouvait y avoir une tranche de tonnage ou éventuellement un rabais ultime ». Il a ajouté : « Le dispositif national était destiné aux clients à fort potentiel, et comprenait en plus des barèmes, les classements et les clients monitorés. Les dispositifs régionaux et départementaux étaient similaires au dispositif national en ce qu’ils mettaient en place des barèmes, mais pour les plus petites affaires » (cotes 23071 à 23084). 61. L’étendue du dispositif variait selon les produits concernés. Les discussions sur les poutrelles étaient les plus approfondies. Sur ce produit, outre les barèmes communs, les classements généraux de clients et l’encadrement des remises, existants pour tous les

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produits, a été réalisé en commun un classement plus élaboré des clients les plus importants en fonction de leur potentiel. Une répartition des parts de marché a été mise en place sur cette base. L’instance principale de cette concertation était la commission poutrelles. Elle est présentée par le demandeur de clémence comme le lieu où s’est élaborée l’entente, où elle s’est poursuivie et où a été contrôlé son fonctionnement, par un examen précis des consultations des clients, des réponses faites à ces consultations et de leurs résultats. M. E… (Descours & Cabaud) a ainsi déclaré : « C’est dans cette instance que le véritable accord de la profession était « concocté ». En effet, la poutrelle est un produit stratégique chez les grands négociants qui distribuent environ 90 % de ce produit sur le marché » (cotes 19823 à 19827). Ce dispositif était suivi et a été resserré en septembre 2003. La tarification : barèmes de base et remises 62. Comme les autres commissions, le club poutrelles discutait et établissait le barème de référence national (qui avait pour vocation principale de déterminer les prix à pratiquer pour les clients poutrelles les plus importants, en fonction de leur classement) ainsi que les rabais pour les poutrelles. Ce barème servait ensuite de référentiel pour la détermination des barèmes régionaux, pour la clientèle plus petite. Le club discutait également des barèmes et autres conditions tarifaires concernant d’autres produits pouvant être vendus aux mêmes clients ou en même temps que les poutrelles (laminés mais aussi tubes, ronds, etc.) ainsi que des services associés (la coupe notamment), afin d’éviter que la concurrence ne puisse jouer entre des négociants respectant le dispositif relatif aux poutrelles elles- mêmes mais baissant leurs prix sur d’autres postes des commandes (cotes citées supra, paragraphe 59, et déclarations de Descours & Cabaud, cotes 21926 à 21939 et 19709). 63. Les documents saisis montrent que les discussions portaient à la fois sur les éléments généraux d’évolution des barèmes, sur les dates d’application des changements, sur les classements de clients, sur les rabais maximums possibles, sur les conditions commerciales relatives à d’autres produits que les poutrelles et sur les marchés importants ou problématiques dans les 11 régions. Ainsi, le compte-rendu d’une réunion en date du 2 septembre 2002 (cote 14646) illustre l’étendue de la concertation : « 2/9/02 Club P. Paris (…) Hausse de 15€ et 10€ (…) Liste des clients classés 19/7/02 Au 1/10 +20/25€ au 1/10 Application du barème au 1/8/02 Respect des classements du 19/7/02 L.M Barèmes au 1/8/02 Rabais maxi 15% L.Plats id Tubes 1/9 5 » 64. La suite du compte-rendu, intitulée « Les marchés », dénombre des marchés « monitorés » et « non-monitorés » pour chacune des 11 régions.

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65. Les barèmes classiques dans le négoce de produits sidérurgiques comportent pour chaque produit (catégorie, référence et taille) entre trois et huit colonnes, correspondants à un prix relatif à une fourchette de tonnage. Traditionnellement, la cotation d’une consultation se fait en lecture directe, en fonction du tonnage demandé, en ajoutant le cas échéant le prix de la coupe. Cependant, en matière de poutrelles, les conditions déterminées étaient plus élaborées que celles concernant les autres produits. Les classements de clients 66. M. A… (Maisonneuve) a déclaré, sur le classement des clients : « C’est le syndicat national qui établit les tarifs et selon les clients, il y a un classement par importance d’entreprises. Ce sont les clients que l’on appelle monitorés. Des tarifs sont recommandés en fonction de l’importance et le potentiel de ces sociétés (en volume de tonnage). Selon cette classification, nous savons quels tarifs leur appliquer » (cote 226). 67. Le classement est établi en fonction du potentiel de commandes réalisées par un client à l’ensemble des négociants. Le classement d’un client renvoie à une fourchette de tonnage ou à une valeur correspondant à la cotation à appliquer, indépendamment des quantités demandées à l’occasion de la consultation. De ce fait, les prix à appliquer à ces clients sont fixés par avance. Des classements existaient pour toutes les catégories de produits depuis au moins 1999 (par exemple, cotes 10382 à 10435 et 10467 à 10472). 68. Ce classement était cependant bien plus développé en matière de poutrelles et assorti d’un dispositif de suivi et de contrôle (monitorage). Les clients importants ont été appelés, selon les périodes et les acteurs, « clients monitorés » ou « clients à gros potentiel ». La définition du classement des clients monitorés était réalisée au FNA par le club poutrelles, ce qu’explicitent notamment les déclarations suivantes (cotes 23123 à 23133, 1828 à 1838 et 1348 à 1355) : • M. Y… (KDI) : « La commission poutrelles décidait des clients monitorés poutrelles pour le national. Pour les régions (clients monitorés de tous les produits, y compris poutrelles), il s’agissait d’une décision collégiale régionale prise sous la houlette du président de région » ; • M. D… (FNA) : « En principe, les cotations se font à l’affaire, à partir des tranches de tonnage des barèmes élaborées par les sociétés. Mais les gros clients achètent d’importants tonnages. Les sociétés discutent de la validité des classements (A, B, L) en fonction de la vision qu’elles ont du potentiel des clients. Parfois, les sociétés ne sont pas d’accord sur le potentiel de certains clients. Ces discussions avaient lieu lors des commissions poutrelles. Le classement se faisait à cette occasion » ; • M. F… (KDI) : « club P » signifie club poutrelles au cours duquel nous étions amenés à discuter de la conjoncture sur la construction métallique, nous examinions également la situation de l’amont et nous classions les plus gros clients en L, A, B. Cela nous donnait une idée du potentiel de ces clients, dont tous leurs achats en poutrelles passent par le négoce contrairement aux produits plats ». 69. Les tarifs proposés aux clients concernés étaient déterminés en fonction de leur classement et des conditions fixées pour chaque classe. Les barèmes concernant les poutrelles, ainsi que la plupart des listes de clients, comportaient dès lors cette référence à la catégorie de client concernée. Par ailleurs, sur des listes de clients monitorés, et afin d’affiner la définition des conditions à appliquer, pouvait être décidée, outre le classement et la colonne du barème qui y était associée, une remise maximale (en pourcentage ou en

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valeur) (par exemple, cotes 22369 à 22384, 22401 à 22416, 22735 à 22754, 22761 à 22765, 22807 à 22809, 22813 à 22838 et 22058 à 22064). 70. M. 21… (KDI) a déclaré, à propos des catégories de clients monitorés (cote 392) : « Dans les clients monitorés, il existe les clients L comme libres ; puis il y a une hiérarchie A et B : A sont des très gros clients et B sont des clients importants. Cette classification est une classification FNA ». B correspond ainsi à la traditionnelle dernière colonne du barème (50 tonnes et davantage le plus souvent), A concerne des clients plus importants, pour lesquels les conditions sont meilleures et L des clients encore plus favorisés. Sur certains tableaux présents au dossier figure la mention « P », qui signifie qu’il s’agit de clients pilotés, c’est- à-dire de clients dont un négociant, le plus souvent son principal fournisseur, assure le suivi des consultations, des commandes passées et des tonnages livrés par chaque concurrent afin de déterminer si les prix et répartition de parts de marché décidés pour ce client sont respectés. Par ailleurs, des clients de moindre importance étaient classés « C ». Ces clients-là étaient principalement traités au niveau régional (décisions sur les classements et les conditions tarifaires à appliquer). 71. Les clients monitorés ont été définis au début de l’année 2001 : une liste de clients importants (un peu moins de 120) a été établie sur la base de remontées par les différents négociants des volumes de commandes (tonnages réalisés) pour les années 1999 et 2000. Des documents préparatoires figurent ainsi au dossier, dont certains datés de mars 2001 et reprenant le pourcentage moyen de parts de marchés chez une série de clients de la 4e région pour sept négociants : Descours & Cabaud, D’Huart, KDI, Maisonneuve, Morel, ProfilArbed et PUM (cotes 8161, 8162 et 8166). 72. Par ailleurs, des documents explicitent la méthode à retenir pour définir les clients monitorés, ainsi qu’un certain nombre de règles de fonctionnement du dispositif alors mis en place. L’un, en date du 2 avril 2001, évoque à propos de la 4e région un dispositif dont la portée est néanmoins nationale (cotes 13921 à 13923) : « 3° Définition des pourcentages des réalisations de chaque société à partir de la moyenne références tonnes réalisées en 1999/2000, déclarées par chacune d’elles, avec possibilité de vérification par RM FNA (…) 4° A partir de ces références désignation de «pilotes» (1-2 ou 3) et de «suiveurs» avec pour objectif que chaque société retrouve son % de réalisations, avec exception pour environ 30 clients concernés par DESCOURS & CABAUD ATLANTIQUE. 1 seul interlocuteur par société et par client. 5° Les «pilotes» déterminent prix à pratiquer pour enregistrer les commandes et seront «protégés» par les «suiveurs» qui remettront prix PILOTE + 30 à 50 F/T. Les «suiveurs» appellent le «pilote» pour connaître conditions et prix, lors de chaque consultation. 6° Le point sera effectué chaque quinzaine par les membres du Club P avec communication pour chaque société :

- réunion fin de mois : enregistrement/tonnes des 15 derniers jours ;

- réunion milieu de mois : enregistrement/tonnes des 15 premiers jours, et facturation du mois M-1.

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7° Autres clients régions :

- Maintien du barème 20T du 1/01/2001
- Rabais maxi autorisé 250 F/T La région n’a pas de compétence pour définir des conditions plus basses sans accord préalable du Club P. La région communiquera à FNA RM la liste de ses classements. 8° Conditions laminés – larges plats
- Pour les 117 clients monitorés : barème 20 T rabais maxi 8%
- Autres clients : voir la région. 9° Date de démarrage : 2 avril 2001 10° Le 17/04/2001, à 16h30, le Club P invite les présidents de régions pour un premier point. (…) ».
73. Les tableaux joints à ce document présentent les clients monitorés pour la 4e et la 5e région et mentionnent pour chaque client concerné le potentiel en tonnes, les tonnages D&C pour 1999 et 2000, l’objectif pour 2001, les prix C1 ainsi que le nom des pilotes (cotes 13924 à 13926). 74. L’actualisation du classement des clients avait également lieu au club poutrelles, comme l’indiquent les deux pièces suivantes (cotes 8730 et 9089) :

• un courrier électronique interne à KDI de M. F… ainsi formulé : « Décision du club P d’hier : 1/ application du barème à lecture directe des coupes. Le rabais de 30% est supprimé. 2/ GAGNE passe de L en A 3/ VINSON n’est plus monitoré donc géré par la région. 4/ BRISARD à DAMPIERRE passe de L en A » ; • les notes de la page de la semaine 16 de 2002 de l’agenda de M. Y… : « Bureau FNA : – revendeurs

Poutrelles pas d’accord avec la proposition

 –  clients libres

- les 10€ ne sont pas passés.

de moins 50t – 10 on est passé à 50t – 20». 75. Interrogé sur cette pièce, M. Y… a déclaré : «Je suppose que je n’étais pas d’accord avec la proposition émise au club poutrelles de faire changer de tranche des clients monitorés». 76. Un grand nombre de listes de ces clients, nationales ou régionales, concernant spécifiquement des clients poutrelles, avec ou sans mention des pilotes, ainsi que des envois par courrier électronique qui y font référence, existent au dossier (par exemple, fichier Excel «clients monitorés avec pilotes.xls » et cotes 20021 à 20044, 14634 et 14635).

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Le suivi des parts de marché 77. M. H… (Descours & Cabaud) a déclaré, s’agissant de l’utilisation du classement des clients : « En même temps que le contrôle des prix, il a été décidé (sur impulsion initiale de PAD puis immédiatement de KDI) de geler les parts de marché. Dès lors, avant même de s’occuper des barèmes, il s’est agi d’identifier, de classer les clients constructeurs métalliques et d’étudier les chiffres des deux années précédentes afin de procéder à la répartition des parts de marché ». 78. Un document en date du 1er juin 2001 largement diffusé en interne à Descours & Cabaud renseigne sur le fonctionnement pratique des remontées de tonnage et du suivi de la réalisation des objectifs (cotes 13916 et 13917) : «1°/ Nous vous communiquons, en annexe, tableaux des enregistrements de commandes de clients monitorés, pour la période du 2/04 au 25/05. Tableau n° 1 : Pour chaque société, point entre la moyenne des réalisations 1999/2000 (D) et les réalisations (R) pour la période considérée. Vous remarquerez que notre % réalisé est identique à celui de nos moyennes 1999/2000 et que nous accusons un retard sur les 6e, 7e, 9e et 11e régions. Tableau n° 2 : Réalisations par société et par client des tonnages en valeur absolue. Tableau n° 3 : tableau par société et par client des réalisations en %. 2°/ Pour les 28 clients monitorés repris sur la liste jointe, il a été décidé : d’opérer dans chaque société un contrôle des tonnages déclarés vendus en avril 2001 ; nous vous fixerons prochainement les «modalités». De confier le pilotage à une seule personne (bien noter les modifications intervenues). 3°/ Rappel des conditions, pour toute affaire jusqu’à 100 T (quelle que soit son origine) : Un seul barème en vigueur : celui du 2/05/2001 Rabais clients monitorés : pour faciliter l’emploi, nous vous joignons pour chacun d’eux les rabais à appliquer par catégorie de poutrelle, en sachant que :

- pour les clients bénéficiant d’un rabais inférieur ou égal à 530 F (hors catégorie BO), le rabais maxi pourra être de 530 F/T,
- pour les clients bénéficiant d’un rabais supérieur ou égal à 530 F (hors catégorie BO), les conditions demeurent inchangées. 4°/ Nous profitons de la présente pour vous informer que vous devrez nous communiquer, pour réception impérative vendredi 15 juin avant 10h00 les renseignements suivants : Facturation poutrelles de mai 2001 Enregistrements poutrelles pour la période du 2/04 au 14/06 inclus ».
79. Le tableau n°1 dont il est fait mention dans les instructions est daté du 28 mai 2001 et présente, par région, pour la période avril/mai 2001 et pour sept négociants (Descours & Cabaud, D’Huart, KDI, Maisonneuve, Morel, ProfilArbed et PUM), le pourcentage de ventes (« réalisations ») en moyenne sur les années 1999 et 2000 et le pourcentage de commandes enregistrées du 2 avril au 25 mai 2001. Ce document a été réalisé par le club poutrelles (déclaration de M. H…, dans le bureau duquel le document a été trouvé). Les tableaux n° 2 et 3, également datés du 28 mai 2001 détaillent, par clients monitorés, les

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réalisations (en tonnage et en pourcentage) des sept mêmes négociants du 2 avril au 25 mai (cotes 13918, 1181 et 19828 à 19840). 80. Des documents de suivi similaires figurent au dossier. Selon les cas, ils ont pour objet d’opérer un suivi global des tonnages ou des objectifs et des réalisations sur des clients des 11 régions (en pourcentage et en tonnage), de référencer les commandes passées chez certains clients monitorés et le groupe dont fait partie le pilote, de recenser, pour une région et une période données, les demandes des clients monitorés, les commandes prises et les conditions offertes ou encore de calculer le pourcentage de consultations pour lesquelles les commandes ont été déclarées et conclues au prix concerté. Les entreprises concernées par ces tableaux sont tout ou partie celles du groupe PUM/ Arcelor, PADF, KDI, Descours & Cabaud, Martin Belaysoud, Morel et Maisonneuve. Une catégorie « autres » est parfois comprise (par exemple, cotes 19972, 19973, 20098 à 20111, 13293, 4496 à 4509 ainsi que fichiers Excel dénommés « POUT 9E REG SEPT 02.xls », « 8 10 au 22102002.xls » et « CR affaires 91003.xls »). 81. Pour réaliser ces tableaux, les négociants faisaient remonter au FNA des informations précises sur les tonnages réalisés avec les clients monitorés. Cela pouvait être fait par courrier, comme c’est le cas de la société Maisonneuve en février et mai 2003 concernant une cinquantaine de clients monitorés pour 2001, 2002 et janvier à avril 2003 ou par informatique : figurent au dossier des fichiers remplis (intitulé « synthèse pilotage oct-nov FNA ») ou à remplir (intitulé « synthèse pilotage ») pour une période donnée et à retourner au FNA et comprenant pour tout ou partie des 11 régions les colonnes « client », « potentiel », « volumes en consultation » ou « consultation (tonnage total) », « volumes déclarés par intervenant » ou « consultations par intervenant », « volumes enregistrés par intervenant » ou « commandes par intervenant» et dans certains cas « % du marché par intervenant » ou « observations ». M. D… (FNA) a déclaré à propos de ces documents qu’il s’agissait de « valider les classements des clients qui ont été effectués (à partir de l’addition des tonnages réalisés auprès des différentes sociétés) » et que « ces données étaient examinées lors des réunions poutrelles » (cotes 14602 à 14604, 14529, 20112, 20121, 1828 à 1838 ainsi que fichier « synthèse pilotage.xls »). 82. Le club poutrelles ou le FNA centralisait les remontées d’informations et réalisait des tableaux similaires à celui du 28 mai 2001, présenté ci-dessus au paragraphe 79. Cinq séries de tableaux récapitulatifs émanant du FNA et distribués, selon le demandeur de clémence, pendant ou après les réunions de la commission poutrelles comportent pour sept négociants (Descours & Cabaud, D’Huart, KDI, Maisonneuve, Morel, PADF et PUM) des informations sur les performances réalisées en matière de poutrelles sur toutes les régions et en global pour des clients correspondants à la liste des clients monitorés de 2001. La société Descours & Cabaud a déclaré : « Ces tableaux constituaient le véritable cœur de l’accord puisqu’ils permettaient le contrôle des niveaux de vente de poutrelles : – chez chaque client « monitoré » ; – dans chacune des 11 régions de l’entente ; – et au plan national » (cote 19687). Les tableaux sont datés de juillet 2001, octobre 2001 ou décembre 2001 et contiennent chacun une partie des informations suivantes (cotes 19792 à 19796 et 20260 à 20574) : • niveau des parts de marché décidé en commun sur la base des performances de 1999 et 2000 ; • commandes enregistrées entre le 25 juin et le 10 octobre 2001, en tonnes puis en pourcentages ; • livraisons de septembre 2001, en tonnes puis en pourcentages ;

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• livraisons du troisième trimestre 2001, en tonnes et en pourcentages ; • pourcentages de livraisons effectives du deuxième trimestre 2001, du troisième trimestre 2001 entre le 25 juin et le 10 octobre 2001, de septembre 2001 et de novembre 2001 ; • facturation de novembre 2001, en tonnes puis en pourcentages ; • analyse du marché poutrelles : potentiel haut, potentiel bas, réalisation moyenne sur 1999 et 2000, réalisations d’avril à novembre 2001 et projection sur 2001. 83. De telles informations ne peuvent être obtenues isolément par un négociant. Leur établissement et leur diffusion dépassent le champ de l’agrément délivré par l’administration au FNA pour collecter des données statistiques. Les remontées d’informations et le contrôle des consultations, des tonnages déclarés et des tonnages vendus permettaient un suivi global de l’évolution du dispositif mais également des parts de marché et de leur répartition telle que décidée en commun. C’est ce que confirment les pièces et déclarations suivantes (cotes 9063, 1181 et 13307) : • des notes prises dans l’agenda de M. Y…, qui confirment d’ailleurs l’idée selon laquelle une répartition des parts de marché avait lieu en Club poutrelles : « Perrin Constr. Métallique S Est ªsait exactement tout ce qui s’est dit le 3/1/02 au Club Poutrelles – parts de marché distribuées au préalable »; • la déclaration de M. H… (Descours & Cabaud) : « Dans le cadre du club poutrelles, on désirait fixer les parts de marché chez les clients monitorés (…) Lorsque dans les réalisations, nous étions en retard, nous prenions les dispositions pour récupérer notre retard » ;

• un document daté du 13 novembre 2003 relatifs à un client monitorés et comportant les mentions suivantes : « TOTAL DES CONSULTATIONS POUTRELLES EN OCTOBRE : 115T. DIS (nom d’une société appartenant au groupe Descourt et Cabaud) EN A TRAITE 55T. SOIT 47% POUR UN OBJECTIF A 26 %. KDI EN A TRAITE 37T. SOIT 32 % POUR UN OBJECTIF A 25 % CHAILLOUS EN A TRAITE 23T. SOIT 20% POUR UN OBJECTIF A 32 % ». L’évolution de la concertation et le renforcement du dispositif produits longs en 2003 84. Le dispositif a évolué par resserrements successifs. L’année 2001 est notamment marquée par la mise en place du « monitorage » présenté ci-avant. L’année 2003 l’est par le renforcement du dispositif poutrelles et la mise en place d’un dispositif produits plats. A cet égard, M. H… (Descours & Cabaud) a déclaré : « [D]ès avant 2001, dans le cadre de réunions nationales mensuelles, nous déterminions, sur les différents produits sidérurgiques, des tendances, des instructions de vente taquets (c’est-à-dire minimales) ou des barèmes. Cela n’empêchait pas les régions de s’organiser et de «légiférer» pour mettre en place un mode de fonctionnement plus précis par produits. En avril 2001, compte tenu des baisses de volume pour l’ensemble des produits sidérurgiques et d’une chute de rentabilité, spécialement sur le marché des poutrelles (produit sur lequel le négoce est le plus présent), la situation était difficile et nous avons décidé, avec les deux autres grands groupes nationaux (PAD, devenu par la suite

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ARCELOR DISTRIBUTION et KDI) qu’il fallait réglementer sur le plan national les prix et donc les marges de ce produit qui représentait des tonnages très importants et dont les prix étaient particulièrement perturbés. En même temps que le contrôle des prix, il a été décidé (sur impulsion initiale de PAD puis immédiatement de KDI) de geler les parts de marché. Dès lors, avant même de s’occuper des barèmes, il s’est agi d’identifier, de classer les clients constructeurs métalliques et d’étudier les chiffres des deux années précédentes afin de procéder à la répartition des parts de marché. Pour qu’un tel dispositif fonctionne, la société MOREL a tout de suite été associée, compte tenu de son importance dans le secteur. Dans un deuxième temps, la société MAISONNEUVE, bien implantée notamment dans l’Ouest, a aussi été associée. Initialement, le nouveau dispositif ne concernait que les poutrelles qui étaient les produits les plus consommés par les constructeurs métalliques retenus. Pour les autres produits, on restait à l’état antérieur (c’est-à-dire des réunions nationales mensuelles fixant les tendances, conditions taquets et/ou barèmes, pour l’ensemble des produits et pour toutes les références, éventuellement complétées par une réglementation plus poussée au niveau régional). Mais, en pratique, tout en respectant les conditions poutrelles, d’autres prestations pouvaient permettre de récupérer des affaires. On a donc très vite compris que, pour fonctionner efficacement, le dispositif ne pouvait pas concerner uniquement les poutrelles. C’est pourquoi les conditions pour certains services associés, notamment la coupe, qui a une vraie valeur dans notre métier, ont été définies au niveau national. Puis on a évolué vers d’autres produits parfois vendus aux constructeurs métalliques en même temps que des poutrelles et que certaines régions réglementaient déjà (laminés, tôles, tubes de construction, profils à froid). Les résultats et l’intensité du dispositif sur ces autres produits variaient. Un dispositif discuté en commissions produits plats et en commission tubes a par exemple fonctionné chez les constructeurs métalliques pour les produits plats et les tubes construction sur la base d’un «barème spot». Dans le cadre des Clubs Poutrelles, une barémation a été mise en place dans le même esprit pour les profilés à froid, également achetés par les constructeurs métalliques, sur la base d’un barème KDI. Par ailleurs, dans le cadre des commissions produits, il a été demandé à DESCOURS & CABAUD de réfléchir à un barème national sur les ronds à béton : ce barème a été fait mais il n’a pas eu de résultat et ce en raison de la part peu importante du négoce dans cette activité. Dans le même ordre d’idée, certaines règles ont été fixées afin de ne pas polluer l’application du dispositif. Tout d’abord, les ventes considérées comme semi-directes ont été définies (en terme de tonnage et de délai de livraison). Ces ventes représentent une part peu importante de l’activité globale et les marges sont toujours réduites. Mais les prix n’ont jamais été réglementés sur les ventes semi-directes et les commandes des clients monitorés, qui sont des clients importants, pouvaient parfois être traitées comme des ventes semi-directes afin d’échapper au dispositif. Il était donc important de fixer les critères de définition de ce type de ventes. Ensuite, il existe une différence entre le poids théorique et le poids pesé, et certains clients demandent à ne payer que le poids pesé. Cela peut faire varier les conditions commerciales appliquées. Les rares clients à qui pouvait être facturé le poids pesé étaient donc identifiés et listés ». 85. Les éléments au dossier révèlent ainsi la mise en place, sous l’impulsion des trois principaux négociants, de la relance du dispositif produits longs en 2003. Des rencontres ont eu lieu entre eux les 30 juillet 2003 (en présence également de représentants de Morel),

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2 septembre et 8 septembre 2003 (en présence également de représentants de Maisonneuve) (cotes 1997 à 20020, 8164 et 8165, 10919 à 11049, 8870 à 9220 et 14688). 86. Le tableau suivant recense les consignes de cette période trouvées respectivement dans chacun des trois grands groupes de négociants et atteste d’une très grande similitude entre elles. Il montre également que le dispositif mis en place en septembre 2003 couvre au niveau national tous les produits longs et toutes les hypothèses pouvant se rencontrer sur les marchés : clients importants et plus petits, ventes semi-directes, etc. (cotes 10252 à 10255, 9708 à 9711, 8256 à 8258, 17733 à 17735 ainsi que fichier « 1_next1.ppt ») :

Tableau n° 5 : Consignes diffusées chez les trois négociants nationaux en septembre 2003

D&C KDI PUM Retranscription d’un document manuscrit

Aff. Poutrelles >Application du barème de → Application du barème de Barème de gros à lecture Négoce «gros» à lecture directe gros à lecture directe directe clients >Les rabais sur ce barème
- Les rabais sur ce barème Pas de nouveaux marchés ni A et L sont interdits sont interdits de renouvellement des >Ni nouveaux marchés, ni
- Ni nouveaux marchés, ni marchés renouvellements renouvellements Coupe à lecture directe >Application du barème > Coupes : Juin 99 -30% «coupes» à lecture directe
- Application intégrale du grenaillage peinture
- coupe paquet barème «coupes»
- coupes pour Voir barème
- Pour les coupes au paquet longueur métrique

et longueur métrique : voir > Application du barème barème GPP du juin 99 avec > GPP : application du possibilité de remise de 30% barème GPP de juin 99 avec possibilité de remise de 30% LM >Barème du 1er mars 2003 : → Barème national du 1er [Mot illisible] Barème Mars remise maxi 25% mars 2003 avec une remise 2003 – 25% maxi colonne « 20T et + » de 25% Tubes >Barème du 1er avril 2003 : → Barème national 1er avril Barème Avril 2003 – 25% remise maxi 25% 2003 avec une remise maxi sur colonne « 20T et + » de 25%

Suivi mensuel de ces clients

Suivi mensuel dans le cadre par un club Produits Longs des clubs produits longs régional (nouvelle définition Avt 1/10 – Part de marché au 1er octobre) des différents [mot illisible] et respect de ces prix

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Aff. Poutrelles >Application du « barème de → Application du barème de Barème référence colonne B Négoce référence « colonne B référence colonne B. avec avec rabais de –50€ à 60€ clients >Rabais possible de 50 ou 60 une selon le client – [mot B Euros selon client sur remise maxi de 50 ou 60 illisible] cette colonne euros, selon indication Pas de ~ >Ni nouveaux marchés ni
- ni nouveaux marchés, ni Coupe de lecture directe renouvellements renouvellements Grenaillage Peinture idem A >Application du barème « > Coupes : et L coupes « à lecture directe
- Application intégrale du
- coupe paquet barème « coupes »
- coupes pour V
- Pour les coupes au paquet oir barème et longueur métrique : voir longueur métrique

barème >Application du barème GPP du juin 99 avec > GPP : application du barème GPP de juin 99 avec possibilité de remise de 30% possibilité remise de 30% LM >Barème du 1er mars 2003 : → Barème national du 1er Mars 2003 20% remise maxi 20% mars 2003 avec une remise

maxi sur colonne « 20 T et + « de 20% Tubes >Barème du 1er avril 2003 : → Barème national au 1''' Avril 2003 20% remise maxi 20% avril 2003 avec une remise maxi sur colonne « 20 T et + « de 20%

Suivi mensuel de ces clients Clubs régionaux → suivi par un club Produits Longs mensuel de ces clients régional (nouvelle définition au 1er octobre) Aff. Poutrelles > Barème négoce de détail à =>Barème de détail à Barème Négoce bâtir à partir des colonnes construire par les région en de détail 10 et 20 et 20 à 50T Autres « 10 à 20 T « et « 20 à 50 T» partant des colonnes « 10 à A construire clients 20T » et « 20 à 50T » du > Ni nouveaux marchés, ni en région suivant la colonne Clients barème de référence renouvellements Rabais — maxi— 20 à €50 C Rabais maxi à appliquer, > Le rabais maxi à appliquer, pour les affaires importantes, Maxi – 60€ 20 à 50 T affaires pour les affaires est importantes importantes, est de 60 euros de 60 euros sur la colonne « Coupe à lecture directe sur la colonne « 20 à 50 T » 20 à 50T « Grenaillage-peinture- 30% >Application du barème «coupes» à lecture directe Ni nouveaux marchés, ni

renouvellements
- coupe paquet

>Coupes :

- coupes pour Voir barème longueur métrique

Application intégrale du barème « coupes » > Application du barème GPP du juin 99 avec Pour tes coupes au paquet et possibilité de remise de 30% longueur métrique : voir barème >GPP : application du barème GPP de juin 99 avec possibilité de remise de 30%

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LM > Barème négoce de détail à → Barème de détail à Barèmes à bâtir bâtir à partir des barèmes construire par les régions en Aff de + de 15T 20% sur nationaux partant du barème national chaque colonne du 1er mars 2003 > Les rabais maxi à

appliquer, pour les affaires > – Les rabais maxi à appliquer,

10 T, pour les affaires > 10 T, sont sont de 20% sur chaque de 20% sur chaque colonne colonne Tubes > Barème négoce de détail à → Barème de détail à Barèmes à bâtir bâtir à partir des barèmes construire par les régions en Aff de + de 15T 20% sur nationaux partant du barème national chaque colonne du 1er avril 2003 > Les rabais maxi à appliquer, pour les affaires > – Les rabais maxi à appliquer, 10T, pour les affaires > 10 T, sont sont de 20% sur chaque de 20% sur chaque colonne colonne

Suivi de cette application par

les régions. Aff. Pour les DEFINITION 1 > Pas de cotation des Pas de cotation des semi catégories > Pas de cotation des producteurs aux négociants producteurs aux négociants ?? 1 à 5 étrangers pour le marché directes producteurs aux négociants Pas de cotation des français étrangers pour le marché producteurs aux utilisateurs français > Pas de cotation directement Aff 100Tmini des producteurs aux > Pas de cotation directement 10T mini par poste utilisateurs des producteurs Livraison en un seul point et 1 > Affaire de 100 tomes aux utilisateurs seul [mot illisible] minimum > Affaire de 100 tonnes Délai > 1 mois > Poste de 10 tonnes en minimum longueur commerciale > Poste de 10 tonnes en > Livraison directe de l’usine longueur commerciale chez le client ou le chantier > Livraison directe de l’usine en un seul point de livraison chez le client ou le et en une seule fois chantier en un seul point de > Délai > 1 mois livraison et en une

seule fois > Délai > I mois

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Pour les DEFINITION 2 > Pas de cotation des Aff mini 50T catégories > Pas de cotation des producteurs aux négociants 5T en lgueurs [mot illisible] 0 et 6 producteurs aux négociants étrangers pour le marché étrangers pour le marché français français > Pas de cotation > Pas de cotation directement des producteurs directement des producteurs aux aux utilisateurs utilisateurs > Affaires de 50 tonnes > Affaires de 50 tonnes minimum minimum > Poste de 5 tonnes en > Poste de 5 tonnes en longueur commerciale longueur commerciale > Livraison directe de l’usine > Livraison directe de l’usine chez le client ou le chantier chez le client ou le chantier en un seul point de livraison en un seul point de livraison et en une seule fois et en une seule fois > Délai > 1 mois > Délai > 1 mois

En cas d’affaire mixte Dans le cas d’affaire mixte Affaires mixtes (catégories 0 et 6 + autres (catégories 0 et 6 + autres 0et 6→ pour l’ensemble des catégories), c’est la définition catégories) c’est la première catégories 1 qui s’applique définition qui s’applique. point 1 87. Une note interne à la société KDI rédigée par M. F…, datée du 10 septembre 2003, concernant la « politique commerciale septembre à décembre 2003 », comprend les mentions « application au 15 septembre 2003 » et « dispositif Produits Longs sera renforcé au 1er octobre 2003 ». Des notes prises à l’occasion d’une conférence téléphonique de M. X… réunissant toutes les filiales de distribution du groupe PUM/ Arcelor par deux responsables de filiales contiennent les mentions et passages suivants : « évolution conjoncturelle exécrable », « Produits longs et produits plats », « Démarrage au 15/09 », « Verrouillage complet le 1/10 » « Dispositif assorti de sanction », « Paroles de J. X… sur AND Descours KDI > nous respectons l’engagement pris au niveau professionnel », « notre respect s’accompagne du respect des autres », et « surveillance/ Contrôle mis en place », ainsi que :

« 3 facteurs : évolution conjoncturelle exécrable hausse certaine de l’amont AND sous haute surveillance (participons-nous à la dégradation du marché ?) Accord formel de tenue des prix sur le marché français
- dès le 15/9
- verrouillé le 1/10 dispositif assorti de sanction discipline exemplaire

[Mot illisible] ne veut pas dire naïveté (surveillance et contrôle) Bien vérifier que les confrères respectent le dispositif ». 88. M. D… (FNA) a qualifié ces documents « d’instructions « taquets » (des conditions minimales) données par les directions générales des groupes » et a précisé que « les filiales ont toujours la possibilité de pratiquer des tarifs plus élevés ». Leur similitude démontre qu’elles ont été décidées en commun et transmises en septembre 2003, ce qui est

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également confirmé par ces notes de M. A… (Maisonneuve), postérieures à cette date : « L’accord de septembre porte sur un dispositif global : – Poutrelles – L.M. – L.Pl – Tubes – PAF – P. Plats et chez tous les clients ». Des documents de 2004, également saisis chez Maisonneuve confirment le maintien d’un dispositif suivant les mêmes principes (cotes 1828 à 1838, 15175 et 14850 à 14856). Le dispositif produits plats 89. En 2003 a également été décidée la mise en place d’un dispositif concernant les produits plats et répliquant le dispositif poutrelles. Comme indiqué ci-dessus, la commission produits plats discutait, établissait ou modifiait jusqu’alors des conditions tarifaires préparées par le groupe PUM/ Arcelor, diffusées ensuite à l’intérieur des trois grands groupes ainsi qu’aux présidents de régions, qui les transmettaient aux négociants de leur région. 90. Des documents antérieurs à septembre 2003 et remontant jusqu’à 1999 confirment que des conditions concertées sur les produits plats étaient diffusées dans la profession. Il s’agit de comptes rendus de réunions, d’instructions de vente internes aux groupes, de communications de conditions tarifaires par des présidents de régions, d’échanges ponctuels de consignes ou encore de récapitulatifs régionaux des dispositifs. Par ailleurs, si le classement n’était pas aussi poussé qu’en matière de poutrelles, figurent au dossier des barèmes généraux de clients reprenant, pour tous les produits dont les produits plats, la colonne tarifaire à leur appliquer (cotes 15692 à 16032, 11253, 16776 à 16778, 17965 à 17967, 8719 à 8727, 20156 à 20259, 8317, 8318, 8327, 10410, 14371, 8343, 7221, 17957 à 17962 et 14622). 91. A partir de septembre 2003, parallèlement au resserrement du dispositif concernant les poutrelles, a été décidée la transposition du monitorage des clients importants – jusqu’ici appliqué aux seules poutrelles – aux produits plats. Un système de suivi a donc été ajouté, comme cela avait été le cas en 2001 pour les poutrelles, aux barèmes et classements en vigueur. Le dispositif mis en place est le suivant, tel que présenté dans la même note interne de KDI que celle citée au paragraphe 87 : « Dispositif produits plats Affaires magasin et semi-directes : a. Clients Monitorés : Le barème (franco client) à lecture directe en date du 15 septembre est à appliquer pour tous les clients monitorés dont vous trouverez ci-jointe la liste. Les rabais sur ce barème sont interdits. Cette liste pourra être complétée par les régions. b. Clientèle diffuse : Barème de détail à construire par les régions en partant du barème du 2 mai 2003. Rabais maxi à appliquer pour les affaires importantes : 50 euros sur la colonne « 10 à 20 T » de ce barème » (cotes 8256 à 8258 et 10253). 92. Ce dispositif a également été diffusé dans les régions, comme en témoigne un courrier électronique de M. 12… (KDI), président de la 4e région, à plusieurs négociants : « En complément de la note des conditions 4e région pour le mois de septembre nous vous précisons que le dispositif national Produits plats est renforcé par une « structure de suivi » des dossiers retenus. Liste modifiée en annexe. Monsieur Jacques 39… assumera le rôle (…) Rappel des conditions : – Application du barème de gros du 8/09/03 Net franco pour les clients listés uniquement – Déclaration systématique des consultations à J. 39…. Veuillez informer vos commerciaux concernés par ces clients. – Une analyse des affaires sera faite lors de la réunion régionale mensuelle. – Un compte rendu sera effectué le jeudi précédent la réunion FNA » (cote 10289).

93. Pour mettre en place ce dispositif, et comme cela avait été le cas pour les poutrelles en 2001, une liste de clients monitorés a été établie. Cinq documents intermédiaires puis

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définitifs établis entre août et octobre 2003 et comprenant plus ou moins de clients, figurent au dossier. Les chiffres des dernières listes se stabilisent à un niveau proche du nombre de clients monitorés en poutrelles. M. D… (FNA) a confirmé que ce système avait été mis en place à l’automne 2003. Il a expliqué que « la structure de suivi dont il est question s’inspire du pilotage pour les produits longs » et que « le « dispositif national produits plats » n’est ni plus ni moins que ce qui se fait au niveau des poutrelles pour cette famille de produits. Les négociants ont listé les clients par potentiel (les gros potentiels) au sein de la commission produits plats pour les 11 régions » (cotes 20045 à 20072, 10289 à 10293, 10437 à 10452, 1828 à 1838 ainsi que le fichier « dossiers retenus lors de la réunion du 2.09.03.xls »).

94. Postérieurement à septembre 2003, les informations sur le dispositif produits plats continuent à être données par les mêmes moyens mais font référence aux clients monitorés produits plats (récapitulatifs, instructions internes et transmission via le président de région), dont un suivi des affaires est effectué (cotes 14856, 14857, 14837 à 14849, 11971 à 11973, 18196, 20138 à 20151, 19507, 19511, 19518, 19523, 19527, 19530, 19531, 19532, 19550 et 19554 à 19556, 14296 et 15646). L’activité du bureau du FNA 95. Le bureau est une réunion prévue par les statuts du FNA. L’ordre du jour pour la réunion du 16 avril 2002 était le suivant : « 1. Position de la profession sur l’évolution des conditions de paiement, 2. Évolution de l’organisation de la 11e région, 3. Point sur les dossiers adhérents « non déclarants », 4. Situation du marché et 5. Questions diverses », celui pour la réunion du 20 mai 2003 était : « 1. Situation générale. 2. Compte rendu des commissions. 3. Position vis-à-vis des associations régionales. 4. Création d’un centre de formation à F.N.A. ? 5. Synthèse PFTE. 6. Questions diverses » (cotes 16123 et 16154). 96. Les pièces au dossier indiquent que le bureau du FNA était en charge de valider les modifications apportées à la définition géographique ou à la direction des régions. Il dressait par ailleurs la liste des négociants de produits sidérurgiques ainsi que, dans le cadre de « commission services », des pratiques tarifaires annexes (frais de transports, terme de paiement, d’emballage, etc…) de chacun, procédant à un recensement des différents frais facturés par un grand nombre de négociants sur les 11 régions sidérurgiques ou préconisant des tarifs. Ces missions étaient attribuées à un membre du bureau en particulier, dont M. 8… (Liametho) en 2003 sur les frais de transport et les frais annexes et M. F… (KDI) en 2000 sur les services annexes. Un compte rendu interne à KDI de l’activité de cette commission propose que les points concernés soient abordés au prochain bureau et se termine ainsi : « Il faut réactiver la commission « barèmes » a. pour lancer de nouveaux barèmes nationaux ou régionaux sur : – les ronds à béton – les treillis soudés – les profilés à froid – etc…. », ce qui montre que les préconisations sur les services se placent sur le même plan que la réalisation de barèmes (cotes 19190, 19364, 19189, 19147, 19148, 16156 à 16159 et 8152). 97. Selon le demandeur de clémence, le bureau du FNA passait en revue les questions inhérentes au fonctionnement du syndicat et informait les participants du contenu des réunions précédemment citées auxquelles ils n’avaient pas nécessairement assisté. Respectivement pour les produits longs et pour les produits plats, les directeurs commerciaux de KDI et de PUM communiquaient oralement lors de cette réunion les décisions qui allaient ensuite être transmises aux présidents de région. Ceci est confirmé par les notes prises par M. D… lors de la réunion du bureau du 13 janvier 2004, dans lesquelles on voit que sont évoqués les barèmes des différents produits et les modalités de transmission des informations ainsi que par celles prises par M. Y… (KDI) dans son agenda

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2002 aux notes de la semaine 16 (15 au 21 avril). Ce dernier a par ailleurs déclaré : « J’étais membre du bureau de la FNA, qui est l’instance exécutive de la FNA : à l’époque, ce bureau s’occupait du fonctionnement interne du syndicat (le Conseil d’administration actuel s’occupe de la vie juridique du syndicat), notamment des commissions et réunions régionales, pour lesquelles il s’assurait qu’elles avaient lieu, que la situation de l’amont était connue et que les travaux des commissions étaient suivis par les régions » et « Le bureau qui avait connaissance de l’évolution des produits amonts pouvait indiquer à une commission que vu l’évolution des prix amonts, tel ou tel mouvement dans le barème de référence était souhaitable » (cotes 19692 à 19694, 19351, 9089 et 23088 à 23100). L’activité de la réunion des présidents de région 98. En substance, cette réunion était le point de jonction entre le niveau national et le niveau régional de la concertation. Les présidents de région y assistaient, recueillaient des informations des producteurs ainsi que les orientations ou décisions actées par les différentes commissions (ou le bureau). Ils faisaient ensuite un point sur la situation et l’application du dispositif dans leur région. Les éléments au dossier concordent sur le contenu de ces réunions. D’abord, des représentants des producteurs (souvent d’Arcelor) venaient présenter les tendances de leurs conditions tarifaires à venir. Puis, respectivement pour les produits longs et pour les produits plats, les directeurs commerciaux de KDI et de PUM communiquaient oralement le dispositif devant être mis en place. Ensuite, chaque président de région commentait oralement, pour sa région, la situation du marché, des prix et le comportement des opérateurs. Charge ensuite était à eux de diffuser, par courrier ou envoi électronique, les informations recueillies dans leur région, dans les réunions régulières qui s’y tenaient. M. 15… (KDI), président de la 7e région, confirme ce déroulement : « Le premier rôle de la fonction de président de région était d’assister à une réunion mensuelle à Paris où nous rencontrions des producteurs (ARCELOR tubes, ARCELOR produits plats et ARCELOR produits longs) qui nous parlaient de la conjoncture économique à leur niveau dans le contexte de pénurie. Chaque président de région devait faire un résumé de la situation locale sur le terrain : la mission était de faire une synthèse de l’information. Enfin, il convenait de relayer l’information au niveau de chaque région (notamment concernant les hausses tarifaires)» (cotes 1005 à 1014). 99. Ces éléments sont également confirmés par les différentes notes de ces réunions qui figurent au dossier, dont deux exemples représentatifs sont mentionnés ci-dessous (cotes 19352, 19353, 4800 à 4804, 4286 à 4289, 3839 à 3849 et 1185 à 1188) : • les notes prises M. D… lors de la réunion du 13 janvier 2004 : y apparaissent les informations vraisemblablement données par les producteurs, puis de rapides notes sur les barèmes (qu’il devait déjà connaître) et enfin des éléments sur les 11 régions concernant les opérateurs, les clients et le respect du dispositif (« R1 : tous les barèmes sont en place », « R2 (…) 5 à 20T → bagarre : doit vérifier la mise en place des barèmes », « R3 Adaptation des barèmes régionaux s/ national », etc.) ; • les notes prises par M. 15…, président de la 7e région lors de la même réunion ainsi qu’à l’occasion de celles des 16 mars et 20 avril 2004 : ces notes renvoient également aux présentations des producteurs puis aux variations des barèmes sur tous les produits (mentions explicites de M. 4… les 13 janvier et 20 avril et de M. I…

le 13 janvier ainsi que de consignes strictes « + 50 euros sur Pdts Plats tte catégo au 03 mai », « 1er barème < à lecture directe, plus de rabais sur clients B », « 2e barème de gros A et L → modification du barème de coupes », etc.).

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100. La réunion des présidents de région concluait ainsi les réunions syndicales de concertation de la « semaine des forges ». c) Les autres contacts bilatéraux ou multilatéraux 101. Les pièces du dossier attestent de l’existence, en sus des commissions et réunions intéressant un grand nombre de négociants dans le cadre de la « semaine des forges », de rencontres régulières entre les directeurs commerciaux et les présidents des trois grands groupes nationaux de négociants, accompagnés des représentants du FNA, dans le cadre desquelles étaient évoqués le suivi et l’orientation de la concertation. Par ailleurs, des contacts bilatéraux, par téléphone ou par courrier, avaient lieu entre les négociants. Les déjeuners des directeurs commerciaux 102. Les documents saisis au FNA font état de « déjeuners du mardi » organisés après les réunions des présidents de région. Tous les négociants ne participaient pas à ces déjeuners, réservés aux directeurs commerciaux des trois grands groupes nationaux. Ainsi, assistaient à ces déjeuners en 2004 MM. C…, (président FNA), E… (D&C), F… (KDI), G… (D&C), H… (D&C), I… (AND), Y… (KDI) et 4… (AND). Antérieurement, (au moins jusqu’en mars 2001) M. T… représentait le FNA à la place de M. C…, (au moins jusqu’en 2003) M. S… représentait PUM/AND à la place de M. 4…, M. L… représentait KDI (en 1999) et M. 22… représentait SLPM (en 1999). Ces déjeuners avaient lieu à Paris, au « Petit Colombier » jusqu’en 2002 et au « Vinci » après 2002 et servaient à synthétiser les éléments importants de la concertation. Ils étaient en effet l’occasion d’une analyse des informations recueillies et des décisions prises lors des réunions précédentes. Par ailleurs, les participants s’accordaient sur des instructions à communiquer et procédaient à des mises au point ou des rappels à l’ordre en cas de dérapage dans le suivi du dispositif. Les frais étaient pris en charge à tour de rôle par les participants et la société Descours & Cabaud a apporté dans le cadre de sa demande de clémence les notes de frais de dix de ces repas, de 1997 à 2004 (19498, 10919 à 11104, 8870 à 9220, 19913 à 19927, 20615 à 20628, 20666 et 20667). Le tableau ci-dessous recense les participants aux déjeuners concernés par ces notes de frais : Tableau n° 6 : Participants aux déjeuners des directeurs commerciaux

16/12/97 26/08/99 20/03/01 18/09/01 22/01/02 18/02/03 17/06/03 14/10/03 13/01/04 20/04/04 FNA M. C… X X X X X X X X M. T… X X X D&C M. E… X X X X X M. G… X M. H… X X X X X X X X KDI M. L… X M. F… X X X X M. Y… X X X X X X X PUM M. I… X X X X X X X X X AND M. 4… X X M. S… X X X X X X X X M. 22… X

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Les dîners des présidents 103. Les documents saisis au FNA font état de « dîners des présidents », réunissant les dirigeants des trois grands groupes ainsi que celui du FNA. Étaient ainsi conviés en juillet 2003 MM. C… (président du FNA), X… (PUM), Y… (KDI) et Z… (D&C). La société Descours & Cabaud a déclaré à propos de ces dîners réunissant les présidents des trois grands groupes nationaux, ainsi qu’éventuellement leurs directeurs commerciaux et le président du FNA qu’ils avaient lieu à intervalles non réguliers mais environ deux à trois fois par an. L’objet était le suivant : «A la lumière des échanges sur le marché des aciers (production comme distribution), un point sur le fonctionnement général de l’entente était fait. Les difficultés de fonctionnement de l'«entente» étaient mises en relief et les familles de produits concernés par l'«entente» étaient définies » (cotes 19499, 19700 à 19702 et 19769 à 19771). 104. Les frais étaient pris en charge à tour de rôle par les participants et la société Descours & Cabaud a apporté dans le cadre de sa demande de clémence une note de frais d’un diner du 25 novembre 2002 au « Pressoir », ayant réuni MM. Q… (PAD), I… (PADF), Z… (D&C), E… (D&C), Y… (KDI) et C…. Par ailleurs, les agendas 2002 et 2003 de M. Y… mentionnent des dîners des présidents aux dates et lieux et suivants : 13 mars 2003 (à la « Maison du Danemark »), 10 juin et 16 décembre 2003 (au « Faugeron »), 14 janvier (endroit non précisé, précédé d’une réunion avec des représentants du FNA, de D&C et de PUM) et 10 juin 2002 (endroit non précisé) et 8 avril, 29 août et 25 novembre 2002 (au « Pressoir »). Y sont également indiqués un dîner le 9 avril 2003 avec MM. X… et 23…, des déjeuners avec M. X… les 25 juillet et 11 décembre 2003 et une réunion avec MM. X…, I… et 23… chez KDI le 26 août 2003 (cotes 19928 à 19938, 8938, 8964, 9018, 9062, 9086, 9126, 9152, 8946, 8977, 9016 et 8986). Les contacts téléphoniques et autres contacts bilatéraux 105. Les pièces réunies au dossier révèlent que des contacts bilatéraux entre négociants, notamment les grands groupes, pouvaient se faire par courrier ou par téléphone. M. H… (Descours & Cabaud) a ainsi indiqué que s’il « n’y avait pas de contacts bilatéraux sur le fond ou sur les parts de marché, [i]l en existait par contre pour des clients ou des affaires. Certains dossiers se réglaient à deux plutôt qu’en réunions ». Figurent au dossier deux cahiers recensant les appels téléphoniques reçus par M. F…, du groupe KDI. Ils montrent que celui-ci était en contact régulier avec un certain nombre de négociants concurrents (dont PUM/Arcelor, D&C et Morel), de points centraux ou du FNA. L’agenda de M. Y… (KDI) indique par ailleurs un certain nombre d’appels passés à M. Z… (D&C), M. Q… (PAD), M. X… (AND) et MM. C… et D… (FNA) (cotes 21926 à 21939, 8576 à 8637 et 9238 à 9298 et 8870 à 9220).

