Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 10e chambre, 23 novembre 2017, n° 16/10567

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, 10e ch., 23 nov. 2017, n° 16/10567
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 16/10567
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Marseille, 11 mai 2016, N° 13/12986
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

10e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 23 NOVEMBRE 2017

N° 2017/ 463

Rôle N° 16/10567

A X

C/

MAIF

CPAM DES BOUCHES DU RHÔNE

CARCDSF

Grosse délivrée

le :

à :

Me Philippe CARLINI

Me Laurent LAZZARINI

SELARL BOULAN

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 12 Mai 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 13/12986.

APPELANT

Monsieur A X

né le […] à […]

de nationalité Française, demeurant […]

représenté par Me Philippe CARLINI de la SELARL CARLINI ET ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEES

MAIF, demeurant 200, Avenue Salvador Allende – 79018 NIORT représentée par Me Laurent LAZZARINI de la SELARL CONVERGENCES AVOCATS, avocat au barreau de MARSEILLE

CPAM DES BOUCHES DU RHÔNE,

dont le siège social est : […]

défaillante

CARCDSF,

dont le siège social est : […]

représentée par Me Françoise BOULAN de la SELARL BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, Me Catherine GRANIER, avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 10 Octobre 2017 en audience publique. Conformément à l’article 785 du code de procédure civile, Madame Françoise GILLY-ESCOFFIER, Conseiller , a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Olivier GOURSAUD, Président

Madame Françoise GILLY-ESCOFFIER, Conseiller

Madame Anne VELLA, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. C D.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Novembre 2017

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Novembre 2017,

Signé par Monsieur Olivier GOURSAUD, Président et Madame Sylvaine MENGUY, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Le 5 février 2009 M. A X a été blessé au cours d’un accident de la circulation dans lequel a été impliqué un véhicule assuré auprès de la société Mutuelle assurance des instituteurs de France (MAIF).

Il a saisi le juge des référés qui par ordonnance du 3 juillet 2009 a prescrit une mesure d’expertise médicale confiée au docteur Z E.

L’expert a établi son rapport le 12 avril 2011.

Par actes du 18 octobre 2013 et du 13 janvier 2014 M. X a assigné devant le tribunal de grande instance de Marseille la société MAIF, la caisse primaire d’assurance maladie des Bouches du Rhône (CPAM) et la Caisse autonome de retraite des chirurgiens-dentistes et des sages femmes (Caisse autonome de retraite) pour obtenir, sur le fondement de la loi du 5 juillet 1985, la réparation de son préjudice corporel et une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 12 mai 2016 cette juridiction a :

— donné acte à la société MAIF qu’elle ne conteste pas devoir indemniser M. X des conséquences dommageables de l’accident du 5 février 2009,

— évalué le préjudice corporel de M. X hors débours de la CPAM et de la Caisse autonome de retraite à la somme de 117'112,46 €,

— condamné la société MAIF à payer à M. X avec les intérêts au taux légal à compter du jugement:

* 70'842,46 € en réparation de son préjudice corporel après déduction des provisions de 46'870 € déjà versées,

* 1 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné la société MAIF à payer à M. X les intérêts au double du taux légal sur la somme de 87'713,06 € pendant la période ayant couru du 2 octobre 2011 au 26 novembre 2012,

— condamné la société MAIF à payer à la Caisse autonome de retraite :

* 22'221 € avec intérêts au taux légal à compter du 13 novembre 2014,

* 400 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

— déclaré le jugement opposable à la CPAM,

— ordonné l’exécution provisoire,

— condamné la société MAIF aux dépens dont les frais d’expertise judiciaire avec distraction.

Le tribunal a détaillé ainsi qu’il suit le préjudice corporel de M. X :

* frais d’assistance à expertise : 600 €

* dépenses de santé restées à charge : 183,86 €

* frais divers : 652,60 €

* assistance par tierce personne : 7 440 € sur la base d’un volume horaire de 2 heures par jour et d’un tarif horaire de 15 €

* perte de gains professionnels actuels : 30'336 € après imputation des indemnités versées par la Caisse autonome de retraite de 19'992 €

* incidence professionnelle : 25'000 € au titre de la pénibilité accrue

* déficit fonctionnel temporaire : 7 980 € (accord des parties)

* préjudice esthétique temporaire : 2 000 €

* souffrances endurées : 16'000 €

* déficit fonctionnel permanent : 11'520 €

* préjudice esthétique permanent : 4 000 €

* préjudice d’agrément : 12'000 €.

