Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 2e chambre, 26 octobre 2017, n° 15/05935

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, 2e ch., 26 oct. 2017, n° 15/05935
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 15/05935
Décision précédente : Tribunal de commerce de Salon-de-Provence, 3 décembre 2014, N° 201400125
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

2e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 26 OCTOBRE 2017

N° 2017/ 374

Rôle N° 15/05935

Société Z A SA

C/

CAISSE NATIONALE DES ENTREPRENEURS DE TRAVAUX PUBLICS

Grosse délivrée

le :

à :

Me FAUBERT

Me CENAC

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de SALON-DE-PROVENCE en date du 04 Décembre 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 2014 00125.

APPELANTE

Société Z A

immatriculée au R.C.S. de SALON DE PROVENCE sous le n° 530 640 622, […], […]

représentée et plaidant par Me Frédéric FAUBERT, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Alexandre FAVARO, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

CAISSE NATIONALE DES ENTREPRENEURS DE TRAVAUX PUBLICS,

[…]

représentée par Me Nathalie CENAC de la SCP CENAC NATHALIE CAMILLE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

assistée et plaidant par Me Rémy BELLENGER avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 11 Septembre 2017 en audience publique. Conformément à l’article 785 du code de procédure civile, monsieur PRIEUR, conseiller a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Marie-Christine AIMAR, Présidente

Monsieur Baudouin FOHLEN, Conseiller

Monsieur Jean-Pierre PRIEUR, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame X Y.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 26 Octobre 2017

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 26 Octobre 2017,

Signé par Madame Marie-Christine AIMAR, Présidente et Madame X Y, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DE L’AFFAIRE

La société Z A SA est une société dont le siège est situé en Espagne et qui accomplit ponctuellement des chantiers sur le territoire français.

Elle a versé ses cotisations à la CAISSE NATIONALE DES ENTREPRENEURS DE TRAVAUX PUBLICS (CNETP) jusqu’en juin 2013 puis n’a pas fourni ses déclarations de salaires avec le règlement corrélatif.

Saisi par la CNETP, le tribunal de commerce de Salon de Provence, par jugement du 4 décembre 2014 a statué ainsi :

— Condamne Z A SA à payer à la CAISSE NATIONALE DES ENTREPRENEURS DE TRAVAUX PUBLICS la somme de 61. 537,35 € à titre des cotisations estimées et exigibles pour la période couverte par les mois de juillet 2013 à avril 2014 avec intérêt à taux légal à dater du 13/02/2014 sur 15. 268,82 € et à dater du 20/06/2014 sur 46. 268,53 euros,

— Condamne Z A SA à produire à la CAISSE NATIONALE DESENTREPRENEURS DE TRAVAUX PUBLICS sous astreinte provisoire de 50 € par jour de retard, à dater d’un mois de la signification du présent jugement, les déclarations de salaires afférentes aux mois de juillet 2013 à avril 2014.

— Condamne Z A SA à payer à la CAISSE NATIONALE DES ENTREPRENEURS DE TRAVAUX PUBLICS la somme de 6. 661,65 € par mois au titre des cotisations évaluées à dater du 1er mai 2014 et ce jusqu’au dernier mois entier précédent celui du présent jugement sauf compte à parfaire et à produire à la CNETP, sous astreinte provisoire de 50 € par jour de retard à dater d’un mois de la signi’cation du présent jugement, les déclarations de salaires afférentes aux mois de mai 2014 jusqu’au dernier mois entier précédent celui du présent jugement et ce, avec intérêts au taux légal à dater de la décision sur les montants définitivement liquidés.

— Dit que l’astreinte provisoire ainsi accordée sera, le cas échéant, liquidée par la présente juridiction qui s’en réserve expressément la faculté et ce, conformément aux dispositions de l’article L131-3 du Code des Procédures Civiles d’exécution.

La société Z A a relevé appel de cette décision et soutient dans ses dernières écritures du 6 septembre 2017 :

— que si, exerçant son activité principale en dehors du territoire national, elle est considérée comme recourant au détachement, puisqu’elle emploie directement des salariés pour ses propres opérations ou celles de ses filiales ou établissements, en France, mais qu’en vertu de l’article D3141-26 du Code du travail elle est fondée à se prévaloir d’une exception puisqu’elle est établie en Espagne,

— que les caisses de congés ne constituent pas la seule solution pour garantir leurs droits aux salariés,

— qu’on ne peut considérer que le système étranger doit octroyer des« dispositifs équivalents à ceux du droit français et offrant les mêmes garanties à leurs salariés '' incluant en cela les droits extra-légaux, notamment conventionnels, ou encore la garantie « chômage -intempéries '',

