Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 4e chambre a, 24 octobre 2013, n° 10/19301

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, 4e ch. a, 24 oct. 2013, n° 10/19301
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 10/19301
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Nice, 9 septembre 2010, N° 07/1542
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Date de dernière mise à jour : 15 octobre 2022
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Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX EN PROVENCE

4e chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 24 OCTOBRE 2013

N° 2013/442

Rôle N° 10/19301

[O] [E]

C/

SARL VALGENIO

SARL FLORIDA

Grosse délivrée

le :

à :

SCP TOLLINCHI

SCP MAYNARD

Me PIAZZESI

Décision déférée à la Cour :

Jugement du tribunal de grande instance de NICE en date du 10 septembre 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 07/1542.

APPELANTE

Madame [O] [E]

née le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 1] ([Localité 1])

demeurant [Adresse 3]

représentée par la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON, avocats au barreau d’AIX-EN-PROVENCE plaidant par la SCP MARRO & ASSOCIES, avocats au barreau de NICE substituée par Me Sébastien ZARAGOCI, avocat au barreau de NICE

INTIMÉES

LA SARL VALGENIO

dont le siège est [Adresse 2]

représentée par Me Kaled HARRAG, avocat au barreau de NICE

LA SARL FLORIDA

dont le siège est [Adresse 1]

représentée par la SCP MAYNARD SIMONI, avocats au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, Me Sirio PIAZZESI, avocat au barreau de NICE substitué par Me Florence CATTENATI, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 26 septembre 2013 en audience publique. Conformément à l’article 785 du code de procédure civile, Monsieur TORREGROSA, président, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Georges TORREGROSA, président

Madame Anne DAMPFHOFFER, conseiller

Madame Sylvaine ARFINENGO, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Sylvie MASSOT.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 24 octobre 2013

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 24 octobre 2013,

Signé par Monsieur Georges TORREGROSA, président et Madame Sylvie MASSOT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Les faits, la procédure et les prétentions :

Mme [E] est locataire d’un appartement dépendant d’un immeuble situé au numéro [Adresse 3]. Son bailleur, la société Florida lui a notifié le 26 décembre 2003 un congé avec offre de vente pour un prix stipulé de 192'000 €.

La vente, portant sur la totalité des appartements de l’immeuble, a été conclue entre la société Florida et la société Valgenio pour un prix de 1'509'000 € selon acte authentique en date du 17 mars 2004.

Mme [E] estime donc que l’appartement qu’elle occupe à été vendu au prix de 1239 € le mètre carré, soit 120'273 €.

Un second congé pour vente a été délivré par la SARL Valgenio le 6 juillet 2004, pour un prix stipulé de 160'000 €.

Par acte d’huissier en date du 12 mars 2007, Mme [E] a fait citer devant le tribunal de grande instance de Nice les sociétés Florida et Valgenio, sur le fondement de l’article 15 – deux de la loi du 6 juillet 1989, aux fins d’annulation de la vente conclue entre les deux sociétés.

Par jugement réputé contradictoire en date du 10 septembre 2010, l’action était déclarée irrecevable, faute de publication au bureau des hypothèques.

Mme [E] a relevé appel de façon régulière et non contestée le 27 octobre 2010. Il sera fait application de l’article 455 du code de procédure civile.

L’appelante a conclu de façon récapitulative le 28 août 2012 et demande à la cour de juger que :

— le congé du 23 décembre 2003 était prématuré ;

— les effets du congé s’inscrivaient dans la période comprise entre 23 décembre 2006 et le 30 juin 2007 ;

— le droit de préemption était fixé dans la période comprise entre le 30 décembre 2006 et fin février 2007 ;

il convient donc de juger que l’appelante était privée de son premier droit de préemption, ainsi que de son deuxième droit de préemption, pour défaut de notification d’une vente consentie à des conditions plus avantageuses à un tiers ;

la vente du 17 mars 2004 est donc nulle et de nul effet, et doit être anéantie rétroactivement ;

Par l’effet de cette nullité, il y a nullité du congé du 23 décembre 2003, entâché de plus fort de nullité pour défaut de mentions obligatoires, et pour défaut d’intention de vendre à Mme [E] et donc pour intention frauduleuse ;

Mme [E] a accepté la vente pour un prix supérieur à celui proposé par la société Florida, et le pollicitant était lié par l’offre d’achat effectuée antérieurement tant au congé qu’à la vente ;

