Décision de la Commission des sanctions du 20 décembre 2017 à l'égard de la société Finance Utile et de Mme A

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Sur la décision

Référence :
AMF, 20 déc. 2017, n° SAN-2017-14
Numéro : SAN-2017-14
Identifiant AMF : SAN-2017-14

Sur les parties

Texte intégral

La Commission des sanctions

COMMISSION DES SANCTIONS Décision n° 16 du 20 décembre 2017

Procédure n° 16-16 Décision n° 16

Personne(s) mise(s) en cause :

− La société Finance Utile Immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 515 320 240 Dont le siège social est situé 9 bis rue de Chernoviz à Paris (75016) Prise en la personne de son représentant légal

− Mme A Née le […] Demeurant […]

La 2ème section de la Commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers (ci-après : « AMF ») :

Vu le code monétaire et financier et notamment ses articles L. 211-1, L. 321-1, L. 541-1, L. 541-8-1, L. 547-1, L. 548-1, L. 621-9, L. 621-15, L. 621-17 et D. 321-1 ;

Vu le règlement général de l’AMF et notamment ses articles 325-4 à 325-8 et 325-12-3 ;

Après avoir entendu au cours de la séance publique du 6 décembre 2017 :

— M. Lucien Mil ou, en son rapport ;

- Mme Lisa Dano, représentant le Collège de l’AMF ;

- M. Jean-Baptiste Bernard, représentant la directrice générale du Trésor, qui a indiqué ne pas avoir d’observations à formuler ;

- Mme A, tant en son nom personnel qu’en qualité de présidente de la société Finance Utile, assistée par son conseil Me Edgard Vincensini ;

Les mises en cause ayant eu la parole en dernier.

17 place de la Bourse – 75082 Paris cedex 2 – tél. 01 53 45 60 00 – fax 01 53 45 63 20 www.amf-france.org

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FAITS

La société par actions simplifiée Finance Utile, anciennement dénommée Bourse Privée, a été créée le 9 octobre 2009. Son capital est détenu par sa présidente, Mme A.

Entre le 11 juil et 2014 et le 3 mars 2017, elle a été adhérente de l’association nationale des conseils financiers agréée (ci-après : « ANACOFI-CIF ») et inscrite en tant que conseil er en investissements financiers (ci-après : « CIF ») sur le registre unique des intermédiaires en assurance, banque et finance tenu par l’Organisme pour le registre unique des intermédiaires en assurance en banque et en finance (ci-après : « ORIAS »).

A l’époque des faits, Finance Utile proposait des investissements dans des sociétés non cotées à des particuliers par le biais d’une plateforme Internet éponyme et accompagnait les sociétés financées dans leur développement.

PROCÉDURE

Le 22 juil et 2015, le secrétaire général de l’AMF a décidé de procéder au contrôle du respect par Finance Utile de ses obligations professionnelles.

Le contrôle a donné lieu à un rapport daté du 9 février 2016 qui a été adressé à Finance Utile le 15 février suivant, accompagné d’une lettre lui indiquant qu’el e disposait d’un délai d’un mois pour présenter ses observations éventuel es.

Le 29 mars 2016, Finance Utile a présenté des observations en réponse au rapport de contrôle.

La Commission spécialisée n° 1 du Collège de l’AMF a décidé, le 30 septembre 2016, de notifier des griefs à Finance Utile et à Mme A.

Les notifications de griefs ont été adressées à Finance Utile et à Mme A par lettres du 2 décembre 2016.

Il est reproché à Finance Utile d’avoir manqué :

− aux obligations de se comporter avec loyauté, d’exercer son activité dans les limites autorisées par son statut et avec le soin et la diligence qui s’imposent ainsi que de s’enquérir de la situation financière de ses clients, prévues aux 1°, 2° et 4° de l’article L. 541-8-1 du règlement général de l’AMF ;

− et aux obligations :

• de faire signer à ses clients une lettre de mission présentant certaines caractéristiques avant de formuler un conseil, posée par l’article 325-4 du règlement général de l’AMF ;

• de communiquer des informations présentant un caractère exact, clair et non trompeur, prévue par l’article 325-5 du même règlement ;

• d’informer de manière complète, exacte et compréhensible ses clients de l’existence, de la nature et du montant de la rémunération qu’elle perçoit, énoncée à l’article 325-6 du même règlement ;

• de formaliser les conseils donnés à ses clients dans des rapports écrits, édictée par l’article 325-7 du même règlement ;

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• de se doter de procédures lui permettant de prévenir, gérer et traiter les conflits d’intérêts pouvant porter atteinte aux intérêts de ses clients, prévue par l’article 325-8 de ce règlement.

L’ensemble de ces manquements est également reproché à Mme A, présidente de

Finance Utile, en application des articles L. 621-15 III b) et L. 621-17 du code monétaire et financier et de l’article 325-12-3 du règlement général de l’AMF.

Une copie des notifications de griefs a été transmise le 2 décembre 2016 à la présidente de la Commission des sanctions, conformément aux dispositions de l’article R. 621-38 du code monétaire et financier.

Par décision du 7 décembre 2016, la présidente de la Commission des sanctions a désigné M. Lucien Mil ou en qualité de rapporteur.

Par lettres du 27 décembre 2016, Finance Utile et Mme A ont été informées qu’elles disposaient d’un délai d’un mois, en application de l’article R. 621-39-2 du code monétaire et financier, pour demander la récusation du rapporteur dans les conditions prévues par les articles R. 621-39-3 et R. 621-39-4 du même code.

Par lettres du 9 mars 2017, dont copie a été transmise au conseil de Finance Utile, le rapporteur a rappelé aux mises en causes les différentes étapes de la procédure de sanction et leur a accordé un nouveau délai de deux mois pour formuler leurs éventuelles observations en réponse aux notifications de griefs.

Aucune des mises en cause n’a déposé d’observations en réponse aux notifications de griefs dans ce délai ou ultérieurement.

Le 26 septembre 2017, le rapporteur a entendu Mme A, d’abord en qualité de présidente de Finance Utile, puis à titre personnel.

Le rapporteur a déposé son rapport le 3 novembre 2017.

Par lettres du même jour auxquel es était joint le rapport du rapporteur, Finance Utile et Mme A ont, d’une part, été convoquées à la séance de la Commission des sanctions du 6 décembre 2017 et informées qu’elles disposaient d’un délai de quinze jours pour présenter des observations en réponse à ce rapport, conformément au III de l’article R. 621-39 du code monétaire et financier et, d’autre part, été avisées de la composition de la formation de la Commission des sanctions appelée à délibérer lors de cette séance ainsi que du délai de quinze jours dont elles disposaient, en application de l’article

R. 621-39-2 du code monétaire et financier, pour demander, conformément aux articles R. 621-39-3 et R. 621-39-4 du même code, la récusation d’un ou de plusieurs de ses membres.

Aucune des deux mises en cause n’a déposé d’observations écrites en réponse au rapport du rapporteur.

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MOTIFS DE LA DÉCISION

Les manquements relevés par les notifications de griefs adressées à Finance Utile et à Mme A, qui se sont déroulés entre le 11 juil et 2014 et le 9 février 2016, seront examinés à la lumière des textes, applicables au moment des faits, suivants :

L’article L. 541-8-1 du code monétaire et financier, dans sa version issue de la loi n°2010-1249 du 22 octobre 2010 et non modifiée depuis dans un sens plus doux, dispose : « Les conseil ers en investissements financiers doivent : / 1° Se comporter avec loyauté et agir avec équité au mieux des intérêts de leurs clients ; / 2° Exercer leur activité, dans les limites autorisées par leur statut, avec la compétence, le soin et la diligence qui s’imposent au mieux des intérêts de leurs clients, afin de leur proposer une offre de services adaptée et proportionnée à leurs besoins et à leurs objectifs ; / […] 4° S’enquérir auprès de leurs clients ou de leurs clients potentiels, avant de formuler un conseil mentionné au I de l’article L. 541-1, de leurs connaissances et de leur expérience en matière d’investissement, ainsi que de leur situation financière et de leurs objectifs d’investissement, de manière à pouvoir leur recommander les opérations, instruments et services adaptés à leur situation. Lorsque les clients ou les clients potentiels ne communiquent pas les informations requises, les conseil ers en investissements financiers s’abstiennent de leur recommander les opérations, instruments et services en question […] ».