Le tribunal a par ailleurs relevé que la société MAIF ne démontrait pas avoir fait une offre d’indemnisation avant l’envoi du courrier avec accusé de réception du 26 novembre 2012.

Par déclaration du 7 juin 2016 M. X a interjeté un appel partiel de cette décision limité à la perte de gains professionnels et à l’incidence professionnelle.

Par ordonnance du 8 février 2017 le conseiller de la mise en état a rejeté la demande d’expertise comptable formulée par M. X.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

M. X demande à la cour dans ses conclusions du 11 mai 2017, en application de la loi du 5 juillet 1985, de :

' le recevoir en son appel et déclarer celui-ci bien fondé

' condamner la société MAIF à lui verser les sommes de

— perte de gains professionnels actuels : 40 694 €

— incidence professionnelle : 237 992 €

— perte de gains professionnels futurs : 140 339 €

— perte de droits à la retraite (PGPF) : 28 403 €

— préjudice d’agrément : 12 000 €

— frais irrépétibles : 5 000 €

— le tout avec intérêts au taux doublé à compter de la date de l’accident

— condamner la société MAIF aux entiers dépens avec distraction.

Il soutient que :

' sur le préjudice professionnel

— son cabinet était en constante croissance et il a décidé de faire des investissements pour plus de 100.000 €, or l’accident a empêché une évolution plus favorable de son activité,

— il a dû restreindre son activité en raison de son handicap et de sa plus grande fatigabilité, a fait appel à une remplaçante à temps plein du 5 février 2009 au 31 décembre 2009 puis à une assistante collaboratrice à raison de 3 demi-journées par semaine jusqu’au début de l’été 2010 et a ainsi subi une réduction de ses revenus,

— il a communiqué un rapport d’un expert comptable indépendant, M. Y, qui a analysé les documents comptables et le rapport d’analyse de la société MAIF,

— cet expert a analysé sa situation professionnelle avant l’accident et a constaté qu’à l’exception des achats il n’avait pas de frais variables liés au chiffre d’affaires et que son cabinet était en croissance régulière, a déterminé ses revenus entre la date de l’accident et la date de consolidation (44 985 € en 2009 et 93 219 € en 2010) et a chiffré sa perte de gains professionnels actuels en utilisant 4 méthodes de calcul, à la différence de la société MAIF qui n’en a retenu qu’une, pour aboutir à une perte de 40 694 €,

— le taux de marge retenu par la société MAIF est arbitraire en ce qu’il intègre des charges dont la variation n’est pas liée au chiffre d’affaires ainsi que le démontre le rapport de l’expert qui révèle un taux de marge moyen de 83,45 %,

— il précise que les réductions de cotisations sociales ont contribué à majorer son résultat comptable et fiscal, de sorte que les pertes de gains professionnels actuels étant calculées par la différence entre ledit résultat comptable et un résultat théorique sont minorées du montant des réductions obtenues,

— l’expert comptable a recherché l’impact économique de l’accident sur son activité professionnelle, en se basant sur un déficit fonctionnel permanent de 8 % qui a généré une baisse d’efficacité professionnelle et l’a conduit à prendre des mesures palliatives qui n’ont pas supprimé l’impact de l’accident mais l’ont réduit, en retenant un coût moyen de mesures destinées au retour à la situation antérieure de 237 992 € et une perte annuelle moyenne de revenus de 8 010 € soit une perte de gains professionnels futurs capitalisée de 140 339 € outre une perte de retraite au titre des pertes de gains professionnels actuels de 5 829 € et au titre des pertes de gains professionnels futurs de 22 574 €,

— le médecin expert ayant estimé que le choix de conserver la remplaçante 3 demi- journées par semaine n’est pas imputable à l’accident, les incidences économiques de la remplaçante ont été corrigées par M. Y de sorte que les charges ou produits induits par le remplacement n’affectent pas les calculs,

' sur le préjudice d’agrément

— il était très sportif et pratiquait le ski et la voile, activités demeurant possibles mais avec une fatigabilité plus importante, ainsi que le jardinage et le bricolage qui imposent des stations accroupies qu’il ne peut plus effectuer.