106. Enfin, des négociants entraient en contact les uns avec les autres pour s’interroger mutuellement sur l’issue d’affaires perdues ou s’informer de niveaux de prix (dont Maisonneuve avec KDI, Chaillous et PUM) et organisaient dans certains cas des réunions ou des échanges bilatéraux sur des consultations, des classements de clients ou la réalisation de barèmes spécifiques (dont Descours & Cabaud avec KDI et avec PUM et CODIP avec KDI) (cotes 10369 à 10371, 14550 à 14557, 14559 à 14571, 22777 à 22794 et 16688 à 16694).

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d) Le suivi des dispositifs nationaux 107. Si les orientations du dispositif « produits longs » étaient décidées au niveau national, sa mise en place était régionale, la plupart des affaires se décidant à ce dernier niveau. Les éléments de suivi du dispositif « produits longs » sont parfois identiques ou se confondent avec le suivi de dispositifs concernant d’autres produits. La diffusion des décisions prises et des conditions concertées 108. Les décisions prises au niveau national étaient transmises aux différents négociants par message électronique, télécopie ou courrier, notamment par l’intermédiaire du président de région (avec parfois l’ajout de conditions liées à la région) ou du syndicat. Elles étaient par ailleurs relayées à l’intérieur des sociétés et des groupes. Les décisions prises par les commissions de produits étaient diffusées par les présidents de région ou par le syndicat FNA concernant les différents produits. Figurent ci-dessous des exemples représentatifs de ces échanges, concernant différentes régions : • pour la 1re région, message électronique de M. 9… (président de la 1re région) à M. A… rappelant les coordonnées du point central de la première région, le seuil de déclaration (5 tonnes) et communiquant la liste des clients monitorés poutrelles nationaux avec leur rabais par catégorie (cotes 14634 et 14635) ; • pour la 8e région, envois par M. 24…, président de la région, de barèmes et de classements pour plus de 22 clients, par messages électroniques à 14 négociants de la région (dont PUM, PADF, KDI, Descours & Cabaud, Morel, Ferren Fers et CODIP) en juin 2002 et par télécopie à Descours & Cabaud en septembre 2002, un document similaire ayant été retrouvé chez CODIP en septembre 2003. Le dossier révèle aussi l’envoi de trois barèmes à un très grand nombre de négociants et l’envoi d’un barème rectificatif de M. 16… (qui a succédé à M. 24… comme président de région) à M. S… à la suite de la diffusion d’un barème par le FNA (cotes 16776 à 16778, 17966, 17967, 18580, 18581, 18 910, 18911 et 19582) ; • pour les 3e, 4e, 9e et 10e régions, transmissions de barèmes (et autres instructions) par le président de région (cotes 20152 à 20155, 13485 à 13494, 19507 à 19511, 22640, 22353 à 22355 et 22390 à 22400), dont, pour la 9e région, envois par M. 17… à PUM, KDI, Descours & Cabaud et Morel (cotes 22513 à 22719) ; • envois par l’intermédiaire du FNA aux présidents de région ou aux négociants dont PUM, PADF, KDI, Descours & Cabaud, Morel, Maisonneuve, CODIP et Ferren Fers (cotes 4439, 4454, 4455, 14721 et 19576 à 19585). Le suivi régulier par les négociants 109. Les dispositifs nationaux étaient suivis et adaptés par les entreprises, de manière plus ou moins formelle. Ainsi, des réunions (détaillées ci-dessous) organisées sous l’autorité des présidents de régions au niveau régional, sous-régional ou départemental, générales ou spécialement dédiées aux poutrelles, étaient l’occasion non seulement de diffuser les barèmes et les autres décisions prises au niveau national, mais aussi de discuter sur les affaires passées et le comportement de chacun des opérateurs. Elles pouvaient être également le lieu de demandes de justifications voire de sanction des déviances (par exemple, cotes 14573 à 14583, 14996 à 16032, 9937 à 10373, 18153 à 18188, 18656 à 18785, 18912 à 18967).

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110. En cas de difficulté, les conflits pouvaient être traités au niveau des réunions nationales, compte tenu des fréquentes remontées d’informations des filiales des trois grands groupes à leurs directeurs commerciaux ou responsables produits. M. H… (Descours & Cabaud) a déclaré à ce propos : « Le suivi des affaires se faisait en réunion, sur la base éventuelle d’offres de prix ou quelques fois de factures. (…) de manière générale, des points étaient faits lors des réunions du Club Poutrelles et des réunions des Directeurs commerciaux des groupes nationaux au FNA, ainsi qu’entre les Présidents des groupes nationaux. C’est à ces occasions qu’était réalisé le suivi des affaires et que les mesures visant à assurer la discipline étaient prises. L’entreprise en infraction y passait un mauvais moment. A cet égard, en plus de permettre de préciser certains points ou d’officialiser les règles et comportements à suivre, les déjeuners des directeurs commerciaux étaient également l’occasion de remettre, en plus petit comité, les choses au point quand des infractions avaient été constatées » (cotes 21926 à 21939 et pour les exemples de remontées internes des déviances, cotes 4669 à 4775, 10245 à 10254 et 18186). 111. Les négociants procédaient par ailleurs eux-mêmes à un suivi des affaires, de manière ponctuelle ou de manière générale et méthodique. Ainsi, a notamment été retrouvée dans les locaux de la société Maisonneuve une série de tableaux récapitulatifs des « dysfonctionnements » observés ou des demandes directes d’explications sur les affaires perdues auprès des concurrents ou du syndicat, par courrier ou par téléphone (cotes 15148 à 15172, 15191 à 15204, 13739, 13755, 13781). La gestion des consultations par les pilotes et points centraux Les notions de pilote et de point central 112. Au jour le jour, des référents ont été mis en place pour recueillir les informations et suivre les consultations au niveau d’un client ou d’une zone géographique. Des « pilotes » et des « points centraux » étaient ainsi désignés pour surveiller l’évolution des affaires, au niveau d’un client en particulier (clients monitorés poutrelles principalement) ou d’un département (tous produits). Les pilotes et les points centraux constituent le deuxième point d’ancrage du dispositif national dans les régions, avec les réunions régionales mises en place sous la direction des présidents de région. 113. L’existence de points centraux et de pilotes, depuis au moins 1999, est clairement établie sur l’ensemble des 11 régions FNA, tant par les pièces saisies que par les déclarations du demandeur de clémence qui concordent avec celles des différentes personnes auditionnées lors de l’enquête et de l’instruction. Des comptes rendus de réunions, des listes de pilotes, des listes de clients accompagnés de leur pilote, des listes de points centraux par département ou des documents faisant la synthèse de consultations et de commandes par clients monitorés, accompagnés du nom des pilotes de ces clients figurent ainsi par exemple au dossier et permettent d’identifier les personnes en charge de ces fonctions. Ces pilotes et point centraux sont issus de différentes sociétés ou groupes de négociants, parmi lesquels plusieurs membres des groupes PUM/ Arcelor, KDI, Descours & Cabaud et Morel ainsi que des sociétés Maisonneuve et Clisson Métal. Il a été possible de retrouver dans certains cas des documents de suivi sur la base desquels ils orientaient les consultations (par exemple, cotes 19958 à 19969, 20086 à 20097, 4937, 4432, 4792, 19972, 19973, 20112 à 20131, 13293, 10382 à 10395, 13261 à 13267, 13269 à 13271, 13274 à 13276 et 13279 à 13312, 2264 à 2715, 6401 à 6521, 12023 à 12221, 9399 à 9559, 3962 et s., 4198, 4501, 225 à 232 et 390 à 396 ainsi que le fichier « clients monitorés régions classés avec pilotes.xls »).

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114. Une différence terminologique existe entre la notion de « pilote » et celle de « point central ». Le premier est théoriquement attaché à un client monitoré et le second à une zone géographique, au sein de laquelle il couvrait les affaires concernant d’une part les clients poutrelles non monitorés et d’autre part les clients des autres produits. Néanmoins, les deux notions désignent parfois la même fonction ou sont employées l’une pour l’autre. L’appellation « point central » est ainsi parfois rattachée à une catégorie de produits ou de clients plutôt qu’à un territoire. La référence à des « points centraux produits » se retrouve notamment dans la 4e région : ces points centraux ont alors en charge les produits plats, s’agissant de clients monitorés produits plats, dans le cadre du système mis en place à partir de 2003 visant à transposer le système de monitorage des poutrelles (cotes 20596 à 20640, 19, 14299 et 4792). Les fonctions des pilotes et points centraux 115. Leurs fonctions sont en pratique similaires : il s’agissait notamment de recueillir les informations sur les différentes consultations dans leur périmètre ou concernant le client particulier qu’ils suivaient et de les faire remonter au FNA. M. H… (Descours & Cabaud) a déclaré à leur propos : « Ils assuraient par ailleurs la remontée des volumes effectivement réalisés par les «clients monitorés», via le directeur commercial de chaque entreprise ou le syndicat FNA, afin que soit vérifié en réunion commerciale que les répartitions de tonnages étaient respectées ». S’agissant des clients monitorés importants, un pilote était nommé pour suivre les conditions proposées et les tonnages livrés. Il s’agissait généralement d’un membre (commercial ou dirigeant) du fournisseur principal du client concerné. Sa mission était d’obtenir des informations sur les consultations et les résultats des affaires, mais également, dans certaines régions et à certains moments, de s’occuper de la répartition des affaires ou de la mise en place de tours entre négociants. Ces catégories d’informations recueillies puis remontées au FNA dépassent largement le champ de l’agrément du SESSI concernant des remontées statistiques, qui ne devrait correspondre qu’à des données agrégées et des tonnages globaux. Les informations recueillies par les pilotes et les points centraux étaient sensibles et répondaient à une finalité très précise : s’assurer du suivi des conditions commerciales fixées en concertation. Mais les fonctions exercées par les pilotes et points centraux pouvaient être beaucoup plus importantes (cotes 23402 à 23420, 978). M. H… (Descours & Cabaud) a déclaré à ce propos : « Le rôle du « point central » était différent selon les régions : soit il avait uniquement un rôle de suivi et d’enregistrement des affaires, soit son rôle pouvait aller jusqu’à décider du sort à donner aux consultations des clients autres que les clients « monitorés »». 116. Le document présenté au paragraphe 72 démontre que le terme de pilote renvoyait initialement à celui de « leader », entendu comme l’entreprise prenant l’affaire en étant éventuellement « couverte » par d’autres. Ce pilote fixait le prix auquel était prise la commande : « Les pilotes » déterminent le prix à pratiquer pour enregistrer les commandes et seront « protégés » par les « suiveurs » qui remettront prix PILOTE + 30 à 50 F/T. Les « suiveurs » appellent le « pilote » pour connaître conditions et prix, lors de chaque consultation». Ceci est notamment confirmé par un document intitulé « principe de fonctionnement du pilotage » ainsi formulé (cotes 13922, 13923 et 22385 à 22389) : « 1. Déclaration de toutes les consultations magasins et semi-directes, dès l’instant où il y a un poste de poutrelles. 2. Les semi-directes ne nécessitent pas d’arbitrage, 3. Déclaration de toutes les commandes enregistrées, y compris les semi-directes qui sont comptabilisées dans les parts de marché.

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4. Le pilote a connaissance des parts de chacun et s’engage à les respecter 5. L’objectif de prix à atteindre est celui du classement déterminé. 6. Le pilote doit avoir connaissance de tous les intervenants, notoirement reconnus comme fournisseurs (et notamment les indépendants régionaux) et des intervenants exogènes. 7. Le pilote organise la riposte aux exogènes si nécessaire. 8. Si infraction → rachat des tonnes ». 117. Les pilotes et les points centraux pouvaient aussi être chargés d’organiser les réponses aux consultations. M. H… (Descours & Cabaud) a déclaré à ce propos : « un dispositif avait été mis en place chez les gros consommateurs de poutrelles pour geler les parts de marché. Pour ces clients, le respect des barèmes allait initialement de pair avec cette répartition des parts de marché. Sur une consultation, et sous contrôle d’un « pilote », un confrère était « leader » de l’affaire, compte tenu de ces parts de marché réalisées et de son objectif. Le « leader » validait la vente au prix du barème. Les autres négociants protégeaient le « leader » par des offres de couverture supérieures au prix du barème ». 118. Les négociants devaient déclarer au point central les consultations qu’ils avaient reçues (cotes 12307, 14635 et 22048) : • soit de manière systématique pour les pilotes, comme en témoignent notamment les notes prises par M. 25… le 4 novembre 2003, à la rubrique « pilote » : « il faut déclarer toutes les affaires – pas leader = suivre le dossier – revendiquer vos parts = des tournantes ! (se battre) ! – bien informer (précision) point hebdo » et les déclarations de M. H… (Descours & Cabaud) : « En matière de poutrelles, quand le système de « pilote » fonctionnait efficacement, toutes les consultations et toutes les commandes pour un client piloté donnaient lieu à déclaration. Il fallait attendre l’autorisation du « pilote » pour finaliser l’affaire (ce qui posait parfois des problèmes de disponibilité et donc de délai). Les choix faits par les « pilotes » se faisaient dans le strict respect des éléments décidés et du dispositif. (…) » ; • soit au delà d’un certain seuil pour les points centraux : le seuil apparaissant dans la plupart des pièces du dossier est celui de 2 tonnes. Cependant, certaines pièces renvoient à 3 ou à 5 tonnes. La 1re région a fixé le seuil de déclaration à 5 tonnes. La 8e région est celle dans laquelle ont été retrouvées le plus grand nombre de pièces divergentes sur le seuil exact de déclaration. Dans la 3e région, les déclarations étaient quotidiennes pour les affaires de plus de 5 tonnes. 119. Le point central indiquait alors le négociant devant remporter l’affaire (le « leader ») et le niveau de prix à pratiquer pour un client donné. Plusieurs comptes rendus de réunion indiquent ainsi que des échanges avaient lieu à propos de consultations entre des points centraux et des déclarants, ces échanges et l’activité des pilotes et des points centraux ayant à la fois une fonction de prescription et de surveillance des affaires perdues et plus généralement de mise en œuvre concrète du dispositif. Les arbitrages se faisaient en fonction des commandes déjà prises par le négociant (ou son groupe) et des objectifs de parts de marché, tel qu’en attestent certains documents de synthèse. Ils pouvaient également se faire ponctuellement compte tenu des affaires précédentes et des éventuels incidents survenus (par exemple, cotes 18167, 15488, 15897, 12166, 12167, 14287, 14517, 14521, 14531, 15008, 15179, 15600, 15812, 15842, 18657, 18862, 18929, 18944, 18949, 13309, 7372 et 7373).

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120. A l’occasion de ces déclarations et de la gestion d’une consultation par un point central, ce dernier pouvait décider de l’octroi de dérogations à la cotation initialement prévue et donner des autorisations de sous-coter ou « droit de suite », notamment en cas « d’infraction » observée, c’est-à-dire de non respect des barèmes. M. H… (Descours & Cabaud) a déclaré à ce propos : « Exceptionnellement, le « leader » pouvait avoir l’autorisation du « pilote » de vendre sous le prix du barème, en cas de sous-cotation par un membre de l’entente en infraction (ne respectant pas le barème) ou par un « pénétrant » (concurrent étranger ou concurrent d’une autre région ne respectant pas les barèmes). C’est ce qu’on appelait le « droit de suite » (par exemple, cotes 15008 et 14488). De ce fait, des affaires conclues à des montants différents de ceux initialement prévus dans les barèmes ou dans les consignes de remises maximales résultaient en réalité d’une concertation, dans l’esprit du dispositif mis en place, sous la surveillance d’un point central. L’un des objectifs de ce système, c’est-à-dire limiter les entrées de sociétés étrangères ou venant d’autres régions, est confirmé par M. B… (société CODIP, 8e région) : « Un de nos soucis lors de ces réunions était de préserver notre marché contre les pénétrants de la 9e région et d’Italie » (cote 900). Les tournantes et les rotations des deltas 121. Des systèmes destinés à contourner la méfiance de certains clients étaient également mis en place, au cas par cas ou de manière plus organisée. Les négociants procédaient à des offres de couverture (de la part des « suiveurs ») ou à la mise en place de « tours », « tournantes » ou « turn overs » sur certains clients. Les « turn overs » sont ainsi définis dans un compte rendu de réunion FNA 72 du 16 juin 2003 : « pour les dossiers en Turn Over (…), il faut que pour ces affaires, les cotations soient couvertes de 3 % mini ou décliner un poste important de la demande ». Figurent au dossier des documents provenant de différentes régions démontrant la mise en place d’une tournante, reprenant l’organisation des tours ou permettant de situer, dans le temps ou par rapport aux négociants, les commandes enregistrées, voire de demander à ce qu’un écart soit compensé (cotes 15341 et par exemple, cotes 15067, 15262, 15341, 15751, 18671, 18922, 16783, 16784, 16760, 4189, 4190, 21997 et 22013). 122. Par ailleurs, des documents réunis au dossier font état de la notion, proche de celle de tournante, de « rotations des deltas ». M. 26… (Descours & Cabaud) a déclaré à ce propos : « II fallait éviter que les clients reçoivent les mêmes prix. Il avait été imaginé « la rotation des deltas ». Ex : Sur 3 produits phares, pour tel client qui était classé, les négociants «consultés» appliquaient un delta convenu par avance permettant de remettre des prix différents au client. Le point central surveillait ensuite l’affaire qui devait être prise par tel ou tel » (cotes 22362 à 22368). 123. Le tableau suivant présente l’organisation d’un tel système en 2002 pour la 6e région (cotes 22802 à 22804) :

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Les commissions poutrelles régionales 124. Dans certaines régions, le compte rendu de l’activité des pilotes et des points centraux (lorsque ces derniers traitaient de clients poutrelles), quand il n’était pas fait au cours des réunions régionales, sous-régionales ou départementales, avait lieu dans des réunions, spécialement dédiées aux poutrelles, des commissions poutrelles organisées au niveau régional. Les éléments du dossier montrent en effet que, dans les régions comprenant un nombre important de clients poutrelles monitorés, se tenaient des réunions spécialement consacrées à ce produit et ces clients : elles étaient considérées comme la déclinaison régionale du club poutrelles national. Le calendrier pour la fin de l’année 2002 de ce type de réunions indique qu’il en existait trois différentes (une pour les 4e et 5e régions, bien que dans les faits les clients évoqués dans ces réunions concernent principalement la 4e région, une pour les 6e et 7e régions et une pour la 9e région). D’autres éléments au dossier indiquent qu’une autre se tenait également en 11e région. Les commissions se réunissaient une à deux fois par mois, en présence des « nationaux » ou de M. D… ( FNA ). Y assistaient notamment des représentants de PUM, PADF, KDI, Descours & Cabaud, Maisonneuve, Morel et Clisson Métal (par exemple, cotes 1361 à 1368, 1031, 14642, 19188, 22755 à 22760, 2430, 10267 à 10373, 13515 à 13517, 13466 et 13467). 125. Ces réunions étaient consacrées aux poutrelles et aux clients monitorés mais ressemblaient dans leur principe et leur déroulement aux réunions régionales décrites ci-dessous. Elles en partageaient les trois objets principaux (par exemple, cotes 4196, 3859, 10283, 8728, 14647 à 14649, 14654 à 14657, 14346 à 14350, 10271, 10272, 10366 à 10368, 8547, 3959, 4186, 4196, 4197, 4798, 4799, 4824, 4825, 6231, 6255, 6261, 6269 et 6270) : • diffuser et, le cas échéant, compléter les classements de clients décidés au niveau national par des classements relatifs à des clients plus petits (clients B ou clients C). Ces clients étaient alors sous la surveillance d’un pilote ou, le plus souvent, laissés à celle du point central géographique. Ces classements étaient discutés en réunions régionales puis diffusés par le pilote ou le président de région ; • diffuser, adapter ou compléter les conditions tarifaires (barèmes et remises) à appliquer à ces clients : les clients monitorés étaient généralement des clients importants soumis

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aux barèmes nationaux (ou tout du moins à leurs tranches les plus élevées). Pour les clients classés régionaux et notamment les clients C et B, les clubs poutrelles régionaux décidaient, au moins jusqu’en septembre 2003, date à laquelle le dispositif s’est rigidifié, des rabais maxima qu’il était possible de leur appliquer, ainsi qu’en témoignent certains comptes rendus mentionnant des passages tels que : « 1) Régionaux non monitorés – 30 maxi 2) Cl. A liste et rabais inchangés 3) Cl. B inchangés » et « liste des rabais proposés sur le barème du 01/05/03 pour la 4e région. Autres clients poutrelles affaires – 20T barème région » affaires + 20T barème Nation – 10€ » ; • suivre le respect des consignes lors des affaires passées et des objectifs : ce suivi était effectué au jour le jour par les pilotes, voire, pour les plus petits clients poutrelles, par des points centraux. Les clubs poutrelles régionaux examinaient par ailleurs précisément la situation de clients figurant sur ces listes. Ces comptes rendus ressemblent à ceux des clubs poutrelles nationaux et à ceux des réunions régionales ; ils contiennent des informations sur l’évolution générale des barèmes, sur les éventuels changements de classements, puis examinent la situation des différents clients classés (tonnage, nom du négociant et montant de l’affaire). 126. Les réunions étaient donc un point de discussion privilégié pour les produits poutrelles. Dans les régions n’ayant pas de club poutrelles, les informations étaient diffusées lors des réunions régionales ou par le président de région. Le tableau suivant recense les informations au dossier au sujet des participants aux clubs poutrelles régionaux (le cas échéant, les parenthèses indiquent le nombre de participations sur le nombre de comptes rendus au dossier) : Tableau n° 7 : Les sociétés représentées aux clubs poutrelles régionaux Réunions PUM/ Arcelor KDI D&C Maisonneuve Morel FNA Autres 4e/5e Chaillous, X DIS, CMB, X X 1

PADF, D’Huart, (8/8) MR, VAMA (5/8) (4/8) SLPM (8/8) (8/8) 6e /7e PADF, D’Huart X Bernard Pagès X X 2 PMSO, Mirouze, Arcelor Profil 9e PUM, X D&C RAA Savoie Metal 11e D’Huart X SMETA

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Les parrains 127. Certains directeurs commerciaux des groupes nationaux avaient été désignés comme « parrains », dont la vocation était de veiller à ce que la concertation nationale soit prolongée en région. Sur ce terme, M. H… (Descours & Cabaud) a déclaré : « les « parrains » étaient les directeurs commerciaux des groupes nationaux qui prenaient en charge, en plus du président de région, les régions les plus difficiles à animer. Ils prenaient également en charge l’animation des régions dans des périodes difficiles (par exemple, fin 2002/2003). Il s’agissait d’une assistance, pour donner un peu plus de poids aux réunions régionales. J’ai moi-même co-parrainé la 9e région (Rhône Alpes- Auvergne) avec Monsieur Hervé F… de la société KDI ». M. Y… (KDI) a déclaré : « A un instant, un membre d’une des commissions pouvait être souhaité par un président de

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région comme appui aux travaux de sa région ». Il ressort des éléments du dossier que, de la même façon que pour MM. H… et F…, M. K… était parrain en 6e et 7e régions, particulièrement concernant le club poutrelles. M. D… assistait également à certaines réunions régionales. Ces « parrainages » illustrent la mainmise des grands groupes nationaux sur l’ensemble de la concertation et, de manière générale, de l’élan donné par le niveau national à l’ensemble de la concertation (cotes 22926 à 22939, 15143, 23123 à 23133, 2430 et 1027). 2. LES ÉLÉMENTS RELEVÉS AU NIVEAU RÉGIONAL a) L’organisation générale des régions 128. A l’époque des faits, la France était, dans le cadre du fonctionnement du FNA, décomposée en 11 régions, chacune étant animée par un ou plusieurs présidents de région. Les modifications dans la présidence ou la délimitation géographique de ces régions étaient actées par le bureau et transmises par son secrétaire général voire son président. Une présentation intitulée « Rôle et objectifs du FNA » est ainsi rédigée : « Le territoire français est divisé en 11 régions sidérurgiques, certaines nécessitant un découpage plus fin en sous-régions. Chaque région ou sous-région a, à sa tête, un Président qui représente FNA dans sa région et qui a pour mission de réunir, à leur convenance et/ou sur demande, les adhérents dépendant de ladite région. Les sujets abordés lors de ces réunions ne sont que la forme décentralisée des réunions nationales. Mensuellement, les Présidents se réunissent à Paris et font part, aux membres du Conseil d’Administration de FNA, des résultats de leurs travaux. Le Conseil d’Administration, le Bureau et le Président de FNA font ensuite la synthèse de ces informations. Après avoir consulté les différentes Commissions spécialisées ou après enquêtes et études, ils sont en mesure de déterminer les grandes lignes d’action et leur degré d’urgence » (cotes 19364 et suivantes). 129. Un document saisi dans une agence de KDI décrit le fonctionnement d’une région, tel que l’indique son président, M. 24… (8e région) (cotes 16770 à 16775) : « 

PROJET ORGANISATION 8e région La 8e région est divisée en 6 sous-régions qui sont : 1- ALPES MARITIMES 2- ALPES DE HTE PROVENCE – BOUCHES DU RHONE 3- CORSE 4- GARD 5- HERAULT 6- VAR 7- VAUCLUSE Les sous-régions 1 et 3 sortent de l’organisation générale de par leur spécificité et leur niveau de prix. Pour les 5 autres ont été nommés des responsables de région qui sont ;

-2 THIERRY 27…

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-4 ARMAND 28…

-5 JEAN-RENE 29…

-6 GEORGES 30…

-7 DANIEL 31… Leur rôle et leurs pouvoirs :

- Sont sous l’autorité du Président de région.

- Fixent et animent les réunions 2 MINI PAR MOIS (les dates sont fixées en concertation avec les autres sous-régions).

- Suivent les affaires.

- Instruisent les dossiers litigieux.

- Répondent impérativement aux demandes des confrères.

- Mettent à jour les listes de classement.

- Donnent éventuellement des priorités ou des droits de suite.

- Déterminent les sanctions à appliquer au confrère pris en infraction.

- Rachat de l’affaire (prix à déterminer).

- Éloignement du client pour une durée déterminée.

- Ils demandent aide au président pour ;

- D’éventuels contrôles.

- Des interventions auprès des directions générales. Cette 8e région est dirigée par un président installé par le bureau directeur du F.N.A. ; il est donc sous son autorité.

- Il assiste aux réunions régionales.

- Il met en place une fois par trimestre une réunion générale en liaison avec les responsables régionaux en invitant les confrères extérieurs et un membre du bureau directeur F.N.A.

- II assure la logistique administrative régionale.

- Représente la région au F.N.A. et entretient les relations au niveau Directions Générales.

- Intervient chaque fois qu’il sera nécessaire, sur appels des responsables régionaux pour régler les différents litiges.

- S’inquiète de la cohérence des comportements des régions limitrophes.

- Il est responsable du respect de l’organisation régionale et doit faire acte d’une totale impartialité.

- Il détermine avec ses responsables régionaux les propositions de modifications de barèmes à présenter à la commission nationale. Cette organisation bâtie autour d’hommes très professionnels et responsables a pour but d’optimiser nos résultats. Elle doit être complétée par des engagements d’autres acteurs qui sont :

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CONFRERES 8e REGION 1) Leurs obligations :

- Respect des barèmes, des classements et dispositions particulières régionales.

- Confidentialité.

- Présence aux réunions.

- Communication confrères.

- POINT JOURNALIER avec les responsables régionaux.

- Réponses obligatoires aux demandes de renseignements formulées par les responsables régionaux 2) Leurs attentes :

- Respect des barèmes et du dispositif par l’ensemble de la profession.

- Amélioration de la marge brute.

- Respect par ses confrères de sa part de marché et de son fond de commerce. CONFRERES EXTERIEURS A LA 8e REGION GROUPE COMPRIS 1) Leurs obligations :

- Respect des conditions, barèmes, classements de la région.

- Déclaration des consultations et commandes aux responsables de sous-régions, si un système de déclaration est mis en place.

- S’engagent à ne pas créer dans la région des revendeurs occasionnels susceptibles déranger le dispositif.

- Participent aux réunions trimestrielles. 2) Leurs attentes :

- Recevoir l’ensemble des barèmes régionaux ainsi que les classements en temps et à l’heure.

- Etre informé de toutes modifications par la voie la plus rapide.

- Maintien de leurs volumes régionaux. CLIENTS 1) Leurs obligations :

- Payer le juste prix.

- Respecter les conditions de règlement. 2) Leurs attentes :

- Une qualité de produits.

- Un respect des délais.

- Une disponibilité des gammes.

- Des barèmes stables et adaptés (2 fois l’an).

- Un préavis pour toute modification.

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- L’assurance d’obtenir des prix identiques à leurs confrères de même importance. En complément à ce dispositif, il semble indispensable de rappeler les grandes lignes d’un comportement commercial. Ne jamais prononcer les mots « ACCORD, ENTENTE ». Ne jamais divulguer des informations sur nos réunions. Eviter de donner en lectures nos barèmes aux clients. Eviter de parler des confrères. Utiliser les arguments de la Direction pour justifier des prix identiques. Ne pas déroger aux conditions de règlement. Ne pas utiliser de remises déguisées ». 130. Compte tenu des différences dans les réalités économiques des régions (types de clientèle, concurrence étrangère, etc.) et dans la personnalité des présidents de régions, toutes les régions n’étaient pas organisées d’une manière strictement identique, mais reposaient néanmoins toutes sur un fonctionnement similaire. b) Les réunions au niveau régional et leur contenu 131. Les pièces au dossier attestent de la tenue de réunions dans toutes les régions FNA. Les réunions régionales avaient trois fonctions principales : elles étaient tout d’abord l’occasion pour le président de région de transmettre les informations recueillies lors de la réunion des présidents de région, tenue au niveau national ; elles permettaient ensuite de décider des éléments de concertation propres à la région, tels que l’adaptation et l’extension des barèmes et classements nationaux aux clients locaux, plus petits, ou de régler des situations délicates (libération d’un client, sanctions), etc. ; elles étaient enfin l’occasion de faire un suivi précis des affaires récentes, de leur issue et de l’application du dispositif dans les réponses faites aux consultations. 132. A cet égard, le dossier comprend de très nombreux comptes rendus saisis (entre 150 et 200 venant de différents négociants couvrant un plus de 100 réunions différentes). Ceux-ci montrent que les négociants venaient aux réunions avec des documents attestant de leur respect du dispositif ou encore dénonçaient le non-respect de celui-ci par un autre négociant. Ils présentent tous une structure très proche et témoignent des deux différentes phases des discussions : l’évocation des barèmes et des classements d’une part et la surveillance des affaires d’autre part. Le tableau suivant recense les informations disponibles au dossier sur les réunions qui se tenaient aux niveaux régional et sous- régional (cotes 21940 à 22050, 13983 à 16032, 9937 à 10373, 22771 à 22776, 16752 et s., 18656 à 18785, 18786 à 18897 et 18912 à 18967) :

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Tableau n° 8 : Les différentes réunions régionales et départementales Région Réunions Périodicité Comptes rendus au dossier 1re
- Niveau régional Bimensuelles / Mensuelles / 2e
- Seine et Marne Nord/ Aisne Sud/ Oise Ouest
- Nord et Pas de Calais Mensuelles
- Niveau régional Hebdo (2003) Mensuelles(2004) 3e
- Orne Mensuelles 03/2003 à 05/2004
- Manche Mensuelles 03/2003 à 04/2004
- Sous région Océane Bimensuelles à mensuelles 10/2001 à 02/2004
- Loire Atlantique 10/2001 à 04/2004
- Maine et Loire 10/2001 à 03/2004
- Vendée 04/2003 à 03/2004 4e
- Sarthe 04/2003 à 05/2004
- Mayenne 04/2003 à 05/2004
- Ille-et-Vilaine 03/2003 à 10/2004
- Morbihan Mensuelles / 5e
- Deux Sèvres /Vienne
- Creuse/ Cher/ Indre Bimensuelles
- Gironde/ Landes Nord/ Dordogne Sud/ Hebdomadaires / Lot et Garonne

— Hautes-Pyrénées Toutes les 4 à 6 semaines / 6e
- Charentes/ Haute Vienne/ Dordogne Nord Mensuelles 01/2003 à 04/2004
- Charente Ouest/ Deux-Sèvres Bimensuelles

/
- Niveau régional Mensuelles Ponctuels
- Rotations Hebdomadaires
- Ariège/ Aude/ Haute Garonne (périmètre variable) 7e
- Tarn

— Tarn et Garonne Bimensuelles
- Aveyron

— Lot Mensuelles Bimensuelles Ponctuels 8e
- Gard/ Hérault
- Vaucluse/ Bouches-du-Rhône Bimensuelles
- Rhône Mensuelles /
- Isère Toutes les 4 à 6 semaines 9e
- Loire Bimensuelles
- Savoie Mensuelles
- Puy de Dôme Mensuelles
- Niveau régional Trimestrielles /
- Yonne/ Nièvre/ Aube/ Allier/ Côte d’Or Mensuelles 10e
- Saône-et-Loire/ Ain/ Rhône Mensuelles
- Doubs/ Haute-Saône Mensuelles
- Niveau régional Mensuelles / 11e
- Metz Mensuelles
- Meuse/ Haute-Marne Mensuelles 133. Le tableau suivant recense les informations disponibles au dossier sur les sociétés participant aux réunions dans chaque région (le cas échéant, les parenthèses indiquent le nombre de participations sur le nombre de comptes rendus au dossier), telles qu’elles résultent de comptes-rendus de réunions ou de déclarations, obtenus dans le cadre de l’enquête administrative ou fournis par le demandeur de clémence :

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Tableau n° 9 : Les sociétés représentées aux réunions régionales et départementales Région Réunions PUM/ Arcelor KDI D&C Maison. Morel Liametho Clisson Métal CODIP Ferren Fers PUM 1re Région X X X

PADF 2e 2 sous-régions X X X

Région X X X

X

X X X X Dép. 61

3e (10/14) (13/14) (14/14) (10/14) X X X X Dép. 50

(8/13) (13/13) (13/13) (13/13) Océane X X X X

X

Celtique X (3/3) X (3/3) X (3/3) X (3/3)

Dép. X X X X X

(tous) (80/96) (96/96) (89/96) (72/96) (59/96) X X X X X Dép. 44

(14/15) (14/15) (15/15) (15/15) (13/15) X X X X X Dép. 49

(19/23) (19/23) (23/23) (23/23) (21/23) 4e X X X X X Dép. 85

(12/13) (13/13) (12/13) (13/13) (13/13) X X X X Dép. 35

(22/22) (19/22) (22/22) (22/22) X X X X Dép. 53

(22/22) (17/22) (22/22) (22/22) X X X X Dép. 72

(20/20) (19/20) (20/20) (20/20) Dép. 56 X (4/5) X (5/5) X (5/5) X (5/5)

Dép. 79 et 86 X X X X

X

5e Dép. 23, 18 et 36 X X X

PUM 3 sous-régions PADF X X

6e Métal Pyren. Charente Ouest X X X

X

7e Rotations X X X

X

Dép. X X X

X

8e Dép. X X X

X X PUM Dép. 69 X X X

PADF Dép. 38 X X X

X

PUM 9e Dép. 42 X X X

PADF PUM Dép. 73 X X

PADF Dép. 63

X X

10 X X X

10e 2 sous-régions X X X

Dép. 70 et 25 X X X

X

PUM Région X X

PADF 11e Dép. X X X

PADF Dép. X X X

PUM

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L’évocation des barèmes 134. Les comptes rendus de réunions au dossier débutent par la diffusion des informations recueillies lors de la réunion des présidents de région à Paris et notamment une mise au point sur les barèmes. Sont ainsi évoqués les produits pour lesquels les barèmes ont évolué et, le cas échéant, la date d’entrée en vigueur des nouveaux barèmes (ou des modifications des anciens barèmes). Figurent ci-dessous trois exemples représentatifs de ces discussions (cotes 15284, 3960 et 18835) : • le compte rendu de la réunion FNA 72 du 26 janvier 2004 débute ainsi : « NOUVEAUX BAREMES AU 02/02/04
-TUBES Région 05/01/04
National 02/02/04 - LAMINES ET L.PLATS Région et Nat. au 02/02/04 » ; • le compte rendu d’une réunion du 19 février 2003 en 7e région commence par : « Résumé FNA Nal - Tendance volume à la baisse → Priorité Marge (…)
- Réflexion sur FNA internatal (Pb. concurrence frontalière) (…)
Au 1er mars + 15/20 € Pout. + 15€ LM Refonte barême (à la ↑) Pdts bétons » ; • le compte rendu de la réunion du 19 décembre 2002 en 8e région évoque : « Barèmes régionaux = Poutrelles + 15€T Laminés sans changement Tubes + 2% ainsi que les PAF Tôle : + 20 €/T sur les deux dernières tranches " + 15€/T -- -- premières tranches ». 135. Il est fait référence dans les comptes rendus aux barèmes nationaux et à des barèmes régionaux, adaptés par rapport aux valeurs nationales, et notamment de la dernière colonne des barèmes. M. 21… (KDI) a déclaré à ce propos : « NAT. FNA correspond au barème national FNA qui nous sert à élaborer nos barèmes régionaux ». M. 12… (KDI) a déclaré : « C’est à partir de ces barèmes là et notamment de la lettre B que l’on élabore les barèmes régionaux ».

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L’évocation des classements 136. Il est également fait référence au classement de clients, qu’il soit, ici encore, décidé au niveau national pour les plus importants d’entre eux ou au niveau régional pour les plus petits. Sur ce point, M. 32… (Beauplet, groupe Descours & Cabaud) a déclaré : « A ces réunions, nous pouvions déterminer un classement client avec des niveaux de prix plancher. Ces prix plancher étaient décidés entre nous. Ce niveau de prix minimum est en quelque sorte historique ; il ne reflète pas nos coûts propres mais il s’agissait de permettre de maintenir un niveau de marge acceptable par notre société ». Il était parfois indiqué en réunion par quel moyen seraient transmis les classements (par exemple « expédiés par courrier », cote 15232). 137. Figurent ci-dessous trois exemples représentatifs du début de ces passages des réunions (cotes 15289, 6226 et 15361) : • le compte rendu de la réunion FNA 72 du 12 janvier 2004 débute ainsi : « * Nouveau dispositif MAINE au 12/01/04 * Bonne mise en place des nouveaux tarifs au 05/01/04 CLASSEMENTS A REVOIR - SARTHEC Le Mans (FILLOUX)
- ISEBERG La Mans (CHAILLOUS)
- MONTREUIL Noyen (CHAILLOUS) Dès réception de ces nouveaux classements, KDI Le Mans nous fera parvenir la nouvelle grille de classement du Dépt. 72 » ;
• le compte rendu d’une réunion en 7e région mentionne : « Ptr Cat L (Soreco) 0/20T +20T +50T Sur barème 1/3 Cat A

50T-50€ 50T-70€ Cat B

50T-10€ 50T-30€ 50T-50€ Cat C

Régional 50T-10€ A : Cabrol, Dejon Servière, DL, Enjalbert, Minamon, Serin, RCM B. : Delpoux, Charpente SA, CISO, Massol C : Autres Non classés Forestier Soulié Viguier Maynodier Gileste Troisel Arnal

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LM : Barème actuel (1/3) –15% maxi Tubes : Même barème (1/3) Remise maxi : 20% Tôles : Barème actuel

1/5 + 15€ 0/20T 20T/100T +100T A

-70€ -90€ Libre B

-50€ -70€ Libre C

Régional -50€ Libre » ; • le compte rendu de la réunion FNA 72 du 7 mars 2003 débute ainsi : « Application des nouveaux barèmes – classements et conditions NOUVEAUX CLASSEMENTS Poutrelles BRUNEAU CltC 50T-10€/T BOBET

Nat. B

5OT - 50 €/T COMEMA CltC 50T-10€/T DORISON CltC 50T-10€/T FOURNIGAULT

CltC 50T-10€/T GARCZYNSKI

CltC 50T-10€/T GUERRIER

CltC 50T-10€/T LORY

CltC LYRE

CltC METALAG CltC MONTAMETAL CltC SOCAREM CltC SPP

CltC WEBER

CltC (Voir nouveaux classements à venir cette semaine – Rect. Liste N°4) ». 138. Après cette première phase de la discussion sur les conditions tarifaires, la quasi-totalité des comptes rendus évoque une analyse des affaires sur la période récente. La surveillance des affaires récentes et le respect du dispositif 139. Un suivi des affaires, client par client, occupait largement le temps des réunions régionales. En témoignent notamment les nombreux comptes rendus des réunions au dossier, dont une assez longue section, fréquemment dénommée « Les affaires », « Les affaires de la quinzaine » ou « Les affaires du x/x au x/x », et éventuellement une section « dossiers à problème ». Ils contiennent des indications sur les consultations et les ventes en cours ou passées : y figurent des renvois à des clients, des dates, des prix et le nom des négociants déclarants et/ ou des négociants ayant pris l’affaire. Figurent ci-dessous trois exemples représentatifs de ces parties des réunions (cotes 15306 à 15309, 15298 à 15300 et 15229 à 15231) :

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• le compte rendu de la réunion FNA 72 du 2 novembre 2003 aborde les consultations de 35 clients lors de la dernière quinzaine, notamment : « *27/10/03 FICAD – ASNIERES S/VEGRE Cde prise par M. R. (-8% pour compenser les erreurs de prix CHAILLOUS et LANGUILLE sur les précédentes affaires cotées au dessous des conditions prévues) » ; • le compte rendu de la réunion FNA 72 du 2 décembre 2003 traite des consultations de 20 clients lors de la dernière quinzaine, notamment : « *14/11/03 LORY – MULS ANNE Cde MN – Prix Ok ! *25/11/03 Devis en consultation + 9 tonnes Poutrelles *26/11/03 (R.20% en tubes au lieu de R.15%) – Amélioration par PC » ; • le compte rendu de la réunion FNA 53 du 17 novembre 2003 revient sur les consultations de 21 clients lors de la dernière quinzaine, notamment : « * 10/11/03 ESPO – OUEST – ST PIERRE LA COUR

Cotation BEAUPLET – Poutrelles Nat. 20/50T – 25€/ T

MN et KDI – Poutrelles Nat. 20/50T net

CHAILLOUS – Poutrelles Nat. 20/50T – 20€/T

Affaire en cours (…) *

LEFORT – BONCHAMP LES LAVAL * 04/11/03 Cde MN – 6 Flles LAC 2000x6000x3 à 523€/T * 04/11/03 Cde KDI Le Mans – Prix Ok

Vu « bon pour accord » du client * 04/11/03 Poutrelles coupées + Tubes – Devis en cours * 04/11/03 Cde MN : 17 Tonnes (Nat. – 50€/T) * 13/11/03 Cde BEAUPLET – Prix Ok ! ». 140. Ce passage en revue avait d’abord pour objectif, tout de savoir qui avait pris la commande concernée (un négociant participant aux réunions ou un extérieur) et à quel prix (dans le respect du dispositif ou pas). Il complétait le contrôle effectué au jour le jour par les points centraux, déjà évoqué. Au delà, les discussions portaient sur les suites à donner aux dossiers non résolus, sur les façons de sanctionner ou corriger une « infraction », sur les décisions à prendre concernant les clients difficiles à gérer ou se doutant de l’existence d’une concertation. 141. Les comptes rendus listent, par date et par client, les affaires récentes suscitant des interrogations. Selon les cas, pour chacune de ces affaires est précisé tout ou partie des données suivantes : le volume en consultation, l’éventuel classement du client et la cotation correspondante, les négociants ayant fait des offres et le montant de ces offres, le négociant ayant remporté la commande, le tarif proposé et le cas échéant le prix qui aurait

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normalement dû être proposé. Des commentaires sur le contexte de l’affaire sont parfois également inscrits dans les comptes rendus. 142. Apparaissent aussi des commentaires sur le traitement particulier à appliquer à un client, compte tenu de la difficulté à gérer ses consultations ou des erreurs, voire des « infractions » constatées dans les propositions faites. Trois catégories de situations suscitent des réactions particulières (par exemple, cotes 18671, 18922, 16760, 16783, 16784, 15262, 15951 et 15483) : • lorsque trop d’affaires restent non élucidées et qu’il est difficile de gérer un client, les négociants peuvent décider, dans de rares cas, de le « libérer » : il sort alors du dispositif ; • lorsque des clients sont mécontents des prix qui leur sont proposés et émettent des doutes sur l’existence d’une entente entre les négociants, des tours (ou tournantes) voire des « rotations de deltas » sont parfois mis en place dans les réunions régionales, sous le contrôle du point central. Le suivi fait en réunion régionale s’attache à vérifier l’équilibre des parts de chacun auprès du client concerné ; • lorsqu’un acteur extérieur à la concertation ou un participant aux réunions syndicales fait une offre inférieure à la cotation à laquelle aurait abouti le dispositif, un alignement ou « droit de suite » peut être autorisé par le point central. Cet état de fait (ou à l’inverse, le fait qu’un négociant ait pratiqué un prix inférieur sans autorisation préalable du point central) est alors pris en compte dans le suivi des affaires. Si un alignement n’est pas possible sur l’affaire concernée, un recadrage ou une compensation à l’occasion d’une prochaine consultation peut être discuté. 143. Les comptes rendus de réunions et les déclarations au dossier attestent par ailleurs que les négociants assistant aux réunions devaient, lorsque des affaires les concernant étaient en discussion, apporter des éléments probants pour étayer leurs accusations et, le cas échéant, des arguments en défense. M. 32… (Beauplet, groupe Descours & Cabaud) a déclaré : « Nous nous rendions à ces réunions avec des offres de prix qui appuyaient nos propos si nous étions accusés à tort d’avoir fait un offre de prix trop basse ». Les éléments suivants sont des exemples de réunions à l’occasion desquelles (cotes 602 à 606, 15832, 15787, 4424, 15352, 15052, 15042) : • des documents ont été vérifiés (réunion du 12 juin 2003) : « 20/05/03 DECOUPE ANJOU TECHNOLOGIES – AVRILLE : Cette affaire a été prise par KDI Angers à 525€/T. Nous avons tous pu voir le bon de commande en bonne et due forme » ; • des documents non présentés ont été exigés (réunion du 12 juin 2003) : « 6 tonnes Tôles DKP-LAC-TPG prises par M. R. au classement alors que le client confirme avoir traité à –13 et – 10€ /T. MR devra nous apporter la preuve à la prochaine réunion avec la facture », (réunion du 28 mars 2004) : « Mirouze demande que les dossiers suivants soient contrôlés » ; • un négociant venu sans documents a été pointé du doigt : « Bertand 33… assiste à cette réunion sans beaucoup de dossiers. Il est impératif pour ces réunions que chacun vienne avec les documents (bons de commande – offres de prix – factures etc.) afin de prouver et de rassurer les différents intervenants… Or ce n’est pas le cas !!! » ; • des documents et des informations plus précis étaient demandés (réunion du 8 avril 2004) : « à chaque intervenant de fournir le CA 2003 et le CA T1/2004 pour mieux analyser les flux de clients ». Le compte rendu de la réunion suivante fait apparaître les chiffres demandés lors du passage concernant le client en question.

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144. Dans les différents comptes rendus reviennent ainsi régulièrement les mêmes expressions relatives au suivi des affaires ou à des décisions prises quant à leur gestion : Tableau n° 10 : Expressions récurrentes dans le suivi des dossiers Expression Signification Cotes (exemples) « ? », « Qui ? » Affaire non résolue 15023 « En cours » ou « devis » Consultation non terminée 15054 ou « en attente » 15711 « au prix » ou « ok » Affaire conclue dans le respect du dispositif 15703 « arrondis » Affaire prise en arrondissant vers le bas 15769 « sous côté » Affaire prise à un prix inférieur à celui du dispositif 10247 « hors dispositif », « HD », Affaire prise en contradiction avec les conditions définies par le 15017 « erreur de cotation » ou dispositif 14517 « infraction » « au lieu de » Montant auquel une affaire aurait dû être prise 15807 « accord du PC » Affaire prise, éventuellement à des conditions différentes de celles du 15843 (avec ou sans) dispositif mais avec l’autorisation du point central (ou sans) 15942 15953 « droit de suite » ou Affaire prise (ou autorisation de le faire) à un niveau inférieur à celui 15008 « alignement » du dispositif compte tenu d’une autre offre déjà inférieure au dispositif 14223 « libéré » Client placé hors dispositif compte tenu de la difficulté à gérer ses 15428 consultations (rare) 15849 « tours », « tournante », Mise en place d’un système de rotation des fournisseurs pour les 15751 « turn-over », « leader », clients mécontents ou soupçonnant une entente. Un « leader » tarifie 15341 « suiveur » au niveau du dispositif et les « suiveurs » le couvrent en faisant des propositions plus élevées ou incomplètes. « vu », « prix confirmé », Affaire pour le suivi de laquelle des documents ont été présentés ou 15781 « contrôle facture », demandés par un négociant 4424, 3857 « réclamation facture » 2359, 2360 12126 c) La diffusion de documents relatifs à la mise en place du dispositif 145. Préalablement, à l’occasion ou à la suite des réunions étaient diffusées des informations sur les conditions tarifaires applicables : barèmes, classements, tableaux récapitulatifs des dispositifs ou instructions ponctuelles. Les barèmes régionaux Le contenu des barèmes 146. De nombreux barèmes ont été saisis ou communiqués au cours de l’instruction. Il en circulait un grand nombre dans les régions, puisque coexistaient des barèmes nationaux, des barèmes régionaux ainsi que des barèmes internes aux groupes ou aux sociétés, dont la correspondance avec les barèmes de la profession était assurée.