Aux termes de l’article 325-4 du règlement général de l’AMF, dans sa version issue de l’arrêté du 27 décembre 2007 non modifiée depuis : « Avant de formuler un conseil, le conseil er en investissements financiers soumet à son client une lettre de mission, rédigée en double exemplaire et signée par les deux parties. La lettre de mission, rédigée conformément à un modèle type élaboré par l’association à laquelle le conseil er en investissements financiers adhère, comporte notamment les indications suivantes : […] 3° Les modalités de l’information fournie au client, en précisant, lorsque la relation est appelée à devenir durable, les dispositions spécifiques convenues en matière de compte rendu de l’activité de conseil et d’actualisation des informations mentionnées aux 3° et 4° de l’article 325-3 ; / 4° Les modalités de la rémunération du conseil er en investissements financiers, en précisant, s’il y a lieu, le calcul des honoraires correspondant à la prestation de conseil et l’existence d’une rémunération perçue de la part des établissements mentionnés au 4° de l’article 325-3 au titre des produits acquis à la suite des conseils prodigués […] ». L’article 325-5 du règlement général de l’AMF, dans sa version issue de l’arrêté du 30 décembre 2007, non modifiée depuis dans un sens plus doux, prévoit par ail eurs que : « Toutes les informations, y compris à caractère promotionnel, adressées par un conseil er en investissements financiers, présentent un caractère exact, clair et non trompeur ».

L’article 325-6 du règlement général de l’AMF, dans sa version issue de l’arrêté du 30 décembre 2007, non modifié depuis dans un sens plus doux, énonce quant à lui : « Le conseil er en investissements financiers est considéré comme agissant d’une manière honnête, loyale et professionnelle qui sert au mieux les intérêts d’un client lorsque, en liaison avec la prestation de conseil à ce client, il verse ou perçoit une rémunération ou une commission ou fournit ou reçoit un avantage non monétaire suivant : / […] 2° Une rémunération, une commission ou un avantage non monétaire versé ou fourni à un tiers ou par celui- ci, ou à une personne agissant au nom de ce tiers ou par celle-ci, lorsque les conditions suivantes sont réunies : / a) Le client est clairement informé de l’existence, de la nature et du montant de la rémunération, de la commission ou de l’avantage, ou lorsque ce montant ne peut être établi, de son mode de calcul. Cette information est fournie de manière complète, exacte et compréhensible avant que la prestation de conseil ne soit fournie. Le conseil er en investissements financiers peut divulguer les conditions principales des accords en matière de rémunérations, de commissions et d’avantages non monétaires sous une forme résumée, sous réserve qu’il s’engage à fournir des précisions supplémentaires à la demande du client et qu’il respecte cet engagement ».

L’article 325-7 du règlement général de l’AMF dans sa version issue de l’arrêté du 30 décembre 2007, non modifiée depuis, dispose pour sa part que : « Le conseil au client est formalisé dans un rapport écrit justifiant les différentes propositions, leurs avantages et les risques qu’elles comportent ».

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Enfin, aux termes de l’article 325-8 du règlement général de l’AMF, dans sa version issue de l’arrêté du 30 décembre 2007, non modifiée depuis : « Le conseil er en investissements financiers doit se doter des moyens et des procédures écrites lui permettant de prévenir, gérer et traiter tous conflits d’intérêts pouvant porter atteinte aux intérêts de son client ».

I. Sur l’exercice par Finance Utile d’une activité de placement non garanti en méconnaissance des limites du statut de CIF et de son obligation de loyauté

Les notifications de griefs reprochent à Finance Utile d’avoir fourni un service de placement non garanti en méconnaissance des obligations de loyauté et d’exercice dans les limites autorisées par son statut posées par l’article L. 541-8-1 du règlement général de l’AMF. Elles relèvent à cet égard que Finance Utile a encaissé des « honoraires versées par certaines sociétés financées, en rémunération de sa contribution au placement des titres émis par ces sociétés, ce qui constitue un critère de qualification du service de placement ».

Finance Utile conteste l’exercice d’une telle activité et fait valoir que quatre des sept sociétés mentionnées dans le rapport de contrôle n’ont versé aucune rémunération à Finance Utile.

Le rapport de contrôle auquel renvoient les notifications de griefs fait état de rémunérations versées aux sociétés X, Y et Z et d’un service de placement non garanti.

Pour apprécier le grief, il convient d’abord, de déterminer si Finance Utile a fourni à ces trois sociétés le service de placement allégué et, ensuite, le cas échéant, si ces faits caractérisent un manquement aux obligations de loyauté et d’exercice dans les limites du statut de CIF édictées par l’article L. 541-8-1 du code monétaire et financier.

Sur l’exercice par Finance Utile d’une activité de placement non garanti

Aux termes de l’article L. 321-1 du code monétaire et financier, dans sa version issue de l’ordonnance n°2007-544 du 12 avril 2007 et non modifiée depuis sur ce point : « Les services d’investissement portent sur les instruments financiers énumérés à l’article L. 211-1 et comprennent les services et activités suivants : / […] 7. le placement non garanti ».

L’article D. 321-1 du code monétaire et financier, dans sa version issue du décret n°2007-904 du 15 mai 2007 non modifiée depuis sur ce point, dispose : « Les services d’investissement mentionnés à l’article L. 321-1 sont définis comme suit : […] 7. Constitue le service de placement non garanti le fait de rechercher des souscripteurs ou des acquéreurs pour le compte d’un émetteur ou d’un cédant d’instruments financiers sans lui garantir un montant de souscription ou d’acquisition ».

Il résulte de ces textes que l’exercice du service de placement non garanti se caractérise par la réunion de trois conditions : (i) la recherche de souscripteurs ou d’acquéreurs d’instruments financiers ; (i ) le fait que cette recherche intervienne pour le compte de l’émetteur ou du cédant desdits instruments financiers ; (i i) l’absence de garantie apportée à l’émetteur quant à un montant minimal de souscription ou d’acquisition.

Il convient de rechercher si ces trois conditions sont réunies pour chacune des trois sociétés susvisées.

Selon les explications de Mme A confortées par les pièces recueil ies, l’activité de Finance Utile consistait notamment à sélectionner des sociétés dans lesquelles elle proposait ensuite à ses clients d’investir. Ces investissements étaient réalisés par l’intermédiaire de sociétés spécialement créées à cet effet dont Mme A est la présidente.

Ainsi, les investissements effectués dans les sociétés par actions simplifiées X, Y et Z l’ont été par le biais des sociétés par actions simplifiées FBF Finance, P2A Finance et GP1 Finance.

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Les actions de sociétés par actions simplifiées souscrites par les clients de Finance Utile entrent donc dans la catégorie des instruments financiers visés à l’article L. 211-1 du code monétaire et financier.

S’agissant de la Société X, il résulte du protocole d’investissement conclu le 21 avril 2015 entre les fondateurs de la Société X et FBF Finance que la seconde s’est engagée à « faire ses meil eurs efforts » pour souscrire à hauteur de 400 000 euros à l’augmentation de capital de la première ou y « faire souscrire » un ou plusieurs tiers. En contrepartie de ces diligences, FBF Finance devait percevoir « une somme forfaitaire de 28 000 euros, sans toutefois pouvoir excéder 7 % du montant de la souscription éventuel ement réalisée ».

Cette convention prévoit donc une recherche d’investisseurs par FBF Finance pour le compte de A sans garantie d’un montant de souscription.

Bien que Finance Utile ne soit pas partie à cette convention, elle a émis, le 15 décembre 2015, une facture d’un montant de 7 000 euros HT à l’ordre de la Société X.