La société MAIF demande à la cour dans ses conclusions du 11 avril 2017, de :

' débouter M. X de toutes ses demandes

' confirmer le jugement sauf en ce qui concerne les points suivants

— perte de gains professionnels actuels

* débouter M. X de ses demandes

* confirmer le jugement en ce qu’il a retenu son analyse comptable

* infirmer le jugement en ce qu’il a omis la somme de 2 229 € correspondant aux exonérations de cotisations dont a bénéficié M. X

* juger que la perte de gains professionnels actuels s’élève à la somme de 28 107,39 € et non à celle de 30'336 €

— incidence professionnelle

* débouter M. X de ses demandes

* confirmer le jugement en ce qu’il a retenu que la pénibilité dans l’exercice de son travail n’est pas de nature à entraîner pour M. X une perte de revenus « après la consolidation de ses blessures »

* infirmer le jugement en ce qu’il a alloué à la victime une somme de 25'000 €

* juger que la somme de 6 000 € est satisfaisante pour réparer l’incidence professionnelle subie

— préjudice d’agrément

* infirmer le jugement en ce qu’il l’a condamnée à payer une somme de 12'000 € au titre d’un préjudice non retenu par l’expert, non justifié et contredit par les propres pièces de la victime

* juger qu’il n’y a pas lieu de retenir un préjudice d’agrément

' en tout état de cause condamner M. X à lui verser la somme de 2 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile

' condamner M. X aux dépens avec distraction.

Elle fait valoir que :

' sur la perte de gains professionnels actuels

— le tribunal a justement retenu que M. X n’est pas fondé à réclamer une perte de gains professionnels après le 31 décembre 2009 alors qu’à cette date il pouvait selon l’expert reprendre son travail sans assistance,

— l’assiette du montant réclamé ne peut se calculer sur la base d’une simple attestation comptable produite par le propre expert comptable de M. X,

— elle-même a fait diligenter une étude comptable pour comparer les chiffres d’affaires réalisés par M. X en 2006, 2007 et 2008 afin de les rapprocher des recettes perçues en 2009 et de compenser la perte théoriquement subie ; contrairement à ce qu’affirme M. X cette analyse comptable est objective puisqu’elle repose sur des chiffres précis fournis par l’appelant lui-même ; en outre elle a affecté les recettes encaissées d’un coefficient de pondération pour donner plus d’importance à l’année précédant l’accident et replacer la victime dans la situation qui était la sienne au moment de celui-ci ; ainsi le taux de marge médian réalisé sur les trois années précédentes est de 74,71%,

— il y a lieu de déduire les indemnités versées par la Caisse autonome de retraite sur la même période,

— le rapport d’expertise comptable de M. Y que M. X a fait établir ne peut remettre en cause les conclusions de l’expert médical sur la durée de l’arrêt de travail et sur l’imputabilité du recours à la remplaçante après la date de la consolidation et comporte au surplus une erreur sur le montant des indemnités perçues de la Caisse autonome de retraite,

' sur l’incidence professionnelle

— l’expert a relevé dans son rapport que le choix de conserver la remplaçante trois demi-journées par semaine n’est pas imputable à l’accident,

— les chiffres d’affaires de M. X les années ayant suivi l’accident sont en constante augmentation ce qui démontre que l’accident n’a eu aucun impact direct sur le développement du cabinet qui a continué son cours,

— l’attestation de l’expert-comptable ne peut établir la réalité de la perte alléguée,

— M. X a en réalité fait le choix de travailler moins et la perte de gains professionnels futurs n’est pas démontrée,

' sur le préjudice d’agrément

— M. X a transmis des attestations et une licence de voile pour l’année 2012 ce qui démontre que la pratique de cette activité est restée possible,

— il en est de même pour les activités de bricolage et de jardinage puisque l’expert en page 16 de son rapport ne fait état que d’une discrète limitation de la cheville droite gênant l’accroupissement.