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147. M. 15… (KDI) a ainsi déclaré : « II y a trois sortes de barèmes : un barème usine communiqué à l’issue des réunions FNA à Paris ; puis chaque groupe élabore son barème national de référence et le transmet localement ; là est élaboré un barème régional de référence propre à la profession. Enfin, il existe un barème site spécifique au site de Toulouse ». De même, M. H… (Descours & Cabaud) a indiqué : « au niveau de DESCOURS & CABAUD, nous avons toujours eu nos propres barèmes, que nous faisions sur la base des barèmes nationaux. Afin de préserver une apparence de légalité, il y avait toujours des écarts entre les barèmes nationaux et les barèmes de DESCOURS & CABAUD. Mes instructions de vente précisaient les remises à faire obligatoirement par rapport à nos barèmes pour retomber sur le barème national. Cela ne posait pas de problème par rapport aux autres membres de l’entente car les comparaisons se faisaient sur la base des offres effectivement faites aux clients ». Ceci est confirmé par certaines des instructions internes de vente présentes au dossier, qui mentionnent les variations à la fois par rapport au barème interne et au barème de la profession. Un dirigeant régional du groupe a de même indiqué : « Nous utilisons le barème DESCOURS quotidiennement (c’est notre base informatique). Le groupe nous indique des correspondances pour retrouver les barèmes de la profession » (cotes 1004 à 1014, 22926 à 22939, 22382 à 22384 et 632 à 637). 148. Les barèmes régionaux, réalisés sur la base des barèmes nationaux, existaient pour la totalité des produits et pouvaient être, par période (notamment en 2004), renouvelés très fréquemment. La coexistence entre la partie nationale des barèmes, qui correspond à une colonne (« B », « DC » pour « dernière colonne », « 50T et + » ou « national »), voire pour les poutrelles à deux ou trois colonnes (« B », « A » et « L ») et la partie régionale est matérialisée visuellement dans un certain nombre des barèmes au dossier (par exemple, cotes 14861 et suivantes, 22435 à 22440, 22513 à 22719). La réalisation et la diffusion des barèmes 149. Selon les régions, les personnes ayant la charge d’élaborer les barèmes régionaux pouvaient varier, leur rôle étant plus ou moins clairement défini. Par exemple, dans la 4e région, les déclarations du président de région sont peu précises : « Les barèmes régionaux sont élaborés régionalement ; il n’en existe qu’un. Une société le construit puis le communique aux autres ». Par contre, dans la 7e région, les déclarations du dirigeant d’une agence KDI sont complètes : « La mise à jour de barèmes de référence pour la région, compte tenu des remises à jour fréquentes des barèmes usine, était partagée entre les différentes sociétés en fonction des familles de produits. Par exemple, Jean-Paul 34… (société BAURES) élaborait le barème poutrelles ; la société PAGES élaborait le barème laminés ; la société KDI élaborait le barème tubes; la société PUM élaborait le barème tôles. Il existait un barème produits béton. Aucune société n’était spécifiquement chargée du barème produits béton ». Dans certaines régions existaient par ailleurs des projets de barèmes spécifiques, comme c’est le cas pour la confection par CODIP et KDI d’un barème ronds à béton dans la 8e région. 150. De manière générale, et comme indiqué ci-avant, il ressort des pièces et des déclarations au dossier que les barèmes régionaux (et nationaux) étaient principalement diffusés par les présidents de région. Des barèmes renvoient explicitement à cette distinction entre niveau national et régional ou mentionnent les différentes catégories de clients (cotes 22417 à 22512). Le tableau ci-dessous recense les informations disponibles au dossier, concernant la rédaction ou la mise à jour des barèmes régionaux (et pour mémoire, également des barèmes nationaux), leur diffusion et leur destination :

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Tableau n° 11 : Informations disponibles sur la réalisation et la diffusion des barèmes Régions Catégorie Sociétés Sociétés destinataires 1re Réalisation PTR : KDI « Tous les intervenants sur la première région en poutrelles » PP : PUM dont Maisonneuve Diffusion M. 9…, indépendant 2e Réalisation PTR : PUM Pas d’informations précises PP : PUM LM : D’Halluin Tubes : Dubocage Diffusion Pas d’informations 3e Réalisation PL : KDI Pas d’informations précises PP : KDI et PUM Diffusion M. 10…, KDI et PUM 4e Réalisation PTR : KDI Chaillous (PUM), Clisson Métal, CMB (D&C), Maisonneuve, Edition : Clisson D’Huart (PUM), DIS (D&C), Martin Rondeau (D&C), PADF (PUM/ Arcelor Profil), SLPM (PUM), VAMA (D&C), KDI, Diffusion M. 12…, KDI Arus (KDI), KDI CM et FNA 5e Réalisation Pas d’informations KDI, Guillot (PUM), Penicaut, Prometo, Clisson Métal, Maisonneuve, D&C Diffusion M. 13…, KDI 6e Réalisation PL : KDI Pas d’informations précises PP et tubes : PUM Diffusion KDI et Guillot (PUM) 7e Réalisation PTR : D&C Pas d’informations précises LM : D&C Tubes : KDI PP : PUM Diffusion Pas d’informations 8e Réalisation PTR : KDI KDI, Morel, CODIP, PUM, D&C, Ferren Fers (CODIP), LM : BS (PUM) Lopez SSA (PUM), Auxiliaire Metallurgique, Blanc, PADF (PUM/ Arcelor Profil), Balitrand, Berton (PUM), Sibille, Tubes : BS (PUM) Baures (D&C), Chessa PP : BS (PUM) RB : CODIP/ KDI Diffusion M. 24…, BS (PUM) et KDI 9e Réalisation Pas d’informations D&C, Arcelor Profil, KDI, Morel, CMF (D&C), Savoie Métal (PUM), PUM, AGDG (D&C), Lopez SA (PUM), Sibille Diffusion M. 17…, KDI 10e : Maringue Sagetat (D&C), KDI 11e : PUM, D’Huart (PUM 10e Réalisation KDI en partie Pas d’informations précises Diffusion Président de région 11e Réalisation Pas d’informations Pas d’informations précises Diffusion Pas d’informations National Réalisation PTR : KDI Présidents de région, PUM, PADf, KDI, D&C, D’Halluin, PP : PUM Maisonneuve, Dubocage, Morel, CODIP et Ferren Fers. Autres : D&C Diffusion FNA

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L’utilisation des barèmes 151. Les pièces au dossier permettent de conclure que ces barèmes avaient vocation à s’appliquer et qu’ils pouvaient l’être, directement ou indirectement. L’utilisation de barèmes nationaux ou de concurrents est aussi confirmée par les déclarations de négociants, dont les citations suivantes sont des exemples représentatifs (cotes 23071 à 23084, 23110 à 23122 et 897 à 904) : • M. A… (Maisonneuve) a déclaré : « Le dispositif, c’est les barèmes d’orientation qui sont donnés. Ils étaient définis dans l’objectif d’être appliqués strictement » ; • M. 8… (Liametho) a déclaré que « le barème taquet pouvait nous aider à construire notre barème (mais nous avions aussi le prix de nos fournisseurs, voire de nos concurrents pour faire la même chose) » et, en commentaire d’un classement de client interne, « à l’époque nous n’avions pas de conditions clients sur informatique et nous ne travaillions pas en lecture directe. Les commerciaux ou le service chiffrage avaient ce document. Il décrit les clients auxquels on faisait des remises. Dans le cas « dernière colonne » (ou la référence à une autre colonne, type « T4 » ou « 500kg/1T »), cela renvoie, quel que soit le poids, à la dernière colonne (ou à la colonne concernée). Quand il y a un chiffre, c’est la remise par rapport à la dernière colonne. Quand c’est vide, c’est en fonction du poids. Les fois où il y a « NAT » sont les rares fois où l’on se referait aux barèmes taquets, tels quels ou avec une variation » ; • M. B… (CODIP) a déclaré, au sujet d’un barème en provenance de Berton Sicard : « Nous avons décidé par souci d’alignement de prendre ce tarif comme référence même si nous appliquons nos propres remises ».

152. De plus, tous les comptes rendus de réunions régionales saisis, qui comportent la plupart du temps une première partie consacrée aux barèmes applicables, font référence, dans la deuxième partie consacrée au suivi des affaires récentes, aux barèmes nationaux et régionaux lorsqu’il s’agit d’analyser si les affaires ont été conclues au bon tarif. De la même façon, les suivis du dispositif faits individuellement par les négociants, et notamment la société Maisonneuve, prennent les barèmes nationaux et régionaux comme référence pour évaluer de la légitimité des réponses apportées aux consultations des clients et montrent que les négociants s’attendent à ce que ces barèmes soient respectés. On y retrouve ainsi des expressions, en face des affaires étudiées, telles que « gros + 50 », « NAT + 20% », etc. Un grand nombre de documents ou déclarations dont certains sont cités ci-dessous vont dans le même sens et confirment le statut qu’ont les barèmes nationaux et régionaux. Ceci est vrai lorsque les barèmes sont respectés : « bon maintien des prix respect des consignes syndicales y compris par les intervenants extérieurs », « aujourd’hui, grâce à FNA, l’application des barèmes de vente produits tradi est globalement verrouillée », « globalement, les nouveaux barèmes sont bien appliqués au 03/03/03, par l’ensemble de la profession sur le 13 et 84 » ou « les prix sont en hausse ainsi que les marges, conséquence de l’environnement économique et du respect de la barémation 8e région ». C’est aussi vrai lorsqu’ils ne le sont pas : « trop d’affaires partent hors barème pour des raisons non justifiées » ou « beaucoup d’affaires hors barèmes de la part des périphériques » (cotes 15148 à 15172, 15191 à 15204, 13739, 13755 et 13781, 4720, 3139, 18167, 16946, 18166 et 4689). Les listes de classements de clients 153. Les classements des clients ont déjà été évoqués. A été retrouvé dans les régions un grand nombre de listes de classements, mentionnant notamment la colonne à utiliser et les rabais maximaux à accorder aux clients, pour une catégorie de produit ou, plus généralement,

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pour tous les produits. Ces classements étaient échangés entre négociants (par courrier, télécopie ou envoi électronique) et évoqués au cours des réunions (par exemple, cotes 22735 à 22754, 22813 à 22833, 19526 à 19528 19529 et 19530, 15593 à 15595, 4187, 4200, 4817, 10258, 10246 et 10108). Les classements par produit 154. Les classements par produit concernent les poutrelles d’une part et les produits plats d’autre part (voire les deux en même temps). Ils complètent les listes existant au niveau national. Ces classements s’intéressent à des clients importants et renseignent pour chacun d’entre eux le barème (et le cas échéant la colonne) de référence (NAT, R.10T,…) ainsi que la remise applicable. Ces classements se présentaient de la manière suivante, comme le montre un exemple en matière de produits plats (cote 10108) : « 

TOLES LAC REVETUES DKP-RELIEFS XC ACM

Nat. – 30 €/T

Nat. – 30 €/T ALDIGE

Nat. – 30 €/T

Nat. – 30 €/T ATEP

R.10T-160€/T

R.10T-300€/T … ». Les classements généraux 155. Des classements plus généraux ont été trouvés en grand nombre. Ceux-ci permettaient de savoir exactement quelle cotation appliquer à un client quel que soit le produit. Le fait que tous les produits soient recensés permettait notamment de pouvoir répondre sans déviance à une consultation concernant plusieurs produits, chose fréquente dans la profession. C’est ce qui est exprimé dans un compte rendu de réunion de la 4e région : « Définition d’un classement. Mais également sur les ronds béton pour éviter que les commandes de laminés et tubes partent chez celui qui aura proposé le moins cher en ronds béton » (cote 15502). C’est d’ailleurs pour répondre à ce genre de situations que la concertation s’est appliquée à tous les produits, mais également à la coupe et aux ventes semi-directes. 156. Ces classements étaient le plus souvent départementaux. Il en a été trouvé pour un grand nombre de départements, parfois dans des versions similaires chez plusieurs négociants et dont certains remontaient jusqu’à 1999. Ils couvraient les principales catégories de produits (poutrelles, laminés, larges plats, tubes, PAF, tôles et parfois ronds à béton ou étirés). Leur précision, de même que leur aspect formel, est assez variable en fonction des différents exemples trouvés (par exemple, cotes 4 946 à 4 956, 22401 à 22416, 17376 à 17381, 17957 à 17962, 18972 à 18982, 18983 et 18984, 17966 et 17967, 10382 à 10435, 10467 à 10472 et 20156 à 20259). 157. Par exemple, en 4e région, a été saisie une liste de classement précédée de données sur les conditions générales minimums (dites « taquets »). Y sont également indiqués des prix minima et un rappel sur la question des « arrondis » (cotes 19523 et 10405 et suivantes) : « 

CLASSEMENT 85 APPLICATION POUR TOUTE AFFAIRE A PARTIR DU 06/05/04 Rappel des conditions « Taquet » (hors clients A & L) Laminés

R 10 % sur BN au 03/05/04

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Larges plats R 10 % sur BN au 03/05/04 Tubes

R 10 % sur BN au 03/05/04 PAF

N NET sur BN au 03/05/04 Tôles

N NET sur barème au 03/05/04 Poutrelles

N 20/50 T NET sur barème au 03/05/04 Dispositif Général Pour tous les clients non listés : respect des prix mini suivants : (appel PC si difficultés à appliquer) LM POUTR. TUBES TOLES PAF
-10% 1/3 T
-15% 3/5 T 1/3 T

—  500 Kg + 500 Kg ETIRES A37 990 € 940 € ETIRES A60 1010€ 960 € La tolérance sur les prix est toujours en plus, jamais en moins. Aucun arrondi ». 158. Ce document était suivi d’un tableau reprenant pour un grand nombre de clients soit la colonne et le montant maximum de la réduction possible sur la valeur de la colonne, soit un pourcentage de remise maximum. Il contient en outre une colonne « observations » et une colonne PC (remplie d’une initiale). Il se présente ainsi (extrait) :

NOMS LM POUT. TUBES TOLES TOLES TOLES PAF Observations PC LAC DKP MCR Drapeau -10% 5/10T
-35% 5/10T-15€ 5/10T-15€ 5/10T-30€ 1/3T

F ECMI -15% 3/5T
-30% 3/5T-15€ 3/5T-15€ 3/5T-30€ 3Tet+

C Etienne -45% N10/20T -55% TQ TQ TQ 3Tet+ Grillages et MD: C
-5% 40et+ …

Les tableaux récapitulatifs et les instructions 159. Compte tenu du grand nombre de conditions tarifaires appliquées aux clients, des documents récapitulatifs étaient édités dans certaines régions et faisaient figure de référence pour savoir comment coter une consultation. Le dossier comprend de tels documents, sous différentes présentations, pour des dates allant du 3 juin 2002 au 1er juin 2004 et concernant tout ou partie des 3e, 4e et 5e régions. Ces récapitulatifs présentent, pour les principaux produits et d’autres produits, les barèmes en vigueur, leurs dernières variations, les éventuels prix minima et les spécificités pouvant exister sur certains produits. En voici un exemple qui avait vocation à s’appliquer au 1er juin 2004 (cotes 22393 à 22395, 19436, 14839 à 14849, 14700 à 14707, 10300 à 10302) : « 4e région OCEANE AU 01/06/2004 1) POUTRELLES Nouveau barème national au 01/06/04. Barème régional au 26/04/04 inchangé.

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A noter nouveaux barèmes au 01/07. Dispositif national inchangé ; 1- Clients L ; Tranche 100 T et + 2- Clients A : Tranche 75 à 100 T 3- Clients B ; Tranche 50 à 75 T Autres clients Régionaux : Application du barème régional et des dispositifs départementaux. Tableau en annexe pour conditions plancher. Coupes : application du barème net sans remise sauf les 11 cas particuliers. Commandes Semi-directes : Définition des conditions du semi direct inchangées 2) LAMINES MARCHANDS ET LARGES PLATS Barèmes national et régional au 26/04/04 Tableau en annexe pour conditions plancher. 3) TUBES CONSTRUCTION- Tl – T2 – T3 – TIO : Nouveau barème national au 01/06/04. Barème régional au 26/04/04 inchangé. A noter : nouveaux barèmes au 01/07. Tubes constructions ; voir tableau en annexe pour conditions plancher. Tubes cana soudés : remise maxi 25 % sur barème national. Tubes cana sans soudure : barème national net sans remise. 4) PAF Nouveau barème national au 01/06/04. Barème régional au 26/04/04 inchangé. A noter : nouveaux barèmes au 01/07. La tranche 20T et + constitue le nouveau taquet 5) PRODUITS PLATS : Nouveau barème national au 01/06/04. Barème régional au 26/04/04 inchangé, A noter : nouveaux barèmes au 01/07. RAPPEL : pour tous les clients, les listes sont supprimées et le barème Spot n’est plus appliqué ainsi que les remises sur le 20 T, ET PAS DE CUMUL PRODUITS PLATS / PRODUITS LONGS. 6) ETIRES : Nouveau barème au 01/05/04. A37 A60 Prix mini : commandes < 500 kg : 990 €/T 1010€/T Commandes > 500 kg : 940 €/T 960 €/T

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7) PRIX TAQUETS POUR COMMANDES < 3 T sur le 44-85 et 49. Laminés 10 T -10 % Produits plats 3/5 T NET Tubes CM 10 T -15% Poutrelles 1/3 T NET PAF 1/3 T NET Conditions applicables sur les barèmes en vigueur. 8) GALVANISATION Majoration 830 €/T 9) GRILLAGE SERRURIER Barème au 01/02/04. 10) MÉTAL DEPLOYE Barème au 01/03/04 11) PRODUITS BETON Barème Ronds au 22/03/04 . Barème Treillis soudés au 21/04/04 ». 160. Le tableau d’annexe auquel il est fait référence est le suivant (cote 10303) :

161. Ces récapitulatifs étaient envoyés par les présidents de région, par télécopie ou messagerie électronique. Ils sont mentionnés dans un grand nombre de comptes rendus de réunions régionales. Des documents récapitulatifs circulaient également à l’intérieur des groupes et des sociétés. Ils diffusaient les mêmes informations sur les dispositifs, à cela près que, dans certains cas, les modifications étaient données à la fois sur la base du barème de la profession et sur celui du groupe (14140, 14141, 8723 à 8727, 8719 à 8722, 14389 à 14397, 15464, 15468, 15902, 15910, 15925, 7221, 14850 à 14854, 16042, 16043, 14383, 14398, 1936 à 1938, 19554 à 19556, 18190 à 18197, 18221 à 18227, 12492 à 12498, 11909, 11910, 11939, 11940, 11971 à 11973, 19982 à 19992 et 22396 à 22400).

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d) La mise en place d’actions coercitives 162. Lorsque les conditions associées aux dispositifs n’étaient pas respectées, des actions coercitives étaient mises en place. Les pièces au dossier révèlent les mécanismes mis en œuvre dans les différentes régions, à l’égard des membres de la concertation ou d’acteurs extérieurs, qu’il s’agisse de négociants français ne prenant pas part à la concertation ou de « pénétrants », c’est-à-dire de négociants étrangers ou appartenant à une autre région FNA. Les systèmes de contrôle et de sanctions internes 163. M. H… (Descours & Cabaud) a déclaré, à propos des sanctions appliquées en cas de non- respect des décisions concertées : « Le dispositif a été mis en place pour une question de survie. Nous n’avions pas le choix : il fallait que ça marche. Même si le risque de déviance existait, nos intérêts étaient liés et si quelqu’un déviait, tout le monde tombait et tout le monde risquait d’y « laisser des plumes ». Il y avait donc un climat de confiance, qui s’est maintenu, en dépit de quelques périodes de doute. Il fallait ainsi accepter la règle du jeu dans sa totalité : dévier revenait à ne pas l’accepter et à mettre tout le système en péril. En outre, le dispositif était si contraignant dans sa forme qu’il ne nécessitait pas forcément de sanctions. Malgré tout, pour renforcer l’efficacité du dispositif, nous avons réfléchi au plan national à des systèmes de contrôle et de sanctions. Les déviations, qui existaient, étaient ponctuelles et étaient liées à une situation ou à un client (historique, etc…). Le suivi des affaires se faisait en réunion, sur la base éventuelle d’offres de prix ou quelques fois de factures. (…) de manière générale, des points étaient faits lors des réunions du Club Poutrelles et des réunions des Directeurs commerciaux des groupes nationaux au FNA, ainsi qu’entre les Présidents des groupes nationaux. C’est à ces occasions qu’était réalisé le suivi des affaires et que les mesures visant à assurer la discipline étaient prises. L’entreprise en infraction y passait un mauvais moment. A cet égard, en plus de permettre de préciser certains points ou d’officialiser les règles et comportements à suivre, les déjeuners des directeurs commerciaux étaient également l’occasion de remettre, en plus petit comité, les choses au point quand des infractions avaient été constatées. L’exclusion était évidemment difficile. Le fautif pouvait par contre parfois être interdit de prendre des commandes chez un client pendant un certain temps. Le rachat de tonnes (à l’entreprise qui aurait dû être leader et qui ne l’a pas été à cause d’une sous-cotation en infraction par rapport au barème ou aux objectifs de parts de marché) n’a jamais vu le jour au plan national. Il me semble cependant que cela a été le cas dans la 4e région. Il est en outre possible que certaines régions aient organisé des contrôles et mis en place des sanctions ». Le système formalisé constaté dans la 7e région 164. Les documents saisis dans la 7e région (un tableau dactylographié de sanctions et la présentation sur un « paperboard » d’un système de sanctions) ont révélé l’existence d’un système complet, graduel et sophistiqué de sanctions des déviances préparé par le président de région, dont certains des éléments ont effectivement été mis en œuvre, dans cette région mais également dans d’autres. Le mécanisme envisage les types de dérapages possibles et prévoit leurs sanctions, décidées en réunion : ces sanctions peuvent augmenter en fonction des conséquences du dérapage et d’une éventuelle récidive. Ces différents documents sont reproduits ci-après. PMMA, dont la mention apparaît à droite du tableau dactylographié ci-

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dessous, est un client de la 7e région dont le nom est cité dans le cahier des notes prises par un dirigeant de KDI : « PMMA → Punition Mirouze. (couverture 100T) », ce qui indique que les règles issues des documents ci-dessous ont été utilisées pour traiter des sanctions discutées lors des réunions ou en sont inspirées (cotes 4936, 3828 à 3830 et 3977).

Tableau dactylographié des sanctions

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Première page du paperboard (original et reproduction) :

Deuxième page du paperboard (original et reproduction) :

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Troisième page du paperboard (original et reproduction) :

165. En substance, ces documents présentent les différentes hypothèses d’« infraction » au dispositif et les sanctions graduelles de ces dérapages qui peuvent être de deux ordres : l’exclusion, de durée variable et le rachat des tonnes. Le système prévoit un mois d’exclusion même en cas de retrait de l’offre formulée hors dispositif. Il ressort du premier document qu’une exclusion correspond à la définition suivante : « pas d’affaires », ce qui prive le négociant de telles affaires pendant 1, 2 ou 3 mois ou pour une durée correspondant à une à trois fois le tonnage litigieux. Les exemples au dossier montrent également des cas d’exclusion des réunions. Les sanctions relevées dans les régions 166. Des sanctions proches de celles mentionnées ci-dessus ont été relevées dans les comptes rendus des réunions régionales. Les conflits concernaient au premier chef les déviances ponctuelles des participants actifs à la concertation, ceux-là mêmes qui surveillaient par ailleurs la bonne application du dispositif par les autres. Dans ces cas, les comptes rendus de réunion font surtout apparaître des corrections et des compensations, afin que l’équilibre d’ensemble soit respecté et demeure le plus stable possible. Ces premières situations s’apparentent autant à la gestion normale de la concertation qu’à des sanctions. Les modalités de corrections, graduelles, sont les suivantes (cotes 15026, 15312, 15790, 15307, 15771, 15252, 15313, 15337, 18929, 4213, 3977 et 4198) : • correction immédiate, par le retrait de l’offre illégitime (après intervention du point central ou discussion en réunion), ainsi que l’indiquent par exemple les extraits de réunions suivants : « Nous avons rendu la commande suite à une erreur de cotation »

et « Prix OK pour cette affaire, COMET n’avait pas coté dans le dispositif, mais il a retiré son offre pour ne pas prendre l’affaire » ;

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• octroi par le point central d’un « droit de suite » permettant de coter sous le dispositif pour remporter les consultations suivantes à la suite d’une déviance d’un autre négociant, ainsi que l’indiquent par exemple les extraits de réunions suivants : « pour cette affaire de poutrelles coupées, PC 49 a autorisé CM de faire 10€/T de mieux pour pénaliser KDI qui n’a pas été correct sur ce dossier depuis début 2003 » et « Cde prise par MR (-8% pour compenser les erreurs de prix CHAILLOUS et LANGUILLE sur les précédentes affaires traitées cotées au dessous des conditions prévues » ; • compensation d’une erreur lors d’une consultation postérieure en « couvrant » le négociant légitime, selon le dispositif, à prendre l’affaire (on retrouve parfois l’expression « rendre une affaire ») et en ne prenant temporairement pas d’affaire avec le client en question, ainsi que l’indiquent par exemple les extraits de réunions suivants : « cde prise par MR qui n’a pas coté selon la méthode définie (…) MR couvrira entièrement la prochaine affaire », « nous avons pris 20 tonnes (…) en suivant en dessous des prix de GUILLOT définis avec le PC alors que nous n’avions pas déclaré cette affaire (…). Nous couvrirons les prochaines affaires », « Affaire couverte par LANGUILLE hors dispositif s/ dernière affaire », « Prix suivi sans accord du PC. Ils devront se retirer pour la prochaine affaire », « SCOMAP → DC ? (DC 1 mois se retire) », « 10 T prises par Mirouze à rendre à KDI », « Mirouze sur-cote pendant 1 mois » et « PMMA →Punition Mirouze (couverture 100T) ». 167. Il apparaît dans certains comptes rendus que des déviances antérieures étaient parfois utilisées en défense comme justification. Ce type d’explication était parfois admise, ainsi que l’indique par exemple l’extrait de réunion suivant : « hors dispositif (en représailles aux précédentes affaires dont celle du 8/07/03 prise par Beauplet – hors dispositif. Rafraîchissement de mémoire) » (cote 15495). 168. Des sanctions plus graves ont été prises ou demandées, telles que des exclusions temporaires des réunions, ainsi que l’indiquent par exemple les extraits de réunions suivants : « Maisonneuve est exclu », « La situation est plus difficile en Haute Normandie où Descours est exclu du dispositif », «  3e : Descours Rouen exclu lundi collégialement », « A part Descours, toujours à l’index, pas de problème, le climat reste bon malgré la relative sous-activité. Chacun sait l’intérêt du dispositif pour éviter de dégrader les marges », « faire exclure Sieuzac Agen », « Fourcade → Métal Pyrénées (- 10%) Prochaine à exclure » et « → exclus 4 fois sur les prochaines » (cotes 15495, 8506, 7319, 8971, 7346, 3966, 3990 et 3958). 169. Enfin, dans certains cas, les pièces du dossier font état de l’agressivité des négociants à l’égard d’un autre membre dissident : « une réunion est prévue pour « mettre au pas » le boute-feu. Souhaitons qu’il se range dans la voie de la sagesse. Sinon le FNA et vous-même en entendrez parler » (cote 4736). Les mécanismes de pression et de coercition à l’encontre d’acteurs extérieurs 170. Des pratiques diverses ont été mises en place pour contrecarrer les initiatives des négociants ne faisant pas partie de la concertation. M. B… (CODIP) a notamment déclaré : « Un de nos soucis lors de ces réunions était de préserver notre marché contre les pénétrants de la 9e région et d’Italie». M. 21… (KDI) a déclaré : « Je peux dire qu’il y a une sorte de solidarité régionale entre négociants d’une même région qui a pour objectif de se protéger de l’implantation d’un certain nombre de concurrents extérieurs à la région » (cotes 900 et 390 à 396). 171. Le processus récurrent, dans ce cas, consiste en un accord (« Nous rencontrons à nouveau Soprométal comme fauteur de trouble et nous allons en commun essayer de le

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repousser »), pour casser les prix et faire une concurrence très agressive à l’égard de l’extérieur en cause. Les clients concernés sont surveillés de plus près, par un classement (« Il faut aménager un nouveau classement pour contrer SoproMétal probablement ») ou le recours au point central (« nous avons décidé de contrer Albert en appelant systématiquement le PC lorsque nous sommes consultés »). Les déclarations sont ainsi systématisées et diverses mesures sont mises en place (cotes 7307, 7308, 15472, 8193, 439 à 443, 14287 et 4937) : • des « droits de suite » : dans ce cas, le point central autorise les négociants à suivre des cotations inférieures au dispositif car elles sont le fait d’un extérieur qui remporterait l’affaire en l’absence de réaction ; • des « tours de rôle », ainsi que l’illustrent les déclarations suivantes : « A la réunion a été décidé pour éviter qu’Albert prenne d’autres affaires, de désigner un point central. IDC est un client ; les participants à la réunion ont dû vouloir décider de faire tourner les affaires pour le client IDC. La même attitude est adoptée face à Albert dans le 44 »

et « Dès qu’un négociant indépendant ne voulait pas respecter le dispositif établi en commun (comme par exemple les sociétés GERMOND ou SUARD-BELLEMON) des « tours de rôle » à « prix coûtant » étaient organisés pour chaque consultation afin que ces négociants ne remportent pas la commande : chaque membre de l’entente proposait, à tour de rôle, des prix très bas en réponse à des consultations pour que les entreprises qui ne voulaient pas faire partie du dispositif ne remportent pas la commande ». La logique ici est inversée par rapport aux tournantes traditionnelles : il ne s’agit plus de coter au dispositif et de faire des offres de couverture pour tromper le client mais de faire tourner le négociant qui cassera les prix (et descendra donc sous le dispositif) pour prendre les affaires à l’entreprise extérieure ; • le blocage des approvisionnements : les extérieurs à la concertation sont souvent des « vendeurs en chambre » (c’est-à-dire sans stock) qui font l’interface entre les clients et des producteurs ou des petits revendeurs qui se fournissent en produits sidérurgiques auprès des négociants eux-mêmes. Dans ce cas, le blocage des approvisionnements est une solution rapidement envisagée, ainsi que l’indiquent par exemple les extraits de réunions suivants : « KDI Nantes et MR Angers sont intervenues auprès de PAD et D’Huart pour bloquer l’appro d’Albert sur ce dossier », « Il faut envisager, sauf amélioration, de régler le problème en amont en contrôlant les appros et en remontant les prix de façon significative (Morel semble être le plus présent) » et « j’ai décidé de ne plus le dépanner ». 3. LES INFORMATIONS ÉCHANGÉES 172. L’élaboration et le suivi des différents maillons du dispositif ainsi que l’activité des commissions et autres instances syndicales nécessitaient un grand nombre d’échanges d’informations entre entreprises concurrentes ou à l’intérieur de chacune d’entre elles. Les moyens d’échanges étaient variés et alimentaient aussi bien les dispositifs nationaux que régionaux. Ils complétaient les éléments nourrissant la concertation. 173. L’application concrète et quotidienne de la concertation se faisant dans les régions, de nombreuses informations devaient être remontées aux directions générales des grands groupes aux fins de préparer les réunions ayant lieu au niveau national. Des remontées régulières d’informations, expressément demandées par les directions générales, ont ainsi été constatées au sein de chacun des trois grands groupes.

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174. Le même type de suivi était mis en place dans la société Maisonneuve pour des raisons similaires. M. A… a déclaré à ce propos : «  Les comptes-rendus de réunions départementales de la FNA se trouvant dans les scellés 3, 4 et 5 ont été rédigés pour la plupart par Philippe 40… à mon intention afin de me tenir au courant de ce qui se passait. Ainsi dans les réunions nationales, je pouvais défendre au mieux la position de ma société ». 175. Avant les réunions nationales, étaient par ailleurs remontées des séries de chiffres de tonnages très détaillés au FNA. Avant les réunions régionales, des contacts pouvaient avoir lieu pour décider des clients qui seraient abordés. Pendant les réunions, des échanges très détaillés d’informations étaient réalisés sur les affaires récentes ou en cours, sur l’état de la demande et sur les barèmes à utiliser prochainement. Après les réunions, la diffusion des décisions des commissions nationales et des réunions régionales ou de documents récapitulatifs était effectuée de diverses manières par les présidents de région, mais également par le FNA et les grands groupes aux membres du FNA et aux régions. 176. Toutes les informations échangées à l’occasion de la concertation sont des informations confidentielles et stratégiques. Elles ont trait à la stratégie commerciale des négociants, à leur parc de clientèle et donc aux éléments fondamentaux de leur activité commerciale. Ces informations sont pour partie échangées dans le cadre de l’activité syndicale du FNA. Celui-ci est titulaire d’un agrément du SESSI pour assurer un relevé statistique concernant des données annuelles agrégées, permettant seulement de cibler l’origine de l’acier acheté et les débouchés, pour éviter un double comptage des tonnages. Les valeurs pécuniaires les plus précises qui y sont recensées concernent les facturations hors taxes des sorties de l’année. Les données que le FNA a la charge de réunir sont donc, en substance, uniquement des volumes agrégés annuels par catégories. Elles n’expliquent et ne justifient pas les échanges constatés, les informations demandées par le FNA à des négociants, les informations transmises par les négociants au FNA, les informations sur lesquelles il est débattu dans le cadre des réunions FNA ainsi que des documents, émanant du FNA, transmis aux négociants et intégrant des données précises relatives à des prix, des clients et à des parts de marché. F. LES GRIEFS NOTIFIÉS 177. Sur la base des éléments qui précèdent, a été notifié le 5 mars 2008 « - A la société PUM Service Acier, pour son comportement et celui de ses filiales Arcelor Négoce Distribution, PUM Paris Normandie, PorfilArbed Distribution France, D’Huart, Arcelor Profil, Mirouze Novacier, Chaillous, SLPM, PMSO, Berton Sicard, Lille Aciers, Lopez, Guille, Guillot, Fermatec, Prometo, SIME, Savoie Metal, CML, CIMA et Baechler avec lesquelles elle formait à l’époque des faits une unité économique ;

- A la société Arcelor Profil, venant aux droits de la société ProfilArbed Distribution France qu’elle a absorbée ;

- A la société AMD Sud/Ouest, venant aux droits de la société Métal Pyrénées qu’elle a absorbée ;

- A la société KDI ;

- A la société Descours & Cabaud SA, pour son comportement et celui de ses filiales Descours & Cabaud Sogedesca, Descours & Cabaud Ile de France, Descours & Cabaud

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Normandie, Descours & Cabaud PACA, Descours & Cabaud Rhône Alpes Auvergne, Descours & Cabaud Savoie, Dock Généraux/ Dock Industries Services/ David, Beauplet, Martin Rondeau, Lecoufle, Bernard Pagès, Soferac, VAMA/ Comptoir Métallurgique Vendéen, AGDG, Baudoux, Baures, Bossu Cuvelier, Beaurain, Burdin Bossert, CACC, CMB, CMF, Languille, Cattiaux Rochettes, Guermont Weber, Mailland, Maringue Sagetat, Prevot Smeta, Servet Duchemin / Commaille, Epac Expansion (SMEPAC), SMG et Schmerber avec lesquelles elle formait à l’époque des faits une unité économique ;

- A la société Maisonneuve ;

— A la société Etablissements Marc Morel et Fils, pour son comportement et celui de sa filiale Duferco Morel Produits Plats, avec laquelle elle formait à l’époque des faits une unité économique ;

- A la société Clisson Métal ;

— A la société Liametho ;

— A la société CODIP, formant à l’époque des faits une unité économique avec la société Ferren Fers ;
- A la société Ferren Fers, formant à l’époque des faits une unité économique avec la société CODIP ;

— A France Négoce Aciers »

le grief « d’avoir participé à une entente complexe et continue sur le marché français du négoce de produits sidérurgiques consistant en une concertation sur des barèmes et autres conditions tarifaires, sur les clients, sur les parts de marché et en un échange régulier d’informations stratégiques. Ces pratiques, qui ont eu pour objet d’imposer sur le marché français du négoce des produits sidérurgiques un mode d’organisation substituant au libre jeu de la concurrence une collusion généralisée entre les négociants et pour effet de restreindre la libre fixation des prix et la liberté commerciale des opérateurs sur le marché, sont prohibées par l’article L. 420-1 du Code de commerce et par l’article 81 du Traité CE. Elles ont été mises en œuvre au moins de 1999 à 2004 et sont retenues pour cette période à l’encontre de l’ensemble des entreprises et organismes concernés, à l’exception des sociétés Maisonneuve, CODIP et Ferren Fers, dont la participation n’est retenue que pour la période allant de 2001 à 2004 et des sociétés Liametho et Clisson Métal, dont la participation n’est retenue que pour la période allant de 2002 à 2004 ». G. LA MISE EN ŒUVRE DU III DE L’ARTICLE L. 464-2 DU CODE DE COMMERCE 178. A la suite de la notification des griefs, les sociétés PUM Service Acier/ Arcelor Profil/ AMD Sud Ouest et KDI, ainsi que la FFDM, venant aux droits de FNA, ont sollicité le bénéfice des dispositions III de l’article L. 464-2 du code de commerce, selon lesquelles : « lorsqu’un organisme ou une entreprise ne conteste pas la réalité des griefs qui lui sont notifiés et s’engage à modifier ses comportements pour l’avenir, le rapporteur général peut proposer au Conseil de la concurrence qui entend les parties et le commissaire du Gouvernement sans établissement préalable d’un rapport, de prononcer la sanction

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pécuniaire prévue au I en tenant compte de l’absence de contestation. Dans ce cas, le montant maximum de la sanction encourue est réduit de moitié ». 1. LES ENGAGEMENTS SOUSCRITS PAR LES SOCIÉTÉS DU GROUPE PUM/ ARCELOR 179. Pour la mise en œuvre du III de l’article L. 464-2 du code de commerce, PUM Service Acier, Arcelor Profil et AMD Sud Ouest ont souscrit par procès-verbal du 11 avril 2008 les engagements suivants : « 1. Sensibilisation et programme de formation du personnel concerné

1.1 Code d’éthique et lignes directrices en matière de concurrence A la suite de la fusion entre Arcelor et Mittal Steel, le programme de compliance déjà en place chez Mittal Steel a été adapté et étendu à l’ensemble du Groupe. Ainsi, un Code d’éthique a été diffusé sur le site intranet à partir de janvier 2007. Ce document, qui couvre un nombre important de thèmes et contient en particulier des dispositions relatives au droit de la concurrence, est distribué à l’ensemble des salariés du Groupe. Il est également fourni à toutes les personnes nouvellement embauchées. Le déploiement de ce code d’éthique au sein de PUM est en cours et sera terminé au plus tard le 30 septembre 2008. Par ailleurs, le droit de la concurrence a fait l’objet de lignes directrices spécifiques (les « Directives Antitrust »), diffusées aux membres du Comité de Direction de l’activité distribution du Groupe courant 2007. Dans les trois mois suivant la décision du Conseil de la concurrence clôturant la procédure en cours et rendant obligatoires les présents engagements (la « Décision »), ces directives Antitrust seront distribuées à l’ensemble des catégories de personnel suivantes :

- Chefs de secteurs et dirigeants de filiales – 13 personnes ;

- Responsables d’agences agissant sous d’autorité des chefs de secteur – environ 80 personnes en tout ;

- Responsables des produits longs et des produits plats et responsables des ventes au sein des différentes agences – environ 150 personnes en tout ; L’ensemble de ces responsables sera désigné ci-après comme les « Responsables Commerciaux ». En parallèle seront organisées de nombreuses séances d’information et d’explication qui débuteront dès le 15 avril prochain au siège de PUM à Reims et seront ensuite déclinées en différentes sessions. A l’occasion de la convention annuelle du 5 juin prochain, rassemblant environ 200 cadres de PUM, des juristes spécialisés interviendront pour présenter le code d’éthique et en particulier les règles du droit de la concurrence. Au 30 septembre 2008, l’ensemble des responsables commerciaux aura assisté à de telles séances. 1.2 Formation spécifique au droit de la concurrence, « hotline » et e-learning en matière de concurrence Des modules de formation spécifiques, dédiés au droit de la concurrence, ont été organisés à partir d’avril 2007 en direction des dirigeants de la branche du Groupe à laquelle appartient PUM.

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Dans l’année suivant la décision, de telles séances de formation spécifiques au droit de la concurrence seront organisées à destination de l’ensemble des responsables commerciaux. Ces séances seront adaptées aux situations concrètes rencontrées par les responsables commerciaux : elles seront ainsi complétées par des illustrations pédagogiques liées au secteur de la distribution de produits sidérurgiques. De telles séances seront répétées tous les trois ans et organisées aussi souvent que nécessaire pour les personnes assumant pour la première fois des fonctions de responsable commercial (ces dernières se verront par ailleurs remettre les directives Antitrust au moment de leur entrée en fonction). Les registres de présence correspondant à ces séances de formation seront conservés pendant cinq ans par la direction des ressources humaines au sein de PUM. De manière générale, les salariés de PUM disposeront d’une « hotline » (par courrier, email et téléphone) destinée à répondre à toute question ou tout doute relatif à l’application du droit de la concurrence. Cette hotline sera plus précisément présentée aux responsables commerciaux lors des séances de formation au droit de la concurrence et son existence sera rappelée dans les directives Antitrust qui leur seront distribuées. Elle sera animée par des juristes internes spécialisés en droit de la concurrence et ayant une connaissance suffisante des caractéristiques du secteur de la distribution de produits sidérurgiques. Dans les douze mois suivant la décision, PUM mettra en place des outils d’e-learning en matière de concurrence avec des exemples adaptés au métier de la distribution de produits sidérurgiques. Chaque responsable commercial aura l’obligation de suivre, au moins une fois tous les deux ans, un module d’e-learning consacré au droit de la concurrence, avec signature électronique attestant que le module a été suivi. Ces outils de formation seront par ailleurs accessibles à l’ensemble du personnel de PUM. 1.3 Encadrement des contacts avec les autres distributeurs de produits sidérurgiques PUM prendra aussi des mesures destinées à encadrer plus strictement les éventuels contacts avec les autres distributeurs de produits sidérurgiques concurrents : dans les trois mois suivant la décision, des lignes directrices spécifiques seront diffusées aux responsables commerciaux rappelant la prohibition de principe des contacts avec les autres distributeurs de produits sidérurgiques concurrents. A l’exception des foires et salons et des relations commerciales d’achats-ventes, dans les cas où de tels contacts pourraient avoir lieu (par exemple si des clients souhaitent l’organisation de réunions techniques), l’autorisation expresse préalable, par mail ou par courrier, du chef de secteur sera requise. En l’absence de réponse expresse, le contact prévu n’aura pas lieu, sauf circonstances exceptionnelles à justifier par écrit dans la semaine suivant le contact. De plus, dans tous les cas, les contacts avec d’autres distributeurs de produits sidérurgiques concurrents devront donner lieu à la conservation des éventuels échanges (mails, ordre du jour, comptes-rendus) auprès du chef de secteur concerné, pendant une période de trois ans. Cette procédure d’autorisation a priori et de conservation des données sera susceptible de faire l’objet d’une révision après la cinquième année de sa mise en œuvre. 1.4 Communication interne postérieure à la décision Enfin, une fois que la décision sera rendue, il sera mis en place une communication spécifique, interne à PUM, insistant sur la gravité des pratiques relevées, la nécessité du respect absolu du droit de la concurrence et la variété des outils et formations mis en place. Cette communication sera adressée à l’ensemble du personnel de PUM.

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L’ensemble de ces dispositions atteste que PUM a pris la mesure des considérations du Conseil de la concurrence, dans un contexte proche de l’espèce, selon lesquelles « seules une formation et une sensibilisation sérieuses aux exigences des règles de concurrence impliquant une responsabilisation personnelle peuvent donner un maximum de chances que les comportements anticoncurrentiels soient bannis au sein d’un (…) groupe » défini comme « décentralisé, dont les responsables, en particulier au niveau local, ont une marge de manœuvre importante et dont l’activité est notamment évaluée au regard de leurs résultats commerciaux et financiers) ». Dans le cadre de la présente procédure, PUM souhaite aller au-delà de ces aspects de formation et de sensibilisation en présentant ci-après d’autres engagements destinés à assurer le respect du droit de la concurrence. 2. Dispositif d’alerte professionnelle Un dispositif d’alerte professionnelle, plus particulièrement axé sur d’éventuelles irrégularités dans le domaine de la comptabilité, de l’audit ou des faits de corruption, a été mis en place au niveau du Groupe en 2007. Afin d’inclure spécifiquement les infractions aux règles du droit de la concurrence dans ce dispositif d’alerte professionnelle, PUM s’engage, dans les trois mois suivant la décision, à adresser une note interne à l’ensemble de ses salariés indiquant explicitement que ce dispositif inclut les infractions au droit de la concurrence et prévoyant donc clairement la possibilité pour les employés de PUM d’émettre des alertes en cas de constat relatif à des pratiques de nature à enfreindre les règles du droit de la concurrence. Grâce au dispositif d’alerte professionnelle, les employés de PUM pourront contacter directement, de manière confidentielle, le Comité d’Audit du Groupe, par courrier ou par le biais du portail internet du Groupe où une rubrique est dédiée à ces alertes professionnelles. Ainsi, tous les employés de PUM pourront utiliser ce site afin d’émettre des alertes sur tout incident ou fait se rapportant à des infractions aux règles du droit de la concurrence et ce 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, 365 jours par an. Les alertes professionnelles seront reçues par le Président du Comité d’Audit et le Secrétaire Général du Groupe qui pourront se faire assister, en ce qui concerne les alertes relatives au droit de la concurrence émises par le personnel de PUM, par des juristes spécialisés en la matière et ayant une connaissance suffisante du secteur de la distribution de produits sidérurgiques. Les alertes seront traitées dans un délai raisonnable, compte tenu de la complexité et de la nature de l’alerte. Le Président du Comité d’Audit pourra soit demander au Directeur du département « Internal Assurance » de diligenter une enquête, soit demander un rapport écrit à la filiale concernée de PUM. Toutes les alertes communiquées via le dispositif d’alerte professionnelle seront inscrites sur une liste présentée à la prochaine réunion du Comité d’Audit. Celui-ci décidera de l’étape suivante à mener et pourra décider d’effectuer des investigations supplémentaires (éventuellement appuyées par des juristes et/ou experts spécialisés en droit de la concurrence et ayant une connaissance suffisante des caractéristiques du secteur de la distribution de produits sidérurgiques). Le cas échéant, des recommandations au Conseil d’Administration concernant des actions à mener seront proposées par le Comité d’Audit. Le Secrétaire du Comité d’Audit conservera une copie des toutes les alertes, depuis la réception de l’alerte, jusqu’à la résolution du problème soulevé. Les informations statistiques et les données relatives aux types d’alerte seront conservées pendant une période de cinq ans à compter de la clôture de l’enquête.