— qu’il appartient à la CNETP de démontrer l’existence d’un système français plus avantageux, en faisant référence à tout un ensemble d’ «avantages liés aux congés payés applicables en France dans le secteur d’activité Travaux publics '', compris en cela le « chômage intempéries'' et les avantages conventionnels ou octroyés par la caisse elle-même, alors que seules les dispositions législatives relatives aux « droits à congés payés '' stricto sensu sont en débat,

— qu’elle démontre faire bénéficier ses personnels détachés en France, de droits au moins équivalents à ceux que pourrait servir, et en tout état de cause a servi, la CNETP,

— qu’elle peut donc faire valoir l’exception posée à l’article L3141-26 du Code du travail, pour être dispensée d’affiliation à la CNTEP et de paiement des cotisations correspondantes.

La société appelante conclut à la réformation du jugement au rejet de demandes présentées à son encontre et à la condamnation de la CNETP à lui rembourser la somme de 40765,67 euros indument versée.

A titre subsidiaire, elle sollicite la compensation entre les sommes réglées à tort à ses salairés et les cotisations réellement dues.

Elle ajoute en toute hypothèse n’être débitrice que d’une somme de 40.765,67 euros.

La CNETP rétorque dans ses dernières écritures du 27 août 2015 :

— que l’article D. 3141-27 ne peut s’appliquer dans la mesure où il n’existe pas d’institution équivalente à la Caisse Nationale des Entrepreneurs de Travaux Publics en Espagne,

— qu’il appartient à l’appelant de prouver que les salariés bénéficient de leurs droits congés payés pour la période de détachement dans des conditions au moins équivalentes à celles prévues parla législation française,

— qu’en matière d’indemnités de chômage intempéries, la société Z A ne formule pas le moindre commentaire comparatif à ce sujet.

La CNETP conclut à la confirmation du jugement dans son principe et demande de :

— condamner la société Z A

à lui verser la somme de 155.875,64 euros au titre des Cotisations estimées et exigibles pour la période couverte par les mois de Juillet 2013 à Juin 2015 outre les intérêts,

à produire sous astreinte provisoire de 50 € par jour de retard, à dater d’un mois de la signification de l’arrêt intervenir, les déclarations de salaires afférents aux mois de Juillet 2013 à Juin 2015 désormais exigibles et non produites à ce jour ce, sauf envoi récent,

au paiement de la somme de 6.700,00 Euros par mois au titre des cotisations évaluées à dater du 1er juillet 2015 et ce, jusqu’au dernier jour du mois entier précédent celui du prononcé de l’arrêt à intervenir, sauf compte à parfaire,

à produire sous la même astreinte les déclarations de salaires afférentes à la période concernée et ce, avec intérêts au taux légal à dater de la décision sur les montants définitivement liquidés,

— Dire que l’astreinte provisoire ainsi accordée judiciairement sera, le cas échéant, liquidée par la présente juridiction qui s’en réserve expressément la faculté et ce, conformément aux dispositions de l’article 5 de la loi du 9 juillet 1991.

La cour renvoie, pour l’exposé complet des moyens et prétentions des parties à leurs écritures précitées.

MOTIFS DE LA DECISION

Il résulte de l’article D 3141-14 du code du travail que « s’applique également aux entreprises non établies en France mentionnées aux articles L. 1262-1 et L.1262-2 ».

Selon l’article L. 1262-4 du Code du Travail :

« Les employeurs détachant temporairement des salariés sur le territoire national sont soumis aux dispositions légales et aux stipulations conventionnelles applicables aux salariés employés par les entreprises de la même branche d’activité établie en France, en matière de législation du travail, pour ce qui concerne les matières suivantes :

1° Libertés individuelles et collectives dans la relation de travail;

7° Conditions d’assujettissement aux caisses de congés et intempéries ;

L’article D3141-26 du Code du travail précise que « Les entreprises mentionnées à l’article D. 3141-14, établies dans un autre Etat membre de l’Union européenne ou dans l’un des autres Etats partie à l’accord sur l’Espace économique européen, peuvent s’exonérer des obligations figurant à la présente sous-section si elles justifient que leurs salariés bénéficient de leurs droits à congés payés pour la période de détachement dans des conditions au moins équivalentes à celles prévues par la législation française ».

L’article D3141-26 du Code du travail indique que « Lorsque les entreprises mentionnées à l’article D. 3141-26 sont affiliées à une institution équivalente aux caisses de congés payés, dans le pays où elles sont établies, elles justifient qu’elles sont à jour de leurs obligations à l’égard de ces institutions à la date du commencement de la prestation et qu’elles ont continué à cotiser à l’institution compétente durant le détachement temporaire pour bénéficier de l’exonération ».