La Caisse autonome de retraite demande à la cour dans ses conclusions du 24 octobre 2016, en application de la loi du 5 juillet 1985, de :

— la juger recevable et fondée en ses demandes et y faire droit

— confirmer le jugement en toutes ses dispositions

— condamner la société MAIF aux dépens de l’instance avec distraction

— condamner la société MAIF à lui verser la somme de 3 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle indique :

— qu’elle fonde sa demande en paiement sur les dispositions du décret numéro 60-452 du 12 mai 1960 et des articles L. 621-3 et R. 641-6 du code de la sécurité sociale qui lui reconnaissent le caractère d’un organisme de sécurité sociale à part entière et sur les articles 28 et 29 de la loi du 5 juillet 1985 et L. 642-3 et R. 643-12 du code de la sécurité sociale qui lui permettent d’obtenir le remboursement de toutes les prestations versées en conséquence du fait dommageable,

— qu’elle a versé des indemnités journalières du 6 mai 2009 au 31 décembre 2009 pour un montant total de 19 992 € dont elle fournit le détail et réclame le remboursement,

— il y a lieu de lui allouer le montant des cotisations compensées (exonération de cotisations) du chef du régime de base des libéraux pour l’année 2009 soit 2 229 €.

La CPAM, assignée par M. X par acte d’huissier du 6 septembre 2016 délivré à personne habilitée et contenant dénonce de l’appel, n’a pas constitué avocat.

Par courrier du 1er mars 2017 elle a fait connaître le montant de sa créance définitive de 27'569,52 € correspondant à des prestations en nature.

L’arrêt sera réputé contradictoire conformément aux dispositions de l’article 474 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la réparation des préjudices professionnels et du préjudice d’agrément

Le droit à indemnisation intégrale du préjudice corporel subi par M. X n’a jamais été contesté ; seule est discutée en cause d’appel l’évaluation la perte de gains professionnels actuels, de la perte de gains professionnels futurs, de l’incidence professionnelle et du préjudice d’agrément.

L’expert le docteur Z -E indique dans son rapport du 12 avril 2011 que M. X a présenté un oedème du mollet droit, une fracture du tibia et du péroné droit compliquée d’un syndrome d’algodystrophie, d’une tendinopathie du tendon rotulien avec infection à staphylocoque et qu’il conserve comme séquelles des douleurs sur l’axe jambier, notamment à l’appui (agenouillement), une hypoesthésie cutanée superficielle, du tiers supérieur de la jambe, une limitation de la flexion du genou à 110, avec craquement à l’extension, une discrète limitation des mouvements de la cheville retentissant sur les sauts, l’accroupissement et la station monopodale, un état anxieux et des cicatrices.

Il conclut à :

— perte de gains professionnels : justifiés ; au moment de l’accident la victime était chirurgien libéral ; du fait de son handicap il a dû faire appel à une remplaçante entre février 2009 et décembre 2009 ; il a interrompu son travail du 5 février 2009 au 31 décembre 2009 ; il a ensuite repris son travail en gardant sa remplaçante 3 demi-journées par semaine ce qui ne semble pas en relation directe et certaine avec le fait dommageable ; les séquelles de cet accident ne nécessitent pas de changement de profession mais comme l’explique M. X 'il a une plus grande fatigabilité' ou 'pénibilité accrue'

— un déficit fonctionnel temporaire total du 5 février 2009 au 31 décembre 2009

— un déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 25 % du 1er janvier 2010 au 31 janvier 2010 et au taux de 10 % du 1er février 2010 au 5 juin 2010

— une consolidation au 5 juin 2010

— des souffrances endurées de 4,5/7

— un déficit fonctionnel permanent de 8 %

— un préjudice esthétique permanent de 2,5/7

— un préjudice d’agrément : pour tous les sports nécessitant un appui longtemps prolongé et répété sur le membre inférieur droit, il faut retenir une pénibilité accrue.