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En conformité avec la législation en vigueur, le présent engagement est soumis au Conseil de la concurrence sous réserve, d’une part, si nécessaire, de l’accord de la CNIL et, d’autre part, si nécessaire, de la consultation des instances représentatives du personnel. PUM s’engage à accomplir les formalités nécessaires à cet égard dans un délai de six mois à compter de la décision. PUM souhaite en outre aller au-delà d’une simple extension de son programme de conformité (formation, sensibilisation et alerte professionnelle) en proposant aussi des engagements de type structurel, permettant le plein et entier respect du droit de la concurrence. 3. Réforme du rôle du syndicat professionnel PUM s’engage à faire ses meilleurs efforts pour proposer et mettre en place une profonde réforme du syndicat professionnel France Négoce Aciers (le « FNA », sis 65 avenue Victor Hugo à Paris) et, plus largement, du rôle du syndicat professionnel des distributeurs de produits sidérurgiques. Dès le constat des pratiques relevées dans la notification des griefs, PUM a manifesté sa détermination à faire évoluer le syndicat FNA et a réduit substantiellement sa participation aux instances de ce syndicat. Notamment sur son impulsion, le FNA s’est rapproché de trois autres syndicats pour constituer, en 2008, la Fédération Française de la Distribution de Métaux (« FFDM »). La gestion de la FFDM est actuellement assurée par trois instances (assemblée générale, conseil d’administration et comité exécutif) ainsi que par plusieurs commissions. PUM fera ses meilleurs efforts pour que la FFDM suive différents axes de réforme en vue de limiter les discussions et les contacts se déroulant en son sein à des échanges purement techniques et professionnels : PUM exigera que la FFDM fonctionne à un niveau strictement national : les réunions régionales et autres « Amicales des Marchands de Fer » gérées au niveau local seront totalement supprimées ; les réunions de la FFDM respecteront strictement les statuts limitant l’objet de la FFDM à « la défense des intérêts communs de ses membres et la promotion des métiers et des personnels de la distribution des métaux » notamment par le biais de « la promotion de l’utilisation des métaux dans l’ensemble des secteurs économiques » ; PUM exigera que soit définie une liste de thèmes de discussion prohibés et que cette liste soit annexée aux procès-verbaux de toutes les réunions du conseil d’administration et du comité exécutif de la FFDM, et signée par les participants qui attesteront ainsi n’avoir abordé aucun de ces sujets interdits. Une telle liste pourrait notamment inclure les sujets suivants : échanges portant sur les prix actuels et/ou envisagés des produits et certaines conditions commerciales (notamment les échanges ayant trait aux rabais, marges ou aux évolutions de tarification) ; échanges de données individuelles stratégiques détaillées ;

orientations et recommandations portant sur les tarifications et conditions commerciales pour services divers dont les coûts de transport et les délais de

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paiement (à l’exception de l’élaboration en commun d’une demande de décret d’exemption en vertu de l’article L.420-4 II du Code de commerce) ; communication de données chiffrées individualisées et récentes (c’est-à-dire datant de moins d’un an) sur les coûts d’approvisionnement et les autres coûts intermédiaires ; communication de données précises et individualisées portant sur les clients. PUM exigera que soient rédigés des comptes-rendus détaillés pour l’ensemble des réunions (assemblées générales, conseil d’administration, comité exécutif et commissions) et que ces comptes-rendus soient conservés pendant cinq ans au siège de la FFDM ; PUM exigera la présence, à chaque réunion du conseil d’administration et du comité exécutif, d’un avocat spécialisé en droit de la concurrence, et la signature sur le procès- verbal de cet avocat, afin d’attester la régularité des discussions. En fonction de la position des autres membres de la FFDM, ces engagements pourraient commencer à être mis en œuvre dès la décision. A défaut de mise en œuvre de l’essentiel de ces propositions dans un délai de six mois après la décision, PUM cessera de participer aux réunions des différentes instances de la FFDM. A défaut de mise en œuvre dans un délai d’un an après la décision, PUM quittera la FFDM. 4. Refonte du mode de tarification Au regard de la place des barèmes dans la description des pratiques présentée dans la notification des griefs, PUM s’engage à abandonner le système actuel de barèmes en colonnes et à mettre en place, dans un délai de six mois après la décision, un mode de tarification radicalement nouveau. Cette nouvelle tarification fonctionnerait suivant les principes décrits dans l’annexe jointe (confidentielle à l’égard des autres parties à la procédure). Ces engagements correspondent aux caractéristiques actuelles du secteur de la distribution de produits sidérurgiques ainsi qu’à la législation en vigueur et à la jurisprudence actuelle. Ils devraient par conséquent être reconsidérés en cas d’évolution significative du secteur ou du cadre législatif et réglementaire ou de la pratique décisionnelle et de la jurisprudence des autorités de concurrence. PUM tiendra le rapporteur général informé, pendant une durée de cinq ans, de toute décision prise de ne pas appliquer les engagements tels que souscrits à ce jour en raison d’une telle évolution.» 2. LES ENGAGEMENTS SOUSCRITS PAR LA SOCIÉTÉ KDI 180. Pour la mise en œuvre du III de l’article L. 464-2 du code de commerce, la société KDI a souscrit, par procès-verbal du 14 avril 2008, amendé par un courrier du 25 septembre 2008, aux engagements suivants : « 1. Mise en place d’un programme de conformité au droit de la concurrence et de formation 1.1. Le Comité de direction de KDI, en la personne de son président Monsieur Philippe Y…, diffusera une instruction générale à l’ensemble des salariés de KDI rappelant les termes de la décision du Conseil de la concurrence concernant la société et les

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engagements pris par la société. Une copie de cette instruction sera transmise au Conseil de la concurrence dès sa diffusion. 1.2. KDI établira un document intitulé « Charte de respect du droit de la concurrence ». Cette charte rappellera les principes du droit de la concurrence et, plus spécifiquement, les règles devant être respectées par les salariés de KDI dans le cadre de la réponse à des demandes de consultations des clients, de leur relation avec les entreprises concurrentes ou de leur participation à une organisation professionnelle. Les conséquences de la violation de ces règles par le salarié, pouvant aller jusqu’au licenciement, seront rappelées, dans le respect de la réglementation sociale. Cette Charte sera mise en ligne sur le site Intranet de la société. Une copie de cette Charte sera transmise au Conseil de la concurrence. 1.3. La « Charte de respect du droit de la concurrence » sera annexée au Règlement intérieur de la société KDI, faisant ainsi de son application une obligation légale pour l’ensemble des salariés de la société. Cette modification du Règlement intérieur fera l’objet d’une consultation des organes compétents dans le respect de la réglementation sociale. 1.4. Un exemplaire de la « Charte de respect du droit de la concurrence » sera signée par le Comité de direction de KDI ainsi que par les salariés responsables de l’activité commerciale et donc susceptibles d’être en contact avec des concurrents et de participer à des réunions d’organisations professionnelles, soit : le directeur général du réseau généraliste, le directeur général du réseau spécialiste, les directeurs de région généralistes, les directeurs d’enseignes spécialistes (KDI CM, KDI CSPI, KDI TNP, KDI KMS AERO, KDI MECA SERVICE), les directeurs de site et les responsables commerciaux (soit une centaine de personnes). Une copie de cet exemplaire signé sera notifiée par écrit à chacun des signataires. 1.5. Le contrat de travail des personnes nouvellement embauchées ou promues à l’un des postes énumérés au point 1.2 des présents engagements comprendront une clause spécifique relative au respect du droit de la concurrence et rappelant que toute violation de ces règles peut constituer une faute grave qui pourra être sanctionnée en tant que telle, dans le respect de la réglementation sociale. 1.6. Les personnes signataires de la Charte recevront une formation portant sur le droit de la concurrence, et plus particulièrement sur les règles à respecter dans le cadre des relations avec les concurrents et de la participation à des organisations professionnelles, dispensées par des avocats. 1.7. KDI organise régulièrement une formation juridique à laquelle participent les nouveaux embauchés ou promus aux postes énumérés au paragraphe 1.3. Cette formation, dispensée par des avocats, sera complétée d’une partie relative au droit de la concurrence, portant plus particulièrement sur les régies à respecter dans le cadre des relations avec les concurrents et de la participation à des organisations professionnelles. 1.8. Les supports utilisés et les feuilles d’émargement attestant de la participation à ces formations seront conservés pendant une durée de cinq ans par la Direction des ressources humaines. 1.9. Un module de « e-leaming » portant sur le droit de la concurrence sera mis en place sur le site Intranet et mis à jour annuellement si nécessaire. Il sera demandé aux

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personnes signataires de la Charte d’y accéder au moins une fois par an. La Direction des Ressources Humaines devra adresser un rappel à toute personne manquant à cette obligation. 2. Mise en place d’un contrôle interne 2.1. KDI désignera un «  Responsable-Conformité » ainsi qu’un «  Adjoint au Responsable- Conformité ». Les personnes désignées seront impliquées dans l’activité quotidienne de la société et ont un contact régulier avec les salariés de la société. Ils présenteront également, du fait de leur fonction, une garantie d’objectivité dans l’appréciation du fonctionnement de la société. Le champ de compétence du Responsable-Conformité et de son Adjoint comprendra le contrôle du respect du droit de la concurrence selon le paragraphe 5 de la « Directive de conformité » du groupe Klöckner, précisé et complété par la Charte du respect du droit de la concurrence ; le Responsable-Conformité et son Adjoint recevront une formation spécifique à cette fin sur les dispositions de la Charte. 2.2. Ils pourront être contactés par tout salarié de KDI afin de répondre à leurs interrogations sur l’application de la « Charte de respect du droit de la concurrence » ou, plus généralement, du droit de la concurrence. 2.3. Tout salarié aura la possibilité, dans les conditions précisées dans le règlement intérieur, de contacter le Responsable-Conformité ou son Adjoint, de manière confidentielle, afin de l’informer de pratiques potentiellement anticoncurrentielles mises en place par un salarié de KDI. Si les faits rapportés le justifient, le Responsable-Conformité ou son Adjoint en informera immédiatement le président du comité de direction de KDI et le directeur des ressources humaines. Les suites données à cette information seront dûment consignées par le Responsable- Conformité ou son Adjoint dans un registre relatant son activité, dans le respect de la réglementation sociale et de la réglementation relative aux traitements des données à caractère personnel. 2.4. Les données entrées dans ce registre seront conservées pendant une durée de cinq ans à compter de leur inscription, dans le respect de la réglementation relative aux traitements des données à caractère personnel. 2.5. Ce dispositif d’alerte sera intégré au Règlement Intérieur, cette modification faisant l’objet d’une consultation des organes compétents dans le respect de la réglementation sociale. 3. Participation de la société KDI à la Fédération Française de la Distribution des Métaux (anciennement FNA) 3.1. KDI s’efforcera, dans la mesure de ses moyens en tant qu’adhérent, de faire modifier la Charte de la FFDM afin d’y insérer une liste de sujets qui ne pourront pas être abordés dans le cadre des travaux menés par la Fédération. KDI s’efforcera, dans la mesure de ses moyens en tant qu’adhérent, de faire adopter par la FFDM une résolution prévoyant :

- l’obligation pour la FFDM d’établir un ordre du jour préalablement à chaque réunion ;

- l’obligation de rédiger un procès-verbal détaillé et exhaustif, soumis pour approbation à la réunion suivante ;

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- l’obligation de conserver ces documents pendant un délai de 5 ans ; 3.2. Si dans un délai de 6 mois à compter de la signature du procès-verbal de mise en œuvre du III de l’article L.464-2 du Code de commerce, les modifications demandées par KDI et énumérées aux points 3.1 et 3.2 des présentes n’ont pas été mises en œuvre par la FFDM, KDI s’engage à ne plus participer aux travaux de la FFDM et à quitter la Fédération. 3.3. KDI ne participera plus aux réunions régionales de la FFDM ni à d’autres éventuelles réunions organisées par toute autre association professionnelle de marchands de fer à caractère régional. 3.4. Toute personne représentant KDI assistant à une réunion organisée par la FFDM sera accompagnée par un avocat, pendant un an à compter de la décision du Conseil de la concurrence. Si lors d’une réunion organisée par la FFDM des sujets prohibés par la Charte sont abordés ou si, d’une façon générale, la réunion donne lieu à des pratiques contraires au droit de la concurrence (et notamment échanges d’informations stratégiques et concertation sur la politique commerciale des sociétés présentes), le ou les représentants de KDI quitteront immédiatement la réunion, en demandant à ce que mention de cet incident soit porté au procès-verbal de la réunion. Cet incident sera également communiqué au Responsable conformité ou à son Adjoint ». 3. LES ENGAGEMENTS SOUSCRITS PAR LA FFDM 181. Pour la mise en œuvre du III de l’article L. 464-2 du code de commerce, la Fédération française de distribution des métaux (FFDM) a souscrit, par procès-verbal du 25 avril 2008, aux engagements suivants : « 1. FFDM diffusera une lettre d’information à l’ensemble de ses adhérents reprenant les termes de la décision du Conseil de là concurrence et les engagements pris. 2. Une réunion exceptionnelle de la fédération sera mise en place pour en rappeler la teneur, ainsi que les principes du droit de la concurrence et notamment ceux relatifs au fonctionnement des organisations professionnelles. 3. Les statuts de FFDM, ainsi que la Charte de FFDM sont annexés aux présentes et toute modification ou précision des statuts qui pourrait être sollicitée sera soumise à ses adhérents dans le cadre d’une Assemblée extraordinaire. 4. FFDM continuera à mettre en œuvre les moyens nécessaires pour garantir qu 'aucun sujet illicite ne sera abordé dans le cadre des travaux menés en son sein et que les débats se limiteront à l’objet de FFDM tel que strictement défini dans ses statuts et dans sa Charte. 5. FFDM mettra notamment en œuvre les règles suivantes : • l’obligation d’établir un ordre du jour préalablement à chaque réunion ; • l’obligation de rédiger un procès-verbal ou un compte rendu détaillé et exhaustif, soumis pour approbation à la réunion suivante ; • l’obligation de conserver ces documents pendant un délai de 5 ans ; • FFDM mettra par ailleurs en place un système d’enregistrement sonore des réunions afin que les procès-verbaux puissent être faits de la manière la plus exacte possible.

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•Ces enregistrements seront conservés au sein de la fédération pendant un délai de 5 ans et ne seront pas diffusés. Il n 'y sera renvoyé qu’en cas de contestation. 6. FFDM fonctionnera à un niveau strictement national pour chacune des familles de produits représentés par cette fédération (Aciers au carbone, Aciers spéciaux, Aciers inoxydables, Aluminium, fils émaillés etc…). Les réunions régionales telles que décrites dans la notification des griefs étant d’ores et déjà supprimées, aucune réunion ni autre forme d’organisation de FFDM ne sera mise en place à un niveau régional. Cependant dans le cadre de son intervention sur l’ensemble du territoire français, FFDM assurera des séminaires non réguliers lui permettant d’exposer à ses adhérents et pour l’ensemble des familles de produits réunies, dans chacune des 5 « régions » définies dans le but de regrouper ses adhérents, la communication et la diffusion de l’information sur : • l’amont sidérurgique, • l’évolution des grands secteurs d’activité (automobile, bâtiment, travaux publics, industrie), • les problématiques transversales des métiers de la distribution, • la promotion des métiers de la distribution, • la promotion des produits. Ces séminaires seront exclusivement destinés à assurer la diffusion de l’information auprès de tous les adhérents et notamment de ceux qui ne peuvent participer aux réunions nationales. Chaque séminaire et son objet devront être préalablement proposés et définis sur l’ordre du jour d’un Comité Exécutif de FFDM et leurs validations seront consignées dans le compte rendu du Comité exécutif, établi dans les conditions sus évoquées au § 5. Un compte rendu de chaque séminaire contenant les thèmes abordés, la liste des adhérents et des invités présents ainsi que des questions posées sera établi. Il sera demandé aux participants d’adresser leurs éventuelles questions par écrit et si possible préalablement au séminaire. Ces séminaires donneront lieu à un enregistrement sonore dans les conditions sus évoquées au § 5. Sous réserve de circonstances exceptionnelles, identifiées et considérées comme telles par le Comité exécutif de FFDM, le nombre de séminaires ne saurait excéder quatre par région et par année. 7. Un avocat sera présent à chaque Conseil d’Administration et Comité exécutif de FFDM et signera le compte rendu de cette réunion, afin d’attester la régularité des discussions. 8. La FFDM mettra en œuvre ces engagements dans les meilleurs délais et au plus tard 6 mois après la décision du Conseil de la concurrence ».

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II. Discussion 182. Seront successivement discutés, en réponse aux arguments des parties qui contestent le grief qui leur a été notifié : • la régularité de la procédure, • le droit applicable, • le bien-fondé des griefs. A. SUR LA PROCÉDURE 1. SUR LA RECEVABILITÉ DES ÉLÉMENTS ISSUS DE LA PROCÉDURE DE CLÉMENCE 183. Les sociétés Morel, Clisson Métal et Liametho contestent par principe l’utilisation des déclarations et documents communiqués par le groupe Descours & Cabaud dans le cadre de la procédure de clémence. 184. La décision du Conseil n° 06-D-09 du 11 avril 2006, confirmée par l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 24 avril 2007, précise qu’il découle de « la lettre même des dispositions du IV de l’article L. 464-2 du code de commerce (…) que l’entreprise demandant le bénéfice de la clémence doit apporter au Conseil de la concurrence tous éléments d’information, sans qu’il en soit précisé la forme et la nature, lui permettant d’établir la pratique dénoncée et d’identifier ses auteurs. Ces éléments d’information peuvent être constitués de preuves documentaires (documents internes à l’entreprise, compte rendus de réunions,…) que l’entreprise peut compléter par des explications synthétisées dans un ou plusieurs mémoires versés à l’appui de sa demande, ou de déclarations orales ». La décision n° 03-D-12 du 2 mars 2003, confirmée sur ce point par l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 25 novembre 2003, énonce par ailleurs, en réponse à un moyen tiré de ce que les déclarations spontanées d’un tiers à l’origine de l’affaire devraient être écartées au motif qu’elles auraient été motivées par un esprit de vengeance ou par une volonté de déstabilisation du secteur, « que les raisons de cette démarche sont sans incidence sur la validité de la procédure et que le caractère vraisemblable des déclarations contestées, qui ne constituent qu’un indice parmi d’autres, a été conforté par de nombreuses pièces recueillies au cours de l’enquête ». 185. Le groupe Descours & Cabaud a communiqué des pièces et déclarations dans les conditions fixées par le IV de l’article L. 464-2 du code de commerce. Elles sont recevables sans qu’il soit besoin de rechercher la motivation de l’entreprise qui les apporte : il appartient seulement d’apprécier leur vraisemblance, en les confrontant aux autres pièces du dossier. L’examen de la valeur probante des déclarations, distinct de celui de leur recevabilité, sera fait lors de l’analyse du bien fondé des griefs notifiés.

2. SUR LA PRÉTENDUE ATTEINTE AUX DROITS DE LA DÉFENSE 186. La société Morel fait valoir que le délai imparti pour répondre à la notification des griefs – soit deux mois – n’a pas été suffisant pour lui permettre de préparer sa défense. Elle indique en outre qu’elle a eu des difficultés à ouvrir le DVD-Rom qui lui a été

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communiqué et souligne que les procès-verbaux de non contestation des griefs respectivement signés par les sociétés du groupe PUM/ Arcelor, par KDI et par la FFDM les 11, 14 et 25 avril 2008, ne lui ont été transmis que moins d’une semaine avant l’expiration de ce délai. 187. Mais, l’article L. 463-2 du code de commerce dispose que « le rapporteur général notifie les griefs aux intéressés ainsi qu’au commissaire du Gouvernement, qui peuvent consulter le dossier sous réserve des dispositions de l’article L. 463-4 et présenter leurs observations dans un délai de deux mois » (premier alinéa), que, s’agissant du rapport, « les parties ont un délai de deux mois pour présenter un mémoire en réponse qui peut être consulté dans les quinze jours qui précèdent la séance » (troisième alinéa) et que « lorsque des circonstances exceptionnelles le justifient, le président du Conseil peut, par une décision non susceptible de recours, accorder un délai supplémentaire d’un mois pour la consultation du dossier et la production des observations des parties » (quatrième alinéa). Le Conseil de la concurrence rappelle fréquemment que « la réalisation et l’envoi d’un CD Rom au stade de la notification de griefs ne sont qu’une facilité supplémentaire offerte aux entreprises qui conservent la possibilité de venir consulter le dossier au Conseil » (décision n° 06-D-04 du 13 mars 2006). 188. L’intégralité des pièces au dossier à la date de la notification des griefs a été envoyée dans un format électronique aux parties afin d’en faciliter l’exploitation. A également été transmis un DVD-Rom, pour rendre plus aisée la consultation des pièces. Outre ces facilités informatiques, la société Morel avait la possibilité de venir consulter le dossier dans les conditions fixées par l’article L. 463-2 du code de commerce. 189. Par ailleurs, aucune disposition n’impose d’adresser aux autres parties, avant le rapport, un procès-verbal de non contestation de grief qui n’engage que l’entreprise qui le signe. Enfin, il convient de relever qu’aucune demande de prolongation des délais n’a été formulée au président du Conseil de la concurrence. 190. Dans ces conditions, il convient d’écarter les différents moyens tirés d’une atteinte aux droits de la défense. 3. SUR LA PRÉTENDUE DÉLOYAUTÉ DE L’INSTRUCTION 191. Les sociétés Morel, CODIP, Ferren Fers, Clisson Métal et Liametho dénoncent l’instruction à charge à l’égard des négociants indépendants, en lui reprochant de ne pas s’être appuyée sur des documents qui viendraient à leur décharge. 192. Mais, il résulte d’une jurisprudence constante, notamment confirmée par l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 24 janvier 2006 (Ordre des avocats au barreau de Marseille), que le rapporteur fonde la notification des griefs sur les faits qui lui paraissent de nature à en établir le bien-fondé et que le fait que la notification des griefs ne cite pas tous les faits et indices qui n’ont pas été retenus comme indices des pratiques anticoncurrentielles ne peut faire grief aux entreprises, dès lors que celles-ci ont eu accès à l’ensemble de la procédure. En l’espèce, les parties ont eu accès à l’ensemble des pièces du dossier et ont eu toute latitude pour apporter les éléments qui paraissaient utiles à leur défense. 193. Il convient dès lors d’écarter ce moyen.

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B. SUR LE DROIT APPLICABLE 1. LE CONTEXTE JURIDIQUE DU SECTEUR DE L’ACIER 194. Jusqu’en juillet 2002, le régime juridique mis en place par le traité CECA donnait compétence à la Commission européenne pour prohiber les ententes mises en œuvre dans les secteurs du charbon et de l’acier. Conformément à son article 97, ce traité a expiré le 23 juillet 2002. Depuis cette date, les secteurs qui relevaient précédemment du traité CECA entrent dans le champ d’application du Traité CE. Les règles de compétence et de procédure à l’égard des pratiques éventuellement mises en œuvre dans ces secteurs relèvent donc des dispositions du droit commun de la concurrence, que ce soit dans l’ordre communautaire ou dans l’ordre national. 2. L’APPLICABILITÉ DU DROIT COMMUNAUTAIRE 195. Selon les lignes directrices de la Commission européenne relatives à la notion d’affectation du commerce figurant aux articles 81 et 82 du traité communication de la Commission (JOCE n° C 101 du 27 avril 2004), « les articles 81 et 82 du Traité s’appliquent aux accords horizontaux et verticaux et aux pratiques abusives d’entreprises qui sont «susceptibles d’affecter le commerce entre États membres» ». Pour être prise en compte, cette affectation doit pouvoir être sensible. 196. La question de l’affectation du commerce intracommunautaire est une question distincte et préalable à celle de l’analyse de la restriction de concurrence. Elle est indépendante de la définition des marchés géographiques en cause car le commerce entre États membres peut être affecté même dans des cas où le marché est national ou subnational. C’est l’accord concerné ou la stratégie générale examinée qui doit être susceptible d’affecter le commerce entre États membres, peu important que les différentes parties de l’accord soient susceptibles ou non de le faire isolément. 197. S’agissant des accords couvrant un seul État membre, les lignes directrices précisent que « les ententes horizontales couvrant l’ensemble d’un État membre sont normalement susceptibles d’affecter le commerce entre États membres. Du reste, les juridictions communautaires considèrent souvent que l’entente qui s’étend à l’ensemble du territoire d’un État membre a, par sa nature même, pour effet de consolider des cloisonnements de caractère national, entravant ainsi l’interpénétration économique voulue par le traité. La capacité qu’ont ces accords de cloisonner le marché intérieur est due au fait que, normalement, les entreprises qui participent à des ententes dans un seul État membre doivent se protéger contre les concurrents d’autres États membres (…). En principe, ces accords peuvent également, par leur nature même, affecter sensiblement le commerce entre États membres, compte tenu de la couverture de marché requise pour assurer l’efficacité de ces ententes ». Le Conseil de la concurrence a considéré dans sa décision n° 05-D-38 du 5 juillet 2005 que : « les cartels nationaux sont par définition susceptibles d’affecter le commerce intra-communautaire dès lors que le cartel couvre l’ensemble du territoire national et est mis en œuvre par des sociétés d’envergure internationale ». 198. En l’espèce, les pratiques examinées sont des pratiques horizontales conclues au niveau national et régional, appliquées sur l’intégralité du territoire français. Elles tendent à fixer les prix, à geler les parts de marché et consolident en cela les cloisonnements nationaux. Elles ont également pour but d’interdire à des opérateurs d’autres États membres l’accès au

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marché national, comme l’a exprimé un dirigeant de la 8e région : « Un de nos soucis lors de ces réunions était de préserver notre marché contre les pénétrants de la 9e région et d’Italie » (cote 900). De telles pratiques sont, par leur nature même, susceptibles d’affecter le commerce intracommunautaire. Elles impliquent la quasi-totalité des négociants français pour un chiffre d’affaires concerné dépassant largement les 40 millions d’euros. Dès lors, la présomption négative de non affectation sensible du commerce intracommunautaire prévue au point 52 des lignes directrices n’est pas applicable. Au contraire, s’agissant d’accords susceptibles par nature d’affecter le commerce intracommunautaire, la présomption positive d’affectation sensible prévue au point 53 des lignes directrices est applicable. 199. Il en résulte que le commerce entre États membres est susceptible d’être affecté de manière sensible par les pratiques examinées. Celles-ci peuvent donc être qualifiées au regard de l’article 81 du Traité CE, ce que les parties ne contestent pas. C. SUR LE BIEN FONDÉ DES GRIEFS 1. SUR LE MARCHÉ PERTINENT 200. Le secteur des produits sidérurgiques est généralement divisé, dans la pratique décisionnelle communautaire, selon les produits : aciers au carbone, aciers spéciaux et aciers inoxydables et, parmi les aciers au carbone, produits plats et produits longs, des segmentations plus fines ayant parfois été réalisées. La Commission européenne a indiqué à plusieurs reprises que « les activités de commerce de produits sidérurgiques [constituent] un marché distinct de ceux de la production et de la vente directe et [recouvrent] une large gamme de produits. La distribution de produits sidérurgiques se différencie en effet de la production et de la vente directe proprement dite par la diversité de ses clients, par le montant moins élevé de ses commandes, par sa capacité à répondre rapidement aux besoins du client (les délais de livraison des aciéries se comptent généralement en semaines, voire en mois, tandis que les négociants-stockistes travaillent en heures ou en jours), par le caractère local de l’activité et par le nombre important d’entreprises présentes dans le secteur. Même si de nombreux producteurs d’acier contrôlent en totalité ou en partie les structures de distribution, il existe, dans la plupart des États membres, un secteur indépendant composé de nombreuses sociétés de taille et de surface financière variables, allant de la petite entreprise familiale équipée d’un seul petit dépôt à la filiale d’un grand groupe industrie ». Elle a en outre distingué les différents métiers que la distribution recouvre, les activités des centres de service acier, les activités de centre d’oxycoupage et le négoce, en décrivant ce dernier ainsi : « Les négociants disposent d’entrepôts leur permettant d’offrir une large variété de produits sidérurgiques (plats, longs, tubes). Ils proposent ces produits sans autre transformation à des clients de petite et moyenne taille. Ils répondent ainsi à des commandes qui ne sont pas suffisamment importantes pour être honorées directement par les aciéries » (décision de la Commission du 4 février 1999, affaire M. 1329 Usinor/ Cockerill reprise par le ministre de l’économie dans sa lettre du 29 novembre 2006 relative à l’acquisition par Arcelor SA via PUM Service Acier du groupe Alliance Metal). Du point de vue géographique, la pratique constante est de considérer que les marchés du négoce sont de dimension nationale. 201. Les pratiques examinées concernent l’activité de négoce de produits sidérurgiques et portent sur tous les aciers au carbone, c’est-à-dire les produits plats (tôles, plaques,…) et

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les produits longs, c’est-à-dire les poutrelles mais également les laminés, tubes, produits bétons, PAF, étirés, etc. ainsi que sur les services annexes à la vente (coupe,…). Aucune raison ne conduit en l’espèce à remettre en cause les délimitations de marchés qu’opèrent les décisions précédemment citées. Il n’apparaît pas nécessaire de définir autant de marchés de produits que de produits sidérurgiques concernés. Les pratiques s’appliquent indifféremment à l’ensemble des produits sidérurgiques distribués par le négoce et impliquent des acteurs représentant une partie prépondérante du marché quel que soit le produit concerné. Le fonctionnement même de la concertation englobe la totalité de ces produits et l’analyse concurrentielle est identique quel que soit le marché pertinent défini. 202. En tout état de cause, la délimitation précise des marchés pertinents n’est pas essentielle en l’espèce. De manière générale s’agissant de pratiques d’ententes, « Il n’est (…) pas nécessaire de définir le marché avec précision, comme en matière d’abus de position dominante, dès lors que le secteur et les marchés ont été suffisamment identifiés pour permettre de qualifier les pratiques qui y ont été constatées et de les imputer aux opérateurs qui les ont mises en œuvre » (voir par exemple les décisions n° 05-D-27 du 15 juin 2005 et n° 07-D-41 du 28 novembre 2007). 203. Du point de vue géographique, l’organisation du marché et de la profession du négoce des produits sidérurgiques, l’origine des entreprises concernées et le fonctionnement même de la concertation confirment en l’espèce la jurisprudence traditionnelle selon laquelle les marchés de négoce sont des marchés nationaux. 204. Le marché pertinent dans la présente affaire est dès lors le marché français du négoce des produits aciers au carbone. 2. SUR LE GRIEF D’ENTENTE COMPLEXE ET CONTINUE a) Sur la notion de pratique complexe et continue 205. Le Tribunal de première instance des communautés européennes a récemment défini la notion de pratique complexe et continue dans son arrêt BASF du 12 décembre 2007 : « La qualification de certains agissements illicites constitutifs d’une seule et même infraction ou d’une pluralité d’infractions affecte, en principe, la sanction pouvant être imposée, dès lors que la constatation d’une pluralité d’infractions peut entraîner l’imposition de plusieurs amendes distinctes (…). La notion d’infraction unique peut se rapporter à la qualification juridique d’un comportement anticoncurrentiel consistant en accords, en pratiques concertées et en décisions d’associations d’entreprises (…). Il a été jugé qu’un cas de violation de l’article 81, paragraphe 1, CE pouvait résulter d’une série d’actes ou d’un comportement continu qui s’inscrivaient dans un « plan d’ensemble » en raison de leur objet identique faussant le jeu de la concurrence à l’intérieur du marché commun » (TPICE, 12 décembre 2007, BASF/UCB, Aff. jointes T-101/05 et T-111/05, points 158 à 161). Pour relever d’une telle pratique, les différents éléments de l’infraction doivent présenter un lien suffisant de complémentarité « en ce sens que chacun d’entre eux [est] destiné à faire face à une ou plusieurs conséquences du jeu normal de la concurrence, et [contribuent], par le biais d’une interaction, à la réalisation de l’ensemble des effets anticoncurrentiels voulus par leurs auteurs, dans le cadre d’un plan global visant un objectif unique » (point 179). 206. En l’espèce, les pratiques se rattachent toutes au même plan anti-concurrentiel adopté par les entreprises du négoce des produits sidérurgiques. L’objectif de ce plan était unique :

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faire échec à la compétition par les prix, en mettant en place des barèmes concertés et en se répartissant les marchés et les clients. 207. Si ce plan était mis en œuvre au niveau national et aux niveaux régionaux, les pratiques n’étaient pas pour autant distinctes : elles interagissaient entre elles. S’agissant des trois grands groupes de négoce (PUM/ Arcelor, KDI et Descours & Cabaud), les directions participaient au niveau national de la concertation et diffusaient des consignes au sein de leurs enseignes et filiales actives dans chacune des régions. De même, les représentants du FNA participaient à la fois à des réunions nationales et des réunions régionales. La plupart des autres entreprises en cause, dont Maisonneuve, Morel, Clisson Métal et Liametho, participaient aux réunions ayant lieu dans plusieurs régions ainsi qu’à une ou plusieurs des réunions nationales. 208. Les mécanismes de la concertation avaient précisément pour objet et pour effet d’assurer une cohérence des pratiques entre les niveaux national et régionaux. Comme l’illustre l’organisation de réunions nationales des présidents de régions, les conditions définies en commun au niveau national avaient des conséquences directes sur chacune des régions. Ces conditions concernaient des clients traités en pratique, au moins en partie, par des négociants régionaux et suivis dans le détail lors de réunions régionales. Le contenu même de ces réunions atteste de l’influence du niveau national. L’information sur les réunions et dispositifs nationaux était en effet l’un des premiers thèmes abordés lors des réunions régionales, de sorte que même des négociants purement locaux comme CODIP ou Ferren Fers avaient une connaissance de ce qui avait été concerté au niveau national. Les dispositifs définis dans les régions résultaient en outre soit d’une application directe, soit d’une transposition des décisions prises au niveau national. 209. Le dossier confirme enfin la concomitance des pratiques. Les éléments de preuve les plus anciens au dossier, qui datent d’août 1999, concernent ainsi à la fois des pratiques nationales et régionales, de sorte que sur toute la période des griefs notifiés, les deux niveaux de concertation étaient à la fois actifs et en relation l’un avec l’autre. 210. Il ressort de tous ces éléments que les concertations nationales et régionales relevaient du même objectif commun poursuivi par le même plan anticoncurrentiel. Le dossier caractérise dès lors l’existence d’une pratique complexe et continue, dont la qualification doit être appréciée globalement. b) Sur la participation des entreprises mises en cause à l’entente 211. Comme il a été indiqué au paragraphe 178, les entreprises PUM service Acier, Arcelor Profil, AMD Sud ouest d’une part, KDI d’autre part ont décidé de ne pas contester le grief qui leur a été notifié. Leur renonciation est claire et dépourvue d’ambiguïté : elles ne remettent en cause ni la matérialité des faits décrits dans la notification de griefs, ni leur qualification au regard du droit communautaire et national, ni leur imputabilité. Leurs arguments ne seront donc examinés qu’au stade de la discussion des éléments utiles à la détermination de la sanction. 212. Le syndicat FFDM, venant aux droits de la FNA, a lui aussi demandé le bénéfice du III de l’article L. 464-2 du code de commerce et signé le 25 avril 2008 un procès-verbal en ce sens. Dans ses observations déposées le 18 septembre 2008 en réponse au rapport, il a cependant invoqué la « nullité » de la notification de griefs au motif qu’elle aurait été adressée à tort à la « société France Négoce Acier ».

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213. Invité en séance à préciser s’il entendait maintenir ce moyen – qui n’est pas compatible avec le bénéfice de la procédure de non contestation des griefs –, le syndicat a indiqué qu’il l’abandonnait, ce qui a été explicitement confirmé par la note en délibéré produite le 29 octobre 2008 en réponse à la demande du président de séance. Il y a donc lieu de considérer que le syndicat FFDM ne conteste pas devoir, en tant que personne morale, répondre des faits décrits dans la notification de griefs, dont il n’a remis en cause ni la matérialité ni la qualification juridique. Les arguments ne seront donc abordés qu’au stade de l’examen de la sanction. 214. Enfin, la société Descours & Cabaud, qui a présenté une demande de clémence, ne contribue au débat que sur les aspects relatifs, eux aussi, à la sanction. 215. Le bien-fondé des griefs ne sera donc examiné qu’en tant qu’il est contesté par les entreprises Maisonneuve, Morel, Clisson Métal, Liametho, CODIP et Ferren Fers. 216. Avant de statuer sur la responsabilité encourue par les entreprises – citées au paragraphe précédent – auxquelles il est reproché d’avoir participé à l’entente faisant l’objet du grief notifié, il convient de rappeler les principes qui guident la qualification de telles ententes en droit communautaire et en droit national. Leur application est, en effet, discutée par les parties : différents arguments sont soulevés relativement à l’absence prétendue de preuves suffisantes de leur participation à la pratique complexe et continue reprochée ou à ce que leur participation à des réunions ou à certaines parties des accords et pratiques concernés ne permettrait pas pour autant de retenir leur participation à une pratique anticoncurrentielle. Sur le standard de preuve de la participation à une entente horizontale complexe et continue Sur le standard de preuve de l’adhésion à une entente complexe et continue 217. Le Tribunal de première instance des communautés européennes a indiqué dans l’arrêt Buchmann du 14 mai 1998 que « pour que la Commission puisse tenir chacune des entreprises visées par une décision comme celle de l’espèce comme responsable, pendant une période déterminée, d’une entente globale, il lui faut établir que chacune d’elles, soit a consenti à l’adoption d’un plan global recouvrant les éléments constitutifs de l’entente, soit a participé directement, pendant cette période à tous ces éléments. Une entreprise peut également être tenue pour responsable d’une entente globale même s’il est établi qu’elle n’a participé directement qu’à un ou plusieurs des éléments constitutifs de cette entente dès lors qu’elle savait, ou devait nécessairement savoir, d’une part, que la collusion à laquelle elle participait s’inscrivait dans un plan global et, d’autre part, que ce plan global recouvrait l’ensemble des éléments constitutifs de l’entente » (TPICE, 14 mai 1998, Buchmann, affaire T-295/94, point 121). 218. La Cour de justice des communautés européennes a précisé dans l’arrêt Anic du 8 juillet 1999 que ce type d’infraction résulte « nécessairement du concours de plusieurs entreprises, (…) mais dont la participation peut revêtir des formes différentes, en fonction notamment des caractéristiques du marché, des buts poursuivis et des modalités d’exécution choisies ou envisagées » et que ces différences ne suffisent pas à exonérer l’entreprise participante de sa responsabilité, y compris « pour les comportements qui sont matériellement mis en œuvre par d’autres entreprises participantes, mais qui partagent le même objet ou le même effet anticoncurrentiel (…) lorsqu’il est établi que l’entreprise en question connaissait les comportements infractionnels des autres participants ou qu’elle

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pouvait raisonnablement les prévoir et qu’elle était prête à en accepter le risque » (CJCE, 8 juillet 1999, Anic, affaire C-49/92 P, points 79 à 83). 219. Dans l’arrêt BASF précité au paragraphe 205, le tribunal est revenu sur les conditions d’appréciation de la responsabilité des entreprises à une telle pratique : « La notion d’infraction unique peut également se rapporter au caractère personnel de la responsabilité pour les infractions aux règles de concurrence. En effet, une entreprise ayant participé à une infraction par des comportements qui lui étaient propres, qui relevaient des notions d’accord ou de pratique concertée tombant sous le coup de l’article 81, paragraphe 1, CE et qui visaient à contribuer à la réalisation de l’infraction dans son ensemble, peut être également responsable, pour toute la période de sa participation à ladite infraction, des comportements mis en œuvre par d’autres entreprises dans le cadre de la même infraction. Tel est le cas lorsqu’il est établi que l’entreprise en question connaissait les comportements infractionnels des autres participants ou qu’elle pouvait raisonnablement les prévoir et qu’elle était prête à en accepter le risque. Cette conclusion trouve son origine dans une conception largement répandue dans les ordres juridiques des États membres quant à l’imputation de la responsabilité pour des infractions commises par plusieurs auteurs en fonction de leur participation à l’infraction dans son ensemble. Elle n’est donc pas contraire au principe selon lequel la responsabilité pour de telles infractions a un caractère personnel, ne néglige pas l’analyse individuelle des preuves à charge et ne viole pas les droits de la défense des entreprises impliquées (arrêts Commission/Anic Partecipazioni, point 150 supra, points 83, 84 et 203, et HFB e.a./Commission, point 150 supra, point 231) (…) » (point 160).

220. Il en ressort qu’une entreprise peut, sans que ne soit violé le principe de la responsabilité personnelle, être tenue responsable d’une pratique complexe et continue même si elle n’a pas directement pris part à l’intégralité de ses éléments constitutifs, dès lors qu’il est démontré qu’elle connaissait ou pouvait raisonnablement prévoir que la concertation à laquelle elle participait relevait d’un système global partageant le même objet anticoncurrentiel et recouvrant l’ensemble des comportements infractionnels.

Sur le standard de preuve de l’accord de volonté à une entente horizontale en droit communautaire 221. Le juge communautaire a défini la pratique concertée comme celle qui vise « une forme de coordination entre entreprises qui, sans avoir été poussée jusqu’à la réalisation d’une convention proprement dite, substitue sciemment une coopération pratique entre elles aux risques de la concurrence (arrêt du 14 juillet 1972, ICI/Commission, précité, point 64). Les critères de coordination et de coopération retenus par la jurisprudence de la Cour, loin d’exiger l’élaboration d’un véritable «plan», doivent être compris à la lumière de la conception inhérente aux dispositions du Traité relatives à la concurrence et selon laquelle tout opérateur économique doit déterminer de manière autonome la politique qu’il entend suivre sur le marché commun. S’il est exact que cette exigence d’autonomie n’exclut pas le droit des opérateurs économiques de s’adapter intelligemment au comportement constaté ou à escompter de leurs concurrents, elle s’oppose cependant rigoureusement à toute prise de contact, directe ou indirecte entre de tels opérateurs, ayant pour objet ou pour effet soit d’influencer le comportement sur le marché d’un concurrent actuel ou potentiel soit de dévoiler à un tel concurrent le comportement que l’on est décidé à, ou que l’on envisage de, tenir soi-même sur le marché » (CJCE, 16 décembre 1975, Suiker Unie UA aff. jointes 114-73, TPICE, LVM c/ Commission 29 avril 1999). En conséquence, la qualification de pratique concertée n’est pas limitée aux seuls comportements sur le marché mais peut aussi

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s’appliquer à une forme de coordination et à des prises de contacts entre les entreprises, supposant en cela un accord de volonté pour mener ensemble une telle concertation. 222. Dans l’arrêt Anic précité au paragraphe 218, la Cour de justice des communautés européennes en déduit que : « comme cela résulte des termes mêmes de l’article 85 [devenu l’article 81], paragraphe 1, du Traité la notion de pratique concertée implique, outre la concertation entre les entreprises, un comportement sur le marché faisant suite à cette concertation et un lien de cause à effet entre ces deux éléments. (…) Or, d’une part, il y a lieu de présumer, sous réserve de la preuve contraire qu’il incombe aux opérateurs intéressés de rapporter, que les entreprises participant à la concertation et qui demeurent actives sur le marché tiennent compte des informations échangées avec leurs concurrents pour déterminer leur comportement sur ce marché. Il en sera d’autant plus ainsi lorsque la concertation a lieu sur une base régulière au cours d’une longue période (…) D’autre part, une pratique concertée telle que définie ci-dessus relève de l’article 85, paragraphe 1, du traité, même en l’absence d’effets anticoncurrentiels sur le marché. D’abord, il découle du texte même de ladite disposition que, comme dans le cas des accords entre entreprises et des décisions d’associations d’entreprises, les pratiques concertées sont interdites, indépendamment de tout effet, lorsqu’elles ont un objet anticoncurrentiel. Ensuite, si la notion même de pratique concertée présuppose un comportement des entreprises participantes sur le marché, elle n’implique pas nécessairement que ce comportement produise l’effet concret de restreindre, d’empêcher ou de fausser la concurrence ». 223. La Cour de justice a poursuivi cette analyse dans l’arrêt Sarrio du 16 novembre 2000 (aff. C-291/98), en précisant les éléments de nature à renverser la présomption de l’accord de volonté : « le fait qu’une entreprise ne donne pas suite aux résultats des réunions n’est pas de nature à écarter sa responsabilité du fait de sa participation à l’entente à moins qu’elle ne se soit distanciée publiquement de son contenu». La Cour a confirmé sa position dans un arrêt du 28 juin 2005, (Dansk Industrie c/Commission (C-189/02 P et autres)) : « Aux fins de l’application de l’article 85, paragraphe 1, du Traité (devenu article 81, paragraphe 1, CE), il suffit qu’un accord ait pour objet de restreindre, d’empêcher ou de fausser le jeu de la concurrence, indépendamment de ses effets concrets. En conséquence, dans le cas d’accords se manifestant lors de réunions d’entreprises concurrentes, une infraction à cette disposition est constituée lorsque ces réunions ont un tel objet et visent, ainsi, à organiser artificiellement le fonctionnement du marché. Dans un tel cas, la responsabilité d’une entreprise déterminée du chef de l’infraction est valablement retenue lorsqu’elle a participé à ces réunions en ayant connaissance de leur objet, même si elle n’a pas, ensuite, mis en œuvre l’une ou l’autre des mesures convenues lors de celles-ci. La circonstance d’une participation à l’entente d’entreprises dominantes ou particulièrement puissantes, susceptibles de prendre des mesures de rétorsion envers d’autres participants, nettement moins puissants, au cas où ceux-ci se distancieraient publiquement du contenu des réunions dont l’objet est anticoncurrentiel, l’assiduité plus ou moins grande de l’entreprise auxdites réunions ainsi que la mise en œuvre plus ou moins complète des mesures convenues ont des conséquences non pas sur l’existence de sa responsabilité, mais sur l’étendue de celle-ci et donc sur le niveau de la sanction (voir, arrêt du 15 octobre 2002, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, C-238/99 P, C-244/99 P, C-245/99 P, C-247/99 P, C-250/99 P à C-252/99 P et C-254/99 P, Rec. p. I-8375, points 508 à 510).

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Il en découle que la circonstance (…) que [l’entreprise mise en cause] n’a pas mis en œuvre et ne pouvait d’ailleurs pas mettre en œuvre la mesure de boycottage convenue lors de la réunion du 24 mars 1995 n’est pas de nature à écarter sa responsabilité du fait de sa participation à cette mesure, à moins qu’elle ne se soit distanciée publiquement de son contenu, ce que ladite [entreprise] n’a pas allégué ». 224. C’est ce même raisonnement qu’a rappelé la Cour de justice dans une affaire plus récente : « Dès lors qu’il a été établi qu’une entreprise a participé à des réunions entre entreprises à caractère manifestement anticoncurrentiel il incombe à cette entreprise d’avancer des indices de nature à établir que sa participation auxdites réunions était dépourvue de tout esprit anticoncurrentiel en démontrant qu’elle a indiqué à ses concurrents qu’elle y participait dans une optique différente de la leur. En l’absence d’une telle preuve de distanciation le fait que cette entreprise ne se conforme pas aux résultats de ces réunions n’est pas de nature à la priver de sa pleine responsabilité du fait de sa participation à l’entente » (voir en ce sens, CJCE affaires jointes C-403/04 P C-405/04 P du 25 janvier 2007 Sumitomo Métal Industries Ltd et Nippon Steel Corp.). 225. En droit communautaire, l’accord de volonté d’une entreprise est par suite démontré par sa participation à une ou plusieurs réunions ayant un objet anticoncurrentiel, à moins qu’elle ne s’en soit distanciée publiquement, sans qu’il soit besoin de constater la mise en œuvre effective des décisions prises. L’absence de mise en œuvre est un élément à prendre en compte, non pas pour qualifier l’infraction mais pour établir le montant de la sanction. Sur le standard de preuve de l’accord de volonté à une entente horizontale en droit national 226. Comme l’a rappelé le Conseil de la concurrence dans ses décisions n° 06-D-03 du 9 mars 2006 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des appareils de chauffage, sanitaires, plomberie, climatisation (paragraphes 683 et suivants) et n° 07-D-48 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur du déménagement national et international (paragraphes 178 et suivants), la pratique décisionnelle de l’autorité nationale de concurrence distingue deux situations :

- celle dans laquelle la concertation anticoncurrentielle se déroule au cours de réunions tenues dans le cadre statutaire d’une organisation professionnelle ;

- celle dans laquelle l’entente est mise au point au cours de réunions informelles, de nature le plus souvent occulte ou secrète, auxquelles participent de leur propre initiative les entreprises concurrentes. 227. Dans le premier cas, le standard de preuve est plus exigeant. Le seul fait d’avoir participé à une réunion tenue dans le cadre statutaire d’une organisation professionnelle – assemblée générale ordinaire d’une fédération départementale professionnelle dans le cas de la boulangerie (voir la décision n° 04-D-07 du 11 mars 2004 relative à des pratiques relevées dans le secteur de la boulangerie dans le département de la Marne), assises nationales, conseil d’administration, commission économique ou bureau d’une fédération nationale dans le cas du négoce d’appareils sanitaires ou de chauffage (voir la décision n° 06-D-03 déjà citée) – dont l’ordre du jour aurait dans les faits évolué vers un objet anticoncurrentiel
- ne suffit pas à caractériser l’adhésion des entreprises à l’entente. En effet, dans un tel cas, l’entreprise régulièrement convoquée n’est pas en mesure de connaître l’objet anticoncurrentiel de cette réunion. Dans ce contexte, le Conseil a considéré, dans ces deux affaires, que le concours de volonté était démontré lorsque l’entreprise, ayant participé ou non à cette réunion, a adhéré à l’entente par la preuve de son accord à l’entente de prix, la diffusion des consignes arrêtées lors de cette réunion ou par l’application des mesures

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concrètes décidées par cette réunion ou encore lorsque l’entreprise a participé à une réunion ultérieure ayant le même objet anticoncurrentiel. 228. Dans le deuxième cas, le standard de preuve est le même que celui rappelé aux paragraphes 221 à 224. Comme le rappelle le juge communautaire dans l’arrêt Suiker Unie UA déjà cité, une entreprise doit s’abstenir rigoureusement de participer à des prises de contact, directes ou indirectes, avec ses concurrents en vue d’échanger sur les politiques commerciales et notamment les prix des biens ou des services qu’elle offre sur le marché. Ce type de réunion informelle, généralement secrète et d’ailleurs abritée derrière des noms de code (« le Club », la « réunion des confrères ») qui tente de dissimuler le véritable objet pour lequel sont conviés dirigeants ou responsables commerciaux d’entreprises concurrentes à l’initiative de l’une d’entre elles, n’appelle qu’une réponse de la part des entreprises : refuser d’y participer ou, si la bonne foi du participant est surprise, se distancier sans délai et publiquement du mécanisme anticoncurrentiel dont la réunion est le support. La participation à une seule de ces réunions – même si elle est passive – suffit en effet à conforter le mécanisme de l’entente : d’une part, elle renseigne sur le comportement commercial que les autres acteurs ont décidé d’adopter sur le marché, alors que l’autonomie qu’exige la concurrence entre entreprises suppose que ces dernières restent dans l’incertitude sur la stratégie de leurs compétiteurs, d’autre part elle permet aux participants plus actifs d’escompter que l’absence d’opposition de l’entreprise ne viendra pas perturber le jeu collusif. Sur le standard de preuve applicable à la présente affaire 229. L’affaire soumise au Conseil s’inscrit dans la seconde des deux hypothèses présentées au paragraphe 226. En effet, bien qu’elles aient pour certaines pris place sous couvert d’une organisation syndicale, France Négoce Aciers, les réunions concernées ne peuvent être considérées comme des « réunions tenues dans le cadre statutaire d’une organisation professionnelle » et « dont l’ordre du jour aurait dans les faits évolué vers un objet anticoncurrentiel », comme le requiert la première hypothèse. 230. A l’exception du bureau, aucune des réunions en cause, tant nationales (« Club poutrelles », « commissions produits plats », « réunion des présidents de régions », « déjeuners des directeurs commerciaux », « dîners des présidents »,…) que régionales (réunions locales, commissions poutrelles régionales,…) n’est prévue dans les statuts du syndicat ou ne relevait de l’activité syndicale de France Négoce Aciers. 231. Le syndicat a en réalité servi de lieu de rencontre ainsi que de support logistique à la concertation, dans laquelle ses représentants ont joué un rôle actif. Il a été utilisé afin de dissimuler sous une apparente licéité le véritable objet pour lequel étaient conviés, en toute connaissance de cause, les dirigeants ou responsables commerciaux d’entreprises concurrentes. 232. Au surplus, on relèvera que les pratiques examinées ne se limitent pas à des réunions ayant eu lieu sous couvert ou avec la participation du syndicat mais incluent également des échanges et des contacts entre concurrents qui se sont déroulés à l’extérieur de ce dernier. 233. Plusieurs des entreprises mises en cause contestent l’objet anticoncurrentiel tant des diverses réunions auxquelles elles ont pu assister que du cadre général dans lequel elles y ont pris part. Elles soutiennent également qu’elles n’ont pas adhéré à l’entente, faute d’avoir uni leur volonté à celle des autres participants pour se joindre au plan anticoncurrentiel général. Il convient de répondre à ces deux types d’arguments.