Si, aux termes de la facture, ces sommes devaient rétribuer des prestations d’« assistance dans le montage financier et juridique » de l’augmentation de capital de la Société X et de « suivi des investisseurs », la circonstance que leur montant corresponde au pourcentage, contractuel ement convenu par la Société X et FBF Finance, de 7 % du montant des souscriptions réalisées, démontre qu’elles avaient en réalité vocation à rémunérer la recherche, effectuée non par FBF Finance mais par Finance Utile, d’investisseurs pour cette opération.

Il est donc établi que Finance Utile a fourni un service de placement non garanti à la Société X.

S’agissant de la Société Y, contrairement à ce qu’indiquent les notifications de griefs, le dossier ne contient aucune convention intéressant cette société.

Il résulte en revanche de courriels échangés entre un client de Finance Utile et Mme A les 12 et 14 octobre 2014, que cette dernière a vanté, auprès de plusieurs clients de Finance Utile, la qualité du projet porté par la Société Y.

En outre, dès le lendemain de la clôture des souscriptions à l’augmentation de capital réalisée par cette société, Finance Utile lui a adressé une facture d’un montant de 15 878,75 euros HT, soit « 5% HT de 317 575 euros », c’est-à-dire des sommes que Finance Utile pensait initialement collecter, comme cela résulte des informations communiquées par cette dernière aux contrôleurs. Ce montant a ultérieurement été ramené à 9 166 euros HT, ce qui correspondait à 7,3 % des sommes effectivement collectées, qui représentaient 125 575 euros.

Si la facture indique que les honoraires étaient dus par la Société Y au titre de l’« accompagnement pour la réalisation de la levée de fonds de décembre 2014 », leur caractère variable ainsi que leur indexation sur le montant des sommes finalement collectées par Finance Utile pour le compte de la Société Y indique au contraire que ces honoraires avaient vocation à rémunérer la recherche de souscripteurs par la mise en cause.

La promotion de la Société Y réalisée par Mme A, conjuguée aux modalités de rémunération de Finance Utile ainsi qu’à l’absence d’engagement de cette dernière relativement à un montant de souscription, établit la fourniture, par Finance Utile, d’un service de placement non garanti à la Société Y.

Concernant la Société Z, pour laquel e aucune convention ne figure non plus au dossier, il ressort des pièces de la procédure que le 9 décembre 2014, Mme A a adressé un courriel à partir de son adresse de messagerie Finance Utile à un investisseur potentiel en vue de déterminer si ce dernier demeurait intéressé par l’augmentation de capital de la Société Z, comme il l’avait indiqué à l’occasion d’un sondage précédemment réalisé.

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Par ail eurs, le 30 janvier 2015, soit le jour même de la date limite fixée pour l’émission, par la Société Z, des actions et obligations convertibles en actions, Finance Utile lui a adressé une facture d’un montant de 9 256,10 euros HT, ce qui représentait 5 % des souscriptions recueil ies pour son compte, qui s’élevaient à 185 140 euros.

Comme précédemment, si cette facture de Finance Utile indique qu’elle a été émise au titre de l’« accompagnement » de la Société Z, l’apparente corrélation du montant des honoraires avec celui des fonds col ectés par Finance Utile dans l’intérêt de cette dernière indique au contraire que cette rémunération était due au titre de la recherche de souscripteurs.

La combinaison de ces éléments établit la recherche, par Finance Utile, d’investisseurs à l’augmentation de capital de la Société Z sans engagement ferme de sa part quant au montant des souscriptions à intervenir et, donc, la fourniture, par la première, d’un service de placement non garanti à la seconde.

Au demeurant, il apparaît qu’à l’issue d’une réunion intervenue au mois de mars 2015 entre Finance Utile et les représentants de l’AMF et de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, ces derniers ont considéré que l’activité exercée par Finance Utile nécessitait un « agrément en tant que PSI [prestataire de services d’investissement] placement non garanti », que Mme A a sollicité le 10 août 2015.

Il est ainsi établi que Finance Utile a bien fourni un service de placement non garanti aux sociétés X, Y et Z

Sur la méconnaissance, par Finance Utile, des limites de son statut de CIF ainsi que de son obligation de loyauté

Aux termes de l’article L. 541-1 du code monétaire et financier, dans sa version issue de la loi n°2010-1249 du 22 octobre 2010, non modifiée depuis sur ces points : « I. – Les conseil ers en investissements financiers sont les personnes exerçant à titre de profession habituelle les activités suivantes : / 1° Le conseil en investissement mentionné au 5 de l’article L. 321-1 ; / 2° (Abrogé) ; / 3° Le conseil portant sur la fourniture de services d’investissement mentionnés à l’article L. 321-1 ; / 4° Le conseil portant sur la réalisation d’opérations sur biens divers définis à l’article L. 550-1. / II. – Les conseil ers en investissements financiers peuvent également fournir le service de réception et de transmission d’ordres pour le compte de tiers, dans les conditions et limites fixées par le règlement général de l’Autorité des marchés financiers et exercer d’autres activités de conseil en gestion de patrimoine […] ».

Le service d’investissement de placement non garanti ne figure pas parmi les activités susceptibles d’être exercées par un CIF énumérées par ces dispositions.

Il s’ensuit qu’en plaçant auprès de ses clients les titres financiers des sociétés X, Y et Z Finance Utile a méconnu l’obligation faite aux CIF d’« exercer leur activité, dans les limites autorisées par leur statut » prévue par le 2° de l’article L. 541-8-1 du code monétaire et financier.

Les notifications de griefs ne précisent pas en quoi Finance Utile aurait, à raison des mêmes faits, contrevenu aussi à l’obligation faite aux CIF de « se comporter avec loyauté et agir avec équité au mieux des intérêts de leurs clients » prévue au 1° de l’article ci-dessus. Il n’y a donc pas lieu de retenir un second manquement sur le fondement de ce texte.

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II. Sur le manquement de Finance Utile à l’obligation de communiquer aux clients des informations claires, exactes et non trompeuses sur ses propres investissements, ses moyens humains et son habilitation à exercer une activité de financement participatif

II est fait grief à Finance Utile d’avoir communiqué à ses clients des informations inexactes ou trompeuses sur sa capacité à exercer une activité de financement participatif, sur la réalité de ses propres investissements et sur l’importance de ses moyens humains, en violation de l’obligation de communiquer des informations claires, exactes et non trompeuses prévue par l’article 325-5 du règlement général de l’AMF.

Sur le caractère inexact des informations communiquées par Finance Utile sur les co-investissements réalisés.

Les notifications de griefs retiennent que Finance Utile a mentionné sur son site Internet qu’el e investissait conjointement avec ses clients dans les sociétés sélectionnées, alors que ces investissements ne revêtaient pas un caractère systématique et n’étaient pas effectués par la société mais par sa dirigeante, Mme A, à titre personnel.

Aux termes de son site Internet, « Finance Utile co-investit systématiquement à vos côtés dans les entreprises sélectionnées ».

Or, Mme A a indiqué lors de ses auditions des 23 septembre 2015 et 6 janvier 2016 que ces co-investissements étaient réalisés par elle à titre personnel en précisant, lorsqu’el e a été entendue le 26 septembre 2017, qu’ils l’étaient « tant [qu’elle] le pouvai[t] financièrement ». Elle a d’ail eurs reconnu, lors de la deuxième audition, l’inexactitude des renseignements figurant à cet égard sur le site Internet de Finance Utile.

Si elle soutient que l’information ainsi communiquée n’était pas pour autant trompeuse dès lors que les clients de Finance Utile ont été informés « oralement » de cette situation, une tel e circonstance, à la supposer démontrée, n’a aucune incidence sur le contenu de l’information qui figurait sur le site Internet.

La communication d’une information inexacte par Finance Utile à ses clients est dès lors établie.

Sur le caractère inexact des informations communiquées par Finance Utile quant à ses effectifs

Les notifications de griefs reprochent à Finance Utile d’avoir indiqué sur son site Internet qu’elle disposait d’une équipe de trois personnes, en ce compris Mme A, alors qu’elle n’employait plus de salarié depuis le 1er janvier 2015.