La Caisse Nationale des Entrepreneurs de Travaux Publics a pour mission d’effectuer le paiement des indemnités de congés payés aux salariés des entreprises de travaux publics et d’assurer la mise en 'uvre des dispositions du régime d’indemnisation, du chômage-pour cause d’intempéries, en contrepartie de quoi elle doit percevoir de ses adhérents les cotisations nécessaires à l’accomplissement de ses missions.

La société appelante ne prouve pas qu’elle serait affiliée à une institution équivalente aux caisses de congés payés, dans le pays où elle est établie.

Il lui appartient de démontrer que ses salariés bénéficient de leurs droits congés payés pour la période de détachement dans des conditions au moins équivalentes à celles prévues par la législation française.

Il doit être relevé que la société Z A ne peut se prévaloir d’une convention « metal Sevilla » alors que ses employés travaillent dans le bâtiment.

En outre elle ne justifie pas qu’ils pourraient bénéficier d’indemnités telles que prévues par la législation française.

En conséquence, la société Z A n’établit pas pouvoir s’exonérer de son obligations d’affiliation et du règlement des cotisations dues à la CNETP.

La société Z A ne peut solliciter une compensation entre les sommes dues à la CNETP et celles versées à ses salariés puisque les conditions prévues à l’article 1289 du code civil ne sont pas remplies.

L’appelante conteste la somme réclamée par la CNETP. Toutefois, il convient de relever qu’elle s’est abstenue, malgré les termes du jugement, de produire les déclarations de salaires afférents à l’intimée, et que les documents qu’elle remet aux débats ne sont nullement probants pour permettre de faire droit à son argumentation quant au quantum de la somme qu’elle estime devoir.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement attaqué sur le principe de l’affiliation de la société Z A à la CNETP, la détermination de l’assiette de cotisation, et sur le fait que le tribunal s’est réservé le pouvoir de liquider l’astreinte prononcée.

Il convient d’infirmer la décision déférée pour le surplus et de condamner la société Z A :

à verser à la CNETP la somme de 155.875,64 euros au titre des Cotisations estimées et exigibles pour la période couverte par les mois de Juillet 2013 à Juin 2015 outre les intérêts,

à produire sous astreinte provisoire de 50 € par jour de retard, à dater d’un mois de la signification de l’arrêt intervenir, les déclarations de salaires afférents aux mois de Juillet 2013 à Juin 2015 exigibles en précisant que l’astreinte durera pendant 6 mois, date à laquelle il sera à nouveau fait droit,

au paiement de la somme de 6.700,00 Euros par mois au titre des cotisations évaluées à dater du 1erjuillet 2015 et ce, jusqu’au dernier jour du mois entier précédent celui du prononcé de l’arrêt à intervenir, sauf compte à parfaire, à produire sous la même astreinte provisoire de 50 € par jour de retard, à dater d’un mois de la signification de l’arrêt intervenir les déclarations de salaires afférentes à la période concernée et ce, avec intérêts au taux légal à dater de la décision sur les montants définitivement liquidés, en précisant que l’astreinte durera pendant 6 mois, date à laquelle il sera à nouveau fait droit.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement attaqué sur le principe de l’affiliation de la société Z A à la CNETP, la détermination de l’assiette de cotisation, et sur le fait que le tribunal s’est réservé le pouvoir de liquider l’astreinte prononcée,

L’infirmant pour le surplus et statuant à nouveau,

Condamne la société Z A :

— à verser à la CNETP la somme de 155.875,64 euros au titre des Cotisations estimées et exigibles pour la période couverte par les mois de Juillet 2013 à Juin 2015 outre les intérêts,

— à produire sous astreinte provisoire de 50 € par jour de retard, à dater d’un mois de la signification de l’arrêt intervenir, les déclarations de salaires afférents aux mois de Juillet 2013 à Juin 2015 exigibles en précisant que l’astreinte durera pendant 6 mois, date à laquelle il sera à nouveau fait droit,

— au paiement de la somme de 6.700,00 Euros par mois au titre des cotisations évaluées à dater du 1er juillet 2015 et ce, jusqu’au dernier jour du mois entier précédent celui du prononcé de l’arrêt à intervenir, sauf compte à parfaire,

— à produire sous la même astreinte provisoire de 50 € par jour de retard, à dater d’un mois de la signification de l’arrêt intervenir les déclarations de salaires afférentes à la période concernée et ce, avec intérêts au taux légal à dater de la décision sur les montants définitivement liquidés, en précisant que l’astreinte durera pendant 6 mois, date à laquelle il sera à nouveau fait droit.

Déboute les parties de leurs demandes autres ou plus amples,

Condamne la société Z A aux dépens recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

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