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Sur l’objet anticoncurrentiel des pratiques 234. La société Morel conteste l’objet anticoncurrentiel des réunions nationales organisées par le FNA, et notamment des commissions produits nationales. De même, les sociétés Clisson Métal et Liametho soutiennent qu’il n’est pas établi que les réunions auxquelles elles ont participé aient eu un tel objet. Elles font enfin valoir que des échanges d’informations entre concurrents ne sont pas nécessairement prohibés par le droit de la concurrence. Sur l’objet anticoncurrentiel des réunions nationales et régionales 235. Le dossier décrit aux paragraphes 45 à 176 réunit un faisceau d’indices graves, précis et concordants démontrant l’objet des commissions produits (§ 57 et suivants), des autres réunions nationales (§ 95 et suivants), des commissions poutrelles régionales (§ 124 et suivants) et des diverses réunions régionales (§ 134 et suivants). Le faisceau d’indices est composé de déclarations des différents participants à la concertation, membres de sociétés de négoce nationales, régionales ou du syndicat professionnel, d’éléments matériels de preuves issus du fonctionnement du dispositif (courriers électroniques, tableaux,…) et d’un très grand nombres de comptes rendus manuscrits ou dactylographiés des réunions nationales ou régionales. Au dossier figurent ainsi entre 150 et 200 comptes rendus couvrant un peu plus de 100 réunions, principalement régionales. Certains de ces comptes rendus font précisément et explicitement état de la présence des sociétés Morel, Clisson Métal ou Liametho, point sur lequel il sera revenu au stade de l’analyse de la participation individuelle de ces sociétés aux pratiques. 236. Les réunions, tant nationales que régionales, ont permis aux entreprises de négoce concurrentes de nouer une concertation portant systématiquement sur les prix (tarifs et remises) et leur fixation en commun ainsi que sur les clients, leur potentiel et leur classement. Ces réunions portaient également, selon les cas, sur les parts de marché, sur les offres faites à l’occasion des consultations récentes ou en cours, sur la répartition de ces dernières ou sur leur issue, sur le suivi des dispositifs et/ou sur les compensations, sanctions ou mesures coercitives à mettre en place. 237. La collusion permanente entre les acteurs avait pour objectif, tout d’abord, de maîtriser le plus possible les prix et leur évolution, par la fixation concertée du niveau général des barèmes, la détermination de conditions tarifaires à appliquer à des clients ou des catégories de clients, par le classement des clients et par une concertation sur le détail des offres. Elle visait aussi à répartir le marché, par un contrôle global des parts de marché sur les clients les plus importants et un contrôle du détail des consultations et de leur attribution. Elle cherchait enfin à exclure les concurrents extérieurs à la concertation (français ou étrangers), afin de pouvoir conserver la maîtrise des parts de marché et du niveau des prix. 238. Il résulte ainsi du rapprochement des indices au dossier que l’objet même des réunions nationales et régionales, qui s’inscrivait dans le plan d’ensemble décrit plus haut, était de mettre en place sur le marché français du négoce de produits sidérurgiques un mode d’organisation substituant au libre jeu de la concurrence et à ses risques une coopération pratique entre opérateurs. Cet objet commun contrevient aux dispositions de l’article L. 420-1 du code de commerce et à celles de l’article 81 § 1 du Traité. Sur l’objet anticoncurrentiel des échanges d’informations 239. Les arrêts « carburant sur autoroutes » (arrêt de la cour d’appel de Paris du 31 mars 2003) et « téléphonie mobile » (arrêt de la Cour de cassation du 29 juin 2007) auxquels renvoient les sociétés Morel, CODIP et Ferren Fers dans leurs écritures sont relatifs à des échanges

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d’informations examinés de manière autonome au titre des règles de concurrence. Or, tel n’est pas le cas lorsque, comme en l’espèce, l’échange d’informations trouve sa place dans une pratique complexe plus large de fixation de tarifs, de répartition de clientèle et de parts de marché : il constitue alors un mécanisme facilitant l’application de l’entente anticoncurrentielle et le contrôle de son respect. Dans un tel cas, l’échange d’informations ne peut faire l’objet d’une qualification distincte de celle retenue pour l’entente dont il est le support. 240. Comme les réunions, les échanges constatés au dossier contreviennent au principe d’autonomie dont les entreprises doivent faire preuve lorsqu’elles sont en concurrence sur un marché, tel qu’il est rappelé au paragraphe 221, et à l’interdiction qui en découle de participer à des prises de contact, directes ou indirectes, avec ses concurrents en vue d’échanger sur les politiques commerciales et notamment sur les prix des biens ou des services offerts sur le marché. 241. L’objet anticoncurrentiel de la concertation née des réunions et échanges d’informations peut d’autant moins être contesté par les parties à l’entente que ces dernières étaient conscientes du caractère anticoncurrentiel des pratiques auxquelles elles se livraient. En témoignent différents documents saisis, tels qu’un projet d’organisation mentionnant « En complément à ce dispositif, il semble indispensable de rappeler les grandes lignes d’un comportement commercial. -Ne jamais prononcer les mots « ACCORD, ENTENTE ». -Ne jamais divulguer des informations sur nos réunions. -Éviter de donner en lecture nos barèmes aux clients. -Éviter de parler des confrères. -Utiliser les arguments de la Direction pour justifier des prix identiques », les notes d’une réunion régionale précisant « contrôles des prix prévisibles », « détruire tous les documents », « détruire les listes de classement !! » et « Menace en 4e, 9e » ou les éléments indiquant que des négociants procédaient sciemment et régulièrement à la destruction des documents (cotes 16770 à 16775, 18771, 18772, 19632, 19633, 6352 et 6269). Les négociants ont également mis en place une série de mesures pour dissimuler à l’égard des clients l’existence de la concertation en vigueur sur le marché. Des systèmes de tours (§ 121 et suivants), aboutissant à la présentation d’offres de couverture, étaient ainsi mis en place lorsque des clients commençaient à se plaindre de propositions de prix trop proches. (cotes 15341 et par exemple, cotes 15067, 15262, 15341, 15751, 18671, 18922, 16783, 16784, 16760, 4189, 4190, 21997, 22013, 22362 à 22368 et 22802 à 22804). Des barèmes internes aux groupes étaient de même édités, pour rendre l’identification de la concertation plus difficile (cotes 20665 et 21926 à 21939). Sur les arguments communs à plusieurs entreprises contestant les griefs Sur la participation prétendument partielle, passive ou forcée 242. Les sociétés Morel, CODIP, Ferren Fers, Liametho et Clisson Métal relèvent que leur importance sur le marché est modeste par rapport aux trois grands groupes de négoce qui dirigeaient la concertation et qu’elles n’ont participé qu’à un faible nombre des éléments constitutifs de l’infraction complexe, et notamment pas aux plus déterminants, ce qui démentirait une adhésion à la concertation. Clisson Métal et Liametho ajoutent, dans le même sens, que des faits ne leur sont pas reprochés durant l’intégralité de la durée de la pratique notifiée et que le pouvoir de décision dans les régions était limité voire inexistant (premier point). 243. Les sociétés Morel, CODIP, Ferren Fers Clisson Métal, Liametho et Maisonneuve avancent que leur participation était uniquement « passive » et « forcée », étant donné leur

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manque d’intérêt pour le dispositif et le rôle des groupes dans sa mise en œuvre (deuxième point). 244. Les mêmes sociétés prétendent que cette participation n’était qu’apparente, pour ne pas subir de mesures de rétorsion de la part des entreprises plus puissantes (troisième point). 245. Mais, de manière générale et ainsi que décrit au paragraphe 223, la responsabilité issue de la participation à tout ou partie des composantes d’une infraction complexe ne peut être écartée en l’absence d’une distanciation publique, c’est-à-dire la démonstration par une entreprise qu’elle a explicitement indiqué à ses concurrents qu’elle participait à ces réunions dans une optique différente de la leur et qu’elle entendait avoir un comportement sur le marché indépendant du contenu des réunions, une telle distanciation devant être claire. Le Tribunal de première instance des communautés européennes a ainsi indiqué dans l’arrêt Adriatica di Navigazione du 11 décembre 2003 que « la doctrine de la distanciation publique relève d’un principe jurisprudentiel selon lequel lorsqu’une entreprise a participé à des réunions ayant un contenu illégal, son exonération de responsabilité ne peut découler que de la preuve qu’elle s’était distanciée formellement du contenu de ces réunions (arrêt du Tribunal du 6 avril 1995, Tréfileurope/Commission, T- 141/89, Rec. p. II-791; arrêts Sarrió/Commission, et PVC II, précités), distanciation qu’il incombe à l’entreprise en cause d’établir en apportant la preuve que sa participation aux réunions était dépourvue de toute finalité anticoncurrentielle et en démontrant qu’elle avait indiqué à ses concurrents qu’elle participait à ces réunions dans une optique différente de la leur (arrêt du Tribunal du 10 mars 1992, Chemie Linz/Commission, T- 15/89, Rec. p. II-1275, point 135). Il s’ensuit que la notion de distanciation publique en tant qu’élément d’exonération de la responsabilité doit être interprétée de manière restrictive » (TPICE, 11 décembre 2003, Adriatica di Navigazione, affaire T-61/99, point 138). 246. Sur le premier point, le Conseil de la concurrence a rappelé dans sa décision n° 06-D-03 du 9 mars 2006 (§ 688) que le fait de ne pas avoir participé à l’intégralité des éléments constitutifs d’une infraction complexe, ne pas avoir été assidu aux réunions ou ne pas avoir mis en œuvre les dispositions concertées n’excluait pas l’identité d’objet des pratiques et n’empêchait pas une entreprise de se voir poursuivie lorsqu’un accord de volonté est caractérisé. Le Tribunal de première instance des communautés européennes a indiqué dans l’arrêt BASF précité au paragraphe 205 que « la Commission est en droit d’imputer la responsabilité de ces actions en fonction de la participation à l’infraction considérée dans son ensemble (arrêt Aalborg Portland e.a./Commission, point 66 supra, point 258), même s’il est établi que l’entreprise concernée n’a participé directement qu’à un ou à plusieurs des éléments constitutifs de l’infraction (arrêt PVC II, point 159 supra, point 773). De même, le fait que différentes entreprises aient joué des rôles différents dans la poursuite d’un objectif commun n’élimine pas l’identité d’objet anticoncurrentiel et, partant, d’infraction, à condition que chaque entreprise ait contribué, à son propre niveau, à la poursuite de l’objectif commun (arrêts Ciment, point 157 supra, point 4123, et JFE Engineering e.a./Commission, point 139 supra, point 370) » (point 161). 247. La participation partielle aux différentes composantes de l’infraction reprochée dans le grief notifié, de même que la faiblesse des parts de marché détenues par les entreprises en cause, n’élimine donc en rien l’objet anticoncurrentiel des pratiques qui leur sont imputées. Ces éléments influent seulement sur les déterminants de la sanction. Le degré d’implication d’une entreprise dans l’infraction, ainsi que la durée de sa participation, modulent sa responsabilité individuelle, qui sera appréciée pour fixer la sanction.

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248. Sur le deuxième point, la jurisprudence considère que « l’approbation tacite d’une initiative illicite, sans se distancier publiquement de son contenu ou la dénoncer aux entités administratives, a pour effet d’encourager la continuation de l’infraction et compromet sa découverte. Cette complicité constitue un mode passif de participation à l’infraction qui est donc de nature à engager la responsabilité de l’entreprise » (TPICE du 5 décembre 2006, Westfalen Gassen Nederland BV, affaire T-303/02, point 124). Une participation aux réunions renforce en effet l’équilibre en place à hauteur de l’importance de chacune des entreprises, fussent-elles de taille réduite, par rapport à une situation dans laquelle elles n’auraient pas participé à la concertation. De plus, « le seul fait d’avoir reçu lors de ces réunions des informations concernant des concurrents, informations qu’un opérateur indépendant préserve comme secrets d’affaires, suffit à manifester l’existence chez elle d’un esprit anticoncurrentiel (…). Indépendamment de toute autre raison pour participer à ces réunions, il en existait au moins une qui était d’éliminer par avance l’incertitude relative au comportement futur des concurrents. En outre, grâce à la seule participation auxdites réunions, chaque participant a nécessairement pris en compte, directement ou indirectement, les informations obtenues au cours de ces réunions pour déterminer la politique qu’il entendait suivre sur le marché » (TPICE, 12 juillet 2001, Tate & Lyle, affaire T-202/98, points 66 et 67). La prétendue passivité des négociants indépendants aux réunions n’a donc en tout état de cause pas d’incidence sur la qualification des pratiques. 249. Enfin, sur le troisième point, la Cour de justice des communautés européennes a relevé dans l’arrêt Dansk Industries du 28 juin 2005 précité au paragraphe 223 que « la circonstance d’une participation à l’entente d’entreprises dominantes ou particulièrement puissantes, susceptibles de prendre des mesures de rétorsion envers d’autres participants, nettement moins puissants, au cas où ceux-ci se distancieraient publiquement du contenu des réunions dont l’objet est anticoncurrentiel (…) ont des conséquences non pas sur l’existence de sa responsabilité, mais sur l’étendue de celle-ci et donc sur le niveau de la sanction ». L’existence de pressions a pour éventuelle conséquence d’aggraver la sanction de ceux qui les mettent en œuvre, et, sous certaines conditions, d’atténuer celle des autres, mais n’a pas d’incidence sur la qualification des pratiques. Au surplus, aucune des sociétés soulevant ce moyen n’apporte de preuve de l’existence de pressions qui auraient été exercées à son encontre et qui auraient revêtu un caractère irrésistible, seule circonstance pouvant l’exonérer de sa responsabilité. Tout au contraire, les diverses mesures de rétorsion auxquelles font allusion les parties étaient discutées et décidées dans les réunions de concertation auxquelles toutes les sociétés en cause ont pris part. Des contrôles approfondis du respect du dispositif étaient en outre effectués par des négociants indépendants, comme en témoignent les nombreux documents attestant du suivi du respect du dispositif saisis dans les locaux de la société Maisonneuve (§ 111). Cette dernière a par ailleurs déclaré avoir « claqué la porte du syndicat lorsque les dysfonctionnements étaient trop importants ». Interrogé en séance sur le sens de cette déclaration, le représentant de la société Maisonneuve a indiqué qu’il reprochait à l’entente de ne pas fonctionner de manière suffisamment solidaire. 250. Il résulte de tout ce qui précède que les arguments généraux invoqués, à tort, par les entreprises mises en cause pour minorer leur contribution à l’entente n’ont pas d’incidence sur la caractérisation de leur participation à la pratique anticoncurrentielle.

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Sur l’absence prétendue d’adhésion à la mise en œuvre de l’entente 251. Les sociétés Morel, CODIP, Ferren Fers, Liametho et SA Clisson Métal prétendent qu’elles n’appliquaient pas les barèmes et conditions concertées, ces dernières ne correspondant ni à leur activité ni à leurs intérêts, et qu’elles conservaient une politique commerciale propre et autonome. Les sociétés Morel et CODIP avancent de plus qu’elles transmettaient des prix ou des données volontairement erronées, signifiant ainsi leur distanciation publique des pratiques. Les sociétés Clisson Métal et Liametho soulignent enfin que les indicateurs d’activité différaient d’un négociant à l’autre. 252. Mais, tout d’abord, ainsi que l’a rappelé la Cour de justice dans l’arrêt Sarrio du 16 novembre 2000 précité au paragraphe 223, « le fait qu’une entreprise ne se plie pas aux résultats ayant un objet manifestement anticoncurrentiel n’est pas de nature à la priver de sa pleine responsabilité du fait de sa participation à l’entente, dès lors qu’elle ne s’est pas distanciée publiquement du contenu des réunions » (point 118). 253. De plus, le fait pour des entreprises de se concerter pour la définition de barèmes et autres conditions tarifaires ne signifie pas nécessairement que tous les prix proposés sur le marché s’alignent exactement sur les conditions fixées, ni encore moins que leurs indicateurs financiers convergent autour de valeurs identiques. Ceci est d’autant plus vrai quand la pratique a également pour objet, comme en l’espèce, d’identifier les dysfonctionnements éventuels et intègre des mécanismes permettant de les compenser ou de les sanctionner de manière concertée. 254. Dans un tel contexte, les « soupçons » que Morel prétend avoir suscités n’étaient pas le propre des grands groupes à son égard ou à l’égard des indépendants. Les parties en cause ont en effet quasiment toutes relevé des comptes rendus ou déclarations mentionnant une « infraction » au dispositif de leur part ou les désignant comme des « perturbateurs ». Mais, sur ce point, ainsi que l’a affirmé la Commission européenne dans une décision du 17 décembre 2002, les rivalités entre entreprises n’empêchent pas la caractérisation d’une pratique prohibée par l’article 81 § 1 du Traité : « Même si l’entente est une entreprise menée en commun, chaque participant peut y jouer un rôle qui lui est propre. Un ou plusieurs d’entre eux peuvent exercer le rôle dominant de « meneur » ou de « chef de file ». Il peut y avoir des conflits et des rivalités internes. Certains membres peuvent même aller jusqu’à tricher. Cependant, aucun de ces éléments n’empêche cet arrangement de constituer un accord/une pratique concertée aux fins de l’article 81, paragraphe 1, du traité, lorsque les parties s’entendent en vue d’un objectif unique, commun et permanent ». 255. A cet égard d’ailleurs, les arguments de Morel et CODIP tirés de ce que ces entreprises auraient communiqué des informations inexactes, à les supposer vérifiés, loin de révéler une distanciation publique de l’entente, montrent bien la conscience que ces opérateurs avaient de la situation et leur volonté d’en tirer un avantage maximum. Le Tribunal a, dans l’arrêt Adriatica di Navigazione précité au paragraphe 245, retenu le raisonnement suivant sur une telle question : « la volonté de la requérante de ne pas respecter l’entente, exprimée dans le document interne, n’ayant pas été extériorisée, il est permis de considérer qu’une telle attitude constituait une tentative pour tromper les autres membres de l’entente dans l’attente que celle-ci soit respectée, ce qui, comme le souligne la Commission, confirmerait la participation, même infidèle, de l’entreprise à l’entente elle- même » (point 137). 256. Il résulte de tout ce qui précède que les arguments tirés de la supposée inapplication des conditions concertées n’ont pas d’incidence sur la caractérisation de la participation à la pratique anticoncurrentielle.

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Sur la participation de Morel et sa durée 257. La société Morel, qui ne peut tirer prétexte de la circonstance qu’elle n’a pas fait l’objet de visites et saisies pour contester la valeur probante des pièces réunies lors de l’enquête, remet en cause à la fois le principe de sa participation et sa durée. 258. Sur le premier point, les pièces au dossier, de différentes natures et origines, et notamment des listes de membres des commissions, des comptes-rendus de réunions, des invitations à des réunions, des courriers de transmission d’informations ou de calendriers, des listes de présents, des cahiers d’appels téléphoniques, des tableaux de synthèse et de suivi de la concertation sur tout le territoire national mentionnant Morel sur plusieurs régions, des courriers électroniques, des déclarations de Descours & Cabaud (pendant l’enquête administrative et dans le cadre de la procédure de clémence), ainsi même que les déclarations de Morel dans ses observations sont autant d’indices qui, pris ensemble, établissent qu’elle a effectivement participé à la pratique anticoncurrentielle examinée, tant au niveau national qu’au niveau de certaines régions. Elle était ainsi membre des commissions produits longs et produits plats (§ 49 et 54), dont les éléments au dossier montrent qu’elles avaient un objet anticoncurrentiel (§ 235 à 241), a participé à un certain nombre de ces commissions nationales (§ 50 et 51) ou à d’autres réunions régionales ayant trait à l’entente mise en place (§ 133 et par exemple fichier « _dc436.doc »), et notamment à des commissions poutrelles régionales (§124 et 126). Elle a eu des contacts téléphoniques avec KDI (§ 105), a occupé un rôle de pilote (§ 113) en la personne de M. 35… (par exemple cote 13926), M. 36… (par exemple cote 22763) ou M. 37… (par exemple cote 19981), s’est fait communiquer des barèmes, conditions et dispositifs tarifaires par des concurrents ou par le syndicat (§ 108), a participé à l’activité de la commission poutrelles et notamment au système de répartition nationale des parts de marché sur les poutrelles et a elle-même transmis dans ce cadre un certain nombre d’informations stratégiques à ses concurrents sur ses ventes et son chiffre d’affaires (§71, 79 à 82, 84 et 85 et pour des classements de clients cote 22894). 259. Sur le second point, la société Morel s’appuie tout d’abord sur un procès verbal de M. H… (Descours & Cabaud SA) pour soutenir que les pratiques décrites par le demandeur de clémence n’auraient débuté qu’en avril 2001. Mais le grief notifié se fonde sur l’ensemble des pièces au dossier et non uniquement sur les déclarations du demandeur de clémence. Au surplus, la société Descours & Cabaud SA a elle-même précisé qu’elle ne datait pas l’entente de 2001 mais que son point de départ était antérieur. 260. Un élément matériel au dossier date de 1997 : il s’agit de la note de frais d’un déjeuner entre directeurs commerciaux de négociants concurrents. A partir d’août 1999, un faisceau d’indices atteste de la réalité de rencontres entre concurrents et d’échanges sur des conditions commerciales et sur la clientèle (notamment un courrier du 27 août 1999 sur l’organisation d’un club poutrelles, un déjeuner des directeurs commerciaux du 26 août 1999 et des listes de classements d’octobre 1999). Des éléments similaires sont maintenus pour 2000. A compter des mois de mars et avril 2001, il existe des preuves nombreuses de pratiques plus sophistiquées que celles jusque là en place. 261. Ces éléments indiquent que l’entente, prise dans son ensemble, a débuté au moins en 1999. La confirmation d’un « Club P », réunion non statutaire, du 2 septembre 1999 par un courrier daté du 27 août 1999 est notamment adressée à un représentant de Morel (cote 19157) et sa formulation indique que de telles réunions ne sont pas rares (« comme d’habitude »). Un courrier daté du 31 août 1999 liste les présents à cette réunion (cote 19158) et atteste à tout le moins que la société Morel avait répondu favorablement à l’invitation. Les éléments au dossier indiquent que l’objet anticoncurrentiel des

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commissions produits du FNA est ancien et constant (§ 234 et suivants). La présence de représentants de la société Morel au « Club P » en 1999 confirme ainsi les déclarations du demandeur de clémence (§ 51) et démontre que cette entreprise a participé dès cette époque à l’entente dont la continuité est démontrée sur toute la période. 262. Il résulte de ce qui précède que la participation de la société Etablissements Marc Morel et Fils et de sa filiale à 100%, Duferco Morel Produits Plats, avec laquelle elle partageait à l’époque des faits les mêmes locaux, les mêmes dirigeants et avec laquelle elle formait une même unité économique, à l’entente visée par le grief est établie pour toute la période incriminée, soit entre août 1999 et mai 2004. Sur la participation de Maisonneuve 263. La société Maisonneuve a indiqué dans ses observations et son mémoire en réponse que la notification des griefs « vise des faits et des pièces qui ne sont pas factuellement contestés par la société Maisonneuve qui ne conteste ni qu’une organisation a été mise en place via le Syndicat France Négoce Aciers pendant la période concernée, ni qu’elle y a participé dans les limites qui résultent de ce rapport ». Elle conteste néanmoins les conditions dans lesquelles elle a été associée à cette entente et relève tout d’abord que les autorités publiques ont mis en place une organisation exigeant la publication de barèmes de prix, qui a contraint les distributeurs à aligner leurs prix et à miser sur la qualité plutôt que sur le prix. Elle précise par ailleurs que ses clients sont tous des professionnels disposant d’acheteurs expérimentés qui connaissent et négocient les prix. Elle nie en outre pouvoir être qualifiée de responsable régional et souligne que M. A… n’a jamais été président de région. Elle estime enfin n’avoir pris aucune initiative pour favoriser l’entente ou veiller à son application. Sur ce point, elle a précisé dans son mémoire en réponse et lors de la séance qu’il était légitime pour elle de rappeler les « trois grands » au respect des règles qu’ils imposaient eux-mêmes aux « petits ». 264. Mais, tout d’abord, le régime anticrise mis en place par la Commission européenne dans les années 1980 a pris fin en 1990 et ne saurait, en tout état de cause, justifier des pratiques qui excédaient dans le temps, dans leur étendue et dans leur nature le champ de ce que prévoyait la réglementation de crise. De même, à supposer que les clients aient pu minimiser par leur expérience les effets de la concertation, cette situation ne saurait retirer leur caractère anticoncurrentiel aux pratiques. Ainsi, l’existence éventuelle d’un pouvoir de marché susceptible d’être exercé par les clients victimes des pratiques ne saurait justifier la pratique d’entente. Le Conseil s’est déjà prononcé sur ce point dans la décision n° 02-D-57 du 19 septembre 2002 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des roulements à billes et assimilés : « (…) quand bien même elle serait avérée, la puissance d’achat des distributeurs ne peut justifier que les fabricants se concertent pour aligner les hausses de leurs tarifs ». 265. Ensuite, plusieurs documents identiques ou concordants saisis lors de l’enquête dressent une liste des présidents de région faisant apparaître, pour certaines régions, des présidents de sous-régions. En ce qui concerne la 4e région, ces documents mentionnent M. A… comme président de la sous-région Maine (par exemple, cote 8882). M. A… a par ailleurs indiqué à l’occasion de ses auditions qu’il se rendait aux réunions des présidents de région. 266. Enfin, le rôle de surveillance joué par la société Maisonneuve est établi par un faisceau d’indices saisis dans les locaux de la société Maisonneuve, composé de dizaines de tableaux de suivi des « dysfonctionnements » du dispositif, par région et par négociant, par des courriers à destination du président de région, du secrétaire général du syndicat ou de concurrents demandant des explications sur des affaires perdues (§ 111), par une

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intervention de 2003 dénonçant des dysfonctionnements sur la base de ces relevés (cote 15175) et par la démarche volontaire de sortie de la concertation qu’a eue la société Maisonneuve lorsque les résultats du système ne lui convenaient pas (cote 23083). 267. Il résulte de ce qui précède que la participation de la société Maisonneuve à l’entente visée par le grief est établie pour la période de mai 2001 à mai 2004. Sur la participation de Liametho 268. La société Liametho insiste dans sa défense sur les spécificités du marché, telle que sa tradition historique de concertation et de barémation, sa transparence et la domination des trois grands. Elle avance que sa participation au bureau du FNA était justifiée par la présidence du département acier du groupement d’achats SOCODA, dans le seul but d’obtenir des informations. Elle relève par ailleurs que les régions avaient un pouvoir de décision limité, que les grands groupes y étaient très influents et qu’il n’est pas établi que les seules réunions auxquelles un représentant de la société était présent aient eu un objet anticoncurrentiel. Elle estime enfin que la durée retenue de sa participation, 26 mois, confirme le peu d’implication de la société à l’entente. 269. Il a déjà été répondu à l’argument tiré de la tradition historique ou du contexte réglementaire du secteur. En ce qui concerne celui tiré de la transparence des prix, le fait que les prix et conditions du marché puissent être connus par les clients n’enlève rien au caractère anticoncurrentiel des échanges d’informations surtout, lorsque comme en l’espèce, ils constituent le support d’un autre mécanisme anticoncurrentiel, à savoir un accord sur les prix (voir en ce sens l’arrêt de la CJCE du 7 janvier 2004 dans les affaires jointes Aalborg Portland A/S ea : « Même si les informations faisant l’objet desdits échanges relevant du domaine public ou portent sur des prix historiques et purement statistiques, leur échange enfreint l’article 85, paragraphe 1, du Traité lorsqu’il constitue le support d’un autre mécanisme anticoncurrentiel »). 270. Contrairement à ce qui est soutenu, les éléments saisis dans les locaux de FNA concernant la composition du bureau FNA indiquent qu’en étaient membres en 2002 et en 2004 à la fois M. 8… (Liametho) et M. 7… (SA Clisson Métal) et ne mentionnent leur présence en tant que représentants de SOCODA ni pour l’un, ni pour l’autre (cotes 16123, 16154, 19493 et 19494). En tout état de cause, les informations obtenues l’étaient de fait aussi pour le compte de Liametho. 271. En ce qui concerne l’objet anticoncurrentiel des réunions auxquelles a assisté Liametho, il y a lieu tout d’abord d’indiquer que, contrairement à ce qui est soutenu, il ressort des éléments décrits aux paragraphes 95 à 97 que l’activité du bureau FNA, et notamment les enquêtes sur les coûts des différents négociants auxquelles a procédé M. 8…, dépassait le champ d’activité légitime d’un syndicat et avait un objet anticoncurrentiel. Ensuite, les comptes rendus de réunions régionales saisis lors de l’enquête administrative indiquent que Liametho a assisté à 10 des 14 réunions du département de l’Orne entre mars 2003 et mai 2004 et attestent que ces réunions ont concerné l’examen des barèmes, des affaires récentes ou en cours et des mesures à prendre. Elles sont en cela totalement similaires à la quasi- totalité des comptes rendus de réunions présents au dossier dont l’objet anticoncurrentiel a été mis en lumière aux paragraphes 235 et suivants (cotes 15460 à 15531 et 15954). La présence de Liametho à des réunions dans l’objet est anticoncurrentiel, établie sur la base des pièces de l’enquête administrative, est confirmée par le demandeur de clémence (cotes 15006 à 150018 et 15268 à 15363). 272. Enfin, s’agissant de la durée de la participation de Liametho à la pratique, celle-ci est uniquement circonscrite par les preuves disponibles au dossier et n’est pas de nature à

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remettre en cause la responsabilité de l’entreprise pendant l’infraction, mais seulement à en préciser son étendue dans le cadre de la détermination des sanctions. Au demeurant, la participation à une concertation pendant plus de deux ans ne peut, contrairement à ce que soutient Liametho, être considérée comme traduisant un « manque d’implication ». 273. Il résulte de ce qui précède que la participation de la société Liametho à l’entente visée par le grief est établie pour la période d’avril 2002 à mai 2004. Sur la participation de Clisson Métal 274. En réponse aux arguments invoqués, qui sont les mêmes que ceux mis en avant par la société Liametho, il sera relevé que les comptes rendus de réunions régionales saisis lors de l’enquête administrative chez Maisonneuve indiquent que Clisson Métal a assisté à 13 des 15 réunions du département de Loire Atlantique entre octobre 2001 et février 2004, 21 des 23 réunions du département de l’Orne entre octobre 2001 et avril 2004, aux 13 réunions du département de Vendée entre octobre 2001 et mars 2004 et attestent que ces réunions ont concerné l’examen des barèmes, des affaires récentes ou en cours et des mesures à prendre. Elles sont en cela totalement similaires à la quasi-totalité des comptes rendus de réunions présents au dossier dont l’objet anticoncurrentiel a été étudié aux paragraphes 235 et suivants (cotes 15537 à 15615, 15715 à 15859, 15039 à 15071 et 15617 à 15691). Des comptes rendus saisis chez KDI confirment ces éléments et mentionnent la présence d’un représentant de Clisson Métal à 59 des 96 réunions (tous départements confondus de la 4e région) pour lesquels des notes ont été prises entre octobre 2001 et septembre 2003 (cotes 9937 à 10242 et 10267 à 10373). La présence de Clisson Métal à des réunions dans l’objet est anticoncurrentiel, établie sur la base des pièces de l’enquête, est confirmée par Descours & Cabaud (pendant l’enquête administrative et dans le cadre de la procédure de clémence). Les éléments au dossier démontrent aussi que des représentants de Clisson Métal avaient des fonctions de point central (par exemple, cotes 394, 10384 et 10574 et suivantes), participaient à des commissions poutrelles de la 4/5e région (cote 364), que la société Clisson était intégrée dans les schémas de rotations de deltas de la 6e région (§ 123) et qu’elle diffusait et recevait des documents (§ 108 et 150). 275. Il résulte de ce qui précède que la participation de la société Clisson Métal à l’entente visée par le grief est établie pour la période d’avril 2002 à mai 2004. Sur la participation de CODIP 276. La société CODIP avance qu’elle n’a rien à voir avec l’activité concernée par la présente affaire, le négoce de produits sidérurgiques, dès lors qu’elle n’est que revendeur. Elle soutient que, l’individualisation des comportements étant nécessaire, il n’est pas possible de reprocher à CODIP l’ensemble des comportements observés, alors qu’elle n’a pas participé aux réunions essentielles à l’entente, qu’elle n’y a pas donné suite et qu’elle n’avait aucun autre moyen de s’y opposer ou de s’en distancier. Elle avance qu’elle n’a pas repris les barèmes – qui ne lui auraient été transmis que parce qu’elle était adhérente du FNA, ce qui ne serait pas répréhensible –, qu’elle ne les a traités que comme des barèmes plafonds, comme « des bases sur laquelle [elle] pouvait travailler et calculer ses propres tarifs et remises », respectant ainsi le concept de mise en concurrence, argument qu’elle utilise aussi s’agissant des classements. Elle souligne en outre qu’une partie des barèmes obtenus l’étaient ou pouvaient l’être parce qu’elle est elle-même cliente d’autres négociants, que les clients les connaissaient et qu’ils n’étaient pas confidentiels. La société CODIP soutient enfin que le barème « ronds à béton » auquel des pièces du dossier font référence ne constituait pas un barème strict mais des indications laissant libres les négociants de fixer leurs prix.

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277. Mais, une telle argumentation ne résiste pas aux précédents jurisprudentiels cités aux paragraphes 269 et 251 et suivants. Il n’appartient tout d’abord pas à un syndicat de diffuser des barèmes ou d’autres conditions tarifaires à ses adhérents. Les déclarations de CODIP attestent en outre que, loin d’être sans effet sur les tarifs définis, les échanges incriminés ont servi de « base » à la construction de sa politique commerciale « en la forme d’un comparatif des prix de la concurrence avec les siens propres ». Un tel mécanisme, est à l’évidence contraire au mode de fonctionnement normal d’un marché, dès lors que le comparatif est établi sur la base de prix et de classements fixés en commun pour orienter les stratégies commerciales à venir. 278. Par ailleurs, les pièces au dossier, notamment les cahiers de réunions saisis dans les locaux de CODIP et de KDI, montrent que CODIP a participé à un grand nombre de réunions locales de la 8e région dont le contenu a concerné l’examen des barèmes, notamment nationaux, les affaires et la mise en place de mesures de compensation ou de sanction. Elles sont en cela totalement similaires aux autres réunions régionales dont l’objet anticoncurrentiel a été démontré aux paragraphes 235 et suivants (cotes 18656 à 18897, 18912 à 18967 et 16752 à 16766). L’objet anticoncurrentiel de ces réunions est renforcé par la conscience que les négociants avaient du caractère anticoncurrentiel de ces réunions, comme en témoignent des notes prises par CODIP lors d’une réunion indiquant « contrôles des prix prévisibles », «  détruire tous les documents », «  détruire les listes de classement !! » et « Menace en 4e, 9e » et la déclaration du représentant de CODIP selon laquelle : « Un de nos soucis lors de ces réunions était de préserver notre marché contre les pénétrants de la 9e région et d’Italie» (cote 900). La société CODIP a également participé à des échanges bilatéraux avec KDI, ce qu’elle ne conteste pas, en vue de réaliser un barème « ronds à béton » (§ 106) et s’est également fait communiquer des barèmes régionaux et nationaux, des listes de classements et des dispositifs récapitulatifs par des concurrents ou par le syndicat FNA (§ 108). 279. Sur ce dernier point, les envois électroniques de M. 24… (Berton Sicard, groupe PUM/ Arcelor) contenant les barèmes de la région ne s’inscrivaient pas dans une relation de fournisseur à client mais bien dans le cadre d’une activité de président de région coordonnant l’activité d’entreprises concurrentes. Les messages concernés sont en effet adressés à toute une série de négociants, et pas seulement à CODIP. Ensuite, on relèvera que, bien qu’actif uniquement dans une région, CODIP était informé, lors des réunions et par l’envoi de courriers électroniques, des conditions décidées au niveau national. Ces éléments attestent de sa participation à la pratique complexe en cause, dont l’échange d’informations était l’un des supports. 280. Il résulte de ce qui précède que la participation de la société CODIP à l’entente visée par le grief est établie pour la période de février 2001 à mai 2004. Sur la participation de Ferren Fers 281. La société Ferren Fers conteste sa mise en cause dans la procédure, qui ne résulterait selon elle que de la qualification d’unité économique qu’elle formerait avec la société CODIP. Elle remet en cause l’existence d’une telle unité économique, arguant que sa détention par la même holding que CODIP et la présence de M. B… à la tête des deux sociétés ne saurait suffire en l’absence de comportement commun. Elle avance de plus qu’aucun fait n’est intrinsèquement reproché à la société Ferren Fers, les réunions emportant son implication ou leur caractère anticoncurrentiel n’étant pas démontrés. 282. Mais, tout d’abord, des griefs ont été notifiés et adressés séparément aux sociétés Ferren Fers et CODIP. Dès lors, la société Ferren Fers est poursuivie pour des pratiques qui lui

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sont personnellement reprochées, en raison de son propre comportement, indépendamment de l’existence ou non d’une unité économique constituée entre cette société et la société CODIP. 283. Or, sur ce point, il ressort de déclarations convergentes de CODIP et d’autres négociants que Ferren Fers participait aux mêmes réunions entre négociants que celles de CODIP : • M. 38… (Descours & Cabaud SA) a ainsi indiqué : « Nous nous réunissions aux Ombrages à Avignon. A ces réunions, étaient présents KDI, CODIP, ROZIER SIBILLE, BLANC, RICHARDSON, BERTON, FERREN FERS, CHESSA, VILAIN, ABRAM… A ma connaissance, il n’y avait pas d’autres réunions entre confrères ». • M. 27… (KDI) a déclaré : « Nous nous réunissions à Carpentras parce que CODIP venait de racheter (ou était en train de) FERREN FERS. Mais généralement, les réunions se déroulaient à Avignon au restaurant « les Ombrages » tous les mois ». • M. B… (CODIP) a relevé : « Le 28/07/2003 se déroulait une réunion avec les confrères. Ces réunions se déroulaient une à deux fois par mois, surtout aux Ombrages, restaurant près d’AVIGNON. Parfois, elles avaient lieu chez FERREN parce que certains participants venaient de la Drôme. Nous nous réunissions pour parler du métier ; nous avions à cette occasion des retombées d’informations de la FNA. Fin 2003 début 2004, nous avions besoin de nous voir assez souvent car le marché de l’acier était très perturbé avec des fluctuations de prix très importantes ». 284. La participation de Ferren Fers aux mêmes réunions que CODIP est en outre confirmée par un document provenant du président de la 8e région transmettant le calendrier des réunions de juin et juillet 2002 et adressé à Ferren Fers, qui accueillait d’ailleurs certaines de ces réunions (cotes 16779 à 16781) et par les notes de M. B… de certaines de ces réunions qui mentionnent Ferren Fers (ou « FF ») (par exemple, cotes 18938 à 18947). Or, ainsi qu’indiqué au paragraphe 278, ces réunions avaient un objet anticoncurrentiel. 285. Ferren Fers s’est également fait communiquer des barèmes régionaux et nationaux, des listes de classements et des dispositifs récapitulatifs par des concurrents ou par le syndicat FNA (§ 108). 286. Il résulte de ce qui précède que la participation de la société Ferren Fers à l’entente visée par le grief est établie pour la période de février 2001 à mai 2004. Sur les effets des pratiques 287. Les sociétés Morel, Maisonneuve, CODIP, Ferren Fers, Clisson Métal SA et Liametho minimisent l’effet de leur participation à l’entente en soulignant leur rôle limité sur le marché, l’absence de preuve d’une majoration de prix au détriment des clients et le fait qu’elles n’auraient, en réalité, tiré aucun bénéfice de la concertation qui ne fonctionnait pas dans leur intérêt. 288. La pratique décisionnelle du Conseil de la concurrence et des juridictions de contrôle ainsi que celle de la Commission européenne et des juridictions communautaires rappellent de façon constante qu’il résulte respectivement des termes de l’article L. 420-1 du code de commerce et de l’article 81 du Traité CE qu’une pratique anticoncurrentielle est prohibée dès lors qu’elle a un objet anticoncurrentiel, la faiblesse éventuelle des effets réellement constatés ou leur caractère éventuellement peu sensible n’étant le cas échéant qu’un facteur d’atténuation de la sanction. La Cour de justice des communautés européennes a notamment indiqué dans l’arrêt Anic du 8 juillet 1999 précité au paragraphe 218 qu’« il résulte d’une jurisprudence constante que, aux fins de l’application de l’article 85§1 du

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Traité, la prise en considération des effets concrets d’un accord est superflue, dès lors qu’il apparaît qu’il a pour objet de restreindre, d’empêcher ou de fausser le jeu de la concurrence » et que « comme dans le cas des accords entre entreprises et des décisions d’associations d’entreprises, les pratiques concertées sont interdites, indépendamment de tout effet, lorsqu’elles ont un objet anticoncurrentiel » (points 99 et 123). Par ailleurs, le Conseil de la concurrence a indiqué dans sa décision n° 07-D-48 du 18 décembre 2007 que « le simple fait de communiquer ses prix à un concurrent en sachant que celui a l’intention de s’aligner à la hausse est anticoncurrentiel ». 289. Une entente produit nécessairement des effets anticoncurrentiels lorsqu’elle consiste en une concertation et des échanges sur les prix, les clients ou les parts de marché. Elle altère la concurrence en influant sur les prises de décision des acteurs, et ce indépendamment du respect des conditions convenues. Le Tribunal de première instance des communautés européennes a notamment estimé dans l’arrêt Archer Daniels Midland du 9 juillet 2003 que « (…) la fixation d’un prix, même simplement indicatif affecte le jeu de la concurrence par le fait qu’il permet à tous les participants à l’entente de prévoir avec un degré raisonnable de certitude quelle sera la politique de prix poursuivie par leurs concurrents » (affaire T-224/00, point 120) et dans l’arrêt Thyssen Stahl AG du 11 mars 1999 « que les informations que recevaient les entreprises dans le cadre des systèmes litigieux étaient capables d’influencer leur comportement de façon sensible, en raison tant du fait que chaque entreprise se savait surveillée de près par ses concurrents que du fait qu’elle-même pouvait, le cas échéant, réagir au comportement de ceux-ci, sur la base d’éléments nettement plus récents et plus précis que ceux qui étaient disponibles par d’autres moyens » (affaire T-141/94, point 403). Dans une décision du 17 décembre 2002, la Commission européenne a précisé par ailleurs qu’« étant donné que les parties avaient remplacé l’incertitude d’une situation de libre concurrence par un comportement collusoire continu, les prix ont été nécessairement fixés à un niveau différent de celui qui aurait prévalu sur un marché concurrentiel » (voir la décision n°2004/206/CE). 290. Par leur participation à la concertation, les négociants, loin de déterminer leur politique de prix de manière autonome, dans l’incertitude du comportement de leurs concurrents, ont nécessairement pris en compte, directement ou indirectement, les informations obtenues de ceux-ci au cours des réunions litigieuses (voir par exemple, le raisonnement suivi par le TPICE dans les arrêts Limburgse Vinyl Maatschappij et autres du 20 avril 1999, affaires T-305/94 à T-307/94, T-313/94 à T-316/94, T-318/94, T-325/94, T-328/94, T-329/94 et T-335/94 s’agissant de la limitation du degré de négociation des prix avec les clients), ce qui a réduit l’intensité concurrentielle. Le fait que les barèmes étaient conçus comme des niveaux de prix planchers, définis non pas en fonction des coûts propres à chaque entreprise mais dans le but de maintenir un niveau de marge « acceptable » par tous les membres du cartel, n’a pu que renforcer cette atteinte à la concurrence. 291. Enfin, l’ensemble des pièces réunies au dossier démontre que l’organisation très sophistiquée du dispositif a été précisément conçue pour produire des effets sur le marché, qui étaient évalués par des participants à l’entente. M. H… (Descours & Cabaud) le confirme en déclarant : « Le temps consacré à la mise en œuvre du dispositif était effectivement très important. Il s’agissait non seulement des réunions mais également de leur préparation en amont (remontées d’informations par exemple) et de la diffusion des instructions en aval. Si l’on acceptait d’y passer autant de temps, c’est que le dispositif produisait des résultats. Historiquement, le dispositif a été mis en place, en 2001, alors que les volumes, et, avec eux, la rentabilité, baissaient. L’objectif était de relever les prix et les marges à un niveau plus satisfaisant, d’équilibrer les volumes et de figer les parts de marché respectives. Les résultats se sont fait sentir tout de suite. De manière générale, les

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objectifs ont été atteints et l’effet recherché, redresser le marché, a été obtenu, bien que, selon les périodes, il a pu être plus ou moins important et le dispositif plus ou moins efficace. On a très vite pu constater que l’on avait « bien fait » de mettre en place le dispositif. Dans les moments de relâchement, des instructions étaient données en vue d’une reprise en main (…) Le dispositif était payant tout d’abord car il a produit des résultats dès sa mise en place et ensuite car il était utile même lorsqu’il ne marchait pas parfaitement. Il est arrivé que le dispositif se désorganise voire soit sur le point d’exploser, compte tenu des difficultés à le faire marcher. Mais, à chaque fois, plutôt que de l’abandonner, il a été décidé de le faire repartir et de veiller au respect des instructions ». 292. Il doit à cet égard être rappelé que, selon une jurisprudence constante des juridictions communautaires, le comportement effectif que prétend avoir adopté une entreprise est sans pertinence aux fins de l’évaluation de l’impact d’une entente sur le marché, seuls doivent être pris en compte les effets résultant de l’infraction dans son ensemble (voir arrêt Anic du 8 juillet 1999 précité au paragraphe 218, point 152). Dès lors, les arguments des parties tirés du non-respect des consignes ou de leur faible importance en termes de produits distribués ou de parts de marché sont sans portée sur leur responsabilité à l’égard des effets des pratiques, la règle de minimis ne pouvant au surplus pas s’appliquer compte tenu de la nature des pratiques concernées. 293. Les éléments au dossier, notamment ceux décrits aux paragraphes 58, 60, 68 à 72, 151, 152 et 163 à 169, montrent que les conditions convenues avaient vocation à s’appliquer, qu’elles l’étaient effectivement, directement ou indirectement, et qu’un contrôle de cette application était mis en œuvre. De ce point de vue, si certains documents font effectivement mention de « reproches » à l’égard du dispositif ou de « dysfonctionnements », au demeurant compensés dans le cadre de la concertation, un grand nombre de comptes rendus de réunions ou de documents internes attestent de l’application du dispositif barèmes, totale ou partielle (et dans ce second cas éventuellement cyclique). 294. Les extraits suivants sont des exemples représentatifs d’un respect complet du dispositif (cotes 4720, 3139, 18167, 16946, 18181 et 7346) : • « bon maintien des prix, respect des consignes syndicales y compris par les intervenants extérieurs » ; « aujourd’hui, grâce à FNA, l’application des barèmes de vente produits tradi est globalement verrouillée » ; « globalement, les nouveaux barèmes sont bien appliqués au 03/03/03, par l’ensemble de la profession sur le 13 et 84 » ; « les prix sont en hausse ainsi que les marges, conséquence de l’environnement économique et du respect de la barémation 8e région ». « L’application des barèmes ne pose aucun problème pour la petite et moyenne clientèle, ce qui tire nos marges et notre CA vers le haut : +11,62% de CA en PM et + 8,18% en BB entre janvier 2002 et 2003 » ; « Chacun sait l’intérêt du dispositif pour éviter de dégrader les marges ». 295. Les extraits suivants sont des exemples représentatifs d’un respect partiel ou cyclique du dispositif (cotes 18166, 18175, 18176 et 7928) :

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« Les prix de vente semblent de nouveau être mieux respectés par l’ensemble des acteurs/ Mais encore trop d’affaires partent hors barèmes pour des raisons non justifiées » ; « Le dispositif, jusqu’ici globalement respecté dans le 13, s’affaiblit de jour en jour » ;

« les prix obtenus par BSI sur des affaires moyennes laissent à penser que le dispositif n’est pas respecté à 100% (…) pour les autres produits traditionnels, demande faible mais les prix restent corrects du fait du dispositif ». 296. La situation du marché a, logiquement, changé après les visites et saisies de mai 2004 et la sortie de Descours & Cabaud de la concertation. Elle s’est traduite par une plus grande liberté des entreprises dans la fixation des prix et/ou une concurrence par les prix plus forte (cotes 26486, 23369, 23366, 23367, 23260 à 23274, 23071 à 23084) : • la société Descours & Cabaud a déclaré : « dés la cessation des pratiques (à la fin du premier semestre 2004), DESCOURS & CABAUD a retrouvé sa liberté en matière tarifaire. Cela s’est traduit par une baisse significative et instantanée de ses marges » ; • les propos de M. Y… (KDI) lors du comité exécutif du FNA du 15 mars 2005 ont été ainsi rapportés : « DESCOURS & CABAUD a effectué depuis quelques mois une véritable ponction sur le marché et par les prix indiqués, baisse de 40 € / T, a fait perdre environ 100 Millions d’Euros à la profession pour en rapporter 1 ou 1,5 de plus à ses actionnaires ». Le compte rendu de ce comité relate ainsi cette intervention : « un adhérent fait part de son fort mécontentement vis à vis d’un confrère dont le comportement sur le terrain engendre des situations d’exploitation extrêmement dégradées et une incompréhension de la clientèle, paradoxalement informée de prix stables voire haussiers » ; • M. B… (CODIP) a déclaré à propos de l’état du marché après mai 2004 : « Le fonctionnement du marché s’est modifié : il y a eu tout de suite après une très forte bagarre déclenchée par les marchands de fer (les groupes surtout), surtout Descours & Cabaud qui a baissé les prix de façon très importante et qui a commencé une reconquête des parts de marché, notamment en poutrelles (ils ont gardé des parts de marché notamment en grands clients). Les autres ont répliqué de façon aussi forte (groupes et aussi indépendants). Dans ma zone de chalandise, deux indépendants n’y ont pas survécu ».

297. Dès lors, les différents moyens soulevés par les entreprises, tendant à démontrer que les pratiques reprochées n’ont pas eu d’impact réel sur le marché, doivent être écartés. 298. Il résulte de tout ce qui précède qu’est établie l’existence, entre août 1999 et mai 2004, d’une pratique anticoncurrentielle contraire à l’article L. 420-1 du code de commerce et à l’article 81 du Traité CE, retenu, pour des périodes détaillées ci-dessus, à l’encontre de la société PUM Service Acier, pour son comportement et celui de vingt-et-une de ses filiales, de la société Arcelor Profil, venant aux droits de la société ProfilArbed Distribution France, de la société AMD Sud/ Ouest, venant aux droits de la société Métal Pyrénées, de la société KDI, de la société Descours & Cabaud SA, pour son comportement et celui de trente-deux de ses filiales, de la société Morel, pour son comportement et celui d’une de ses filiales, de la société Maisonneuve, de la société Clisson Métal, de la société Liametho, de la société CODIP, de la société Ferren Fers et de la Fédération Française de Distribution des Métaux, venant aux droits de France Négoce Aciers.

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D. SUR LES SANCTIONS 299. Les pratiques retenues à l’encontre des sociétés mises en cause dans la présente affaire ont été commises pour partie antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques, mais se sont poursuivies de manière continue après la date d’entrée en vigueur de cette loi, le 18 mai 2001. La saisine, reçue le 8 juillet 2005, est également postérieure à cette date. Il en résulte, comme l’a décidé le Conseil dans une décision n° 04-D-39, que les dispositions du livre IV du code de commerce applicables en l’espèce sont celles de la loi du 15 mai 2001. 300. Aux termes de l’article L. 464-2-II du code du commerce dans sa rédaction applicable à l’espèce : « Le Conseil de la concurrence peut ordonner aux intéressés de mettre fin aux pratiques anticoncurrentielles dans un délai déterminé ou imposer des conditions particulières. (…) Il peut infliger une sanction pécuniaire applicable soit immédiatement, soit en cas d’inexécution des injonctions soit en cas de non-respect des engagements qu’il a acceptés. Les sanctions pécuniaires sont proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l’importance du dommage causé à l’économie, à la situation de l’organisme ou de l’entreprise sanctionné ou du groupe auquel l’entreprise appartient et à l’éventuelle réitération de pratiques prohibées par le présent titre. Elles sont déterminées individuellement pour chaque entreprise ou organisme sanctionné et de façon motivée pour chaque sanction. Si le contrevenant n’est pas une entreprise, le montant maximum de la sanction est de 3 millions d’euros. Le montant maximum de la sanction est, pour une entreprise, de 10 % du montant du chiffre d’affaires mondial hors taxes le plus élevé réalisé au cours d’un des exercices clos depuis l’exercice précédant celui au cours duquel les pratiques ont été mises en œuvre ». 301. Dans le cadre de la procédure de non contestation des griefs, l’article L. 464-2 III dispose que « le montant maximum de la sanction encourue est réduit de moitié ».