Une capture d’écran du 23 novembre 2015 laisse apparaître qu’à cette date, la page « Philosophie et équipe de FinanceUtile » indiquait que cette dernière était dotée d’une « équipe de professionnels » composée de trois personnes, dont Mme A, et était « efficacement » complétée de « plusieurs consultants experts ».

Or, il résulte des déclarations faites par Mme A aux contrôleurs le 6 janvier 2016 et au rapporteur le 26 septembre 2017 qu’une personne a cessé ses fonctions au sein de Finance Utile à la fin de l’année 2014 et que l’autre, bien que continuant à intervenir dans le cadre de missions ponctuelles sur lesquel es Mme A ne s’est pas expliquée, n’a jamais été employée par la société, de sorte qu’à compter du début de l’année 2015, les effectifs de Finance Utile se limitaient à Mme A. Cette dernière a d’ail eurs reconnu, lors de la première audition, la nécessité de réviser les mentions du site Internet de Finance Utile à cet égard.

La communication d’une information inexacte par Finance Utile à ses clients est dès lors établie.

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Sur le caractère trompeur de l’utilisation des termes « financement participatif » sur le site Internet de Finance Utile

Les notifications de griefs relèvent que l’utilisation des termes « financement participatif » sur le site Internet de Finance Utile a pu laisser croire aux investisseurs que cette dernière disposait d’un statut de conseil er en investissement participatif (ci-après : « CIP ») ou d’intermédiaire en financement participatif (ci-après : « IFP ») et d’une « habilitation à exercer une activité de financement participatif », alors que tel n’était pas le cas.

Finance Utile conteste l’existence d’un tel manquement en faisant valoir, d’une part, que l’activité de financement participatif peut être exercée sous d’autres statuts que celui de CIP, notamment celui de prestataire de services d’investissement, et, d’autre part, qu’aucune disposition ne réservant aux seuls CIP l’usage des termes financement participatif, ceux-ci peuvent être librement employés par tous.

Le I de l’article L. 547-1 du code monétaire et financier, créé par l’ordonnance n°2014-559 du 30 mai 2014, dans sa version en vigueur entre le 1er octobre 2014 et le 1er juillet 2016, définit les CIP comme suit : « Les conseil ers en investissements participatifs sont les personnes morales exerçant à titre de profession habituelle une activité de conseil en investissement mentionnée au 5 de l’article L. 321-1 portant sur des offres de titres de capital et de titres de créance définies par décret », le IV du même article précisant que : « Ne sont pas soumis aux dispositions du présent chapitre les prestataires de services d’investissement ayant reçu un agrément pour fournir le service de conseil en investissement mentionné au 5 de l’article L. 321-1 ».

Par ail eurs, l’article L. 548-1 du code monétaire et financier, également créé par l’ordonnance n°2014-559 du 30 mai 2014, dans sa rédaction en vigueur depuis le 1er octobre 2014 et non modifiée depuis, décrit ainsi l’intermédiation en financement participatif : « L’intermédiation en financement participatif consiste à mettre en relation, au moyen d’un site internet, les porteurs d’un projet déterminé et les personnes finançant ce projet dans les conditions suivantes : / 1° Les personnes morales et les personnes physiques agissant à des fins professionnelles peuvent obtenir les crédits mentionnés au 7 de l’article L. 511-6, des prêts sans intérêt et des dons ; / 2° Les personnes physiques souhaitant financer une formation initiale ou continue peuvent obtenir les crédits mentionnés au 7 de l’article L. 511-6, des prêts sans intérêt sous réserve que les prêteurs n’agissent pas dans un cadre professionnel ou commercial, et des dons ; / 3° Les personnes physiques n’agissant pas pour des besoins professionnels peuvent obtenir des prêts sans intérêt, sous réserve que les prêteurs n’agissent pas dans un cadre professionnel ou commercial, et des dons. / Au sens du présent chapitre, un projet consiste en un achat ou un ensemble d’achats de biens ou de prestations de service concourant à la réalisation d’une opération prédéfinie en termes d’objet, de montant et de calendrier ».

L’article L. 548-2 du code du code monétaire et financier, créé par la même ordonnance, dans sa rédaction en vigueur entre le 1er octobre 2014 et le 3 décembre 2016, applicable à l’époque des faits, définit en ces termes les IFP : « I.- Sont intermédiaires en financement participatif les personnes qui exercent, à titre habituel, l’intermédiation au sens de l’article L. 548-1 pour les opérations de prêt à titre onéreux ou sans intérêt. Seules les personnes morales peuvent être intermédiaires en financement participatif. II.- Les personnes qui ne proposent que des opérations de dons peuvent être intermédiaires en financement participatif.

Enfin, l’immatriculation des CIP et des IFP sur le registre unique tenu par l’ORIAS est rendue obligatoire par les articles L. 547-2 et L. 548-3 du code monétaire et financier, dans leur version en vigueur entre le 1er octobre 2014 et le 3 janvier 2018.

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Il résulte de ces textes que :

— l’exercice à titre habituel et au moyen d’un site Internet d’une activité de conseil en investissement portant sur des offres de titres de capital ou de titres de créance suppose une immatriculation en qualité de CIP auprès de l’ORIAS, sauf à justifier d’un agrément de l’ACPR en tant que prestataire de services d’investissement (ci-après : « PSI ») fournissant un service de conseil en investissement ;

— l’exercice à titre habituel et au moyen d’un site Internet d’une activité d’intermédiation en financement participatif, consistant en la mise en relation entre les porteurs d’un projet déterminé et les personnes qui le financent, pour des opérations de prêt à titre onéreux ou sans intérêt requiert une inscription sur le registre tenu par l’ORIAS en tant qu’IFP.

Par un communiqué publié le 3 mars 2015, le ministère de l’économie et des finances a indiqué restreindre l’usage de la marque « Plate-forme de financement participatif régulée par les autorités françaises », déposée auprès de l’Institut national de la propriété industrielle, aux professionnels immatriculés à l’ORIAS pour exercer l’activité de CIP ou d’IFP ainsi que par les PSI agréés par l’ACPR qui proposent des offres de titres financiers par Internet.

En l’espèce, Finance Utile qui, à l’époque des faits, était enregistrée auprès de l’ORIAS en tant que CIF, n’avait ni la qualité de CIP, ni de celle d’IFP.

S’il n’est, en l’état des éléments du dossier, pas démontré que Finance Utile s’est directement prévalue du statut de CIP, d’IFP ou de PSI, ni allégué par la poursuite qu’elle s’est présentée comme une « Plate-forme de financement participatif régulée par les autorités françaises », seule dénomination à faire l’objet d’un usage réglementé, il reste que son site Internet contient de nombreuses références au financement participatif ou « crowdfunding », son équivalent en anglais.

Il peut, à cet égard, être observé que la page d’accueil du site internet mentionne : « Financement participatif / Philosophie et équipe de Finance Utile » et l’onglet « Notre philosophie » rappelle « Finance Utile c’est une communauté d’acteurs avec des valeurs partagées : des droits, des devoirs et des engagements réciproques au service du crowdfunding ». Le site de Finance Utile comprend par ail eurs une fiche explicative intitulée « Qu’est-ce que l’equity crowfunding ? ».

Enfin, cette dernière se présente, dans sa plaquette commerciale, comme une plateforme pionnière de « l’investissement participatif en fonds propres ».

L’activité exercée par les IFP, qui porte sur des prêts ou des dons, est différente de celle mise en avant par Finance Utile dans les termes rappelés ci-dessus, écartant tout risque de confusion à cet égard.

En revanche, l’emploi répété des termes « financement participatif » ou « crowdfunding » donnait à penser aux investisseurs que Finance Utile était habilitée à proposer des financements participatifs par souscription d’instruments financiers et agréée en tant que PSI ou immatriculée en tant que CIP.

La communication d’une information trompeuse par Finance Utile à ses clients est donc établie.

Il résulte des éléments qui précèdent que Finance Utile a communiqué à ses clients des informations, selon les cas, inexactes ou trompeuses, sur la réalité de ses propres investissements, ses effectifs et son habilitation à exercer une activité de financement participatif.