Il y a donc lieu de réaliser la vente au profit de Mme [E] ;

Par l’effet de la nullité de la vente, la société Florida est demeurée bailleresse et le congé délivré le 6 juillet 2004 est nul et de nul effet pour avoir était délivré par une personne morale non propriétaire qui s’est autorisée de surcroît à vouloir rétracter le précédent congé, entaché de plus fort de nullité pour défaut de description du bien vendu ; en l’état de nullité de la vente du 17 mars 2004, toutes les ventes qui ont suivi son nul et à défaut de congé régulier, le bail s’est reconduit tacitement pour six années à compter du 30 juin 2007 ;

Une somme de 15'000 € est réclamée conjointement et solidairement aux sociétés intimées, outre 15'000 € en réparation de l’intégralité du préjudice, et 7000 € au titre des frais inéquitablement exposés.

La société Florida, intimée, a conclu le 29 mars 2013 en précisant dans son en-tête sa qualité de société civile immobilière.

Mme [E] est irrecevable en ses demandes, faute d’avoir assigné tous les propriétaires concernés. Au fond, il est conclu au débouté intégral à titre principal ;

Subsidiairement, la vente individuelle de l’appartement objet du congé du 26 décembre 2003 n’a pas eu lieu et en tout état de cause le droit de préemption découlant de ce congé a été purgé le 26 février 2004 ;

La vente intervenue entre Florida et [C] le 17 mars 2004 était une vente de l’immeuble dans son entier, soumis à la loi du 31 décembre 75, qui ne prévoit aucun droit de préemption du locataire ; cette vente est donc valable et Mme [E] sera déboutée.

Encore plus subsidiairement, la cour jugera que le bail du 1er juillet 95 arrivait à échéance les 30 juin 2004, le congé délivré le 26 décembre 2003 l’ayant été à la bonne date, sans que Mme [E] exerce son droit de préemption jusqu’au 26 février 2004 ; ce congé était donc valide.

Une somme de 5000 € est réclamée au titre des frais inéquitablement exposés.

La société à responsabilité limitée Valgenio, intimée, a conclu pareillement le 4 avril 2013, à l’irrecevabilité à titre principal, et au débouté à titre subsidiaire. Une somme de 5000 € est réclamée au titre des frais inéquitablement exposés.

L’ordonnance de clôture est en date du 12 septembre 2013.

SUR CE:

Attendu que la chronologie des événements doit être rappelée, dont il résulte de façon reconnue par les parties que :

— Le bail dont se prévaut Mme [E] est en date du 30 juin 1995 et s’est poursuivi par tacite reconduction à chaque période triennale, soit juin 98, juin 2001 ;

— le 8 décembre 2003, par conséquent au cours de la période triennale juin 2001 – juin 2004, l’indivision [P] venant aux droits de la bailleresse initiale [S] [P] a vendu l’ensemble de l’immeuble à la société Florida ;

— par acte extrajudiciaire en date du 26 décembre 2003, la société à responsabilité limitée Florida a fait signifier à Mme [E] un congé pour vente des locaux qui lui sont donnés en location pour le 30 juin 2004, moyennant le prix de 192'000 €;

Attendu que Mme [E] considère que ce congé est prématuré, dès lors que depuis le 8 décembre 2003, le bailleur était une personne morale ne pouvant plus bénéficier de l’article 13 de la loi de 1989, et se trouvait liée par une durée de bail de six ans expirant en juin 2007 ;

Mais attendu que c’est à la date de la tacite reconduction que cesse pour le nouveau bailleur personne morale le bénéfice de la loi de 89, soit en l’espèce le 30 juin 2004 ;

Attendu que le terme du bail tacitement reconduit le 30 juin 2001, avant qu’une personne morale ne devienne bailleur en rachetant l’entier immeuble, était donc au 30 juin 2004, Mme [E] ne pouvant bénéficier d’une nouvelle période de six ans qu’en l’absence de congé délivré antérieurement cette date ;

Mais attendu que précisément le congé délivré le 26 décembre 2003 fixait de façon contractuellement pertinente l’expiration du bail au 30 juin 2004 ;

Attendu que ce congé est parfaitement régulier en la forme et qu’il suffit de le lire pour établir que l’ensemble des textes exigés par la loi, à peine de nullité, y sont rappelés ;