302. Dans ces conditions, le plafond respectif des sanctions qui peuvent être infligées aux sociétés mises en cause dans la présente affaire est présenté ci-dessous.

a) Le plafond légal

303. Les sociétés du groupe PUM/ Arcelor estiment que, dans la mesure où les trois sociétés en cause appartiennent au même groupe et sont pour deux d’entre elles filiales de la troisième, un plafond unique de sanction devrait être pris en compte pour ces trois sociétés.

304. Mais, ainsi qu’indiqué ci-dessus, le maximum légal est, pour chaque entreprise concernée « de 10 % du montant du chiffre d’affaires mondial hors taxes le plus élevé réalisé au cours d’un des exercices clos depuis l’exercice précédant celui au cours duquel les pratiques ont été mises en œuvre ». Ce chiffre est apprécié au niveau du groupe lorsque les chiffres d’affaires sont consolidés à l’intérieur de celui-ci. Le plafond légal est apprécié entreprise par entreprise. Dès lors que les griefs sont notifiés à des personnes morales distinctes au titre d’une participation individuelle aux pratiques, s’agissant de la période ou des auteurs concernés, aucune raison ne justifie d’apprécier le maximum légal différemment. La spécificité de la situation des trois sociétés du groupe PUM/ Arcelor

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concernée pourra néanmoins être prise en compte dans la détermination de la sanction au titre de son individualisation et de sa proportionnalité. 305. Le chiffre d’affaires le plus élevé de la société PUM Service Acier a atteint 588 227 000 euros au cours de l’exercice clos le 31 décembre 2000, ses comptes étant consolidés au sein de ceux du groupe ArcelorMittal. Les comptes consolidés d’ArcelorMittal font apparaître pour 2007 un chiffre d’affaires de 76 772 000 000 euros. Compte-tenu de ces éléments, le plafond de sanction normalement applicable, égal à 10 % du chiffre d’affaires consolidé le plus élevé de la période examinée, est de 7 677 200 000 euros. Par application des dispositions du III de l’article L. 464-2 du code de commerce, le plafond légal de la sanction applicable est réduit de moitié, soit 3 838 600 000 euros.

306. Le chiffre d’affaires le plus élevé de la société Arcelor Profil a atteint 305 577 000 euros au cours de l’exercice clos le 31 décembre 2007, ses comptes étant consolidés au sein de ceux du groupe ArcelorMittal. Les comptes consolidés d’ArcelorMittal font apparaître pour 2007 un chiffre d’affaires de 76 772 000 000 euros. Compte-tenu de ces éléments, le plafond de sanction normalement applicable, égal à 10 % du chiffre d’affaires consolidé le plus élevé de la période examinée, est de 7 677 200 000 euros. Par application des dispositions du III de l’article L. 464-2 du code de commerce, le plafond légal de la sanction applicable est réduit de moitié, soit 3 838 600 000 euros. 307. Le chiffre d’affaires le plus élevé de la société AMD Sud/ Ouest a atteint 122 474 000 euros au cours de l’exercice clos le 31 décembre 2007, ses comptes étant consolidés au sein de ceux du groupe ArcelorMittal. Les comptes consolidés d’ArcelorMittal font apparaître pour 2007 un chiffre d’affaires de 76 772 000 000 euros. Compte-tenu de ces éléments, le plafond de sanction normalement applicable, égal à 10 % du chiffre d’affaires consolidé le plus élevé de la période examinée, est de 7 677 200 000 euros. Par application des dispositions du III de l’article L. 464-2 du code de commerce, le plafond légal de la sanction applicable est réduit de moitié, soit 3 838 600 000 euros. 308. Le chiffre d’affaires le plus élevé de la société KDI a atteint 980 972 623 euros au cours de l’exercice clos le 31 décembre 2007, ses comptes étant consolidés au sein de ceux du groupe Klöckner. Les comptes consolidés de Klöckner font apparaître pour 2007 un chiffre d’affaires de 6 274 000 000 euros. Compte-tenu de ces éléments, le plafond de sanction normalement applicable, égal à 10 % du chiffre d’affaires consolidé le plus élevé de la période examinée, est de 627 400 000 euros. Par application des dispositions du III de l’article L. 464-2 du code de commerce, le plafond légal de la sanction applicable est réduit de moitié, soit 313 700 000 euros. 309. Le chiffre d’affaires le plus élevé de la société Descours & Cabaud SA a atteint 3 331 738 euros au cours de l’exercice clos le 31 décembre 2005, ses comptes étant consolidés au sein de ceux du groupe Descours & Cabaud. Les comptes consolidés de Descours & Cabaud font apparaître pour 2007 un chiffre d’affaires de 3 230 051 000 euros. Compte- tenu de ces éléments, le plafond de sanction applicable, égal à 10 % du chiffre d’affaires consolidé le plus élevé de la période examinée, est de 323 005 100 euros. 310. La société Morel avance que le maximum légal de la sanction qu’elle encoure ne pourrait être calculé sur la base du chiffre d’affaires mondial de sa société mère, Duferco, mais doit l’être sur la base de la société Établissements Marc Morel et Fils, ces deux sociétés étant des personnes morales qui disposent de patrimoines sociaux distincts. Elle a par ailleurs refusé de répondre à une demande de communication de documents relatifs au chiffre d’affaires de cette société mère.

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311. Mais les sociétés du groupe Morel appartiennent au groupe Duferco. La société Etablissements Marc Morel et Fils était en 2007 incluse dans le périmètre de consolidation de la société mère, Duferco Participations Holding, qui établit les comptes consolidés du groupe. Le chiffre d’affaires à prendre en compte pour calculer le plafond légal est donc celui du chiffre d’affaires mondial de la société mère du groupe. 312. Le chiffre d’affaires le plus élevé de la société Etablissements Marc Morel et Fils a atteint 55 192 839 euros au cours de l’exercice clos le 31 décembre 2007, ses comptes étant consolidés au sein de ceux du groupe. Les comptes consolidés de Duferco font apparaître pour 2007 un chiffre d’affaires de 6 700 000 000 euros. Compte-tenu de ces éléments, le plafond de sanction applicable, égal à 10 % du chiffre d’affaires consolidé le plus élevé de la période examinée, est de 670 000 000 euros. 313. Le chiffre d’affaires le plus élevé de la société Maisonneuve a atteint 121 063 748 euros au cours de l’exercice clos le 31 décembre 2007. Compte-tenu de cet élément, le plafond de sanction applicable, égal à 10 % de ce chiffre d’affaires, est de 12 106 374 euros. 314. Le chiffre d’affaires le plus élevé de la société Liametho a atteint 15 620 230 euros au cours de l’exercice clos le 31 décembre 2007. Compte-tenu de cet élément, le plafond de sanction applicable, égal à 10 % de ce chiffre d’affaires, est de 1 562 023 euros. 315. Le chiffre d’affaires le plus élevé de la société Clisson Métal a atteint 30 180 881 euros au cours de l’exercice clos le 31 décembre 2007. Compte-tenu de cet élément, le plafond de sanction applicable, égal à 10 % de ce chiffre d’affaires, est de 3 018 088 euros. 316. Le chiffre d’affaires le plus élevé de la société CODIP a atteint 21 109 000 euros au cours de l’exercice clos le 30 juin 2008. Compte-tenu de cet élément, le plafond de sanction applicable, égal à 10 % de ce chiffre d’affaires, est de 2 110 900 euros. 317. Le chiffre d’affaires le plus élevé de la société Ferren Fers a atteint 14 478 000 euros au cours de l’exercice clos le 31 décembre 2000. Compte-tenu de cet élément, le plafond de sanction applicable, égal à 10 % de ce chiffre d’affaires, est de 1 447 800 euros. 318. Le plafond de sanction normalement applicable à la FFDM est normalement de 3 000 000 euros. Par application des dispositions du III de l’article L. 464-2 du code de commerce, le plafond légal de la sanction applicable est réduit de moitié, soit 1 500 000 euros. b) Les critères de détermination de la sanction 319. Dans son mémoire en réponse, la société Descours & Cabaud SA a indiqué que : « En droit communautaire, après avoir établi un montant de base, fondé sur la valeur des ventes, « la Commission peut prendre en compte des circonstances qui mènent à une augmentation ou à une réduction du montant de base » (point 27 des lignes directrices) » (mémoire en réponse, page 5) et, au sujet de la collaboration de l’entreprise à l’instruction, que « le droit communautaire admet également la valeur d’une telle collaboration. En effet, aux termes du point 29 des lignes directrices (…) le montant de base de l’amende peut-être réduit lorsque la Commission constate l’existence de circonstances atténuantes telles que (…) : lorsque l’entreprise concernée coopère effectivement avec la Commission, en dehors du champ d’application de la communication sur la clémence et au-delà des obligations légales de coopérer » (mémoire en réponse, page 29). 320. De même, la société KDI a indiqué que « la Commission européenne, dans ses lignes directrices pour le calcul des amendes (JOUE C 210/2) commentant le rôle de meneur considère qu’il faut porter une attention particulière à toute mesure prise en vue de contraindre d’autres entreprises à participer à l’infraction et/ou à toute mesure de

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rétorsion prise à l’encontre d’autres entreprises en vue de faire respecter les pratiques constitutives d’une infraction ». (mémoire en réponse, page 21). 321. Enfin, les sociétés du groupe PUM/ Arcelor ont fait observer, à propos de la réitération : « il ressort des lignes directrices communautaires en matière de fixation des amendes que les cas de réitération ne sont constitués que lorsque il a été constaté une infraction à l’article 81 ou à l’article 82 (§28) » (observations, page 11, note 30). 322. De manière générale, le Conseil rappelle que, si l’objectif d’assurer l’effectivité du droit communautaire peut le conduire à s’inspirer des méthodes utilisées par la Commission européenne lorsqu’il détermine la sanction applicable à une infraction aux articles 81 ou 82 du Traité CE – en considérant par exemple que, dans les hypothèses de cartel comme celui de l’espèce, il est plus approprié de se référer, pour l’assiette du calcul de la sanction, à la valeur des ventes réalisées sur le marché affecté par l’entente que de partir du plafond légal, qui doit servir à l’écrêtement éventuel de l’amende dans le cas où elle dépasserait ce maximum –, les lignes directrices invoquées ne peuvent le contraindre juridiquement. Son appréciation est en effet soumise au respect des seuls critères fixés par le droit national, en l’occurrence l’article L. 464-2 du code de commerce, en cohérence avec la pratique décisionnelle du Conseil, développée sous le contrôle de la cour d’appel de Paris qui pourrait d’ailleurs faire l’objet d’un document d’orientation propre à l’autorité nationale. 323. Il est, certes, loisible aux entreprises mises en cause de faire référence aux lignes directrices communautaires ou d’en donner leur propre interprétation pour nourrir leur argumentation en défense. Mais cela ne signifie nullement que le Conseil soit tenu d’y répondre, étant observé au demeurant que l’application intégrale de ces recommandations – et pas seulement des points invoqués par les parties en cause à l’appui de leurs écritures – pourrait conduire à un calcul des amendes beaucoup moins favorable aux entreprises qui s’en prévalent. 324. Seront successivement abordées, parmi les critères de la sanction : • la gravité des comportements, appréciée en général et par rapport à chacune des entreprises ou organisme en cause ; • l’importance du dommage à l’économie, approchée aussi bien en termes quantitatifs que qualitatifs ; • la prise en compte éventuelle de la réitération. c) Sur la gravité des pratiques Sur la gravité générale des pratiques 325. Des ententes sur les prix, sur la répartition de clients ou de marchés entre concurrents, comme celle de l’espèce, constituent des pratiques qualifiées d’injustifiables et donc d’une extrême gravité pour les autorités de concurrence. 326. Cinq éléments permettent de caractériser, de manière générale, la gravité des pratiques. L’emprise des pratiques sur le marché 327. Les participants à la concertation représentent une très large majorité des parts du marché : environ 70 à 90 % des volumes vendus par le négoce selon les produits (à l’exception des ronds). Parmi ces participants figurent les trois principaux groupes de négociants, qui représentent à eux seuls 60 à 80 % des volumes distribués par les adhérents du FNA. La participation de ces grands groupes est d’autant plus importante que l’un deux, PUM/

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Arcelor, fait partie du plus important groupe mondial de production d’acier, qui fournit une grande partie des besoins des négociants. Enfin, le syndicat unique de la profession était totalement impliqué dans les pratiques, tant au niveau national que régional. La persistance des pratiques 328. Les pratiques ont été mises en œuvre pendant une longue période, au moins 58 mois entre 1999 et 2004. Durables, elles ont en outre été durant cette période à plusieurs reprises confirmées par leurs auteurs et même renforcées, dans le sens de l’élargissement des produits et services concernés et de la limitation de la liberté résiduelle des opérateurs, caractérisant ainsi la persistance d’une volonté anticoncurrentielle. Il n’a été mis fin aux pratiques qu’à la suite des opérations de visites et saisies et au début de l’enquête administrative. L’étendue géographique des pratiques 329. Les pratiques se sont étendues, durant toute leur durée, sur l’intégralité du territoire français. Décidées au niveau national au plus haut niveau de responsabilité au sein de chaque société, elles concernaient à la fois des clients nationaux, présents sur toute la France et des clients plus petits, dans les 11 régions définies dans le cadre du FNA. Dans chacune de ces régions, les pratiques avaient un fonctionnement similaire. Les dispositifs nationaux y étaient communiqués et directement appliqués ou adaptés à la réalité locale. Le champ matériel de l’entente 330. Le cartel a eu pour objet non seulement de faire échapper les prix au jeu normal de la compétition, en diffusant des barèmes concertés et en veillant à ce qu’ils soient appliqués par les négociants, mais aussi de répartir les clients et les marchés. C’est donc tout l’espace concurrentiel qui a été anéanti, les entreprises concernées ayant mis en place une collusion générale qui avait pour objet de supprimer tout mécanisme de compétition entre elles. La sophistication des pratiques 331. Les pratiques en cause sont d’une extraordinaire complexité, organisée et maîtrisée par leurs auteurs. Le marché concerné n’est de prime abord pas le plus propice pour mettre en place une entente : c’est un marché de négoce caractérisé par un nombre important de petites transactions ponctuelles pour une clientèle diffuse sur une grande variété de produits, par opposition par exemple aux marchés de grands comptes avec des contrats d’approvisionnement pluriannuels. Les auteurs du cartel ont cependant traité chacune des particularités du marché et y ont apporté une réponse dans l’organisation sophistiquée des pratiques, par la multiplicité des réunions, leur niveau de mise en place (national, régional, local), leur spécialisation par produits, leur périodicité, la multiplication des référentiels tarifaires, la diffusion de récapitulatifs, la mise en place d’instances de contrôle et de soutien des pratiques (parrains, présidents de régions, points centraux et pilotes), un suivi régulier, des sanctions, etc. 332. L’architecture des pratiques incluait par ailleurs des mesures concertées visant d’une part à assurer une flexibilité suffisante pour maintenir une stabilité du cartel sur le long terme face aux acteurs extérieurs ou aux infractions (droits de suite, compensations,…) et d’autre part à masquer la réalité des pratiques aux clients (tours de rôle, rotation de deltas,…). Enfin, il sera relevé que les entreprises avaient conscience du caractère prohibé des pratiques auxquelles elles se sont livrées, comme le montrent les documents cités au paragraphe 241.

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333. Il résulte de tout ce qui précède que les pratiques en cause sont, de manière générale, d’une gravité exceptionnelle. 334. Certaines parties ont avancé que la situation économique et le contexte réglementaire du secteur auraient pour effet de nuancer la gravité des pratiques. Mais de tels arguments ne peuvent en l’espèce prospérer. Sur le contexte de crise et l’intervention des pouvoirs publics 335. La FFDM relève que la relance du dispositif syndical constitue, dans un contexte de profonde mutation économique, une approche « collective », permettant de renforcer l’action de FNA auprès des pouvoirs publics dans une période de crise et de dérèglement du prix des matières premières. Reprenant des propos de M. H… (Descours & Cabaud), elle précise qu’il s’agissait d’une question de survie et, qu’à défaut, il est vraisemblable que les marges auraient été plus limitées que celles pratiquées et auraient même pu aboutir à des pertes. Les sociétés Maisonneuve, Liametho et Clisson Métal relèvent par ailleurs une tradition historique de la concertation et de la barémation, qui serait indissociable des pratiques examinées ci-dessus. 336. Mais, tout d’abord, comme le Conseil de la concurrence l’a rappelé notamment dans la décision n° 07-D-48 (§ 272), la Commission de la concurrence avait déjà indiqué dans son rapport pour 1984 que les ententes étaient une mauvaise réponse à une situation de crise car « loin d’apporter des remèdes aux problèmes de récession, elles [étaient] de nature à les aggraver ne serait-ce qu’en dispensant les entreprises de réactions plus dynamiques ». 337. En outre, la Commission européenne dans une décision du 9 décembre 2004 (décision n°2005/566/CE) a considéré que : « (…) dans une économie de marché, les risques que prennent les entreprises englobent le risque de pertes éventuelles, voire de faillite. Le fait qu’une entreprise puisse ne pas réaliser de profits avec une activité commerciale donnée ne l’autorise pas à conclure une entente secrète avec les concurrents en vue de tromper les clients et les autres concurrents. D’une manière générale, les ententes risquent de se produire non pas lorsque les entreprises font de gros profits, mais précisément lorsqu’un secteur connaît des problèmes. C’est pourquoi, si la Commission suivait le raisonnement de BASF, les amendes infligées dans les affaires d’ententes devraient être réduites dans la quasi-totalité des cas. Dans son arrêt dans l’affaire Électrodes de graphite, le Tribunal de première instance a confirmé que la Commission n’était pas tenue de considérer comme circonstance atténuante la mauvaise santé financière du secteur en cause (…) ». Dès lors, une éventuelle crise qui aurait été à l’origine des pratiques, ce qui n’est au demeurant pas démontré à l’époque de l’entente, ne peut atténuer leur gravité, de même que l’idée selon laquelle une action concertée illicite renforcerait son action auprès des pouvoirs publics. Au contraire, la participation d’un syndicat à ce type de pratiques, contradictoire avec ses devoirs, est de nature à en augmenter la gravité. 338. Ensuite, comme indiqué au paragraphe 264, les régimes exceptionnels de crise mis en place dans le secteur n’ont jamais validé une collaboration aussi poussée que celle observée et se sont interrompus avant le début de la période des griefs notifiés. Depuis, plusieurs décisions des autorités de concurrence ont permis aux opérateurs du secteur de prendre connaissance des limites qu’une entreprise se doit de ne pas dépasser compte tenu de l’autonomie qui doit prévaloir dans la détermination de sa politique commerciale sur un marché concurrentiel. Il s’ensuit que les régimes d’aide ayant existé sur le marché à l’initiative des pouvoirs publics ne justifient en aucun cas les pratiques constatées ni n’atténuent leur gravité.

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Sur la caractérisation du comportement respectif des entreprises en cause 339. La Cour d’appel de Paris a indiqué, s’agissant de la détermination des sanctions, « qu’en référence à son montant maximum, la sanction pécuniaire doit être fixée en fonction du nombre, de la durée, de la gravité des pratiques en cause, de la part prise par l’entreprise dans leur conception et leur mise en œuvre et de l’atteinte qu’elles ont portée à l’économie » (arrêt du 1er juillet 1992). Sur le degré d’implication dans la pratique complexe 340. Plusieurs sociétés ont recensé les éléments de concertation auxquels elles n’avaient pas participé, ainsi que l’éventuelle durée limitée des griefs retenus à leur égard. Les sociétés Morel, CODIP, Ferren Fers, Clisson Métal, Liametho et Maisonneuve avancent que leur participation était uniquement passive et forcée, étant donné leur manque d’intérêt pour le dispositif et le rôle des groupes dans sa mise en œuvre 341. Toutefois, il y a lieu de relever sur ce dernier point que le faible intérêt à la pratique est pris en compte dans la détermination de la sanction par l’analyse des éléments de participation à la pratique et de la durée de cette participation. Au delà, les sociétés requérantes n’avancent ni circonstance spécifique, ni élément de preuve susceptible de démontrer que leur attitude lors des réunions en question a été purement passive ou suiviste hormis le rôle prédominant des grands groupes qui constituent un élément aggravant à leur égard, mais n’est pas atténuant à l’égard des autres. Au contraire, s’agissant de la société Maisonneuve et tel qu’indiqué au paragraphe 266, les pièces disponibles attestent d’un contrôle attentif du respect du dispositif. 342. Pour le reste, la situation de chaque entreprise par rapport à la sanction prononcée doit effectivement différer en fonction de son degré d’implication dans les pratiques, dont une présentation synthétique est faite dans le tableau ci-dessous :

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Tableau n° 12 : Récapitulatif de la participation de chaque opérateur aux pratiques l s .

Eléments de concertation née rel

FNA PUM PADF Méta KDI D&C Mais. Fers Pyré Mo Liam Clisson Métal CODIP Ferren Commission poutrelles X X X X X X X Commission produits plats X X X X Commission tubes X X X X Bureau X X X X X X Réunion des présidents de région X X X X X Déjeuners directeurs commerciaux X X X X X Dîners des présidents X X X X X Pilotes et/ou points centraux X X X X X X X Présidents de régions X X X X Parrains X X X Répartition marché poutrelles X X X X X X X Activités de la 1re région X X X X X Activités de la 2e région X X X Activités de la 3e région X X X X X Activités de la 4e région X X X X X Activités de la 5e région X X X X X Activités de la 6e région X X X X X X Activités de la 7e région X X X X Activités de la 8e région X X X X X X Activités de la 9e région X X X X X Activités de la 10e région X X X X Activités de la 11e région X X X X X Commission poutrelles 4e/ 5e X X X X X X X Commission poutrelles 6e/ 7e X X X X X X Commission poutrelles 9e X X X Commission poutrelles 11e X X X X Etablissement ou diffusion de barème ou/ conditions X X X X X X Réception de barèmes/ conditions

X X X X X X X X X X (hors réunions) Participation à des accords, contacts, échanges X

X X X X X d’informations ou barèmes bilatéraux Durée de participation (en mois) 58 58 49 40 58 58 37 58 26 26 42 42 343. Ce tableau met en exergue l’emprise des trois principaux négociants sur le cartel, qui ont participé à la quasi-intégralité des mécanismes de l’entente dans toutes les régions, sous toutes ses formes et durant la totalité des 58 mois. A l’inverse, certaines sociétés comme Ferren Fers ne sont intervenues que dans une seule région. La participation de certaines autres comme Liametho n’est établie que pendant 26 mois. Sur le rôle de meneur 344. Les sociétés du groupe PUM/ Arcelor et KDI contestent que puisse être pris en compte à leur égard, au titre de circonstances aggravantes, un statut de meneur des pratiques. Elles soutiennent tout d’abord que l’exposition des grands groupes de négoce ne tient qu’à leur taille et à leurs effectifs, que le caractère notablement local du marché du négoce rendait

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nécessaire un consensus entre tous les acteurs et qu’elles n’ont pas procédé à des mesures de contrainte particulières, élément selon elles constitutif du rôle de meneur. Les sociétés du groupe PUM/ Arcelor estiment par ailleurs impossible de distinguer une des trois entreprises par rapport aux autres, ce qui serait pourtant nécessaire pour déterminer qui est « le » meneur. A cet égard, KDI souligne ses faibles parts de marché en produits plats et considère qu’elle ne disposait pas d’un pouvoir économique lui permettant de dicter leur ligne de conduite aux autres opérateurs, le groupe PUM/ Arcelor occupant la première place sur le marché et étant le seul à être intégré à un producteur et à avoir une connaissance directe de l’amont. 345. Mais, le Conseil individualise la sanction de chaque entreprise compte tenu, entre autres éléments, du comportement révélé dans le cadre de l’entente. En l’espèce, au delà de leur place incontournable sur le marché, les trois grands groupes de négoce sont à l’initiative de l’entente et apparaissent comme ses animateurs, tel que cela résulte des pièces du dossier, des déclarations de Descours & Cabaud et des déclarations unanimes des autres parties à l’entente. Ils organisaient ainsi des réunions spécifiques, composées uniquement des représentants de leurs groupes, parmi lesquels les plus hauts responsables de chacun des groupes concernés, et ceux du syndicat, à l’exclusion de ceux d’autres entreprises. Lors de ces réunions étaient définies les orientations ensuite mises en place avec les autres entreprises, ce qui n’est pas contesté. 346. Dès lors, si toutes les entreprises en cause ont exprimé leur accord de volonté aux pratiques, la situation individuelle des groupes est particulière, en ce qu’ils ont orienté l’entente et, par leur comportement, créé un effet d’entraînement à l’égard des autres participants. Pour prendre en compte de telles circonstances, la pratique décisionnelle française et communautaire ne nécessite pas de distinguer une seule entreprise par rapport aux autres. La Commission a par exemple indiqué dans une décision du 24 juillet 2002 que « même si un cartel est une entreprise menée en commun, chaque participant peut jouer un rôle qui lui est propre. Un ou plusieurs d’entre eux peuvent exercer un rôle dominant de meneur ». Elle a retenu ce facteur aggravant à l’égard de deux voire trois entreprises différentes d’un même cartel dans plusieurs affaires (voir par exemple décision du 5 décembre 2001, acide citrique, confirmée par le TPICE le 27 septembre 2006). Il n’est pas non plus nécessaire que soient identifiées des mesures de contraintes mises en œuvre par les entreprises considérées comme des meneurs, de telles mesures étant susceptibles d’aggraver la situation d’une entreprise indépendamment du rôle joué dans la conduite d’une entente. 347. Il résulte de ce qui précède que les entreprises PUM Service Acier, KDI et Descours & Cabaud doivent être considérées comme les meneurs de l’entente en cause. La sanction prononcée à leur égard sera de ce fait aggravée. Sur les prétendues pressions 348. Les sociétés Clisson Métal, Liametho, Morel et CODIP font valoir que des contraintes étaient exercées à l’initiative des trois grands groupes, ce qui limiterait leur responsabilité. 349. Néanmoins, ces sociétés avancent pour ce faire les éléments du dossier faisant état des actions coercitives menées dans le cadre de l’entente, tant à l’égard des acteurs extérieurs que des « infractions » internes. Or, il a été vu que les indépendants participaient également aux réunions, aux mécanismes de vérification de la solidité de l’entente et contribuaient donc, à leur niveau, à ce système de sanctions. De sorte que les éléments mis en avant ne font que valider le fonctionnement de l’entente et l’importance du rôle que les

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grands groupes y ont pris, mais ne démontrent pas pour autant de contraintes ciblées et dépassant le cadre normal de l’entente et des compensations qui y étaient décidées. 350. Or, si le comportement de meneur est susceptible d’augmenter l’étendue de la responsabilité et le montant de la sanction des trois grands groupes, il ne diminue pas pour autant nécessairement celle des autres participants. En effet, pour atténuer la responsabilité d’une entreprise, il faudrait que celle-ci décrive de manière concrète, en s’appuyant sur des pièces du dossier, quels étaient les mécanismes de contrainte exercés à son égard et en quoi ils étaient de nature à peser sur son consentement à l’entente. Mais, sur ce point, aucune des allégations avancées n’est étayée par des pièces probantes. Tout au contraire, ont été cités des documents révélant que les négociants indépendants, et notamment la société Maisonneuve, se plaignaient des « dysfonctionnements » du cartel, jugé insuffisamment solidaire (§ 111). 351. Il en résulte que ces arguments sont sans conséquence pour l’appréciation de la sanction de Clisson Métal, Liametho, Morel ou CODIP. Sur la prétendue inapplication des mesures concertées 352. Comme cela a été indiqué au paragraphe 254, prétendre, sur la base de documents internes ou relatifs à des réunions entre concurrents, être « le perturbateur » de l’entente, comme l’invoquent certains, n’est pas un élément probant d’absence de participation à l’entente s’il n’est pas démontré que les perturbations alléguées dépassaient celles habituellement rencontrées dans une entente et d’ailleurs prévues et gérées par les règles d’organisation mêmes du cartel. Ainsi, un écart de conduite après lequel une entreprise accepterait, en réunion de concertation, qu’une autre entreprise puisse compenser la perte subie ne traduirait pas non plus une opposition au principe de l’entente. Les sociétés qui avancent, sous diverses formes, qu’elles n’ont pas appliqué les mesures décidées en concertation doivent donc le démontrer à partir d’éléments plus précis et convaincants. Cette caractérisation de la non participation effective est, en l’espèce, d’autant plus nécessaire que l’entente a été d’une ampleur particulière dans sa sophistication, sa durée et la fréquence des réunions régionales ou nationales. 353. Pour démontrer la non-application des mesures décidées, la société CODIP relève que celles-ci n’étaient pas adaptées à son activité et qu’elle ne les appliquait dès lors que comme des plafonds. Clisson Métal et Liametho indiquent qu’elles n’avaient pas de clients monitorés et que leurs niveaux moyens de prix et de marges divergeaient de ceux des autres sociétés. Elles avancent toutes les trois, ainsi que Maisonneuve, qu’en tout état de cause leurs résultats n’ont pas évolué après 2004, date à laquelle a cessé l’entente. 354. La société Descours & Cabaud avance que son comportement était incompatible avec la poursuite des pratiques et que l’entente aurait à terme « volé en éclats » même sans l’enquête de concurrence. Elle relève que la progression, entre 1999 et 2003, de son chiffre d’affaires sur les produits sidérurgiques, a été inverse de l’évolution de celui de ses concurrents, que la progression de son volume de ventes de poutrelles entre 1999 et 2004 a été contraire à l’évolution du marché et que la baisse de ses parts de marché en laminés, produits plats et ronds à béton entre 1999 et 2003 a été inférieure à celle subie par ses compétiteurs. Elle soutient que son dynamisme serait à l’origine de ces progressions, notamment l’augmentation de ses capacités de stockage en 2001, la mise en place en 2001, 2002 et 2003 d’opérations commerciales ciblées par produits. 355. Mais il est vain, pour démontrer une non-application des conditions concertées, de faire état de prix effectifs plus élevés que ceux décidés par les membres de l’entente, comme c’est le cas s’agissant des montants indiqués par Liametho et Clisson Métal. Dans de tels

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cas, le prix proposé, loin de remettre en cause l’organisation du cartel, tire profit de l’atténuation de la concurrence générée par l’entente. Cela est particulièrement vrai lorsque, comme on le constate pour CODIP ou Liametho, les tarifs sont de fait utilisés pour le classement des clients ou la définition des barèmes internes. Cela l’est aussi lorsque, comme pour Maisonneuve, une entreprise procède à un contrôle rigoureux du respect du dispositif par ses concurrents et leur demande le cas échéant des explications. Enfin, une concertation, aussi sophistiquée soit-elle, ne peut avoir comme conséquence de faire converger vers la même valeur les indicateurs financiers (résultats, etc.) de tous les participants. L’argument de Clisson Métal et Liametho sur ce point est donc dénué de pertinence. 356. Les arguments avancés par Descours & Cabaud n’emportent pas non plus la conviction. Tout d’abord, faire valoir que le comportement de l’entreprise risquait d’entraîner la fin de l’entente est très contestable, dès lors que l’entente en question s’est maintenue au moins pendant cinq ans et que les comportements allégués par Descours & Cabaud datent pour certains de trois ans avant la fin des pratiques, ce qui démontre à l’évidence qu’ils n’ont pas eu un tel effet. En outre, toutes les actions, mises en avant par Descours & Cabaud, qui démontreraient selon elle des écarts répétés par rapport à la ligne commune, sont antérieures ou contemporaines aux dates qu’elle a elle-même présentées comme celles du renforcement du cartel (par exemple, septembre 2003). 357. En outre, l’interprétation des évolutions chiffrées présentées par Descours & Cabaud est sujette à discussion. En effet, les chiffres présentés montrent, certes, une augmentation du chiffre d’affaires aciers entre 1999 et 2000, soit 4 ans avant la fin des pratiques, mais ensuite une baisse constante jusqu’en 2003 inclus. De même, l’évolution des volumes poutrelles est quasi-intégralement réalisée entre 1999 et 2000, période après laquelle suit une relative stagnation des volumes. Il faut noter également que les baisses limitées des parts de marché sur les autres produits sont réalisées avec des volumes qui restent stables, ce qui pourrait être interprété comme un bénéfice tiré par Descours & Cabaud de la répartition des parts de marché issue de l’entente. Il s’ensuit que les arguments de cette société n’emportent pas la conviction. 358. Enfin, les sociétés du groupe PUM/ Arcelor, d’une part, et Morel, d’autre part, ont présenté de brèves études statistiques révélant des écarts significatifs entre les barèmes préconisés et les prix effectivement pratiqués par les parties atteignant 9 à 13 % dans le cas de Morel et un niveau plus élevé dans le cas des sociétés du groupe PUM/ Arcelor. La méthodologie employée consiste dans les deux cas à extraire un échantillon des transactions réalisées par les sociétés concernées et à comparer leur prix moyen aux barèmes en vigueur à la date de ces transactions. Morel s’appuie, en outre, sur une étude présentant des écarts sensibles entre les volumes déclarés dans le cadre de la répartition de marché sur les clients monitorés poutrelles et les volumes selon elle effectivement réalisés. 359. Mais pour que le rôle de « franc-tireur » ou de « perturbateur » au sein d’une entente, révélé par la non-application du plan poursuivi par celle-ci, puisse être retenu au bénéfice de l’entreprise qui invoque un tel argument, il faut veiller à la représentativité de l’échantillon de transactions utilisé pour comparer les prix effectivement pratiqués aux barèmes, en recensant un nombre suffisant de transactions et en s’assurant que le recueil de l’échantillon est effectué sur l’ensemble de la période et des produits concernés par les pratiques. Les pièces du dossier montrent en effet que les discussions entre concurrents, sous le contrôle d’un pilote ou avec un point central, pouvaient en pratique aboutir à une autorisation ponctuelle de déroger aux tarifs généraux prescrits. En de tels cas, un écart

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ponctuel constaté entre les prix effectivement pratiqués et les barèmes concertés n’est donc pas la preuve nécessaire de l’absence d’application de l’entente. 360. Dans l’étude présentée par les sociétés du groupe PUM/ Arcelor, les échantillons sur lesquels elle s’appuie pour démontrer que les barèmes élaborés en concertation n’auraient pas été appliqués demeurent insuffisamment représentatifs. L’élaboration d’un échantillon représentatif nécessite d’examiner des transactions parmi toutes celles susceptibles d’être affectées par les pratiques, c’est-à-dire une période de plusieurs années. Or, les écarts présentés entre les prix effectivement pratiqués et les barèmes concertés ne portent que sur trois mois de l’année 2004 et sur seulement deux filiales de PUM/Arcelor sur vingt-deux. De plus, les mois d’avril et de mai 2004 étudiés sont les moins représentatifs de la période de l’entente puisqu’ils sont marqués par une croissance de la demande, conjuguée à une augmentation des prix d’achat et des niveaux de stocks élevés, et a pu faire l’objet de pratiques tarifaires spécifiques. Le mois d’avril est présenté comme une période de déstockage, devant donc donner lieu à des baisses de prix. Dans ce contexte, les déviations enregistrées par rapport aux barèmes durant ces trois mois ne sauraient constituer une description représentative des pratiques tarifaires sur l’ensemble de la période visée. 361. Au surplus, le prix moyen constaté est calculé par référence de produit et par tonnage, et non par client. L’étude ignore donc l’influence des ventes éventuellement faites à des clients monitorés bénéficiant de conditions préfixées quelle que soit la quantité achetée ainsi que des remises maximales possibles pouvant être accordées par client, fixées également en concertation. Dès lors, les comparaisons présentées par les sociétés du groupe PUM/ Arcelor n’apportent pas la preuve d’une non-application par elles des conditions concertées. 362. L’analyse présentée par la société Morel échappe, sur certains points, aux critiques adressées à celle proposée par les sociétés du groupe PUM/ Arcelor. Sur les 58 mois de la participation de Morel à la pratique, un échantillon de cinq mois compris entre mars 2003 et mai 2004 a été analysé, soit sur une période de quatorze mois. En outre, la société Morel comprend peu de points de vente et ne commercialise principalement que des poutrelles. La représentativité de l’échantillon est donc, a priori, meilleure que celle de l’échantillon exploité par les sociétés PUM/Arcelor. Surtout, la société Morel présente des comparaisons de prix établies sur les transactions réalisées avec tous ses clients monitorés, c’est-à-dire ceux pour lesquels le suivi des pratiques concertées était a priori le plus régulier. 363. Pour autant, les transactions étudiées ne représentent au maximum que 15 % des ventes de Morel sur plusieurs régions. L’écart obtenu entre les barèmes et les prix effectivement pratiqués, de 9 à 13 %, n’est de ce fait pas très significatif, d’autant que l’échantillon est réalisé en comptant comme transaction unitaire chaque commande d’un même client faite à la même date. C’est donc avec quatre ou cinq clients seulement par mois, souvent les mêmes, que sont faits les deux tiers des transactions échantillonnées, c’est-à-dire des clients privilégiés de Morel. Le fait que les clients de l’échantillon fourni qui bénéficient des plus grosses remises soient des clients dont le « pilote », au sens de l’entente, était Morel affaiblit encore l’analyse statistique présentée. 364. Les résultats doivent en outre être relativisés pour des raisons méthodologiques tenant à la nature des documents utilisés. Tout d’abord, le classement de clients servant de référence pour effectuer la comparaison entre prix pratiqués et prix concertés s’appuie sur une liste unique de clients, datée d’octobre 2003, et donc postérieure à deux des cinq mois retenus dans l’échantillon. Dans le même ordre d’idée, l’étude attribue une remise de 70 euros à tous les clients classés « A » alors que la remise retenue pour cette catégorie n’était pas toujours de ce montant. De plus, pour le mois de mai 2003, le barème utilisé est en fait un

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barème de septembre, ce qui fausse nécessairement les résultats. Pour le mois de novembre 2003, le barème utilisé provient de Descours & Cabaud, qui a déclaré que ses barèmes étaient parfois établis à des prix différents de ceux en vigueur, des notes internes permettant ensuite d’ajuster ces barèmes. Enfin, l’étude de Morel ne permet pas d’exclure que les barèmes étaient utilisés à titre de référence et influençaient les anticipations des négociants quant aux comportements tarifaires de leurs concurrents, et atténuaient ainsi l’intensité concurrentielle du marché. En outre, quand bien même les barèmes n’étaient pas complètement respectés, ils ont néanmoins pu influencer le montant des remises pratiquées : l’écart enregistré entre les prix effectifs et les barèmes ne correspond donc pas à ce que serait un prix concurrentiel. 365. L’examen des données transmises montre effectivement que les remises accordées à un client à une date donnée – un client effectuant le plus souvent plusieurs achats de produits différents à une même date – sont très fréquemment d’un même montant, quel que soit le produit considéré ou le volume de la commande. Cette uniformité des remises accordées tendrait à démontrer que la structure des prix effectifs était bien influencée par les barèmes. 366. La seconde étude fournie par Morel vise à comparer les volumes déclarés aux volumes effectivement réalisés. Mais les chiffres présentés ne sont tout d’abord ni détaillés ni justifiés. Ensuite, en tout état de cause et à la supposer valide, l’étude ne démontrerait pas une absence d’application des conditions décidées mais uniquement une tentative opportuniste de maximiser son avantage propre au sein de l’entente au détriment de la discipline commune. 367. Il suit de tout ce qui précède que les éléments au dossier, sans démontrer que Morel se serait distancié, de manière claire, des pratiques établies en commun, suggèrent un respect imparfait de la discipline de l’entente par cette entreprise. Son adhésion à l’entente s’est arrêtée à la poursuite d’objectifs propres, ce qui a pu atténuer les effets directs de la pratique sur ses clients. Cette circonstance sera prise en compte au titre des éléments individuels pouvant moduler la responsabilité de Morel, au stade de la détermination de la sanction. Sur l’arrêt immédiat des pratiques 368. Les sociétés KDI, Descours & Cabaud, Maisonneuve, Clisson Métal et Liametho et la FFDM avancent que devrait être retenu comme facteur atténuant leur arrêt immédiat des pratiques dès les premières interventions des autorités de concurrence, c’est-à-dire dès les opérations de visite et saisie en mai 2004. La société Descours & Cabaud précise à cet égard que les lignes directrices de la Commission européenne sur le calcul des sanctions de 2006 considèrent une telle circonstance comme un facteur atténuant. 369. Mais l’arrêt immédiat de pratiques dont le caractère anticoncurrentiel est manifeste n’est que l’application des principes normaux du comportement sur un marché. Le Conseil a ainsi relevé dans sa décision n° 08-D-12 que « si la réitération des pratiques et leur poursuite malgré l’enquête sont un facteur d’aggravation de la sanction, l’absence de réitération comme l’arrêt des pratiques à la suite de l’enquête ne sauraient constituer en elles-mêmes des circonstances atténuantes » (§ 250). De même, la Commission a indiqué dans sa décisions BASF du 9 décembre 2004 que « les ententes constituent, de par leur nature même, des infractions caractérisées au droit antitrust. Ceux qui participent à de telles infractions savent généralement pertinemment qu’ils s’engagent dans des activités illicites. La Commission estime que dans de tels cas de comportement illicite délibéré, le fait qu’une entreprise cesse le comportement incriminé avant toute intervention de la Commission ne mérite pas de récompense particulière, sinon que la durée de l’infraction

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de l’entreprise concernée sera plus courte qu’elle ne l’aurait été autrement. En effet, si l’infraction s’était poursuivie après l’intervention de la Commission, cela aurai constitué une circonstance aggravante. Dans son arrêt Electrodes de graphite ( Aff. Jointes

T-236/01, T-239/01, T-244/01 à T-246/01, T-251/01 et T-252/01 Tokai Carbon Co Ltd et autres c/ Commission, § 341) le Tribunal de première instance a confirmé que le fait pour une entreprise d’avoir volontairement mis fin à l’infraction avant l’ouverture de l’enquête de la Commission a été suffisamment pris en compte par le calcul de la durée de la période d’infraction et ne constitue pas une circonstance atténuante ». 370. A ce propos, et pour répondre à l’argument de la société Descours & Cabaud, on relèvera que les lignes directrices de la Commission sur le calcul des sanctions auxquelles cette société fait référence excluent explicitement les accords de nature secrète tels que les cartels de l’hypothèse d’une atténuation des sanctions compte tenu de l’arrêt immédiat des pratiques. 371. Il s’ensuit que ces différents moyens ne sont pas susceptibles d’atténuer la sanction encourue. Sur le cas particulier du syndicat 372. La FFDM cite le rapport administratif d’enquête en ce qu’il indiquait qu’il était difficile de distinguer ce qui relevait des instances syndicales de ce qui relevait des directions générales des groupes. Elle soutient donc que la gravité de la participation du FNA aux pratiques doit être relativisée dès lors que le syndicat n’aurait fait, en tant que mandataire de ses adhérents, qu’appliquer les directives données par eux en servant de lieu ou d’outil à une entente qui « ne serait autre que celle de quelques adhérents de FNA ». Elle estime notamment que « l’adhésion du syndicat à une politique définie par ses membres est en tant que telle normale ». 373. Mais il résulte des pièces réunies au dossier que le syndicat a joué dans la concertation un rôle actif qui dépasse la simple fourniture d’un support logistique : FNA a collecté et diffusé des informations utiles au fonctionnement de l’entente, a participé aux réunions (dont les réunions de pilotage de l’entente impliquant les trois grands groupes). Ce faisant, le syndicat a dévoyé l’agrément qu’il a reçu du SESSI pour la collecte de données statistiques et méconnu sa mission particulière d’assistance et de conseil qui aurait dû l’inciter à mettre ses adhérents en garde contre le caractère manifestement anticoncurrentiel de leur comportement. 374. En outre, le Conseil de la concurrence a affirmé à plusieurs reprises, notamment dans la décision n° 07-D-48 du 18 décembre 2007 (§ 216) que le rapport administratif d’enquête « [constitue] un document de synthèse auquel aucune disposition législative ou réglementaire [n’attache] de force probante particulière ou d’effet juridique qui lui soit attaché ». En l’espèce, la participation distincte du syndicat par rapport à celle de ses adhérents est notamment matérialisée par le comportement de son secrétaire général, M. D…, qui participait personnellement à un grand nombre de réunions et intervenait dans les régions pour préciser le fonctionnement du dispositif, consolidant ainsi l’entente. 375. Dès lors, l’argument du syndicat est sans portée quant à l’appréciation de la gravité de sa participation. Au demeurant, le moyen soulevé est étonnant de la part d’un syndicat qui a pris des engagements visant à éviter la réitération de pratiques telles que celles examinées. En effet, à suivre l’argumentaire présenté, la fédération professionnelle trouverait « normal » d’adhérer à une nouvelle politique anticoncurrentielle si tout ou partie de ses membres la mettait en œuvre dans le futur.

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d) Sur l’importance du dommage à l’économie 376. Le Conseil a fréquemment rappelé, notamment dans sa décision n° 08-D-13

du 11 juin 2008 (§ 70), que l’article L. 464-2 du code de commerce énonce, parmi les critères d’évaluation de la sanction, l’« importance » du dommage à l’économie. La loi n’impose ainsi pas au Conseil de chiffrer précisément ce dommage comme le ferait le juge de la réparation. Le moyen de la société Morel quant à l’absence d’évaluation précise de surprix ou de perte sèche n’est donc pas pertinent. Il faut en outre rappeler que la Cour de cassation a admis que l’existence d’un dommage à l’économie puisse être inférée de l’atteinte à la concurrence portée par la pratique. Par exemple, dans un arrêt du 10 janvier 1995 (société SOGEA), la Cour de cassation a approuvé la cour d’appel de Paris d’avoir rappelé que « le dommage à l’économie est présumé par la loi dès lors que l’existence d’une entente est établie ». 377. Par ailleurs, le dommage à l’économie s’apprécie pour l’ensemble de la pratique et non entreprise par entreprise. A ce sujet, la Cour d’appel de Paris a notamment jugé dans un arrêt du 17 septembre 2008 qu’« en présence d’agissements prohibés combinant leurs effets simultanément, la requérante n’est pas non plus fondée à reprocher au Conseil d’avoir apprécié le dommage à l’économie dans son ensemble, au regard de l’action cumulée de tous les participants aux pratiques en cause et sans identifier la part imputable à chaque entreprise prise séparément ». Dès lors, les moyens des sociétés mises en causes qui visent à démontrer que leur participation respective ne serait pas susceptible d’avoir un impact sur le marché ou n’aurait pas été bénéfique pour elles ne sont pas pertinents au stade de l’évaluation de l’importance du dommage à l’économie. 378. Au plan méthodologique, au-delà des difficultés qui sont toujours rencontrées lorsqu’un prix observé en période d’entente doit être comparé à un prix concurrentiel hypothétique, difficultés propres à cette méthode, les circonstances de l’espèce rendent particulièrement délicate cette comparaison par des méthodes « uni-variées ». En effet, la fin de la période couverte par les griefs notifiés (mai 2004) est concomitante avec des changements profonds dans le secteur de l’acier. En amont de ce secteur, les prix d’achat de l’acier par les négociants, stables pendant l’essentiel des pratiques, ont fortement augmenté à partir de décembre 2003, avant de décroître en 2005, puis de croître à nouveau en 2006. En aval, certains négociants ont indiqué que la demande de produits sidérurgiques avait fortement progressé à partir de 2004. Or, ainsi que le Conseil de la concurrence l’a indiqué dans sa décision n° 07-D-26 du 26 juillet 2007, « pour apprécier l’impact de l’entente à partir d’une méthode par comparaison, il ne faut modifier qu’un des éléments des marchés comparés et ne pas faire varier simultanément plusieurs paramètres ». 379. En outre, les données recueillies au cours de l’instruction se sont avérées trop agrégées ou trop incomplètes pour produire une analyse économétrique détaillée. Il existe enfin des incertitudes quant aux variables qui permettraient de tenir compte des facteurs susceptibles d’influencer les prix indépendamment des pratiques, tels que les évolutions de la demande et leur impact, ce qui complique d’autant les analyses. Les méthodes d’évaluation utilisées dans les observations des parties, qui ont l’ambition de mesurer le dommage par une méthode quantitative précise et non par la considération d’éléments qualitatifs, présentent dès lors d’importantes limites quant à la fiabilité des conclusions qui peuvent en être tirées. 380. Néanmoins, un faisceau d’éléments quantitatifs et qualitatifs conduit à conclure que le dommage à l’économie causé par les pratiques de l’espèce est important.

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Sur les éléments quantitatifs caractérisant l’importance du dommage à l’économie Les arguments relatifs à la comparaison de l’évolution des taux de marge 381. L’instruction a comparé les taux de marge (prix d’achat – prix de vente/ prix d’achat) observés chez tous les négociants et pour la quasi-totalité des produits, entre deux périodes : celle de 2000 à 2003 – pendant laquelle le cartel fonctionnait et celle – de 2005 à 2007 – où il avait cessé. Le rapport a donné une estimation d’une baisse moyenne sur les cinq principaux produits de -23 %, dont -34 % en moyenne pour les poutrelles, produit le plus étroitement suivi par l’entente : il en a déduit que l’entente avait été de nature à gonfler significativement les profits des entreprises. 382. Les sociétés Morel, Maisonneuve, KDI et, en séance, Descours & Cabaud, relèvent que la comparaison de l’évolution des taux de marge avant et après les pratiques était biaisée et soutiennent que la baisse constatée serait entièrement liée à l’augmentation des prix d’achat sur la période. Morel, Maisonneuve et KDI avancent dès lors qu’une comparaison pertinente ne peut se faire que sur les marges brutes nominales et soutiennent que les leurs n’ont pas changé entre les deux périodes, ce qui serait supposé démontrer l’absence de dommage à l’économie imputable aux pratiques. 383. Mais, si la diminution des taux de marge décrite dans le rapport peut effectivement découler pour partie de l’augmentation des prix d’achat, il convient de relever, au regard notamment des données présentées par Maisonneuve en annexe à son mémoire en réponse et en séance, que, contrairement à ce qui est avancé, les chutes de taux de marge concordent, au moins pour certains négociants et pour certains produits, avec des baisses des marges en valeur nominale. En outre, le début de l’augmentation des prix d’achat date de décembre 2003 tandis que la baisse des marges n’intervient qu’à partir de mai 2004. Enfin, les prix d’achat connaissent fin 2005 des baisses sensibles sans que les taux de marge ne soient pour autant reconstitués. La thèse des défenderesses selon laquelle une hausse des prix d’achat entraîne mécaniquement une baisse du taux de marge alors que la marge nominale reste constante n’est donc pas conforme aux données qu’elles ont elles- mêmes fournies. 384. Au demeurant, la stabilité, voire l’augmentation légère des marges brutes nominales entre la période des pratiques et celle qui lui succède, telles qu’elles sont alléguées et dans les cas où elles sont effectivement observées, doivent être mises en parallèle avec l’augmentation de la demande telle que certaines parties l’ont décrite ou approchée par un indice de construction. En d’autres termes, le caractère atone de la demande durant la période des pratiques aurait pu, en l’absence des pratiques, conduire à une diminution des prix plus marquée que celle observée, tandis que la relative stabilité des marges à l’issue des pratiques pourrait s’expliquer par la croissance de la demande observée à cette période. Dans un tel cas, d’autant plus plausible que France Négoce Aciers présente cette entente comme une entente défensive dans un contexte défavorable (§ 335), le dommage qui en a découlé devrait s’analyser non comme une hausse des prix pendant la période des griefs mais comme un frein à leur baisse. 385. En tout cas, l’élément certain de l’examen des taux de marge est que ceux-ci sont restés assez stables pour toutes les entreprises pendant la période de l’entente, marquée par une baisse des volumes vendus, alors qu’ils sont devenus plus volatils et dispersés pendant la période non couverte par les griefs qui est aussi celle d’une reprise de la demande et d’une plus grande volatilité des prix d’achat des négociants.