En conséquence, le manquement de Finance Utile à l’obligation de communiquer une information claire, exacte et non trompeuse prévue à l’article 325-5 du règlement général de l’AMF est constitué.

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III. Sur les manquements de Finance Utile à ses obligations de se comporter avec loyauté et d’agir avec soin et diligence dans l’exercice de son activité de CIF

Il est reproché à Finance Utile d’avoir manqué, d’une part, aux obligations de se comporter avec loyauté et d’exercer son activité avec le soin et la diligence qui s’imposent au mieux des intérêts des clients, en violation des 1° et 2° de l’article L. 541-8-1 du règlement général de l’AMF, et d’autre part, à celle de communiquer une information claire, exacte et non trompeuse, en violation de l’article 325-5 du règlement général de l’AMF.

Sur le défaut de loyauté tenant à l’émission d’attestations faisant état d’un avantage fiscal dont les conditions d’obtention n’étaient pas réunies

Les notifications de griefs retiennent que Finance Utile n’a pas remis, ou veil é à ce que soit remise par les sociétés holdings, à ses clients, la documentation d’information exigée pour l’obtention de l’avantage fiscal annoncé dans la documentation commerciale. Finance Utile a néanmoins adressé à ces derniers des attestations indiquant faussement que leurs investissements bénéficiaient intégralement de cet avantage. Il lui est donc reproché, d’avoir manqué à son obligation de loyauté.

Le manquement reproché porte sur les sept levées de fonds effectuées par l’intermédiaire de Finance Utile entre les mois de juil et 2014 et de février 2016 au profit des sociétés Y, […], X, […], […], V et Z.

Le I f) de l’article 885-0 V bis du code général des impôts, dans sa rédaction applicable entre le 1er janvier 2014 et le 8 août 2015, prévoit : « La Société Z communique à chaque investisseur, avant la souscription de ses titres, un document d’information précisant notamment la période de conservation des titres pour bénéficier de l’avantage fiscal […], les modalités prévues pour assurer la liquidité de l’investissement au terme de la durée de blocage, les risques générés par l’investissement et la politique de diversification des risques, les règles d’organisation et de prévention des conflits d’intérêts, les modalités de calcul et la décomposition de tous les frais et commissions, directs et indirects, et le nom du ou des prestataires de services d’investissement chargés du placement des titres ».

Les bons de souscription ou les bulletins de souscription aux augmentations de capital des sociétés holdings ayant pour objet d’investir dans les sept sociétés précitées indiquent que les versements sont éligibles aux dispositifs de défiscalisation des lois TEPA ou DUTREIL. Sur les modalités de liquidité de l’investissement au terme de la durée de blocage, imposée par la loi fiscale, ils ne contiennent pas d’autre information que l’annonce de la signature d’un pacte d’associés entre la holding et la Société cible définissant les modalités de liquidité. A supposer qu’un tel pacte ait été signé, il l’aurait donc été après et non avant les souscriptions et Mme A a déclaré qu’il n’était remis qu’aux clients qui le réclamaient.

Il est ainsi établi que la remise du document d’information était, au mieux, postérieure à la souscription des titres. Mme A a confirmé que Finance Utile était bien l’auteur des bulletins de souscription. Cette société n’ignorait pas que la documentation ne serait pas remise avant la souscription.

Cependant, la seule lecture des articles 885-0 V bis du code général des impôts, 1° du 1 de l’article 199 terdecies-0 A et 1763 C avant dernier alinéa du même code, ne permet pas d’affirmer que l’absence de délivrance de la documentation d’information entraîne la remise en cause de l’avantage fiscal.

Le manquement à l’obligation de loyauté imposée par les dispositions du 1° de l’article L. 541-8-1 du code monétaire et financier sera en conséquence écarté.

Sur le défaut de soin et de diligence tenant aux transferts de fonds réalisés au profit des sociétés Z et V sans assurance d’une émission de titres

Les notifications de griefs reprochent à Finance Utile d’avoir manqué à son obligation de diligence et/ou de soin en transférant, les 7 et 16 janvier 2015, la somme de 185 140 euros à la Société Z puis, le 12 août 2015, la somme de 15 000 euros à la Société V, sans que des titres soient émis en contrepartie par ces sociétés, a minima pendant plusieurs mois.

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El es précisent que ces sommes correspondaient, dans le premier cas, à la totalité des fonds collectés et, dans le second, à « une partie des fonds complémentaires collectés ».

Il résulte des pièces de la procédure, notamment des bulletins de souscription, que les investissements des clients de Finance Utile dans les sociétés Y et V n’ont pas été effectués directement mais par l’intermédiaire, respectivement, des sociétés « holdings » GP1 Finance et Tech 6 Finance, sans que les fonds correspondant aux souscriptions ne transitent sur un compte de Finance Utile.

Les virements litigieux aux sociétés Y et V ont ainsi été émis, respectivement, par GP1 Finance et Tech 6 Finance comme en attestent les relevés de comptes de ces dernières.

Par ail eurs, Mme A était présidente tant de GP1 Finance que de Tech 6 Finance.

Aucune mention des statuts constitutifs de ces sociétés ne suggère cependant qu’elle exerçait ces fonctions en qualité de représentant légal de Finance Utile, et non à titre personnel.

Les transferts de fonds litigieux n’étant donc pas le fait de Finance Utile, agissant pour son compte ou pour celui de GP1 Finance ou de Tech 6 Finance, c’est à tort qu’il lui est reproché d’avoir contrevenu à l’obligation d’exercer son activité avec soin et diligence en y procédant.

Le manquement aux dispositions du 2° de l’article L. 541-8-1 du code monétaire et financier doit dès lors être écarté.

Sur le défaut de loyauté tenant au caractère trompeur des informations communiquées aux investisseurs de la Société Z.

Il est fait grief à Finance Utile d’avoir manqué à « l’obligation de loyauté issue de l’article L. 541-8-1 1° du code monétaire et financier et de l’article 325-5 du règlement général de l’AMF » en communiquant des informations inexactes ou trompeuses à certains de ses clients quant au sort de leur investissement dans la Société Z et à l’avantage fiscal escompté.

Les clients de Finance Utile ont investi dans la Société Z, par l’intermédiaire de GP 1 Finance, entre les mois de novembre 2014 et de janvier 2015.

Les sommes correspondantes ont été virées par cette dernière à la Société Z les 7 et 16 janvier 2015.

Les pièces de la procédure établissent qu’entre les mois de février et de juil et 2015, plusieurs clients de Finance Utile ont contacté Mme A afin d’obtenir des informations sur l’état d’avancement de leur investissement.

Parmi ces pièces figurent douze courriels de ces clients faisant état d’inquiétudes, formulées en des termes proches, liées à l’absence « de retour » sur la souscription réalisée et à l’impossibilité de visualiser les titres correspondants sur leur compte en ligne.

Mme A a expliqué à certains de ces clients que l’absence de documentation sur cet investissement était exclusivement imputable à un « retard juridique », notamment lié à la « nomination d’un commissaire aux comptes (sociétés de moins de deux ans) » alors que la Société Z, immatriculée le 6 mai 2008, existait depuis plus de sept ans.

El e a par ail eurs confirmé à deux clients leur souscription, al ant même jusqu’à indiquer à l’un d’entre eux : « Les titres [de la Société Z] et le certificat de titres doivent désormais apparaître dans votre portefeuil e » alors que la Société Z n’a procédé à une émission d’obligations simples, de surcroît non conforme aux modalités initialement convenues, que le 19 novembre 2015.

En répondant de la sorte Finance Utile a communiqué à ces clients des informations mensongères.

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Par ail eurs, Finance Utile a émis à l’attention d’un client deux attestations faisant état d’un avantage fiscal
- l’une relative à l’impôt sur le revenu et l’autre à l’impôt de solidarité sur la fortune – alors qu’en raison de la nature des titres émis par la Société Z, à savoir des titres de créance et non de capital, sa souscription n’ouvrait pas droit à cet avantage.