Attendu qu’aucune fraude aux droits du locataire n’est démontrée, pas plus que le caractère vétuste de l’immeuble ou la conviction qu’avait le bailleur de proposer un prix qui ne pourrait qu’être refusé ;

Attendu que la vente de l’entier immeuble intervenue le 17 mars 2004 ne permet nullement à Mme [E] d’établir, par un simple calcul au prorata du prix global sur le métrage global rapporté à la dimension de son appartement, que le prix proposé de 192'000 € constitue ipso facto une fraude à ses droits, ou soit manifestement excessif. ; Que de même le prix de 160'000 € consenti à un tiers le 8 octobre 2004 ne démontre pas cette fraude, sachant au surplus qu’entre-temps la locataire se maintenait dans les lieux, ce qui à l’évidence ne pouvait qu’influer le prix à la baisse, étant précisé que 11 ans plus tard la situation n’a pas évolué ;

Attendu qu’ainsi, la cour ne peut que constater que la vente de l’entier immeuble en date du 17 mars 2004 a eu lieu à l’issue d’un congé parfaitement régulier en date du 26 décembre 2003, qui a purgé le droit de préemption à l’issue des deux premiers mois du préavis, soit le 26 février 2004 , sans que le prix consenti à l’occasion de cette vente ne puisse servir de démonstration à des conditions plus avantageuses, motivation que la cour exprime dans un souci d’exhaustivité alors même que la loi du 31 décembre 1975 n’ouvre droit à aucune préemption du locataire lorsque l’immeuble est vendu dans son entier ;

Attendu qu’enfin, et à compter de l’expiration du préavis le 30 juin 2004, Mme [E] qui n’avait pas accepté l’offre régulièrement formulée s’est trouvée dépourvue de plein droit de tout titre d’occupation sur le local loué, la cour précisant que le second congé délivré le 6 juillet 2004 ne vaut en aucun cas renonciation à la régularité du premier congé ;

Attendu qu’au terme de ces rappels, et tenant les pièces régulièrement communiquées par l’appelant qui se résument au contrat de bail, aux cessions intervenues, aux deux congés, à la justification de la publication de l’assignation et à des jugements dans des procédures annexes pour mémoire, la cour ne saurait faire droit à l’appel puisque le congé n’était pas prématuré et se trouve parfaitement régulier, qu’aucune vente n’a été consentie à des conditions plus avantageuses la privant d’un deuxième droit de préemption, qu’aucune fraude n’est démontrée et qu’elle est dénuée de tout titre depuis le 30 juin 2004 ;

Attendu qu’il n’y a donc nullement lieu à annuler le congé, encore moins à annuler la vente du 17 mars 2004 alors que cette demande est irrecevable puisque tous les propriétaires concernés n’ont pas été assignés ;

Attendu que la demande de voir réalisée la vente à son profit est dépourvue de tout fondement, de même que la demande de nullité de toutes les ventes intervenues depuis le 17 mars 2004 qui serait la conséquence de la nullité de cette vente ;

Attendu que le bail ne s’est pas tacitement reconduit mais a cessé par l’effet du congé antérieur le 30 juin 2004, Mme [E] qui succombe dans son recours ne pouvant solliciter aucune somme à aucun titre et devant supporter les dépens ;

Attendu qu’une somme de 3500 euros est justifiée au profit de chaque intimée au titre des frais inéquitablement exposés en appel, ce montant étant non seulement justifié mais parfaitement raisonnable puisque Mme [E] qui succombe intégralement n’hésite pas à réclamer 7000 € à ce titre ;

PAR CES MOTIFS, LA COUR statuant contradictoirement :

Déclare l’appel infondé ;

Déclare irrecevable l’action de Mme [E] tendant à annuler la vente de l’entier immeuble en date du 17 mars 2004, faute d’avoir assigné tous les propriétaires concernés ;

Déclare recevable l’action de Mme [E] pour le surplus, mais au fond la déboute de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions ;

Condamne l’appelante aux entiers dépens, outre le paiement à chacun des intimés d’une somme de 3500 € au titre des frais inéquitablement exposés en appel ;

Dit que les dépens seront recouvrés au bénéfice de l’article 699 du code de procédure civile.

Le greffier, Le président,

S. Massot G. Torregrosa

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