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L’étude économique présentée par les sociétés du groupe PUM/ Arcelor 386. Les sociétés du groupe PUM/ Arcelor ont présenté en réponse au rapport une étude économique qui tente d’estimer les effets des pratiques en cause, d’une part, en comparant l’évolution des marges et des taux de marges de certaines filiales de PUM durant et après les pratiques – comparaison dite « uni-variée » – et, d’autre part, en proposant une évaluation économétrique du surprix pratiqué durant la période des pratiques – analyse de régression « multi-variée » – qui vise un raisonnement « toutes choses égales par ailleurs », en prenant en compte certains des facteurs extérieurs aux pratiques susceptibles d’influencer les prix et la mesure des surprix. 387. Sur la base des transactions réalisées par six filiales de PUM, la méthode de la comparaison uni-variée déduit une estimation moyenne de différences de marge entre 2000 à 2004 et 2005 à 2006 comprises le plus souvent entre 2 et 7 % du prix des produits (à l’exception de Berton Sicard), les différences de marge variant significativement selon les filiales étudiées. 388. L’estimation économétrique, censée prendre en compte l’influence de différentes variables (comme le prix d’achat, les coûts de transport, les volumes achetés par commande, une mesure « globale » de la demande, la nature de la clientèle, la saisonnalité des ventes, etc.) sur les prix pratiqués, conduit à des résultats similaires dans le cas des poutrelles (surprix de 3,6 %), supérieurs dans le cas des laminés marchands (de 4,6 % à 7,3 % selon la variable de prix d’achat retenue), et inférieurs dans le cas des produits plats (de 0,4 % à 2,8 % selon la variable de prix d’achat retenue), les estimations de surprix différant ici aussi fortement en fonction des filiales et de la variable de prix d’achat retenue (prix mensuels moyens d’achat ou coût moyen du stock). En supposant que les augmentations de prix n’entraînent aucune diminution des quantités, c’est-à-dire en supposant une élasticité- prix de la demande nulle, l’analyse économétrique conduit à évaluer les surprofits causés par les pratiques des six filiales de PUM sur trois des cinq produits visés par les griefs entre 23,2 et 32,5 millions d’euros selon les spécifications retenues. 389. A titre liminaire, le Conseil relève que l’assiette sur laquelle les calculs sont effectués est très limitée. En effet, l’étude s’appuie uniquement sur des données relatives à cinq des vingt-deux sociétés du groupe PUM/ Arcelor (Berton Sicard, Chaillous, Mirouze, PMSO et PUM Paris Normandie) pour le comportement desquelles des griefs ont été notifiés. Ces résultats sont ensuite extrapolés à une sixième société (Arcelor Profil, de loin la plus active sur les poutrelles). Pour ces six sociétés, l’étude se limite à trois des cinq produits concernés. En définitive, ne sont couverts par l’analyse que 25 à 30 % du chiffre d’affaires généré par les sociétés du groupe PUM/ Arcelor pour les produits concernés pendant la période des griefs, ces sociétés représentant environ 35 à 45 % du total du marché. Ainsi, l’évaluation du surprofit, entre 23,2 et 32,5 millions d’euros, ne couvre que 10 % à 14 % du volume des ventes concernés par l’entente. A titre illustratif, une extrapolation, en ordre de grandeur, à partir de la base réduite utilisée et des montants présentés à l’ensemble du marché concerné par les pratiques conduirait, à suivre la méthode proposée par l’entreprise en cause, à évaluer le surprofit de l’entente entre 165 millions d’euros et 325 millions d’euros. 390. Mais, au-delà de l’assiette retenue pour évaluer le dommage et même en limitant ce dernier aux effets du surprix, cette estimation pourrait n’être qu’un minorant de l’importance du dommage réel car l’étude proposée par les sociétés du groupe PUM/ Arcelor présente des limites méthodologiques qui remettent en cause tant les résultats proposés et leur ordre de grandeur que la robustesse générale de l’analyse.

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391. En effet, l’estimation proposée du surprix prend comme période de référence les mois de janvier 2000 à décembre 2004 et de janvier 2005 à décembre 2007. Elle intègre donc les mois de mai 2004 à décembre 2004 à la période de l’entente. L’analyse suppose donc que les pratiques se seraient prolongées jusqu’à fin 2004, contrairement à ce qu’indiquent les pièces du dossier qui conduisent à penser que la fin de l’entente est concomitante avec les opérations de visites et saisies du 25 mai 2004. Ce choix de la période est d’ailleurs en contradiction avec la propre position des sociétés du groupe PUM/ Arcelor qui soutiennent que les pratiques n’auraient pas produit, par inertie, d’effets au-delà de mai 2004. 392. Le choix de cette période de référence, contradictoire avec les autres pièces du dossier, a été justifié par l’étude économique qui a précisé, qu’à défaut de retenir cette période, les résultats du test économétrique seraient « contre-intuitifs ». Interrogés en séance sur la signification des termes « contre-intuitifs », les sociétés du groupe PUM/ Arcelor ont indiqué que les surprix estimés sont négatifs lorsque la période de l’entente considérée dans les estimations correspond à celle établie dans les griefs notifiés. Autrement dit, dans cette hypothèse, plus cohérente avec les pièces figurant au dossier, la fin de l’entente aurait entraîné une hausse des prix. Dès lors, il faut conclure, soit que l’entente a eu pour effet de diminuer les prix pendant les cinq années durant lesquelles elle est établie, ce qui, comme le suggèrent les choix méthodologiques des auteurs de l’étude, paraît peu vraisemblable et même « contre-intuitif » au regard des stratégies mises en œuvre par les opérateurs, soit que, plus probablement, les variables utilisées dans l’étude économétrique s’avèrent incapables de conduire l’analyse « toutes choses égales par ailleurs » nécessaire à une quantification crédible du dommage causé par les pratiques. 393. De fait, compte tenu de la concomitance de la fin des pratiques et de la modification très significative des conditions de marché, les différents paramètres susceptibles d’influencer les prix doivent être mesurés avec suffisamment d’exactitude pour pouvoir donner une estimation fiable du surprix résultant de l’entente. Il n’est donc pas étonnant que l’étude se soit heurtée à des difficultés qu’elle n’a pas surmontées. Par exemple, l’étude présentée par les sociétés du groupe PUM/ Arcelor retient le prix d’achat des produits auprès des producteurs comme variable explicative du prix de revente, ce qui est logique dans un métier de négoce, mais reconnaît que les estimations des surprix sont très sensibles à la mesure de ce prix d’achat et que les résultats sont différents selon que l’on choisit comme prix d’achat des produits sidérurgiques pertinent le coût moyen du stock ou le prix d’achat mensuel moyen. A fortiori, lorsque le prix d’achat devient lui-même très volatil, il devient très difficile d’en inférer l’évolution des prix de revente. 394. Le même constat peut être fait pour la demande que l’étude retient également comme variable explicative de l’évolution des prix de vente. L’indicateur de demande utilisé par les sociétés du groupe PUM/Arcelor, à savoir l’indice Eurostat de la construction, présente ainsi une forte augmentation à partir de mai 2004. Mais il n’est pas établi que l’évolution de la construction, qui ne concerne que la demande du secteur du bâtiment, reflète l’évolution de la demande générale de produits sidérurgiques. La société KDI a d’ailleurs contredit ce point en indiquant en séance que la demande était selon elle restée relativement stable à partir de mai 2004, ou avait même diminué. Son point de vue est confirmé par l’examen des volumes globaux de vente issus des chiffres communiqués par le FNA (§ 27). 395. Il résulte de ce qui précède que, compte tenu de ses limites méthodologiques, l’étude transmise par les sociétés du groupe PUM/ Arcelor n’est pas à même de proposer une évaluation fiable du dommage à l’économie produit par les pratiques examinées.

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Les évaluations présentées en séance par la société Descours & Cabaud 396. En séance, la société Descours & Cabaud a présenté trois évaluations du dommage à l’économie, qu’elle estime être des majorants de sa valeur : une comparaison des écarts de marge réalisés sur les poutrelles par Descours & Cabaud avant et après la fin des pratiques rapportés au volume annuel du marché du négoce tous produits compris, une appréciation de la rentabilité moyenne de l’activité aciers de Descours & Cabaud rapportée à l’ensemble du marché et une appréciation de la capacité d’autofinancement moyenne de l’activité aciers de Descours & Cabaud rapportée à l’ensemble du marché et diminuée des amortissements et de la rémunération du capital investi. Elle en déduit des surprofits théoriques annuels maximums de 25 millions d’euros dans les deux premières approches et de 12 millions d’euros dans la troisième. Ramené aux 58 mois de durée des pratiques, ces montants correspondraient respectivement à 121 millions et 58 millions d’euros. 397. Mais ces évaluations ne peuvent être jugées représentatives ni d’un surprofit théorique annuel, ni de son ordre de grandeur. 398. S’agissant de la première approche, plusieurs imprécisions dans les chiffres retenus contredisent le niveau de surprofit avancé. D’abord, la variation de marge de 10 euros par tonne, prise comme référentiel du calcul, apparaît être inférieure à la réalité. Le tableau présenté par Descours & Cabaud indique ainsi pour le 1er semestre 2004 (soit jusqu’à juin 2004, la période visée par les griefs se terminant fin mai 2004 et les prix d’achat ayant déjà commencé à augmenter depuis décembre 2003) un niveau de 129 euros par tonne. Pour le second semestre 2004, il indique un niveau de 108 euros par tonne, soit une « baisse significative et instantanée » de 21 euros par tonne, que Descours & Cabaud présente dans les documents remis dans le cadre de la procédure de clémence comme la preuve de son arrêt immédiat des pratiques et qu’elle oppose dans son mémoire en réponse aux déclarations de M. Y… sur son comportement. Ensuite, l’écart de marge est appliqué à un volume moyen annuel qui serait de 2,5 millions de tonnes environ. Néanmoins, ce chiffre ne correspond pas à ceux communiqués par France Négoce Aciers (§ 27), qui ne concernent du reste pas tous les produits en cause mais seulement les cinq principaux, selon lesquels les volumes distribués auraient atteint 3,3 millions de tonnes en 2001 et le volume moyen annuel serait entre 2001 et 2004 de 2,9 millions de tonnes par an. En corrigeant ainsi les chiffres présentés par Descours & Cabaud, le dommage est presque deux fois et demi plus important que celui proposé : il atteint, pour les 58 mois qu’ont duré les pratiques, 294 millions d’euros. 399. En outre, cette approche par les marges connaît les mêmes difficultés d’interprétation que celles relevées aux paragraphes 381 et suivants, et ce d’autant qu’elle extrapole à tous les produits des résultats concernant uniquement les poutrelles. Il résulte dès lors de ce qui précède que les évaluations proposées par la société Descours & Cabaud ne permettent pas non plus d’évaluer avec précision le dommage à l’économie généré par les pratiques visées dans les griefs. 400. Les deuxième et troisième approches présentées ne peuvent pas non plus être considérées comme pertinentes, dès lors que Descours & Cabaud ne justifie ni les chiffres avancés, ni la représentativité de sa situation vis-à-vis de celle d’autres négociants. Au demeurant, l’importance du dommage à l’économie ne se confond pas avec la rentabilité financière des entreprises ayant mis en œuvre les pratiques visées et son évaluation ne peut en tout état de cause tenir compte des amortissements, provisions ou de la rémunération du capital investi par ces entreprises.

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Les arguments relatifs à l’exploitation de la déclaration de M. Y… 401. Les parties contestent également le fait que le rapport, pour estimer l’importance du dommage à l’économie, s’est appuyé en partie sur les propos de M. Y…, président de KDI, tenus lors de la réunion du comité exécutif du FNA du 15 mars 2005, c’est-à-dire neuf mois après les premières visites des enquêteurs (cote 23369) : « Descours & Cabaud a effectué depuis quelques mois une véritable ponction sur le marché et par les prix indiqués, baisse de 40€/Tonne, a fait perdre environ 100 M€ à la profession pour en rapporter 1 ou 1,5 de plus à ses actionnaires ». 402. Le Conseil n’entend pas regarder la déclaration de M. Y… au comité exécutif du 15 mars 2005, qui fait à l’évidence référence à l’agressivité tarifaire de Descours & Cabaud durant la période postérieure aux visites et saisies et – a contrario – au niveau des prix pratiqués pendant celle de l’entente, comme une estimation arithmétique. 403. Mais la circonstance que les propos de M. Y… ne résultent pas d’un calcul scientifique ne leur ôte pour autant pas toute valeur probante. En effet ; l’estimation de M. Y… est à quelques mois contemporaine des faits en cause et a été délivrée devant ses pairs : ce n’est pas le cas des déclarations produites a posteriori dans le cadre du contradictoire, qui ne résultent pas non plus de calculs scientifiques rigoureux. 404. Le Conseil relève à cet égard que les estimations établies par les sociétés du groupe PUM/ Arcelor et Descours & Cabaud par des méthodes qu’il ne reprend pas à son compte, aboutissent comme cela a été indiqué précédemment, à des estimations de surprofits de plusieurs centaines de millions d’euros, en cohérence avec l’extrapolation faite à partir de l’intervention de M. Y…. Celle-ci constitue donc un élément supplémentaire qui continue à donner un ordre de grandeur du dommage à l’économie. Si le processus concurrentiel réanimé à partir de juin 2004 a conduit les négociants à restituer – en moins de 10 mois – cent millions d’euros aux entreprises clientes sous forme de baisse des prix, une simple multiplication permet d’approcher ce dont ces dernières ont été privées pendant les 58 mois de fonctionnement du cartel. Un tel ordre de grandeur est compatible avec une autre hypothèse plutôt conservatrice : un renchérissement artificiel des prix de l’ordre de 5 à 10 % pendant la période de mai 1999 à mai 2004 – chiffre plus que modéré compte tenu des observations générales qu’ont pu tirer les études économiques qui se sont penchées sur les cartels de la nature de celui mis à jour en l’espèce – fait apparaître, compte tenu de la valeur cumulée des ventes sur la période (environ 7,25 milliards d’euros), un prélèvement sur les entreprises clientes compris entre 360 et 720 million d’euros. 405. Les déclarations attribuées à M. Y… participent donc à démontrer que le dommage à l’économie dans la présente affaire est d’une part certain et d’autre part important et, qu’à titre illustratif, un chiffrage en centaines de millions d’euros sur toute la période, et non pas de dizaines de millions d’euros comme semblent l’indiquer les évaluations communiquées par les parties, doit être retenu. Sur les éléments qualitatifs caractérisant l’importance du dommage à l’économie 406. Les sociétés du groupe PUM/ Arcelor et KDI relativisent le dommage causé par les pratiques, d’une part en avançant que, compte tenu de certaines des caractéristiques du secteur du négoce de produits sidérurgiques, les pratiques n’ont pu produire d’effets aussi importants que ceux suggérés dans le rapport et, d’autre part en soulignant le rôle économique marginal joué par le marché du négoce dans la filière des produits sidérurgiques. Mais la portée de ces arguments demeure limitée. Au contraire, certaines caractéristiques intrinsèques du marché et des pratiques renforcent l’importance du

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dommage à l’économie, qui est lié à la taille du marché, à l’effet de diffusion des prix sur le marché aval et à la perturbation profonde et durable du processus concurrentiel dans le secteur concerné. Les caractéristiques du négoce de produits sidérurgiques 407. Les sociétés du groupe PUM/ Arcelor estiment que deux caractéristiques du secteur ou de la filière du négoce de produits sidérurgiques limitent le dommage à l’économie provoqué par les pratiques : l’autonomie tarifaire de chacune des filiales de PUM, qui rendrait peu crédible un suivi systématique des barèmes, et la forte variabilité des prix d’achat et de la demande locale, qui empêcherait de mettre au point durablement des barèmes communs à tous les opérateurs. La société KDI avance que le secteur du négoce serait tout d’abord « extrêmement dépendant du marché amont », du fait – c’est la seule explication donnée – de la « concentration des acteurs de la production » et qu’il existerait plusieurs substituts aux produits sidérurgiques (béton, aluminium, PVC, bois,…) susceptibles d’être utilisés par les entreprises clientes des négociants de produits sidérurgiques. 408. Mais ces moyens ne sont pas pertinents pour plusieurs raisons. En premier lieu, l’hétérogénéité des marchés locaux et le caractère aléatoire de la demande, arguments acceptables uniquement pour les plus petits des clients – les plus importants étant traités au moins en partie au niveau national – n’empêchent pas les pratiques visées de produire leurs effets, dès lors que celles-ci étaient précisément structurées de façon à prendre à compte les caractéristiques de ces marchés. L’organisation des pratiques permettait ainsi une concertation sur les prix en dépit de la dimension locale de l’activité, de son hétérogénéité, de l’existence de transactions de gré à gré et de l’incertitude entourant tant l’évolution des prix d’achat que celle de la demande. Pour cela, les réunions étaient mises en place à une fréquence élevée, les barèmes étaient régulièrement actualisés et la prise en compte des évolutions des prix d’achat – au demeurant nettement plus limitée durant la période concernée par les pratiques que pendant la période suivante – était assurée par la transmission des dispositions nationales et leur transposition au niveau régional, voire départemental. 409. Dès lors, les pratiques permettaient d’adapter les prix et les classements de clients aux spécificités des marchés locaux. En outre, la liberté tarifaire était limitée par un mécanisme de surveillance déployé au niveau régional, voire infrarégional. Il a été vu que les réunions régionales étaient l’occasion de faire un suivi de l’application du dispositif dans les réponses faites aux consultations, que la concertation reposait sur des dispositifs permanents et formalisés de surveillance et de sanction, caractérisés notamment par la désignation de points centraux et de pilotes chargés de surveiller l’évolution des affaires et de décider, le cas échéant, de mesures correctrices. Par ces mécanismes, les parties en cause disposaient donc des moyens nécessaires à un suivi significatif et précis des recommandations de prix, en dépit du caractère diffus des structures de distribution du négoce de produits sidérurgiques et de l’autonomie tarifaire des filiales. 410. En deuxième lieu, les arguments de KDI mettant en avant la « dépendance » du secteur aval par rapport au secteur amont, qui ne sont pas précisément étayés et omettent de relever la concentration élevée qui marque aussi le secteur du négoce, ne sont pas de nature à justifier une atténuation de la sanction et ce d’autant moins que les pratiques ont eu pour premières victimes les entreprises clientes, et non les producteurs dont dépendraient, selon l’entreprise, les négociants. 411. L’existence de produits substituables à ceux visés par les pratiques n’est pas démontrée par l’entreprise en cause. Dans le cas d’une utilisation des produits sidérurgiques visés par les

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pratiques dans le secteur de la construction, la Commission européenne a souligné à plusieurs reprises que les différentes catégories de produits sidérurgiques concernées par les pratiques ne sont généralement pas substituables avec les matières premières évoquées (bois, PVC, aluminium, etc.) par KDI dans sa contribution écrite. Ainsi, dans le cas des produits sidérurgiques destinés à être utilisés dans le secteur de la construction, la décision de la Commission européenne relative à la concentration entre Usinor, Arbed et Aceralia (affaire M.2382) relève l’absence de substituabilité entre produits sidérurgiques et autres matériaux (aluminium, plastics, matériaux composites). Au surplus, la thèse même d’une faible élasticité-prix de la demande serait contradictoire avec celle de l’existence de produits substituts. La taille du marché 412. Le marché concerné est un marché intermédiaire de moindre dimension que le marché amont de la production et de la vente d’acier. Par an, la valeur totale des ventes sur ce marché est cependant très importante. D’après les différents chiffres au dossier, elle se situe selon les années concernées entre 1,3 et 2 milliards d’euros, avec une moyenne aux alentours de 1,5 milliards d’euros. Les pratiques concernent tout le territoire national, indépendamment du caractère local de l’activité de certains négociants, toutes les régions et tous les types de clientèle. L’effet de diffusion sur les marchés aval 413. L’acier est un bien intermédiaire utilisé par des entreprises de toutes tailles dans de nombreuses industries – bâtiment, travaux publics, industrie navale, etc. – ainsi que par des artisans tels que des serruriers, etc. Dans de tels cas, le surprix de l’amont est au moins en partie transmis par les opérateurs en aval, augmentant ainsi le prix final subi par le consommateur. KDI avance que le négoce ne réaliserait qu’une part marginale des ventes totales d’acier en France et ne représenterait qu’une part minime du prix de vente final des produits contenant de l’acier. 414. Mais, tout d’abord, le dommage s’évalue au premier chef au regard du marché et du chiffre d’affaires que les opérateurs y réalisent. En l’espèce, le négoce de produits sidérurgiques constitue un marché distinct de celui de la vente en gros de ces mêmes produits, ainsi qu’indiqué au paragraphe 200. Sur ce marché, les parties à l’entente bénéficient d’une part de marché cumulée de 70 à 90 %. On relèvera au surplus que, pour certaines catégories de produits visées, comme les poutrelles et les laminés marchands, la part du négoce dans le chiffre d’affaires total des ventes est élevée, allant jusqu’à 90 % ; elle est par contre plus faible dans le cas des produits plats (10 à 15%) et des ronds à béton (40 %). 415. Ensuite et surtout, le niveau des marges brutes et des taux de marge réalisés par la filière du négoce sidérurgique atteste du rôle effectif que joue cette dernière dans le prix final de l’acier vendu par les négociants, qui sont pour certaines entreprises clientes – et notamment des PME – une source d’approvisionnement incontournable. La perturbation profonde et durable du processus concurrentiel 416. L’entente a non seulement anéanti la compétition entre ses membres mais aussi combattu la concurrentielle potentielle venue de nouveaux entrants. Les pratiques avaient en effet l’objectif affiché de décourager l’entrée d’acteurs extérieurs, par le biais notamment de mesures coercitives. Elles ont ainsi pu générer des barrières artificielles à l’entrée, en autorisant par exemple, par le biais des « droits de suite » ou d’aménagements, des déviations aux accords de l’entente qui pouvaient aller jusqu’à des ventes à prix coûtant,

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notamment en présence d’une entrée potentielle susceptible de créer une pression à la baisse sur les prix. 417. Cette perturbation profonde de la concurrence, existante et potentielle, a duré 58 mois, soit une période suffisamment longue pour affecter la structure du marché. 418. Tous ces éléments pris ensemble permettent de conclure que le dommage à l’économie dans la présente affaire est à la fois certain et important. e) Sur la réitération 419. Dans sa décision n° 07-D-33 du 15 octobre 2007, le Conseil a indiqué que « la réitération des pratiques est depuis longtemps considérée par le Conseil de la concurrence comme une circonstance aggravante justifiant une élévation de la sanction notamment au regard de l’objectif de dissuasion que poursuit sa politique de sanctions ». Ainsi qu’indiqué au paragraphe 299, l’article L. 464-2 du code de commerce dans sa rédaction issue de la loi NRE de 2001, qui en a fait un critère explicite de détermination du montant des sanctions, est applicable dans la présente affaire pour des pratiques initiées en 1999 mais qui se sont poursuivies au-delà de 2001. Le régime sui generis de la réitération au sens du droit français de la concurrence exige, pour en apprécier l’existence, que quatre conditions soient réunies. Il faut : • en premier lieu, qu’une précédente infraction au droit de la concurrence ait été constatée avant la commission des nouvelles pratiques ; • en deuxième lieu, que ces dernières soient identiques ou similaires, par leur objet ou leur effet, à celles ayant fait l’objet du précédent constat d’infraction ; • en troisième lieu, que ce dernier soit devenu définitif à la date à laquelle l’autorité de concurrence statue sur les nouvelles pratiques ; • en quatrième lieu, que le délai écoulé entre le précédent constat d’infraction et la commission des nouvelles pratiques soit pris en compte pour appeler une réponse proportionnée à la propension de l’entreprise à s’affranchir des règles de concurrence. 420. L’instruction s’est fondée, dans la présente affaire, sur trois éléments pour proposer que soit retenue la réitération : • une décision ministérielle du 31 mai 1978 reprenant intégralement un avis de la Commission de la concurrence du 12 janvier 1978, qui a constaté sur le marché du négoce des tubes aciers une entente entre des négociants, dans la cadre du SNCTR (devenu par la suite le SNCPS puis le FNA), consistant, au cours de réunions nationales ou régionales et dans le but avoué d’améliorer la rentabilité du négoce des tubes acier et d’atténuer les effets de la concurrence sur le niveau des prix, en la publication de tarifs de prix indicatifs édités par le syndicat et en la détermination concertée de taux de remises maximales à consentir aux différentes catégories de clientèle ainsi qu’aux principaux clients et assortis de contrôles. Parmi les destinataires de la décision ministérielle figuraient le SNCTR, la société Descours & Cabaud, la société Nozal, la société Hardy-Tortuaux et la société Lapauze ; • une décision de la Commission européenne du 16 février 1994, qui a constaté, notamment sur le marché français, l’existence d’accords et de pratiques concertées entre 1988 et 1991 ayant pour objet ou pour effet de fixer les prix, d’accorder des quotas et d’échanger sur une grande échelle des informations sur le marché communautaire des poutrelles. Ces pratiques se sont organisées autour de réunions

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dans le cadre du syndicat européen Eurofer, notamment à l’occasion de « commissions poutrelles », en mettant en place un monitorage des commandes et des livraisons. Elles concernaient à la fois des producteurs, des distributeurs et plusieurs marchés géographiques dont le marché français. Parmi les destinataires de la décision figuraient Unimétal, sanctionnée pour son comportement propre et celui de sa maison mère, Usinor Sacilor, et Cockerill SA, sanctionnée pour son comportement propre et celui d’une de ses filiales de distribution, Steelinter SA. Y figurait également Arbed SA, à l’égard de laquelle la décision a été annulée par le TPICE pour des questions de procédure puis reprise le 8 novembre 2006, ce qui fait que manque la première condition retracée au paragraphe 419 ; • une décision de la Commission européenne du 21 janvier 1998, qui a constaté l’existence de pratiques anticoncurrentielles consistant, entre décembre 1993 et janvier 1998, en l’application concertée des valeurs de référence de la formule de calcul de l’extra d’alliage sur le marché des produits plats en acier inoxydable. Parmi les entreprises sanctionnées figurait la société Ugine SA. Sur l’existence d’un constat d’infraction antérieur 421. Les sociétés du groupe PUM/ Arcelor ont avancé, concernant la décision du ministre de 1978, que celle-ci ne pouvait être prise en compte dès lors qu’elle indiquait que les infractions relevées étaient en majeure partie couvertes par la prescription et que la préconisation de poursuites judiciaires n’était donc pas possible. 422. Mais, dans cette procédure, la Commission de la concurrence a constaté des ententes de prix manifestes et délibérées. A la suite de cet avis, le ministre a relevé « le caractère de gravité des pratiques en cause », enjoint aux intéressés « de mettre fin sans délai aux pratiques concertées condamnées dans le présent avis ainsi qu’à toute autre pratique anticoncurrentielle prohibée par l’ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945 [qu’ils auraient] pu engager » et renvoie à l’avis de la Commission de la concurrence s’agissant de l’injonction suivante : « renoncer expressément pour l’avenir à des ententes de prix telles que celles qui ont été constatées dans le passé et à notifier par écrit et sans délai cet engagement à tous ses adhérents; qu’il soit également invité à faire savoir aux négociants, adhérents ou non, par publication dans leurs revues professionnelles, qu’ils n’auront plus communiquer à qui que ce soit ni la liste de leurs clients ni les commandes reçues, les tonnages livrés et les conditions consenties, dès lors que ces renseignements seraient individualisés pour chaque client ». 423. Le moins que l’on puisse faire en rapprochant cette décision ministérielle, qui n’a pas infligé de sanctions pécuniaires ni engagé de poursuites pénales, des constatations opérées dans la première partie de la présente décision est de relever le caractère peu dissuasif des injonctions prononcées. Elles n’ont pas empêché les entreprises de reconstruire, avec une grande ampleur et de manière occulte, le dispositif précédemment condamné. 424. Quoi qu’il en soit, la circonstance que le constat d’infraction n’ait pas été accompagné de sanctions pécuniaires ou de la saisine du juge pénal au fondement de l’article 52 de l’ordonnance de 1945 ne fait pas échec à ce qu’il puisse être pris en compte au titre de la réitération.

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Sur le caractère définitif, à la date de la présente décision, du constat d’infraction 425. Les décisions concernées sont devenues définitives : • la décision ministérielle du 31 mai 1978 n’a pas fait l’objet de recours ; • la décision de la Commission européenne du 16 février 1994 est devenue définitive pour ce qui concerne le marché français et les entreprises autres qu’Arbed SA ; • la décision de la Commission européenne du 21 janvier 1998 n’a pas fait l’objet de recours de la part d’Ugine SA. 426. Ce point n’est pas contesté par les parties. Sur l’identité ou la similitude des pratiques 427. La réitération a pour objet d’appréhender les cas dans lesquels une entreprise précédemment sanctionnée pour un type particulier de comportement met de nouveau en œuvre des pratiques identiques ou similaires. Pour être prises en compte, les pratiques peuvent être identiques ou similaires par leur même objet anticoncurrentiel, critère qui renvoie pour l’essentiel à la base légale utilisée pour les qualifier, mais elles peuvent aussi être identiques ou similaires par leur même effet anticoncurrentiel, critère qui s’attache davantage à la finalité du comportement poursuivi : des pratiques d’entente ou des comportements unilatéraux peuvent ainsi rechercher le même effet d’éviction à l’égard de concurrents sur un marché, sans pour autant relever du même régime de prohibition. 428. En l’espèce, il y a lieu de relever l’objet identique des pratiques constatées dans la présente affaire et de celles sanctionnées par les décisions citées au paragraphe 420. Elles concernent toutes des accords horizontaux entre concurrents, ayant pour objet de contrôler les prix et/ou de répartir des marchés. Pour les procédures ayant donné lieu aux décisions de 1978 et 1994, la proximité est d’autant plus forte que les produits sont les mêmes (tubes dans un cas et poutrelles dans l’autre) et que le détail de la pratique est quasiment identique : réunions syndicales prenant la forme de réunions produits, avec mise en place de classements de clients dans un cas et d’un système de monitorage, de contrôle et de répartition de marché dans l’autre. 429. Deux catégories de moyens ont été soulevées, relatives aux normes applicables d’une part et à l’identité des entreprises en cause d’autre part. Sur l’identité des normes applicables 430. Les sociétés du groupe PUM/ Arcelor avancent que les décisions de la commission européenne de 1994 et 1998 ayant été prises sur le fondement de l’article 65§1 du Traité CECA et non sur celui de l’article 81 du Traité CE, le critère de réitération ne pourrait pas être appliqué. 431. Mais la circonstance que la prohibition ait été fondée sur les dispositions de l’article 65 du Traité CE, applicable au secteur du charbon et de l’acier tout en étant rédigé dans des termes voisins de ceux de l’article 81 du Traité afin d’appréhender les mêmes comportements, c’est-à-dire des infractions au droit communautaire de la concurrence, ne peut à elle seule faire échec à la prise en compte de la réitération. Il suffit en effet de relever que le premier constat d’infraction visait des pratiques identiques ou similaires, par leur objet ou leur effet, à celle constatées aujourd’hui.

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Sur l’identité des entreprises 432. Plusieurs sociétés étaient concernées par l’avis de la Commission de la concurrence et de la décision du ministre de 1978. Parmi celles-là, les sociétés Nozal et Hardy-Tortuaux, qui appartenaient respectivement à l’époque à Usinor et Arbed et sont depuis devenues KDI et passées sous contrôle du groupe Klöckner. Les sociétés du groupe PUM/ Arcelor estiment que la transmission universelle du patrimoine impose que la réitération soit imputée à KDI. La société KDI relève à l’inverse que la réitération ne peut être retenue à son encontre car les sociétés condamnées en 1978 appartenaient à l’époque à de futures sociétés du groupe Arcelor et qu’elles n’ont pas fait l’objet de transmission directe au groupe Klöckner. Concernant les décisions de la Commission européenne de 1994 et 1998, les sociétés du groupe PUM/ Arcelor relèvent qu’Unimétal, d’une part, et Ugine, d’autre part, n’ont appartenu au même groupe que PUM qu’à compter de 1999, soit après les pratiques incriminées par les décisions de 1994 et 1998, et n’ont, même postérieurement, jamais fait l’objet d’un contrôle par PUM. 433. Sur ces questions, comme le Conseil l’a rappelé dans sa décision n° 08-D-13 du 11 juin 2008, « les modifications d’organisation (…) ou le renouvellement du personnel constatés depuis la précédente pratique sont sans incidence, dès lors que la réitération vise le renouvellement des pratiques, indépendamment de toute référence au contexte interne, nécessairement évolutif, de l’entreprise. C’est la personne morale qui assume la continuité juridique ou économique de l’entreprise auteur de la première infraction qui, en renouvelant les pratiques, commet une réitération ». L’appréciation de la réitération doit donc suivre les mêmes règles que celles utilisées pour rechercher l’imputabilité des pratiques. 434. La société Nozal, dont l’infraction a été constatée en 1978, a été acquise par fusion par la société Aref, dont le numéro de RCS était 352 645 501, en 1993. Cette société a changé de raison sociale, en devenant Nozal SA, et de siège en 1994. Elle a de nouveau changé de raison sociale en 1999 pour devenir KDI. Cette dernière société, à laquelle des griefs ont été notifiés, assume donc la continuité juridique et économique de Nozal. 435. Le fonds de commerce de la société Hardy-Tortuaux, dont l’infraction a également été constatée en 1978, a été transmis en 1993 à la société Sofisid, dont le numéro de RCS était 389 588 526. La société Hardy-Tortuaux a changé de raison sociale en 1994, en devenant Arus, puis en 1998, en devenant Klöckner Distribution Industrielle, actuelle société holding détenant les parts de KDI. La société Sofisid a changé de raison sociale, en devenant Hardy-Tortuaux, en 1994, puis a été acquise par fusion par KDI en 2000. 436. Dès lors que la personne morale condamnée en 1978 existe toujours et ne s’est pas vue notifier de griefs, la réitération ne peut être imputée à KDI s’agissant d’Hardy-Tortuaux. Elle ne peut pas l’être non plus s’agissant de Lapauze qui a été acquis par fusion par Hardy-Tortuaux en 1993 et se trouve donc exactement dans la même situation. 437. Le SNCTR, dont l’infraction a été constatée en 1978, est intégré depuis 2003 à FNA, qui est devenu la FFDM. 438. La société Descours & Cabaud n’a pas connu de modification. 439. La société PUM Service Acier n’assume la continuité juridique ou économique ni d’Unimétal, ni de Steelinter. Dès lors, la réitération ne peut lui être imputée. 440. Cockerill, Usinor et Ugine font, par le jeu de fusions successives, actuellement partie de la société ArcelorMittal, qui est la société mère de PUM Service Acier. Dès lors que des griefs n’ont pas été directement notifiés à ArcelorMittal et que la société PUM Service

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Acier n’assume la continuité juridique ou économique d’aucune de ces trois sociétés, la réitération ne peut non plus être imputée à PUM. 441. Ne restent donc en cause, pour la prise en compte d’une éventuelle réitération, que les sociétés KDI et Descours et Cabaud ainsi que la FFDM, au titre du constat d’infraction dressé en 1978. Sur le délai écoulé entre les pratiques 442. La société KDI note que l’absence de pratiques anticoncurrentielles relevées à son encontre entre 1978 et 1999 démontre qu’elle n’avait pas de réelle volonté de ne pas tenir compte des règles de concurrence, critère pourtant central en matière de réitération. La société Descours & Cabaud n’hésite pas à soutenir qu’elle a satisfait à l’injonction ministérielle de 1978 de « mettre fin sans délai aux pratiques concertées » en mettant fin volontairement à l’entente en mai 2004. Elle souligne en tout état de cause que le délai de 21 ans observé entre le premier constat d’infraction et le début des nouvelles pratiques ne peut conduire qu’à une aggravation limitée de la sanction. 443. S’agissant de la période écoulée, le législateur n’a pas fixé de limite à la prise en compte de décisions antérieures pour établir la réitération. En conséquence, le Conseil de la concurrence dispose d’une certaine marge d’appréciation. L’affaire Danone (arrêt de la CJCE du 8 février 2007) illustre la prise en compte par la Commission européenne d’une décision de 1974 pour établir la récidive au regard de nouvelles pratiques mises en œuvre de 1993 à 1998, soit 19 ans plus tard. Néanmoins, le principe de proportionnalité invite à ce que la période de temps écoulée entre les pratiques incriminées et le ou les constats d’infraction antérieurs soit prise en compte notamment pour apprécier, à l’aune de l’objectif de dissuasion, la propension de l’entreprise à s’affranchir des règles de concurrence. La réitération de pratiques sanctionnées vingt ans auparavant n’appelle pas a priori la même réponse que celles qui l’ont été trois ans plus tôt. 444. Le Conseil a indiqué dans la décision n° 08-D-13 du 11 juin 2008 que ces principes appellent « à une modulation de la sanction en fonction du délai » écoulé « sans inférer qu’une réitération de pratiques constatées depuis plus de vingt ans n’ait aucune incidence en terme d’amende. (…) Cependant, il n’est pas contestable que le taux de majoration de la sanction doit être modulé en fonction du délai séparant la qualification de la pratique primitive (…) de la pratique réitérée ». Dans cette affaire il a pris en compte la réitération à hauteur de 5 % pour une constatation d’infraction datant de presque 20 ans (décision ministérielle d’août 1983 et début des nouvelles pratiques en mars 2003). 445. Pour apprécier le délai écoulé, il convient de comparer la date du premier constat d’infraction à celle du début des nouvelles pratiques. En l’espèce, l’écart s’apprécie donc entre 1978 et 1999, soit 21 ans. Si un tel délai ne fait pas juridiquement obstacle à ce que soit prise en compte la réitération, le Conseil n’entend pas opposer cette dernière aux entreprises au-delà de vingt ans. 446. Il résulte de tout ce qui précède que la réitération ne sera, dans la présente affaire, prise en compte à l’encontre d’aucune entreprise ou syndicat mis en cause. f) Sur la situation individuelle des entreprises Sur l’autonomie alléguée des filiales du groupe PUM/ Arcelor 447. Les sociétés du groupe PUM/ Arcelor relèvent dans leurs observations que le Conseil devrait prendre en compte la situation très décentralisée du groupe et la grande autonomie

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de ses filiales. Elles arguent de l’existence d’une grande latitude commerciale et budgétaire, d’une concurrence entre enseignes, de la différence de comportement selon les régions, de la constitution du groupe Arcelor uniquement à partir de 2002 et du fait que PUM ne serait pas perçu par les acteurs du secteur comme un groupe homogène susceptible d’exercer un effet d’entraînement sur le secteur. 448. Mais, à le supposer établi, le fait que certaines filiales du groupe auraient, en fonction de la période ou du lieu, respecté le dispositif avec plus ou moins de rigueur ne remet pas en cause l’autonomie des filiales par rapport à leur maison mère, qui n’est pas contestée par les sociétés du groupe PUM/ Arcelor. De plus, la société PUM Service Acier n’est pas uniquement poursuivie pour le comportement de ses filiales : il lui est également reproché d’avoir elle-même participé de manière active aux pratiques et de les avoir impulsées, en influençant ses filiales mais également une partie de ses concurrents. Dès lors, la prétendue autonomie de ses filiales est en tout état de cause sans effet sur le calcul du plafond de la sanction, qui doit tenir compte du chiffre d’affaires consolidé du groupe (voir paragraphe 304), et de l’appréciation de l’amende infligée à chacune des sociétés du groupe, qui doit obéir aux règles habituellement retenues par le Conseil. Sur l’effet d’exemplarité du comportement de certaines entreprises 449. Dans son rapport annuel pour 2005, le Conseil de la concurrence mentionne que « l’effet d’entraînement ou d’exemplarité du comportement provenant de telle ou telle entreprise, est parfois noté. La gravité d’une pratique sera différemment appréciée, selon que son auteur bénéficie d’une forte notoriété ou non, est une grande ou une petite entreprise, un syndicat professionnel minoritaire ou un ordre professionnel disposant d’un magistère moral ». A cet égard, le rôle des trois grands groupes sur le marché leur donne une place particulière et, parmi eux, le groupe PUM/ Arcelor. 450. Les sociétés du groupe PUM/ Arcelor soulignent sur cette question que leur comportement n’a pas entraîné les autres sociétés à se méprendre sur le caractère illégal de leur pratique. Elles soutiennent que leur reprocher un effet d’exemplarité serait inéquitable à leur égard, d’abord par rapport aux deux autres groupes, qui ont une importance comparable sur le marché et dont le comportement est dès lors tout aussi exemplaire, et ensuite parce que la même circonstance ne pourrait pas servir à aggraver plusieurs fois leur sanction, au titre de leur situation financière, d’une prétendue exemplarité et d’un prétendu effet d’entraînement s’agissant du dommage à l’économie. 451. Les sociétés du groupe PUM/ Arcelor appartenaient au moment des faits et appartiennent toujours à un groupe de renommée mondiale, incontournable dans le secteur de l’acier en général. L’appartenance à ce groupe donne une place singulière aux sociétés du groupe sur le marché du négoce français. A titre comparatif, Descours & Cabaud est un groupe congloméral : son importance financière ne traduit dès lors pas son impact sur le marché de l’acier. De même Klöckner, bien que spécialisé dans l’acier, n’est pas structurellement lié à un producteur. Parmi les trois grands groupes de négoce, PUM/ Arcelor est ainsi le seul à être intégré verticalement à un producteur et à avoir de ce fait une connaissance interne de l’amont et un accès direct aux produits vendus. 452. Cette place particulière, même parmi les gros négociants, est d’autant plus nette que le groupe Arcelor était à l’époque l’un des principaux fournisseurs des négociants concurrents de PUM/ Arcelor, gros ou petits, dont il était difficile de se passer, au moins sur une partie des approvisionnements. Il avait la capacité, par des ventes directes, d’intervenir, même marginalement, sur les plus gros clients. Il possédait 10 % du capital de KDI (le principal

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concurrent de PUM/ Arcelor). Il était l’un des principaux et plus fréquents intervenants dans les réunions que le FNA organisait avec les producteurs. 453. Les sociétés du groupe PUM/ Arcelor occupaient donc une place à la fois singulière et incontournable. La valeur de malheureux exemple qu’a représenté leur comportement et l’effet directeur de ce dernier sur le niveau concurrentiel du marché doivent donc être pris en compte dans la sanction encourue. Sur la situation des plus petites entreprises sur le marché 454. Les sociétés Morel, Maisonneuve, Clisson Métal, Liametho, Ferren Fers et CODIP ont souligné leur présence peu significative sur le marché pris au niveau national et leur absence totale de certains marchés. Clisson Métal estime sa part de marché à 0,25 % sur les poutrelles, 0,9 % sur les laminés, 0,4 % sur les plats et 1,9 % sur les tubes, Liametho à 0,34 % sur les poutrelles, 0,48 % sur les laminés, 0,23 % sur les plats et 0,47 % sur les tubes, Morel entre 5,9 et 7,4 % sur les poutrelles, entre 1,1 et 1,2 % sur les laminés, entre 0,4 et 1,4 % sur les plats, et à moins de 0,1 % sur les tubes. Maisonneuve estime qu’elle représente 5 % du marché national. 455. Les chiffres au dossier indiquent un très grand déséquilibre sur le marché, que les trois grands groupes de négoce dominent largement : ces derniers représentent en effet entre 60 et 80 % des volumes distribués par les adhérents du FNA. En outre, ils sont les seuls à être présents sur tout le territoire français, les indépendants n’étant actifs respectivement que sur une (CODIP et Ferren Fers par exemple) à 4 régions (Maisonneuve et Morel par exemple), avec parfois des parts de marché très faibles sur certains produits. 456. L’importance respective de chacune des entreprises sur le marché, approchée par l’ordre de grandeur de son chiffre d’affaires et de sa part de marché, notamment en volume, sur les différents produits sera prise en compte dans le calcul de la sanction, qui ne se désintéressera pas non plus du rôle de contrôle ou d’animation de l’entente que certaines de ces entreprises ont exercé sur certains marchés régionaux. Sur l’absence d’infraction antérieure 457. Plusieurs sociétés ont souligné dans leurs observations qu’elles n’avaient antérieurement jamais été reconnues coupables d’infractions aux règles de la concurrence. 458. Mais si le Conseil doit prendre en compte la réitération de pratiques anticoncurrentielles au titre des critères – en l’espèce aggravants – de la sanction (voir la décision n°07-D-33 du 15 octobre 2007 relative à des pratiques mises en œuvre par la société France Télécom dans le secteur de l’accès à Internet à haut débit), l’absence d’infraction antérieure constitue un comportement normal que l’autorité de concurrence n’a pas à regarder comme une circonstance atténuante (voir en ce sens les arrêts de la CJCE du 17 décembre 1991, Enichem Anic/Commission et du 14 mai 1998, Mayr-Melnhof Kartongesellschaft). 459. Il s’ensuit que ces arguments ne sont pas de nature à influencer à la baisse le montant des sanctions encourues. Sur l’absence de bénéfice économique ou financier tiré de la pratique 460. Les sociétés Maisonneuve, Clisson Métal, Liametho et CODIP soulignent l’absence de bénéfice qu’elles ont tiré des pratiques, soit que celles-ci étaient selon leurs dires contraires à leurs intérêts, soit que leur situation commerciale ou financière n’ait pas été modifiée après la cessation de l’entente.

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461. Il a déjà été répondu à ces arguments aux paragraphes 287 et suivants. Il y a lieu de rappeler également la jurisprudence de la Commission européenne selon laquelle : « (…) Le fait qu’une entreprise subisse des pertes ne signifie pas qu’elle n’a pas trouvé un avantage à participer à une infraction aux règles de la concurrence, étant donné que ledit avantage peut consister en une diminution de ses pertes (…). (…)La Commission prend en compte, à titre de circonstance aggravante, les gains réalisés grâce à l’infraction, lorsque cela est nécessaire pour que le montant de l’amende dépasse celui des gains illicites. On ne saurait toutefois en déduire qu’il convient a contrario de considérer l’absence de tels gains comme une circonstance atténuante » (voir, la décision de la Commission du 5 décembre 2001, affaire IV/37.614/F3, PO/Interbrew et Alken-Maes). 462. Il s’ensuit que ces arguments ne sont pas de nature à influencer à la baisse le montant des sanctions encourues. Sur l’imputabilité à des sociétés 463. Le Conseil de la concurrence rappelle fréquemment que lorsqu’elles sont mises en place par une société filiale, les pratiques anticoncurrentielles sont imputables à cette dernière pour autant qu’elle dispose d’une autonomie de décision par rapport à sa société mère. Dans le cas contraire, la société-mère peut être tenue responsable du comportement anticoncurrentiel de sa filiale. 464. Dans le cas de transformations intervenues dans la structure d’exploitation des entreprises ayant pris part à des pratiques anticoncurrentielles, le Conseil de la concurrence, suivant en cela les solutions de la jurisprudence communautaire qui ont été reprises par les juridictions nationales de contrôle, a dégagé les principes applicables en matière d’imputabilité : • tant que la personne morale responsable de l’exploitation de l’entreprise qui a mis en œuvre les pratiques subsiste juridiquement, c’est elle qui doit assumer la responsabilité de ces pratiques, même si les éléments matériels et humains ayant concouru à la commission de la pratique sont cédés à un tiers ; • lorsque la personne morale responsable de l’exploitation de l’entreprise a juridiquement disparu, les pratiques doivent être imputées à la personne morale à laquelle l’entreprise a juridiquement été transmise c’est-à-dire à la personne morale qui a reçu les droits et obligations de la personne auteur des pratiques ; • et si aucune autre personne n’a reçu transmission de ses droits et obligations, c’est à l’entreprise qui assure, en fait, la continuité économique et fonctionnelle de répondre du comportement. 465. Dans la présente affaire, les pratiques mises en œuvre en propre par la société PUM Service Acier, de même que celles commises par ses filiales Arcelor Négoce Distribution, PUM Paris Normandie, D’Huart, devenue Arcelor Profil après fusion avec ProfilArbed Distribution France (qui a absorbé Champion Profil), Mirouze Novacier, Chaillous, SLPM, PMSO, Berton Sicard, Lille Aciers, Lopez, Guille, Fermatec, Prometo, Savoie Metal, CML, CIMA, SIME, Guillot et Baechler, doivent, compte tenu de l’absence d’autonomie de ces dernières, être imputées à la société PUM Service Acier. 466. L’activité produits longs de la société Etablissements Champion (Champion Profil) a été cédée à la société Profil Arbed Distribution France (PADF) en 1997. Cette société PADF a participé à la pratique complexe et continue avant son entrée dans le groupe Arcelor, puis, après la création d’Arcelor, a été intégrée par fusion absorption à la société Arcelor Profil. La société PADF a été radiée en 2003 et c’est donc à Arcelor Profil que doivent être

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imputées les pratiques commises par PADF avant son entrée dans le groupe Arcelor. De même, la société Métal Pyrénées a participé à la pratique complexe et continue avant son absorption par la société PMSO. PMSO est devenue en 2007 AMD Sud/ Ouest et c’est donc à cette dernière que doivent être imputées les pratiques mises en œuvre par Métal Pyrénées avant son entrée dans le groupe Arcelor. 467. Les pratiques mises en œuvre en propre par la société Descours & Cabaud SA, de même que celles mises en œuvre par ses filiales Descours & Cabaud Ile de France, Descours & Cabaud Normandie, Descours & Cabaud PACA, Descours & Cabaud Rhône Alpes Auvergne, Descours & Cabaud Savoie, Dock Généraux/ Dock Industries Services/ David, Beauplet, Martin Rondeau, Lecoufle, Bernard Pagès, Soferac, VAMA/ Comptoir Métallurgique Vendéen, Baudoux, Prevot Smeta, Baures, Bossu Cuvelier, Beaurain, Mailland, CACC, AGDG, CMB, CMF, SMG, Languille, Cattiaux Rochettes, Burdin Bossert, Epac Expansion (SMEPAC), Servet Duchemin/ Commaille, Maringue Sagetat, Guermont Weber et Schmerber doivent, compte tenu de l’absence d’autonomie de ces- dernières, être imputées à la société Descours & Cabaud SA. 468. Les pratiques mises en œuvre en propre par la société Etablissements Marc Morel et Fils, de même que celles mises en œuvre par sa filiale Duferco Morel Produits Plats, doivent, compte tenu de l’absence d’autonomie de cette dernière, être imputées à la société Etablissements Marc Morel et Fils. Sur l’imputabilité de pratiques anticoncurrentielles à un syndicat 469. La FFDM avance que la sanction simultanée d’un syndicat et de ses adhérents serait contraire au principe non bis in idem et reviendrait à sanctionner deux fois les mêmes faits. Elle fait valoir que la responsabilité du syndicat, mandataire de ses adhérents, est subsidiaire et ne peut être retenue que pour des faits non imputables à ses adhérents. Elle ajoute qu’une sanction infligée à un syndicat reviendrait à taxer également les petits négociants, alors que l’entente émane surtout des grands groupes, et les adhérents actuels de la FFDM qui ne faisaient pas partie de FNA. 470. Mais, de manière générale et comme le Conseil l’a rappelé dans sa décision n° 06-D-03 du 9 mars 2006, la règle non bis in idem ne peut valablement être invoquée pour échapper à des situations dans lesquelles deux personnes morales distinctes sont poursuivies pour avoir participé aux mêmes pratiques prohibées. Conformément à une jurisprudence constante, les syndicats professionnels représentant des entreprises exerçant une activité économique sur un marché, peuvent se voir imputer des pratiques d’ententes anticoncurrentielles dès lors qu’il est démontré qu’ils y ont adhéré. Le Conseil a ainsi considéré, dans sa décision n° 04-D-49 relative à des pratiques anticoncurrentielles dans le secteur de l’insémination artificielle bovine, que « l’UNCEIA, en sa qualité d’union de coopératives d’insémination artificielle et d’organisation professionnelle représentative, a pris une part importante dans l’organisation et la mise en œuvre des pratiques sanctionnées par la présente décision, alors que sa mission particulière d’assistance et de conseil juridique des centres agréés devait, au contraire, l’inciter à mettre ces derniers en garde contre le caractère manifestement anticoncurrentiel de leur comportement vis-à-vis des vétérinaires libéraux ». 471. Il en est de même en l’espèce, compte tenu de l’adhésion, non contestée, du syndicat à la pratique anticoncurrentielle ayant fait l’objet du grief notifié, telle qu’exposée au paragraphe 374.