Ces faits caractérisent une déloyauté de Finance Utile à l’égard de ses clients et, partant, une violation du 1° de l’article L. 541-8-1 du code monétaire et financier.

En revanche, l’article 325-5 du règlement général de l’AMF, qui n’est pas relatif à la loyauté, seule invoquée par la notification de griefs, est un fondement inopérant.

Sur la communication d’une information non claire, inexacte et trompeuse sur la situation de la Société V.

Les notifications de griefs retiennent qu’en présentant comme acquis le co-investissement d’un fonds régional et l’octroi d’un prêt de la Banque Publique d’Investissement (BPI) à la Société V et comme imminent l’apurement de la situation nette négative de cette société, alors qu’une incertitude persistait sur ces points au moment de la levée de fonds réalisée, Finance Utile a méconnu l’obligation posée par l’article 325-5 du règlement général de l’AMF de communiquer une information claire, exacte et non trompeuse à ses clients.

La rubrique « Autres informations » du document d’information adressé, sur demande, aux investisseurs intéressés par la Société V fait état d’un « co-investissement avec un fonds d’investissement à hauteur de 300 k€ » ainsi que d’un « effet de levier apporté par la BPI sous forme de prêt à l’innovation ». Elle indique également que « les fonds propres vont être redressés par abandon d’une partie des comptes courant et par apport des brevets ».

Il résulte cependant des déclarations faites par Mme A aux contrôleurs lors de son audition du 6 janvier 2016 que l’obtention des financements précités était subordonnée à l’apurement préalable de la situation nette négative de la Société V et que l’apport de brevet nécessaire à cet apurement était suspendu à la réalisation d’une opération de « rapprochement avec d’autres entreprises » alors encore incertaine.

L’absence de réserve, conjuguée à l’emploi du futur proche, qui laissaient penser que l’obtention des financements était certaine, rendent le contenu de ce document trompeur.

Le manquement à l’obligation de communiquer une information claire, exacte et non trompeuse édictée à l’article 325-5 du règlement général de l’AMF est donc constitué.

IV. Sur les manquements de Finance Utile à ses obligations d’information en matière de rémunération

Il est reproché à Finance Utile d’avoir fourni aux investisseurs une information incomplète sur sa rémunération en omettant d’en détail er les modalités de calcul et d’indiquer le montant maximum des honoraires qu’elle pouvait percevoir de la part des sociétés financées, en violation de l’article 325-6 du règlement général de l’AMF.

Finance Utile fait valoir que certains clients présents dans l’échantil on examiné par les contrôleurs ont investi dans des sociétés qui ne lui ont versé aucune rémunération, ce dont elle déduit que la présentation du manquement est « partielle et partiale ». El e ajoute que les nouvel es lettres de mission mentionnent « la possibilité d’une rémunération par l’émetteur ».

Il résulte des documents figurant dans les quinze dossiers clients annexés que ces derniers ont tous été informés de l’existence de frais de souscription représentant 6 % du montant investi et de l’intéressement de Finance Utile représentant 10 % des plus-values éventuel ement réalisées. Mais seuls deux d’entre eux ont été avisés de la possible perception, par Finance Utile, d’honoraires de la part des sociétés financées.

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En outre, lorsque cette rémunération est mentionnée dans les documents d’entrée en relation, ses modalités de calcul et son montant maximum ne sont pas précisés.

Le fait que certaines sociétés financées n’aient pas versé de rémunération ne peut justifier l’absence d’information des clients.

En omettant d’indiquer, dans les lettres de mission, qu’el e était susceptible de percevoir, de la part des sociétés financées, des honoraires indexés sur le montant des souscriptions collectées pour leur compte, Finance Utile a fourni à ses clients une information incomplète sur sa rémunération.

Le manquement à l’obligation de communiquer une information complète, exacte et compréhensible sur sa rémunération, édictée par l’article 325-6 du règlement général de l’AMF, est donc constitué.

V. Sur le manquement de Finance Utile à l’obligation de prévenir, gérer et traiter les conflits d’intérêts

Il est reproché à Finance Utile de n’avoir pas prévu, dans sa procédure, de dispositions permettant de prévenir, gérer et traiter les conflits d’intérêts éventuels créés par la perception d’honoraires de la part de certaines sociétés financées, en méconnaissance de l’obligation posée par l’article 325-8 du règlement général de l’AMF.

Dans le rappel des faits, les notifications de griefs évoquent deux sources de conflits d’intérêts pour Finance Utile : le risque de privilégier la collecte de fonds pour le compte des sociétés qui acceptent de la rémunérer et celui d’inciter à une cession rapide des participations afin de percevoir 10 % de la plus-value éventuellement réalisée au préjudice des investisseurs qui doivent conserver les titres acquis pendant cinq ans au moins pour bénéficier d’un avantage fiscal.

Ce second risque n’étant plus mentionné dans la partie « Caractérisation des griefs », seul le premier sera examiné.

Le risque de faire primer les intérêts des sociétés financées qui la rémunèrent sur ceux d’autres sociétés est indissociable de la fourniture par Finance Utile d’un service de placement non garanti aux sociétés concernées.

Comme il a été dit, Finance Utile n’était, en sa qualité de CIF, pas autorisée à fournir un tel service.

El e l’a cependant fourni en se prévalant de sa qualité de CIF sans s’être dotée des moyens et procédures lui permettant de prévenir, gérer et traiter les conflits d’intérêts pouvant survenir à l’occasion de cette activité.

Le manquement à l’obligation de prévention, de gestion et de traitement des conflits d’intérêts prévue par l’article 325-8 du règlement général de l’AMF est donc caractérisé.

VI. Sur les manquements de Finance Utile aux obligations relatives à la connaissance des clients

Les notifications de griefs relèvent plusieurs manquements aux obligations relatives à la connaissance des clients : l’absence ou le caractère incomplet, selon le cas, des lettres de mission, l’absence de rapport écrit présentant les risques inhérents à chacun des investissements proposés et le non-respect de l’obligation de s’enquérir de la situation financière des clients.

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Sur l’absence des lettres de mission ou leur caractère incomplet

Il est fait grief à Finance Utile de n’avoir pas fait signer de lettre de mission à ses clients « dans 80 % des cas examinés », les rares lettres de mission existantes étant « incomplètes » en ce qu’elles ne précisaient ni les informations ultérieures du « suivi / reporting » auquel Finance Utile s’engageait auprès de ses clients lors des levées de fonds réalisées, ni les modalités de calcul des honoraires qu’elle pouvait éventuel ement percevoir de la part des sociétés financées, en violation de l’article 325-4 du règlement général de l’AMF.

Finance Utile conteste l’existence d’un tel manquement. El e explique que « la dénomination utilisée avant le contrôle réalisé le 10 mars 2015 par l’ANACOFI-CIF pour les lettres de missions était celle de Mandat de conseil ». Elle souligne que ce document est présent dans les douze dossiers clients litigieux.

Il ressort des pièces de la procédure que Finance Utile a bien remis à trois des quinze clients dont les dossiers figurent dans l’échantil on examiné par les contrôleurs un document intitulé « lettre de mission ».

Les douze dossiers restants comportent un document dénommé « mandat de conseil », dont la structure et le contenu apparaissent identique à ceux des « lettres de mission ».

Contrairement à ce que soutient la poursuite, l’ensemble des dossiers clients comprend une lettre de mission ou un document équivalent.

« Le 4° de l’article 325-4 du règlement général de l’AMF prescrit aux CIF d’indiquer, dans les lettres de mission, « l’existence d’une rémunération reçue des établissements mentionnés au 4° de l’article 325-3 au titre des produits acquis à la suite des conseils prodigués ». Ces établissements sont les « établissements promoteurs de produits mentionnés au 1° de l’article L. 341-3 du code monétaire et financier » ». Or, le 1° de l’article L. 341-3 mentionne : « Les établissements de crédit ou les sociétés de financement définis à l’article L. 511-1, les organismes mentionnés à l’article L. 518-1, les établissements de monnaie électronique, les établissements de paiement, les entreprises d’investissement et les entreprises d’assurance définies respectivement à l’article L. 531-4 du présent code et à l’article L. 310-1 du code des assurances, les fonds de retraite professionnelle supplémentaire mentionnés à l’article L. 381-1 du même code, les sociétés de capital-risque mentionnées à l’article 1er-1 de la loi n° 85-695 du 11 juil et 1985 portant diverses dispositions d’ordre économique et financier, en vue de la souscription des titres qu’elles émettent, les sociétés de gestion d’organismes de placement collectif définies à l’article L. 543-1 du présent code en vue de la souscription des titres financiers émis par les organismes de placement collectif dont elles assurent la gestion, ainsi que les établissements et entreprises équivalents agréés dans un autre Etat membre de l’Union européenne et habilités à intervenir sur le territoire français ».