Son rapport constitue une base valable d’évaluation des postes contestés du préjudice corporel subi à déterminer au vu des diverses pièces justificatives produites, de l’âge de la victime née le […], de son activité de chirurgien dentiste, de la date de consolidation, afin d’assurer sa réparation intégrale et en tenant compte, conformément aux articles 29 et 31 de la loi du 5 juillet 1985, de ce que le recours subrogatoire des tiers payeurs s’exerce poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu’ils ont pris en charge, à l’exclusion de ceux à caractère personnel sauf s’ils ont effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un tel chef de dommage.

Par ailleurs, l’évaluation du dommage doit être faite au moment où la cour statue.

- Sur la perte de gains professionnels actuels

Ce poste vise à compenser une incapacité temporaire spécifique concernant les répercussions du dommage sur la sphère professionnelle de la victime et doit être évalué au regard de la preuve d’une perte effective de revenus.

Il ressort du rapport d’expertise médicale (pages 4, 6 et 17) que M. X a porté une orthèse de semi-décharge et marché avec une canne jusqu’au 31 janvier 2010 et a suivi une rééducation à raison de 3 séances par semaine jusqu’au printemps 2010.

La nécessité du recours à une remplaçante 3 demi-journées par semaine, du fait de l’accident, est donc établie jusqu’à la date de la consolidation soit jusqu’au 5 juin 2010.

M. X a communiqué :

— les contrats de remplacement non salariés successifs conclus à compter du 10 février 2009 jusqu’au 30 juin 2010 stipulant que le remplacement est rémunéré par le versement de 45 % (jusqu’au 30 juin 2009) puis de 55 % (à compter du 1er juillet 2009) des honoraires perçus et encaissés,

— ses avis d’imposition 2009 à 2012,

— ses déclarations de revenus non commerciaux et assimilés '2035" des années 2008, 2011 et 2013.

M. Y dans son rapport d’expertise comptable détermine la perte de gains professionnels actuels par le recours à quatre méthodes différentes ; ses conclusions sur ce point sont corroborées par les pièces ci-dessus qui révèlent notamment que sur la seule année 2009, année de l’accident, M. X a subi une perte de revenus de plus de 40 000 € ; la société MAIF et la Caisse autonome de retraite ont pu discuter le contenu de ce rapport d’expertise dans le cadre de la présente instance ; ce document peut dès lors être retenu comme élément de preuve parmi les autres documents précités, étant précisé qu’il est plus complet que le rapport d’expertise comptable que la société MAIF a fait établir ; ainsi la perte de gains professionnels actuels doit être chiffrée pour la période du 5 février 2009 au 5 juin 2010 ainsi qu’il suit, étant précisé qu’il y a lieu de réintroduire l’exonération de cotisations qui majore la perte, afin :

— perte de marge : 60 905 €

— honoraires rétrocédés à la remplaçante : 20 328 €

— réintégration de l’exonération de cotisations sociales : 2229 €

— total : 83 462 €

— déduction des honoraires rétrocédés par la remplaçante : 15 924 €

— déduction de l’exonération de cotisations : 2 229 €, somme devant être allouée à la Caisse autonome de retraite

— solde : 65 309 €.

Des indemnités journalières ont été versées sur cette même période par la Caisse autonome de retraite pour un montant de 19 992 € qui s’imputent sur ce poste de dommage qu’elles ont vocation de réparer ; il y a lieu en outre d’imputer les sommes versées par la société la Médicale de France ainsi que mentionné dans le rapport de M. Y de 5 538 €.

La somme revenant personnellement à la victime s’établit à 39 779 €.

- Perte de gains professionnels futurs

Ce poste est destiné à indemniser la victime de la perte ou de la diminution directe de ses revenus à compter de la date de consolidation, consécutive à l’invalidité permanente à laquelle elle est désormais confrontée dans la sphère professionnelle à la suite du fait dommageable.