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Sur la situation financière des sociétés en cause 472. Figurent ci-dessous les chiffres d’affaires totaux et résultats pour l’année 2007 tels que présentés dans les comptes sociaux des sociétés auxquelles des griefs ont été notifiés, ainsi que les ressources du FNA (montant des cotisations pour l’année 2007) : Société Chiffre d’affaires en euros Résultat en euros PUM Service Acier¤* **16 928 000 **36 137 000 Arcelor Profil¤ 305 577 000 2 068 000 AMD Sud Ouest¤ 122 474 000 369 000 KDI¤ 980 972 623 15 868 762 Descours & Cabaud SA¤* 2 635 746 38 501 422 Etablissements Marc Morel & Fils¤* 55 192 839 250 266 Maisonneuve 121 106 374 3 115 086 Liametho 15 620 230 1 221 779 SA Clisson Métal 30 180 881 565 568 CODIP*** 21 109 000 1 233 000 Ferren Fers 7 874 626 556 617 FNA 372 500 / ¤ Société filiale d’un groupe plus large * Société possédant les parts d’autres sociétés du groupe ** Comptes 2007 non déposés, chiffres communiqués par PUM Service Acier *** Exercice clos au 30 juin 2008 473. S’agissant des sociétés appartenant à un groupe et pour lesquelles le chiffre d’affaires du groupe dépasse les chiffres indiqués : • la société PUM est la société mère des autres sociétés françaises de négoce d’acier du groupe. Le chiffre d’affaires consolidé français des sociétés du périmètre de PUM en 2006 s’est élevé à 1,068 milliards d’euros, dont 916 millions en produits sidérurgiques. Ces sociétés, dont Arcelor Profil et AMD Sud Ouest, font par ailleurs partie du groupe sidérurgique mondial ArcelorMittal, dont le chiffre d’affaires pour 2007 s’élève à 76,77 milliards d’euros ; • KDI est la filiale du premier distributeur indépendant d’acier au monde, Klöckner, dont le chiffre d’affaires s’est élevé en 2007 à 6,3 milliards d’euros ; • la société Descours & Cabaud est la société mère des autres sociétés du groupe, et notamment de celles actives dans le négoce d’aciers. Le chiffre d’affaires consolidé français des sociétés du périmètre de Descours & Cabaud en 2006 s’est élevé à 2,55 milliards d’euros, dont 339 millions en produits sidérurgiques. Le groupe opère également hors de France. Son chiffre d’affaires mondial total pour 2007 s’élève à 3,2 milliards d’euros ; • la société Etablissements Marc Morel et Fils est la société mère de la société Duferco Morel Produits Plats, dont le chiffre d’affaires pour 2007 s’élève à 19,6 millions d’euros. Elle est filiale d’un fabricant et trader d’acier, Duferco, qui a réalisé un chiffre d’affaires mondial en 2007 de 6,7 milliards d’euros.

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474. La société Liametho a à l’inverse indiqué que son résultat pour 2007 était faussement important dès lors qu’il intègre une reprise de provision de 2004 et que son montant aurait normalement dû être moitié moins élevé. 475. Plusieurs sociétés ont souligné le fait que leur chiffre d’affaires intégrait également d’autres produits que ceux concernés par les pratiques en cause et que le chiffre pertinent à utiliser pour déterminer les sanctions était uniquement celui de l’activité aciers. 476. La société KDI relève que le chiffre d’affaires ne reflète pas nécessairement la capacité contributive d’une société. Elle avance que son activité de négociant consiste à acheter pour revendre sans transformation des produits, que son profit est constitué de la seule marge amputée des coûts de commercialisation et que sa situation est dès lors proche de commissionnaires. Elle signale dès lors que sa marge brute réalisée sur les aciers courants ne représente que 15 % du chiffre d’affaires généré sur ces produits et que 8 % du chiffre d’affaires global, qu’il existe une grande disproportion entre son chiffre d’affaires et ses résultats nets et que sa rentabilité est faible (1,6 %) et inférieure à la moyenne française (4 %). 477. D’autres sociétés ont relevé, notamment en séance, la part limitée que pouvait avoir, par rapport à leur chiffre d’affaires total, la rentabilité de l’activité aciers. 478. Mais le Conseil de la concurrence tient compte de la situation financière des entreprises afin d’apprécier leur capacité contributive ainsi que, d’une manière plus générale, leur taille et le niveau à partir duquel l’amende se révèlera dissuasive. Les chiffres utilisés à cet égard sont généralement le chiffre d’affaires et le résultat. Le cas échéant, il est également fréquent de prendre en compte le fait qu’une société est la filiale d’un groupe plus important, qu’elle soit la maison mère d’autres filiales ou qu’elle ait plusieurs activités. A cette fin, la rentabilité intrinsèque de l’activité concernée n’est pas en tant que telle pertinente, lorsque les ressources d’une entreprise ne se limitent pas à cette seule activité. 479. Néanmoins, l’analyse du Conseil s’attache également à apprécier quel est le montant de l’activité de l’entreprise influencée par les pratiques en cause. Dans ce cadre, la prise en compte de la valeur des ventes des produits concernées est, comme il a été dit au paragraphe 322, un indicateur utile, que le Conseil intègre en pratique dans la détermination de la sanction. 480. Par contre, et en tout état de cause, même en l’absence alléguée de toute valeur ajoutée par la profession de négociants de produits sidérurgiques, la situation des sociétés concernées, qui achètent un stock dont elles sont propriétaires pour le revendre en en choisissant le prix de revente, est différente, ce que KDI reconnaît d’ailleurs, de celle d’agents qui ne conserveraient de leur vente qu’une commission. Se limiter à la marge conservée n’aurait dès lors de sens ni pour apprécier la capacité contributive des sociétés concernées, ni pour évaluer la réalité du marché affecté. Sur le contexte économique à la date de la décision 481. Plusieurs sociétés ont avancé en séance que, compte tenu de la crise économique mondiale apparue au deuxième semestre 2008 et du ralentissement de l’activité qu’elle était susceptible de créer, une sanction trop forte à leur encontre serait susceptible de les mettre dans une situation financière critique. 482. La société KDI a notamment indiqué que son actionnaire ne recapitaliserait pas la société si une sanction venait à sérieusement gréver ses bénéfices.

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483. La pratique décisionnelle des autorités et la jurisprudence des juridictions de contrôle, tant nationales que communautaires, n’admettent ce genre d’arguments qu’en présence d’« une situation structurelle ou conjoncturelle exceptionnelle » (TPICE, 25 octobre 2005, Danone, affaire T-38/02, point 414) pour diminuer les sanctions encourues. A défaut, cela conduirait à accorder un avantage concurrentiel injustifié aux entreprises qui, en se défendant de la compétition par l’adhésion à un cartel, se seraient les moins bien adaptées aux conditions du marché. Cela reviendrait aussi à faire peu de cas de l’effet de l’entente qui, par la hausse artificielle des prix poursuivie pendant plusieurs années, a pu aussi contribuer à dégrader la situation économique des multiples entreprises clientes – et notamment des PME du bâtiment et des travaux publics, de la serrurerie ou de la chaudronnerie – souvent plus exposées à la crise que les auteurs du cartel. 484. La particularité du contexte économique peut s’apprécier tant au niveau du secteur que d’une entreprise en particulier. Mais, dans les deux cas, le caractère exceptionnel de la situation doit être démontré. 485. En l’espèce, au niveau sectoriel, aucune société n’a avancé d’argument démontrant que le secteur du négoce de l’acier aurait particulièrement souffert de la crise économique actuelle. Au contraire, les éléments au dossier montrent que la profitabilité depuis 2004 est importante, qu’elle a progressé au début de 2008 et que, même si le cours s’est dernièrement inversé et l’activité ralentie, la situation du secteur n’est pas telle qu’elle entre dans les prévisions de ce qui est décrit au paragraphe 483. 486. S’agissant des difficultés individuelles des entreprises, elles sont prises en compte en première approche par l’intermédiaire de leur chiffre d’affaires. En effet, ainsi que la cour d’appel l’a rappelé dans un arrêt Bouygues du 14 janvier 2003, « le chiffre d’affaires (…) permet, non seulement de déterminer le plafond légal de la sanction, mais aussi de fixer concrètement celle-ci en fonction de la dimension et de la situation de l’entreprise concernée ». L’évolution des comptes sur plusieurs exercices permet au Conseil de moduler et d’affiner la sanction en fonction de la santé réelle de l’entreprise. 487. Or, aucune entreprise mise en cause n’a démontré ni même vraiment invoqué une situation structurellement et significativement déficitaire et un péril sur l’avenir de la société. De ce point de vue, l’argument de la société KDI, dès lors qu’il relève d’un choix financier éventuel de son actionnaire, dont le chiffre d’affaires mondial est de l’ordre

de 6,3 milliards d’euros, ne saurait manifester un risque irrémédiable pour sa survie. 488. Pour conclure sur ces arguments avancés lors de la séance, le Conseil admet que la capacité contributive des entreprises peut être obérée par la crise économique et les perspectives défavorables qu’elle risque d’ouvrir : cette dimension sera prise en compte dans la détermination de la sanction. Mais devant conjuguer le respect du principe de proportionnalité – notamment à la capacité contributive des entreprises sanctionnées – auquel il est astreint avec l’objectif de dissuasion que poursuivent les amendes, il ne peut renoncer – surtout en présence de comportements aussi graves et d’un dommage à l’économie aussi important – à cet objectif au seul motif de l’existence d’une conjoncture de crise. C’est en réalité au stade du paiement de la sanction que ce contexte peut être le plus efficacement pris en compte : rien n’interdit en effet aux entreprises de demander au comptable public, en faisant état de difficultés particulières, le bénéfice de délais ou d’un échéancier de paiement.

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g) Sur les procédures conduisant à une exonération partielle ou à une réduction des sanctions 489. Six sociétés ou organismes sont susceptibles de voir une réfaction appliquée à la sanction encourue, compte tenu de la mise en œuvre de la procédure de clémence pour Descours & Cabaud et de celle de non contestation des griefs pour PUM Service Acier, Arcelor Profil, AMD Sud/ Ouest, KDI et la FFDM. Sur la procédure de clémence et la situation de Descours & Cabaud 490. Si la société Descours & Cabaud fait valoir que son comportement justifie une réduction plus forte que celle annoncée dans l’avis de clémence, le commissaire du gouvernement a, quant à lui, souhaité que l’exonération de sanction soit limitée à 20 %, compte tenu du fait que les éléments divulgués auraient dû être mis à la disposition des enquêteurs et que la valeur ajoutée significative serait limitée à l’aveu de la participation des dirigeants au cartel et à l’extension du champ de ce qui était connu aux régions n’ayant pas fait l’objet de visites et saisies. 491. Sur ces questions, le Conseil de la concurrence apprécie, pour déterminer une sanction individualisée et proportionnée, l’ensemble des circonstances de fait et de droit propres à la situation d’une entreprise. De ce point de vue, un certain nombre de choix procéduraux, qui n’étaient pas tous encore en vigueur dans le cadre de la procédure ayant donné lieu à la décision n° 07-D-02 en date du 23 janvier 2001, invoquée par l’entreprise mise en cause, s’offre aux entreprises dans le cadre de la mise en œuvre des règles de concurrence.

492. La société Descours & Cabaud a fait en l’espèce l’un de ces choix procéduraux en engageant une procédure de clémence et, le 14 mars 2007, le Conseil de la concurrence a rendu un avis n° 07-AC-03 accordant à la société Descours & Cabaud « le bénéfice conditionnel de la clémence, avec une exonération de la sanction encourue comprise entre 10 % et 30 %, qui prend en compte le rang et la date à laquelle la demande a été présentée ainsi que la mesure dans laquelle les éléments apportés constituent à ce stade une valeur ajoutée significative par rapport aux éléments dont disposent déjà les autorités de concurrence, et subordonne l’exonération aux conditions suivantes :

- les éléments apportés par la société Descours & Cabaud SA et ses filiales devront avoir effectivement contribué à établir la réalité des pratiques dénoncées, présentées comme étant anticoncurrentielles, et à en identifier les auteurs ;

- la société Descours & Cabaud SA et ses filiales devront apporter au Conseil de la concurrence et, le cas échéant, aux services d’enquête du Ministre de l’économie, des finances et de l’industrie, une coopération totale, permanente et rapide tout au long de la procédure d’enquête et d’instruction et leur fournir tout élément de preuve qui viendrait en leur possession ou dont elles disposent sur les infractions suspectées ;

- elles devront mettre fin à leur participation aux activités illégales présumées, sans délai et au plus tard à compter de la notification du présent avis ;

- elles ne devront pas avoir pris de mesures pour contraindre d’autres entreprises à participer aux infractions ;

- elles ne devront pas avoir informé de leur demande les entreprises susceptibles d’être mises en cause dans le cadre des pratiques dénoncées ». 493. Pour déterminer, après avoir vérifié que ces conditions sont remplies, la part de l’exonération accordée, le Conseil prend en compte la date à laquelle la société a fait sa démarche, la valeur ajoutée des éléments apportés et toutes les autres circonstances

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concrètes de l’espèce. Il n’est, ce faisant, pas lié par la fourchette fixée dans l’avis conditionnel de clémence et peut aller plus loin dans l’exonération finalement décidée. 494. En l’espèce, la demande de Descours & Cabaud est intervenue plus de deux ans après les opérations de visites et saisies et à une date où l’administration avait déjà exploité les informations collectées et saisi le Conseil de la concurrence. Néanmoins, il y lieu de prendre en compte le comportement du demandeur de clémence à compter de l’enquête administrative pour tempérer les conséquences tirées de l’observation de cette démarche tardive. 495. En ce qui concerne la première condition fixée par l’avis conditionnel de clémence, le groupe Descours & Cabaud a fait état d’éléments qui ont effectivement contribué à établir la réalité des pratiques dénoncées et apporté une valeur ajoutée significative. 496. Contrairement à ce que soutient la société Morel dans ses observations, cette valeur ajoutée n’est pas liée à la mise en cause d’autres sociétés, leur participation aux pratiques étant déjà avérée par les pièces de l’enquête administrative. De même, la contribution de Descours & Cabaud n’a pas non plus permis d’informer l’administration sur une extension du champ temporel ou géographique de l’entente qu’elle ignorait, dès lors que les premiers éléments probants issus de l’enquête dataient déjà de 1999 et qu’ils indiquaient que l’entente s’était étendue à toutes les régions définies par le syndicat FNA. 497. Néanmoins, la valeur ajoutée significative des éléments (documents et déclarations) apportés par le groupe Descours & Cabaud découle de trois facteurs : • les explications apportées sur le fonctionnement général de l’entente, sur sa terminologie, sur ses mécanismes et ses principales composantes, ainsi que sur ses évolutions, données par les dirigeants nationaux du groupe ou des responsables régionaux et qui corroborent ou complètent les conclusions auxquelles était arrivé le rapport administratif d’enquête ; • les éclairages sur le fonctionnement de la répartition de marché au niveau national mise en œuvre dans le cadre du Club Poutrelles, de même que sur les réunions de synthèse ou de pilotage de la concertation organisées uniquement entre les trois grands groupes de négociants – impliquant leurs principaux dirigeants et notamment leur président respectif – et le FNA ; • les éléments relatifs au fonctionnement régulier de la concertation dans les régions qui n’avaient pas fait l’objet de visites et saisies. 498. Sur tous ces points, le groupe Descours & Cabaud a fourni des éléments de preuve, dont certains d’une nature différente de ceux déjà en possession de l’administration, qui ont contribué à établir la réalité des pratiques dénoncées ou permis d’exploiter plus précisément les éléments déjà au dossier. Dès lors, la première condition est remplie. 499. En ce qui concerne la deuxième condition, le groupe Descours & Cabaud a fourni une coopération pleine et entière aux services d’instruction, notamment en expliquant les modalités de l’entente à l’occasion d’auditions ou de demandes d’informations du rapporteur et en communiquant des documents relatifs aux pratiques dénoncées. Il n’est pas établi qu’il n’aurait pas immédiatement communiqué un élément de preuve qui serait venu en sa possession. Dès lors, la deuxième condition est aussi remplie. 500. En ce qui concerne la troisième condition, il résulte des éléments du dossier que le groupe Descours & Cabaud s’est retiré de l’entente dans les mois suivants le mois de mai 2004, a quitté le syndicat FNA en 2005 et n’y participait plus lors de sa demande de mise en œuvre de la procédure de clémence. Dès lors, la troisième condition est remplie.

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501. En ce qui concerne la quatrième condition, s’il est établi que le groupe Descours & Cabaud a été l’un des acteurs principaux de l’entente et si son comportement a pu avoir un effet d’entraînement sur celui des autres, il n’est pas établi qu’il aurait pris des mesures pour contraindre d’autres entreprises à participer aux infractions, autres que celles décidées dans des réunions et dans le cadre du système coercitif et de sanctions propre au dispositif dont il était l’un des meneurs. Dès lors, la quatrième condition est également remplie. 502. Enfin, sur la cinquième condition, rien n’indique que Descours & Cabaud aurait informé les autres entreprises en cause de sa démarche. Celles-ci ont été avisées de l’existence de la procédure au moment de la notification des griefs. Dès lors, la cinquième condition est remplie. 503. Les conditions fixées dans l’avis conditionnel de clémence du Conseil de la concurrence du 14 mars 2007 sont donc respectées. Compte tenu de la date à laquelle a été présentée la demande, de la valeur ajoutée significative des éléments apportés par le groupe Descours & Cabaud et de l’ensemble des circonstances de la présente affaire, il convient de lui accorder une exonération de sanction à hauteur de 35 %. Sur la procédure de non contestation des griefs Sur la situation procédurale de Maisonneuve 504. Dans son mémoire en réponse au rapport, la société Etablissements Maisonneuve avance qu’elle devrait bénéficier d’une réduction de sanction au titre de sa non contestation des griefs. Elle fait valoir qu’elle n’a pas contesté l’existence de l’entente mais seulement discuté les conditions dans lesquelles elle y a été associée et les effets de la pratique, au bénéfice du travail du rapporteur, qui s’en serait trouvé allégé. 505. Mais, tout d’abord, la non contestation des griefs est une voie procédurale dont la mise en œuvre est subordonnée à la signature d’un procès verbal entre la société l’ayant choisie et le rapporteur général, ce à quoi la société Maisonneuve n’a pas procédé. Ensuite et en tout état de cause, on relèvera que les observations de cette société indiquent explicitement qu’elle ne « saurait reconnaître l’infraction qui lui est reprochée et donc les griefs dont elle est l’objet ». 506. Il résulte dès lors que la société Maisonneuve ne saurait bénéficier d’une réduction de sanction au titre de la non contestation des griefs. Sur l’appréciation des engagements proposés 507. Dans sa décision n° 08-D-13, le Conseil de la concurrence a synthétisé sa pratique relative aux taux de réfaction applicables à l’occasion de procédures de non contestation des griefs : « Lorsqu’est mise en œuvre la procédure prévue au III de l’article L. 464-2 du Code de commerce, le Conseil qui examine la position du rapporteur général relative à l’aménagement de la sanction pécuniaire encourue tient compte à la fois de la non contestation des griefs et des engagements pris (…) Toutefois, la simple renonciation à contester les griefs, qui a principalement pour effet d’alléger et d’accélérer le travail de l’instruction en dispensant de la rédaction du rapport, notamment lorsqu’elle est choisie par l’ensemble des mis en cause, ne peut conduire à accorder aux entreprises en cause qu’une réduction forfaitaire et relativement limitée de la sanction encourue ». 508. A cet égard, il a indiqué dans la décision n° 07-D-48 du 11 décembre 2007, que la contrepartie procédurale de « la renonciation à contester les griefs, qui a pour effet d’alléger et d’accélérer le travail de l’instruction en dispensant de la rédaction du rapport, doit conduire en l’espèce à accorder aux entreprises en cause une réduction forfaitaire et

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limitée à 10 % de la sanction encourue (…) qui tient également compte des engagements pris », alors que le rapporteur général avait proposé 5 % de réfaction. Ce montant de 10 % est la contrepartie forfaitaire minimale accordée en cas de non contestation des griefs. Au delà, « c’est la qualité des engagements qui peut permettre d’accorder des contreparties plus substantielles dans le cadre de cette procédure » (décision n° 08-D-13). 509. La société KDI avance que des engagements tels que ceux qu’elle a proposés devraient être récompensés à hauteur de 20 ou 30 %.

510. Les sociétés du groupe PUM/ Arcelor estiment pour leur part que le quantum de la réduction les concernant devrait être supérieur à celui accordé à la FFDM et à KDI, dès lors qu’elles ont proposé un engagement structurel et supplémentaire sur le changement de leur mode de barémation, révolutionnaire du point de vue des pratiques commerciales du groupe, substantiel et directement lié à l’une des composantes essentielles des pratiques.

511. Enfin, le commissaire du gouvernement a proposé que le taux de 15 % évoqué – comme plafond – dans le procès verbal signé entre les parties et le rapporteur général soit accordé à KDI et aux sociétés du groupe PUM/ Arcelor, mais soit limité à 10 % pour la FFDM, compte tenu du rôle joué par le syndicat dans le cartel.

512. Sur ces points, le Conseil a estimé dans sa décision n° 08-D-13 « qu’en matière d’entente horizontale, qu’elle soit instantanée (concertation préalable à un appel d’offres) ou durable (cartel), la réduction des sanctions se heurte à une double contrainte. D’une part, les engagements comportementaux de nature à améliorer le fonctionnement du marché pour l’avenir sont souvent difficiles à rendre crédibles. D’autre part, il est indispensable d’assurer une cohérence entre le niveau des réductions de sanctions pécuniaires accordées dans le cadre du programme de clémence et celui pratiqué dans le cadre de la non contestation des griefs ». Néanmoins, la réfaction à laquelle peuvent prétendre les entreprises entrées en procédure de non contestation des griefs n’est pas pour autant en l’espèce contrainte par la procédure de clémence de la société Descours & Cabaud : les engagements proposés doivent être appréciés en fonction de leur valeur propre. 513. Les engagements pris par les sociétés du groupe PUM/ Arcelor et la société KDI consistent tout d’abord en la mise en conformité des pratiques de ces entreprises avec les règles de concurrence, qui comprennent la mise en place de chartes, de programmes de formation interne et de sensibilisation du personnel en charge (« compliance ») mais également l’extension des systèmes d’alerte professionnelle existants (« whistleblowing ») aux infractions au droit de la concurrence, ainsi que pour PUM/ Arcelor des consignes de comportement avec les concurrents et pour KDI l’insertion dans les contrats des cadres dirigeants et commerciaux d’une clause spécifique relative au respect du droit de la concurrence rappelant que toute violation de ces règles constitue une faute grave qui sera sanctionnée en tant que telle, dans le respect de la règlementation sociale.

514. De plus, ces sociétés, ainsi que la FFDM, ont proposé une série d’engagements quasiment structurels relatifs à l’organisation du syndicat et destinés à prévenir la survenance de nouvelles pratiques anticoncurrentielles en son sein. Ces engagements consistent d’abord dans des règles d’organisation des réunions nationales assurant leur objet (notamment par la mise en place d’une liste de thèmes prohibés ou autorisés) et le contrôle de leur contenu (par la rédaction d’ordres du jour et de procès-verbaux détaillés conservés pendant 5 ans, la présence, temporaire pour KDI, d’avocats à un certain nombre de réunions nationales et en plus, pour la FFDM, de l’engagement de mettre en place des enregistrements sonores). Ils consistent ensuite dans la stricte limitation des rencontres syndicales régionales à des situations particulières et encadrées, leur fonctionnement tel que décrit dans la notification des griefs étant entièrement abandonné. Les sociétés du groupe PUM/ Arcelor et KDI ont

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par ailleurs pris des engagements sur leur retrait de l’organisation professionnelle si les changements n’étaient pas réalisés dans les délais fixés.

515. Enfin, les sociétés du groupe PUM/ Arcelor ont présenté un engagement relatif au changement de leur mode de barémation. Néanmoins, contrairement à ce qu’avancent ces sociétés, cet engagement n’est pas en tant que tel susceptible de constituer une plus-value particulière dans le cadre de l’appréciation du montant de la réfaction accordée.

516. L’ensemble des engagements pris par ces cinq sociétés et organismes dans le cadre de la procédure de non contestation des griefs apparaissent substantiels, en partie vérifiables et susceptibles de prévenir en particulier les pratiques litigieuses de même nature que celles notifiées dans la présente affaire. Ils conduisent à accorder à ces sociétés une réduction des sanctions telle que respectivement présentée pour chacune d’entre elles ci-dessous.

h) Sur le montant des sanctions Pour PUM Service Acier 517. La société PUM Service Acier a participé à l’entente complexe et continue notifiée. En fonction des éléments généraux et individuels tels qu’ils ont été appréciés ci-dessus, notamment aux paragraphes 303 et suivants, 325 et suivants, 340 et suivants, 344 et suivants, 376 et suivants, 447 et suivants, 449 et suivants et 472 et suivants, la sanction pécuniaire qui aurait été infligée aurait été de 347 000 000 euros. Pour tenir compte de l’absence de contestation de griefs et des engagements pris, ce montant est ramené à 288 000 000 euros. Pour Arcelor Profil 518. La société Arcelor Profil a participé à l’entente complexe et continue notifiée. En fonction des éléments généraux et individuels tels qu’ils ont été appréciés ci-dessus, notamment aux paragraphes 303 et suivants, 325 et suivants, 340 et suivants, 376 et suivants, 447 et suivants, 449 et suivants et 472 et suivants, la sanction pécuniaire qui aurait été infligée aurait été de 15 600 000 euros. Pour tenir compte de l’absence de contestation de griefs et des engagements pris, ce montant est ramené à 12 950 000 euros. Pour AMD Sud/ Ouest 519. La société AMD Sud/ Ouest a participé à l’entente complexe et continue notifiée. En fonction des éléments généraux et individuels tels qu’ils ont été appréciés ci-dessus, notamment aux paragraphes 303 et suivants, 325 et suivants, 340 et suivants, 376 et suivants, 447 et suivants, 449 et suivants et 472 et suivants, la sanction pécuniaire qui aurait été infligée aurait été de 1 000 000 euros. Pour tenir compte de l’absence de contestation de griefs et des engagements pris, ce montant est ramené à 830 000 euros. Pour KDI 520. La société KDI a participé à l’entente complexe et continue notifiée. En fonction des éléments généraux et individuels tels qu’ils ont été appréciés ci-dessus, notamment aux paragraphes 308, 325 et suivants, 340 et suivants, 344 et suivants, 376 et suivants, 449 et suivants et 472 et suivants, la sanction pécuniaire qui aurait été infligée aurait été de 204 000 000 euros. Pour tenir compte de l’absence de contestation de griefs et des engagements pris, ce montant est ramené à 169 300 000 euros.

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Pour Descours & Cabaud SA 521. La société Descours & Cabaud SAa participé à l’entente complexe et continue notifiée. En fonction des éléments généraux et individuels tels qu’ils ont été appréciés ci-dessus, notamment aux paragraphes 309, 325 et suivants, 340 et suivants, 344 et suivants, 376 et suivants, 449 et suivants et 472 et suivants, la sanction pécuniaire qui aurait été infligée aurait été de 127 000 000 euros. Pour tenir compte de la procédure de clémence et de l’exonération partielle de sanction accordée de ce fait à Descours & Cabaud SA, ce montant est ramené à 82 550 000 euros. Pour Morel 522. La société Etablissements Marc Morel et Fils a participé à l’entente complexe et continue notifiée dans les conditions évoquées aux paragraphes 242 et suivants, 251 et suivants et 257 et suivants. En fonction des éléments généraux et individuels tels qu’ils sont appréciés ci-dessus, notamment aux paragraphes 310 et suivants, 325 et suivants, 340 et suivants, 352 et suivants, 376 et suivants, 454 et suivants et 472 et suivants, il y a lieu de lui infliger une sanction de 12 000 000 euros. Pour Maisonneuve 523. La société Etablissements Maisonneuve a participé à l’entente complexe et continue notifiée dans les conditions évoquées aux paragraphes 242 et suivants, 251 et suivants et 263 et suivants. En fonction des éléments généraux et individuels tels qu’ils sont appréciés ci-dessus, notamment aux paragraphes 313, 325 et suivants, 340 et suivants, 376 et suivants, 454 et suivants et 472 et suivants, il y a lieu de lui infliger une sanction de 8 000 000 euros. Pour Clisson Métal 524. La société SA Clisson Métal a participé à l’entente complexe et continue notifiée dans les conditions évoquées aux paragraphes 242 et suivants, 251 et suivants et 274 et suivants. En fonction des éléments généraux et individuels tels qu’ils sont appréciés ci-dessus, notamment aux paragraphes 315, 325 et suivants, 340 et suivants, 376 et suivants, 454 et suivants et 472 et suivants, il y a lieu de lui infliger une sanction de 800 000 euros. Pour Liametho 525. La société Liametho a participé à l’entente complexe et continue notifiée dans les conditions évoquées aux paragraphes 242 et suivants, 251 et suivants et 268 et suivants. En fonction des éléments généraux et individuels tels qu’ils sont appréciés ci-dessus, notamment aux paragraphes 314, 325 et suivants, 340 et suivants, 376 et suivants, 454 et suivants et 472 et suivants, il y a lieu de lui infliger une sanction de 400 000 euros. Pour CODIP 526. La société CODIP a participé à l’entente complexe et continue notifiée dans les conditions évoquées aux paragraphes 242 et suivants, 251 et suivants et 276 et suivants. En fonction des éléments généraux et individuels tels qu’ils sont appréciés ci-dessus, notamment aux paragraphes 316, 325 et suivants, 340 et suivants, 376 et suivants, 454 et suivants et 472 et suivants, il y a lieu de lui infliger une sanction de 400 000 euros.

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Pour Ferren Fers 527. La société Ferren Fers a participé à l’entente complexe et continue notifiée dans les conditions évoquées aux paragraphes 242 et suivants, 251 et suivants et 281 et suivants. En fonction des éléments généraux et individuels tels qu’ils sont appréciés ci-dessus, notamment aux paragraphes 317, 325 et suivants, 340 et suivants, 376 et suivants et 472 et suivants, il y a lieu de lui infliger une sanction de 100 000 euros. Pour la FFDM 528. La FFDM a participé à l’entente complexe et continue notifiée. En fonction des éléments généraux et individuels tels qu’ils ont été appréciés ci-dessus, notamment aux paragraphes 318, 325 et suivants, 340 et suivants, 376 et suivants, 454 et suivants et 472 et suivants, la sanction pécuniaire qui aurait été infligée aurait été de 150 000 euros. Pour tenir compte de l’absence de contestation de griefs et des engagements pris, ce montant est ramené à 124 500 euros. i) Sur l’obligation de publication 529. Afin d’attirer la vigilance des clients des sociétés du négoce de produits sidérurgiques, il y a lieu, compte-tenu des faits constatés par la présente décision et des infractions relevées, d’ordonner la publication, à frais partagés des entreprises sanctionnées et au prorata de leurs sanctions pécuniaires, dans un quotidien national et un support spécialisé, du résumé de la présente décision figurant au paragraphe 530 ci-après : 530. Résumé de la décision : « Certaines entreprises clientes de négociants en produits sidérurgiques s’étant plaintes de similitudes suspectes dans les offres reçues à l’occasion de consultations, le ministre de l’économie a fait réaliser une enquête administrative dont les résultats ont été transmis au Conseil de la concurrence. Ce dernier a rendu le 16 décembre 2008 une décision par laquelle il sanctionne onze entreprises du négoce de produits sidérurgiques et le syndicat majoritaire de la profession (PUM Service Acier, Arcelor Profil, AMD Sud/ Ouest, KDI, Descours & Cabaud, Morel, Maisonneuve, Clisson Métal, Liametho, CODIP, Ferren Fers et la Fédération Française de Distribution des Métaux) pour avoir mis en place entre 1999 et 2004, une entente sur les prix ainsi que sur la répartition des marchés et des clients. Un cartel particulièrement bien organisé Les pratiques en cause reposaient sur des habitudes nationales et régionales anciennes et consistaient en une concertation entre concurrents sur les conditions commerciales, à l’occasion d’un nombre très important et régulier de réunions et d’échanges d’informations : barèmes communs de prix, classement des clients en fonction de leur potentiel, taux de remise maximum, procédures de suivi des affaires et de contrôle, etc. Elles visaient également la répartition des parts de marché pour ce qui concerne les clients les plus importants et, au jour le jour, la répartition des consultations de tous les clients. L’entente a été particulièrement organisée et maîtrisée par ses auteurs. Ces derniers ont traité chacune des particularités du marché et y ont apporté une réponse dans l’organisation sophistiquée des pratiques, par la multiplicité des réunions, leur niveau de mise en place (national, régional, local), leur spécialisation par produits, leur périodicité, la multiplication des référentiels tarifaires, la diffusion de récapitulatifs, la mise en place d’instances de contrôle et de soutien des pratiques, un suivi régulier, des sanctions dans le cas d’« infractions » aux règles fixées, etc.

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L’architecture des pratiques incluait par ailleurs des mesures concertées, éventuellement coercitives, visant d’une part à assurer une flexibilité suffisante pour maintenir une stabilité du cartel sur le long terme face aux acteurs extérieurs ou aux déviations et d’autre part à masquer la réalité des pratiques aux clients, auxquels ont été adressées des offres de couverture pour simuler l’existence d’une compétition. De telles pratiques s’inscrivaient dans le plan d’ensemble dont l’objet était d’établir sur le marché français du négoce de produits sidérurgiques un mode d’organisation substituant au libre jeu de la concurrence et à ses risques une coopération pratique entre opérateurs. Elles ont été mises en œuvre sous couvert d’une activité syndicale sous l’impulsion des trois principes groupes français de négoce : PUM/ Arcelor, KDI et Descours & Cabaud.

Des pratiques d’une exceptionnelle gravité Le Conseil a estimé que ces pratiques étaient exceptionnellement graves car elles ont eu pour objet et pour effet non seulement de faire échapper les prix au jeu normal de la compétition, mais aussi de répartir les clients et les marchés, anéantissant tout l’espace concurrentiel et tout mécanisme de compétition entre les entreprises. Les pratiques ont de plus été mises en œuvre :

par des négociants représentant une très large partie du marché, environ 70 à 90 % des volumes vendus par le négoce sur la quasi-totalité des produits concernés ; pendant une longue période, de mi 1999 à mi 2004, pendant laquelle elles ont été confirmées et renforcées par leurs auteurs, certaines entreprises n’ayant participé que pour une période plus restreinte ; sur l’intégralité du territoire français, à l’égard des clients importants et de clients plus petits, dans les 11 « régions » définies dans le cadre du FNA et divisant la France ; par les plus hauts dirigeants de chacune des sociétés concernées. Un dommage important causé à l’économie Les caractéristiques du marché du négoce de produits sidérurgiques et des pratiques en cause, de même que les éléments chiffrés au dossier, permettent de conclure que le dommage causé à l’économie par les pratiques concernés était important, d’un ordre de grandeur de centaines de millions d’euros, affectant les clients sur le marché concerné (notamment les PME du bâtiment et des travaux publics, de la chaudronnerie et de la serrurerie) et sur les marchés en aval, auxquels ont été imposés des surprix pour les produits concernés. L’application du programme de clémence français et de la procédure de non contestation des griefs Le Conseil a partiellement exonéré de sanction pécuniaire la société Descours & Cabaud, qui lui a apporté, postérieurement à l’enquête, des éléments ayant une valeur ajoutée significative. Cette entreprise a notamment communiqué des éléments permettant de faciliter la compréhension des pratiques, de confirmer leur mise en œuvre sur l’intégralité du territoire français et d’établir la participation directe et significative des plus hauts dirigeants des trois principaux groupes de négoce français. En application du programme de clémence français (voir communiqué de procédure du Conseil de la concurrence du 17 avril 2007), la sanction a été réduite de 35 %.

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Par ailleurs, après la notification des griefs, quatre sociétés (PUM Service Acier, Arcelor Profil, AMD Sud/ Ouest et KDI) et le syndicat FFDM n’ont pas contesté les faits et ont pris des engagements destinés à prévenir la répétition des mêmes comportements. Leur sanction a, en conséquence, été réduite. Les sanctions Onze entreprises et un syndicat ont été sanctionnés pour un montant total d’un peu plus de 575 millions d’euros. Le Conseil a prononcé des sanctions proportionnées en tenant compte de la participation au grief retenu, de la gravité des comportements en cause, de l’importance du dommage causé à l’économie et de la situation individuelle des entreprises. Il a infligé :à la société Produits d’Usines Métallurgiques PUM – Station Service Acier une sanction de 288 000 000 euros ; à la société Arcelor Profil une sanction de 12 950 000 euros ;

à la société AMD Sud Ouest une sanction de 830 000 euros ;

à la société KDI une sanction de 169 300 000 euros ;

à la société Descours & Cabaud SA une sanction de 82 550 000 euros ;

à la société Etablissements Marc Morel et Fils une sanction de 12 000 000 euros ;

à la société Etablissements Maisonneuve une sanction de 8 000 000 euros ;

à la société SA Clisson Métal une sanction de 800 000 euros ;

à la société Comptoir de Distribution Professionnelle une sanction de 400 000 euros ;

à la société Liametho une sanction de 400 000 euros ;

à la société Ferren Fers une sanction de 100 000 euros ;

à la Fédération Française de Distribution de Métaux une sanction de 124 500 euros. Le texte intégral de la décision du Conseil de la concurrence est accessible sur le site www.conseil-concurrence.fr ». DISPOSITIF Article 1er : Il est établi que les sociétés PUM Service Acier, Arcelor Profil, AMD Sud Ouest, KDI, Descours & Cabaud SA, Etablissements Marc Morel et Fils, Etablissements Maisonneuve, SA Clisson Métal, Liametho, CODIP, Ferren Fers et la Fédération française de distribution des métaux (FFDM) ont enfreint les dispositions de l’article L. 420 1 du code de commerce et de l’article 81 du Traité CE. Article 2 : Il est pris acte des engagements souscrits par les sociétés PUM Service Acier, Arcelor Profil, AMD Sud Ouest, KDI et par la FFDM, tels qu’ils sont mentionnés aux paragraphes 179 à 181. Il est enjoint à ces entreprises ou organisme de s’y conformer en tous points.

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Article 3 : Sont infligées les sanctions pécuniaires suivantes : • à la société Produits d’Usines Métallurgiques PUM – Station Service Acier une sanction de 288 000 000 euros ; • à la société Arcelor Profil une sanction de 12 950 000 euros ; • à la société AMD Sud Ouest une sanction de 830 000 euros ; • à la société KDI une sanction de 169 300 000 euros ; • à la société Descours & Cabaud SA une sanction de 82 550 000 euros ; • à la société Etablissements Marc Morel et Fils une sanction de

12 000 000 euros; • à la société Etablissements Maisonneuve une sanction de 8 000 000 euros ; • à la société SA Clisson Métal une sanction de 800 000 euros ; • à la société Comptoir de Distribution Professionnelle une sanction de 400 000 euros ; • à la société Liametho une sanction de 400 000 euros ; • à la société Ferren Fers une sanction de 100 000 euros ; • à la Fédération Française de Distribution de Métaux une sanction de 124 500 euros. Article 4 : Les sociétés et organisme mentionnés à l’article premier feront publier le texte figurant au paragraphe 530 de la présente décision, en respectant la mise en forme, dans une édition des journaux « La Tribune » et « Le Moniteur des travaux publics et du bâtiment ». Ces publications interviendront dans un encadré en caractères noirs sur fond blanc de hauteur au moins égale à trois millimètres sous le titre suivant, en caractère gras de même taille : « Décision n° 08-D-32 du 16 décembre 2008 du Conseil de la concurrence relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur du négoce de produits sidérurgiques ». Elles pourront être suivies de la mention selon laquelle la décision a fait l’objet de recours devant la cour d’appel de Paris si de tels recours sont exercés. Les sociétés concernées adresseront, sous pli recommandé, au bureau de la procédure, copie de ces publications, dès leur parution et au plus tard le 16 février 2009.

Délibéré sur le rapport oral de M. Berkani, par M. Lasserre, président, président de séance, Mme Béhar-Touchais et M. Bidaud, membres.

La secrétaire de séance, Le président, Véronique Letrado Bruno Lasserre

© Conseil de la concurrence

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Document Outline

  • Décision n° 08-D-32 du 16 décembre 2008relative à des prati
    • Constatations
      • LA SAISINE DU MINISTRE CHARGÉ DE L’ÉCONOMIE
        • LA DEMANDE DE CLÉMENCE DU GROUPE DESCOURS & CABAUD
        • LE SECTEUR CONCERNÉ
          • Les produits sidérurgiques
            • Le secteur de l’acier
            • L’évolution du secteur
              • La crise de la sidérurgie
              • L’explosion de la demande en 2004
            • Les principaux produits concernés
              • Les produits longs
                • Les poutrelles
                • Les tubes
                • Les laminés marchands
                • Les ronds à béton
              • Les produits plats
          • Le négoce des produits sidérurgiques
          • Les volumes et valeurs de vente
        • LES ENTREPRISES CONCERNÉES
          • Le groupe PUM/ Arcelor
          • Le groupe KDI
          • Le groupe Descours & Cabaud
          • Le groupe Morel Duferco
          • La société Maisonneuve
          • La société Liametho
          • La société Clisson Métal
          • La société CODIP
          • La société Ferren Fers
          • France Négoce Aciers
        • LES PRATIQUES RELEVÉES
          • Les éléments relevés au niveau national
            • Les réunions nationales et leurs participants
              • Le club poutrelles
              • La commission tubes
              • La commission produits plats
              • Le bureau du FNA
              • La réunion des présidents de région
            • L’objet des réunions et le contenu des dispositifs mis en pl
              • L’objet des commissions produits
              • Le dispositif produits longs
                • Le contenu du dispositif produits longs
                • La tarification : barèmes de base et remises
                • Les classements de clients
                • Le suivi des parts de marché
                • L’évolution de la concertation et le renforcement du disposi
              • Le dispositif produits plats
              • L’activité du bureau du FNA
              • L’activité de la réunion des présidents de région
            • Les autres contacts bilatéraux ou multilatéraux
              • Les déjeuners des directeurs commerciaux
              • Les dîners des présidents
              • Les contacts téléphoniques et autres contacts bilatéraux
            • Le suivi des dispositifs nationaux
              • La diffusion des décisions prises et des conditions concerté
              • Le suivi régulier par les négociants
              • La gestion des consultations par les pilotes et points centr
                • Les notions de pilote et de point central
                • Les fonctions des pilotes et points centraux
              • Les tournantes et les rotations des deltas
              • Les commissions poutrelles régionales
              • Les parrains
          • Les éléments relevés au niveau régional
            • L’organisation générale des régions
            • Les réunions au niveau régional et leur contenu
              • L’évocation des barèmes
              • L’évocation des classements
              • La surveillance des affaires récentes et le respect du dispo
            • La diffusion de documents relatifs à la mise en place du dis
              • Les barèmes régionaux
                • Le contenu des barèmes
                • La réalisation et la diffusion des barèmes
                • L’utilisation des barèmes
              • Les listes de classements de clients
                • Les classements par produit
                • Les classements généraux
              • Les tableaux récapitulatifs et les instructions
            • La mise en place d’actions coercitives
              • Les systèmes de contrôle et de sanctions internes
                • Le système formalisé constaté dans la 7e région
                • Les sanctions relevées dans les régions
              • Les mécanismes de pression et de coercition à l’encontre d’a
          • Les informations échangées
        • LES GRIEFS NOTIFIÉS
        • LA MISE EN ŒUVRE DU III DE L’ARTICLE L. 464-2 DU CODE DE COM
          • Les engagements souscrits par les sociétés du groupe PUM/ Ar
          • Les engagements souscrits par la société KDI
          • Les engagements souscrits par la FFDM
      • Discussion
        • SUR LA PROCÉDURE
          • Sur la recevabilité des éléments issus de la procédure de cl
          • Sur la prétendue atteinte aux droits de la défense
          • Sur la prétendue déloyauté de l’instruction
        • SUR LE DROIT APPLICABLE
          • Le contexte juridique du secteur de l’acier
          • L’applicabilité du droit communautaire
        • SUR LE BIEN FONDÉ DES GRIEFS
          • Sur le marché pertinent
          • Sur le grief d’entente complexe et continue
            • Sur la notion de pratique complexe et continue
            • Sur la participation des entreprises mises en cause à l’ente
              • Sur le standard de preuve de la participation à une entente
                • Sur le standard de preuve de l’adhésion à une entente comple
                • Sur le standard de preuve de l’accord de volonté à une enten
                • Sur le standard de preuve de l’accord de volonté à une enten
                • Sur le standard de preuve applicable à la présente affaire
              • Sur l’objet anticoncurrentiel des pratiques
                • Sur l’objet anticoncurrentiel des réunions nationales et rég
                • Sur l’objet anticoncurrentiel des échanges d’informations
              • Sur les arguments communs à plusieurs entreprises contestant
                • Sur la participation prétendument partielle, passive ou forc
                • Sur l’absence prétendue d’adhésion à la mise en œuvre de l’e
              • Sur la participation de Morel et sa durée
              • Sur la participation de Maisonneuve
              • Sur la participation de Liametho
              • Sur la participation de Clisson Métal
              • Sur la participation de CODIP
              • Sur la participation de Ferren Fers
              • Sur les effets des pratiques
        • SUR LES SANCTIONS
          • Le plafond légal
            • Les critères de détermination de la sanction
            • Sur la gravité des pratiques
              • Sur la gravité générale des pratiques
                • L’emprise des pratiques sur le marché
                • La persistance des pratiques
                • L’étendue géographique des pratiques
                • Le champ matériel de l’entente
                • La sophistication des pratiques
              • Sur le contexte de crise et l’intervention des pouvoirs publ
              • Sur la caractérisation du comportement respectif des entrepr
                • Sur le degré d’implication dans la pratique complexe
                • Sur le rôle de meneur
                • Sur les prétendues pressions
                • Sur la prétendue inapplication des mesures concertées
                • Sur l’arrêt immédiat des pratiques
                • Sur le cas particulier du syndicat
            • Sur l’importance du dommage à l’économie
              • Sur les éléments quantitatifs caractérisant l’importance du
                • Les arguments relatifs à la comparaison de l’évolution des t
                • L’étude économique présentée par les sociétés du groupe PUM/
                • Les évaluations présentées en séance par la société Descours
                • Les arguments relatifs à l’exploitation de la déclaration de
              • Sur les éléments qualitatifs caractérisant l’importance du d
                • Les caractéristiques du négoce de produits sidérurgiques
                • La taille du marché
                • L’effet de diffusion sur les marchés aval
                • La perturbation profonde et durable du processus concurrenti
            • Sur la réitération
              • Sur l’existence d’un constat d’infraction antérieur
              • Sur le caractère définitif, à la date de la présente décisio
              • Sur l’identité ou la similitude des pratiques
                • Sur l’identité des normes applicables
                • Sur l’identité des entreprises
              • Sur le délai écoulé entre les pratiques
            • Sur la situation individuelle des entreprises
              • Sur l’autonomie alléguée des filiales du groupe PUM/ Arcelor
              • Sur l’effet d’exemplarité du comportement de certaines entre
              • Sur la situation des plus petites entreprises sur le marché
              • Sur l’absence d’infraction antérieure
              • Sur l’absence de bénéfice économique ou financier tiré de la
              • Sur l’imputabilité à des sociétés
              • Sur l’imputabilité de pratiques anticoncurrentielles à un sy
              • Sur la situation financière des sociétés en cause
              • Sur le contexte économique à la date de la décision
            • Sur les procédures conduisant à une exonération partielle ou
              • Sur la procédure de clémence et la situation de Descours & C
              • Sur la procédure de non contestation des griefs
                • Sur la situation procédurale de Maisonneuve
                • Sur l’appréciation des engagements proposés
            • Sur le montant des sanctions
              • Pour PUM Service Acier
              • Pour Arcelor Profil
              • Pour AMD Sud/ Ouest
              • Pour KDI
              • Pour Descours & Cabaud SA
              • Pour Morel
              • Pour Maisonneuve
              • Pour Clisson Métal
              • Pour Liametho
              • Pour CODIP
              • Pour Ferren Fers
              • Pour la FFDM
            • Sur l’obligation de publication
    • DISPOSITIF

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ADLC, Décision 08-D-32 du 16 décembre 2008 relative à des pratiques mises en oeuvre dans le secteur du négoce des produits sidérurgiques