Dès lors, les sociétés financées par Finance Utile n’entrent pas dans la catégorie des « établissements mentionnés au 4° de l’article 325-3 » pour lesquels le CIF est tenu, en application de l’article 325-4 du règlement général de l’AMF, de préciser dans la lettre de mission les rémunérations qu’ils sont susceptibles de lui verser.

En revanche, en dépit d’un terme contractuellement fixé à moins de six mois, les relations entre Finance Utile et ses clients pouvaient s’inscrire dans la durée, les participations prises par ces derniers dans les sociétés sélectionnées n’ayant pas vocation à être cédées à brève échéance. Les lettres de mission prévoyaient d’ail eurs le versement à Finance Utile d’un intéressement « à hauteur de 10 % sur les plus- values réalisées par les investisseurs, si plus-value il y a, en rémunération de l’accompagnement de proximité des dirigeants et par l’équipe et du suivi / reporting auprès des investisseurs pendant une période moyenne de 5 ans ».

Il en résulte que la « relation [était] appelée à devenir durable » au sens du 3° de l’article 325-4 du règlement général de l’AMF et, partant, que, conformément aux exigences de ce texte, la lettre de mission devait préciser « les dispositions spécifiques convenues en matière de compte rendu de l’activité de conseil et d’actualisation des informations mentionnées aux 3° et 4° de l’article 325-3 ».

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Or, aucun des trois documents intitulés « lettre de mission » de l’échantil on examiné par les contrôleurs ne comportait cette précision.

Le manquement à l’article 325-4 du règlement général de l’AMF est donc constitué mais seulement en ce que 20 % des lettres de mission de l’échantil on examiné, soit trois documents, ne comportait pas la précision requise par le 3° de ce texte.

Sur l’absence de rapport écrit faisant état des risques inhérents aux investissements proposés par Finance Utile

Selon les notifications de griefs, Finance Utile n’aurait, dans 20 % des cas examinés, pas établi de rapport présentant les risques spécifiques attachés à chaque proposition d’investissement, en violation des dispositions de l’article 325-7 du règlement général de l’AMF.

Si Mme A a déclaré, lors de ses auditions des 23 septembre 2015 et 26 septembre 2017, que le processus d’entrée en relation avec le client comprenait l’émission d’un « compte rendu de mission », ce document est manquant dans trois des quinze dossiers clients annexés par les contrôleurs à leur rapport.

Le manquement à l’obligation d’établir un rapport de mission présentant les avantages et risques de la proposition d’investissement, prévue à l’article 325-7 du règlement général de l’AMF, est donc constitué.

Sur le non-respect de l’obligation de s’enquérir de la situation financière des clients

Les notifications de griefs déduisent de l’absence de renseignements fournis par certains clients de Finance Utile sur leur situation personnelle ou de leur caractère imprécis que cette dernière a méconnu l’obligation de s’enquérir de la situation financière des clients prévue au 4° de l’article L. 541-8-1 du code monétaire et financier.

Finance Utile fait valoir qu’avant le contrôle réalisé par l’ANACOFI-CIF, ses clients étaient tenus de lire la totalité du questionnaire de connaissance précis qu’ils recevaient mais ne répondaient pas nécessairement à toutes les questions. El e explique en effet que ceux « qui souhaitai[en]t avoir une certaine confidentialité » disposaient de la possibilité de cocher une case « indiquant qu’il[s] ne souhaitai[ent] pas répondre au questionnaire et qu’il[s]

reconnaissai[ent] avoir une expérience suffisante et une connaissance approfondie des problématiques d’investissement » de sorte que, lorsque cette option était choisie, « Le questionnaire de connaissance client qui était alors signé (s’il était envoyé) était « raccourci» ». El e ajoute que, depuis ce contrôle, les clients sont obligés de répondre à toutes les questions.

Les faits suivants résultent des constats des contrôleurs et des dossiers clients annexés à leur rapport.

En premier lieu, la moitié de ces dossiers ne comporte pas l’indication du montant du patrimoine financier et de la part du portefeuil e investie en titres non cotés. En outre, dans près d’un tiers des dossiers, le questionnaire de connaissance du client est soit manquant, soit, les revenus annuels n’y étant pas indiqués, incomplet.

L’obligation faite au CIF de s’enquérir de la situation financière des clients interdisant d’offrir à ces derniers la possibilité de sélectionner les renseignements qu’ils entendent transmettre, c’est vainement que Finance Utile fait valoir que les omissions précitées résultent de l’exercice d’un tel choix.

En second lieu, Finance Utile propose à ses clients d’indiquer leurs revenus en choisissant parmi les quatre fourchettes suivantes : « inférieurs à 30 k€ », « entre 30 k€ et 70 k€ », « entre 70 k€ et 150 k€ » et « supérieurs à 150 k€ ». En regroupant dans la même catégorie des personnes dont les revenus sont susceptibles de varier du simple au double, Finance Utile s’est placée dans l’impossibilité de connaître leur situation financière de manière précise, situation qui vaut pour 60 % des dossiers de l’échantil on, soit neuf clients sur quinze.

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Le manquement à l’obligation de s’enquérir de la situation de ses clients prévue au 4° de l’article L. 541-8-1 du code monétaire et financier est donc constitué.

VII. Sur l’imputabilité des manquements à Mme A

Pour considérer que l’ensemble des manquements reprochés à Finance Utile sont imputables à Mme A, la notification de griefs se fonde, entre autres, sur les dispositions de l’article 325-12-3 du règlement général de l’AMF.

L’article 325-12-3 du règlement général de l’AMF, issu de l’arrêté du 12 avril 2013, devenu l’article 325-12-15 depuis l’arrêté du 12 octobre 2016, énonce : « Lorsque le conseil er en investissements financiers est une personne morale, les personnes physiques ayant le pouvoir de gérer ou d’administrer ladite personne morale s’assurent qu’elle se conforme aux lois, règlements et obligations professionnelles la concernant ».

En application de ces dispositions, il incombait à Mme A, alors présidente de Finance Utile, de s’assurer que cette dernière se conformait « aux lois, règlements et obligations professionnelles la concernant ».

Les manquements relevés à l’encontre de Finance Utile sont donc imputables à Mme A.

SANCTIONS ET PUBLICATION

L’article L. 621-17 du code monétaire et financier, dans sa version en vigueur depuis le 7 mai 2005, non modifiée depuis dans un sens plus favorable, dispose : « Tout manquement par les conseil ers en investissements financiers définis à l’article L. 541-1 aux lois, règlements et obligations professionnel es les concernant est passible des sanctions prononcées par la commission des sanctions selon les modalités prévues aux I, a et b du III, IV et V de l’article L. 621-15 ».