M. X était médicalement apte à la reprise de son exercice professionnel à dater du 5 juin 2010.

Il ne démontre pas que son état de santé passé cette date a nécessité le recours à une remplaçante ni qu’il l’a empêché de réaliser le même nombre d’actes et d’encaisser les mêmes recetttes qu’avant l’accident.

En outre M. Y ne calcule une telle perte qu’à partir du postulat que le déficit fonctionnel permanent a entraîné nécessairement une diminution de la cadence des gestes médicaux ce qui est en contradiction avec les conclusions de l’expert médical.

La demande d’indemnisation d’une perte de gains professionnels futurs n’est donc pas fondée et doit être rejetée.

- Incidence professionnelle

Ce chef de dommage a pour objet d’indemniser non la perte de revenus liée à l’invalidité permanente de la victime mais les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle en raison, notamment, de sa dévalorisation sur le marché du travail, de sa perte d’une chance professionnelle ou de l’augmentation de la pénibilité de l’emploi qu’elle occupe imputable au dommage, ou encore l’obligation de devoir abandonner la profession exercée au profit d’une autre en raison de la survenance de son handicap.

M. X qui reste notamment atteint de douleurs sur l’axe jambier, d’une limitation de la flexion du genou à 110, avec craquement à l’extension, d’une discrète limitation des mouvements de la cheville retentissant sur les sauts, l’accroupissement et la station monopodale va subir une pénibilité et une fatigabilité accrue dans l’exercice de son métier ce qui justifie une indemnisation à hauteur de 50 000 €.

—  Préjudice d’agrément

Ce poste de dommage vise exclusivement l’impossibilité ou la difficulté pour la victime à poursuivre la pratique d’une activité spécifique sportive ou de loisir.

M. X ne justifiant pas qu’il s’adonnait, avant l’accident, à une activité de cette nature, en l’absence du moindre élément produit à ce sujet (attestation ou autre) doit être débouté de toute demande à ce titre.

Compte tenu des éléments qui précèdent il revient à M. X, après imputation des débours de la Caisse autonome de retraite, une somme de 140 155,46 €, provisions non déduites, soit 93.285,46 € après déduction des provisions de 46 870 €.

Il n’y a pas lieu de modifier les dispositions du jugement relatives au doublement du taux de l’intérêt légal, la sanction ayant été appliquée sur le montant de l’offre de 87 713,06 € sur la période du 2 octobre 2011 au 26 novembre 2012 et M. X ne motivant pas sa demande à ce titre.

Sur les demandes annexes

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles doivent être confirmées.

La société MAIF qui succombent partiellement dans son recours et qui est tenue à indemnisation supporteront la charge des dépens d’appel avec application de l’article 699 du code de procédure civile.

L’équité commande d’allouer à M. X une indemnité de 1 500 € et à la Caisse autonome de retraite une indemnité de 800 € au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour et le rejet de la demande de la société MAIF formulée au même titre.

L’équité ne commande pas d’allouer à l’une ou l’autre des parties une indemnité au titre des frais irrépétibles d’appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant dans les limites de l’appel,

— Infirme le jugement sur la perte de gains professionnels actuels, l’incidence professionnelle et le préjudice d’agrément et sur la somme revenant à la victime au titre de la réparation de son préjudice corporel,

Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,

— Evalue la perte de gains professionnels actuels subie par M. A X à la somme de 39 779 € après déduction des indemnités journalières versées par la Caisse autonome de retraite des chirurgiens-dentistes et des sages femmes,

— Evalue l’incidence professionnelle subie par M. A X à la somme de 50 000€,

— Déboute M. A X de sa demande d’indemnisation d’un préjudice d’agrément et de sa demande de paiement des intérêts au double du taux légal sur les sommes allouées,

— Condamne en conséquence la société MAIF à verser à M. A X les sommes de :

* 93.285,46 € après déduction des provisions de 46 870 € en réparation de son préjudice corporel

* 1 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

— Condamne la société MAIF à verser à la Caisse autonome de retraite des chirurgiens-dentistes et des sages femmes la somme de 800 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

— Déboute la société MAIF de sa demande au titre de ses propres frais irrépétibles exposés,

— Condamne la société MAIF aux dépens d’appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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