Aux termes de l’article L. 621-15 du même code, dans sa version en vigueur depuis le 22 février 2014, non modifiée depuis dans un sens plus favorable : « II.- La commission des sanctions peut, après une procédure contradictoire, prononcer une sanction à l’encontre des personnes suivantes : […] a) Les personnes mentionnées aux 1° à 8° et 11° à 17° du II de l’article L. 621-9, au titre de tout manquement à leurs obligations professionnelles définies par les règlements européens, les lois, règlements et règles professionnelles approuvées par l’Autorité des marchés financiers en vigueur, sous réserve des dispositions des articles L. 612-39 et L. 612-40 ; b) Les personnes physiques placées sous l’autorité ou agissant pour le compte de l’une des personnes mentionnées aux 1° à 8° et 11° à 17° du II de l’article

L. 621-9 au titre de tout manquement à leurs obligations professionnelles définies par les règlements européens, les lois, règlements et règles professionnel es approuvées par l’Autorité des marchés financiers en vigueur, sous réserve des dispositions des articles L. 612-39 et L. 612-40 […]. / III.- Les sanctions applicables sont : / a) Pour les personnes mentionnées aux 1° à 8°, 11°, 12°, 15° à 17° du II de l’article L. 621-9, l’avertissement, le blâme, l’interdiction à titre temporaire ou définitif de l’exercice de tout ou partie des services fournis, la radiation du registre mentionné à l’article L. 546-1 ; la commission des sanctions peut prononcer soit à la place, soit en sus de ces sanctions une sanction pécuniaire dont le montant ne peut être supérieur à 100 mil ions d’euros ou au décuple du montant des profits éventuel ement réalisés [… ] ; / b) Pour les personnes physiques placées sous l’autorité ou agissant pour le compte de l’une des personnes mentionnées aux 1° à 8°, 11°, 12°, 15° à 17° du II de l’article L. 621-9, l’avertissement, le blâme, le retrait temporaire ou définitif de la carte professionnelle, l’interdiction à titre temporaire ou définitif de l’exercice de tout ou partie des activités ; la commission des sanctions peut prononcer soit à la place, soit en sus de ces sanctions une sanction pécuniaire dont le montant ne peut être supérieur à 15 mil ions d’euros ou au décuple du montant des profits éventuellement réalisés en cas de pratiques mentionnées aux c à g du II ou à 300 000 euros ou au quintuple des profits éventuellement réalisés dans les autres cas […] ».

—  18 -

Finance Utile peut être sanctionnée sur le fondement du II a) de l’article L. 621-15 du code monétaire et financier et encourt l’une des sanctions disciplinaires prévues au III a) du même article et, en sus ou à la place, une sanction pécuniaire d’un montant maximum égal à 100 mil ions d’euros ou au décuple des profits éventuellement réalisés.

Mme A peut, quant à elle, faire l’objet d’une sanction sur le fondement du II b) de l’article L. 621-15 du code monétaire et financier, dont le montant maximum s’élève, en application du III b) du même article, à 300 000 euros ou au quintuple des profits éventuellement réalisés.

Le III ter de l’article L. 621-15 du code monétaire et financier, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016, définit comme suit les critères à prendre en compte pour déterminer la sanction :

« III ter. – Dans la mise en œuvre des sanctions mentionnées aux III et III bis, il est tenu compte notamment : – de la gravité et de la durée du manquement ; / – de la qualité et du degré d’implication de la personne en cause ; / – de la situation et de la capacité financières de la personne en cause, au vu notamment de son patrimoine et, s’agissant d’une personne physique de ses revenus annuels, s’agissant d’une personne morale de son chiffre d’affaires total ; / – de l’importance soit des gains ou avantages obtenus, soit des pertes ou coûts évités par la personne en cause, dans la mesure où ils peuvent être déterminés ; / – des pertes subies par des tiers du fait du manquement, dans la mesure où elles peuvent être déterminées ; / – du degré de coopération avec l’Autorité des marchés financiers dont a fait preuve la personne en cause, sans préjudice de la nécessité de veil er à la restitution de l’avantage retiré par cette personne ; / – des manquements commis précédemment par la personne en cause ; / – de toute circonstance propre à la personne en cause, notamment des mesures prises par el e pour remédier aux dysfonctionnements constatés, provoqués par le manquement qui lui est imputable et le cas échéant pour réparer les préjudices causés aux tiers, ainsi que pour éviter toute réitération du manquement. ».

Les manquements multiples et répétés de Finance Utile à ses obligations de communication d’une information claire, exacte et non trompeuse, de diligence, et surtout de loyauté, revêtent une particulière gravité. Cette dernière a en outre persisté à fournir, pendant plus d’un an et demi, un service de placement non garanti aux sociétés pour lesquel es elle collectait des fonds, alors que l’AMF et l’ACPR avaient toutes deux appelé son attention sur le fait que son statut de CIF le lui interdisait.

Finance Utile a été radiée, le 3 mars 2017, du registre tenu par l’ORIAS. Elle a déclaré que son chiffre d’affaires s’élevait, au titre de l’année 2016, à 18 000 euros, sans toutefois être en mesure de produire ses états financiers au motif qu’ils n’auraient pas encore été finalisés à la date du 26 septembre 2017. El e n’a pas davantage fourni de justification de sa situation au cours de la séance de la Commission des sanctions. Sa dirigeante a indiqué qu’elle suivait toujours les dossiers en cours avec les mêmes clients sans indiquer quel e rémunération el e avait perçu depuis le contrôle.

Au vu de ces éléments, il sera prononcé à son encontre une sanction pécuniaire de 10 000 euros.

Les considérations exposées ci-dessus sont également applicables à Mme A.

El e est l’élément actif de Finance Utile, qui n’a d’ail eurs plus de salarié depuis le 1er janvier 2015, et des sociétés holding.

Selon ses déclarations, Mme A détient, par le biais de sociétés holdings, des participations dans deux sociétés, dont elle est par ail eurs présidente, d’une valeur cumulée de l’ordre de […] euros. El e fait valoir que ces acquisitions ont été majoritairement financées au moyen d’emprunts. Mme A affirme percevoir des honoraires de l’une de ces sociétés, d’un montant de […] euros par mois, qui lui sont versés par l’intermédiaire d’une « holding patrimoniale ». Elle se déclare enfin propriétaire indivis d’un bien immobilier pouvant être évalué à […] euros.

—  19 -

Au regard de ces éléments, il convient de prononcer à son encontre une sanction pécuniaire de 10 000 euros et une interdiction d’exercer l’activité de CIF pour une durée de dix ans.

La publication de la présente décision ne risque ni de perturber gravement la stabilité du système financier ni de nuire au déroulement d’une enquête ou d’un contrôle en cours, ni de causer un préjudice grave et disproportionné aux mises en cause.

El e sera donc ordonnée, sans anonymisation, à l’égard des personnes sanctionnées.

PAR CES MOTIFS,

Et ainsi qu’il en a été délibéré par Mme Marie-Hélène Tric, présidente de la Commission des sanctions, par Mme Lazard-Kodyra, Mme Anne-José Fulgéras et M. Christophe Lepitre, membres de la 2ème section de la commission des sanctions, et par Mme Edwige Belliard, membre de la 1ère section suppléant M. Christophe Soulard en application du I de l’article R. 621-7 du code monétaire et financier, en présence de la secrétaire de séance, la Commission des sanctions :

— prononce à l’encontre de la société Finance Utile une sanction pécuniaire de 10 000 euros (dix mil e euros) ;

— prononce à l’encontre de Mme A une sanction pécuniaire de 10 000 euros (dix mil e euros) et une interdiction d’exercer les activités de conseil en investissement financier pendant dix ans ;

— ordonne la publication de la présente décision sur le site Internet de l’Autorité des marchés financiers et fixe à cinq ans à compter de la date de la présente décision la durée de son maintien en ligne de manière non anonyme.

Fait à Paris, le 20 décembre 2017

La Secrétaire de séance,

La Présidente,

Anne Vauthier

Marie-Hélène Tric

Cette décision peut faire l’objet d’un recours dans les conditions prévues à l’article R. 621-44 du code monétaire et financier.

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  • FAITS
  • MOTIFS DE LA DÉCISION
  • SANCTIONS ET PUBLICATION
  • La publication de la présente décision ne risque ni de perturber gravement la stabilité du système financier ni de nuire au déroulement d’une enquête ou d’un contrôle en cours, ni de causer un préjudice grave et disproportionné aux mises en cause.
  • Elle sera donc ordonnée, sans anonymisation, à l’égard des personnes sanctionnées.
  • PAR CES MOTIFS,

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Décision de la Commission des sanctions du 20 décembre 2017 à l'égard de la société Finance Utile et de Mme A