Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8, 29 janvier 2021, n° 19/16388

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, ch. 4-8, 29 janv. 2021, n° 19/16388
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 19/16388
Sur renvoi de : Cour de cassation, 18 septembre 2019, N° P18-17.817.
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8

ARRÊT AU FOND

DU 29 JANVIER 2021

N°2021/147

Rôle N° RG 19/16388 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BFB4I

Y X

C/

Etablissement Public CAF DU VAR

Copie exécutoire délivrée

le :

à

 : Me Philippe CAMPS

Me Cyril MARTELLO

Décision déférée à la Cour :

Arrêt de la Cour de Cassation de PARIS en date du 19 Septembre 2019,enregistré au répertoire général sous le n° P18-17.817.

APPELANTE

Madame Y X, demeurant […]

représentée par Me Philippe CAMPS, avocat au barreau de TOULON

INTIMEE

Etablissement Public CAF DU VAR, demeurant […]

représentée par Me Cyril MARTELLO, avocat au barreau de TOULON

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 24 novembre 2020 en audience publique devant la Cour composée de :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président de chambre

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

Monsieur Emmanuel POINAS, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Madame Laura BAYOL.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 29 Janvier 2021.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 29 Janvier 2021

Signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président de chambre et Madame Isabelle LAURAIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Née le […], Mme Y X a obtenu le versement de l’allocation aux adultes handicapés et du complément de ressources à compter du 1er mai 1991.

À l’âge de 60 ans et 9 mois, soit au 7 juillet 2013, s’est ouvert son droit à pension de vieillesse et elle a perçu celle-ci à partir du 1er août 2013.

La caisse d’allocations familiales (CAF) du Var l’a alors avisée de ce que la pension de retraite allait se substituer à l’allocation aux adultes handicapés, que le paiement du complément de ressources prendrait fin également au 1er août 2013 et qu’elle pouvait demander l’allocation de solidarité aux personnes âgées.

Mme X n’a pas fait cette demande et la caisse d’allocations familiales ayant cessé de verser les deux prestations destinées aux adultes handicapés, elle a, après un préliminaire amiable infructueux, saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Toulon qui, par jugement du 25 janvier 2016 désormais irrévocable, a fait droit à sa demande de versement d’une allocation différentielle aux adultes handicapés mais a omis de statuer sur la demande relative au complément de ressources.

Saisi d’une requête en omission de statuer, ce tribunal a, par jugement du 6 juin 2016, débouté Mme X de sa demande au titre du complément de ressources.

Et statuant sur l’appel de l’intéressée par arrêt du 27 septembre 2017, la cour d’Aix-en-Provence a confirmé ce jugement.

Sur pourvoi de Mme X, la Cour de cassation, par arrêt du 19 septembre 2019, a cassé et annulé en toutes ses dispositions l’arrêt susvisé aux motifs suivants :

Vu les articles L. 821-1, alinéa 9, L. 821-1-1, alinéas 2 et 6, et R. 821-7-1 du code de la sécurité sociale dans leur rédaction alors en vigueur ;

Attendu, selon le premier de ces textes que si la personne handicapée bénéficie d’un avantage de vieillesse d’un montant inférieur à celui de l’allocation aux adultes handicapés, celle-ci s’ajoute à la prestation sans que le total des deux avantages puisse excéder le montant de

l’allocation aux adultes handicapés ; que, selon les derniers, le complément de ressources pour les personnes handicapées est versé aux bénéficiaires de l’allocation aux adultes handicapés qui la perçoivent en complément d’un avantage de vieillesse ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, qu’ayant obtenu le versement d’une allocation aux adultes handicapés d’un montant égal à la différence entre le plein taux de cette allocation et l’avantage vieillesse qu’elle perçoit, Mme X a saisi une juridiction de sécurité sociale afin de bénéficier du complément de ressources pour les personnes handicapées dont la caisse d’allocations familiales du Var lui a refusé le versement ;

Attendu que pour rejeter la demande, l’arrêt énonce que le complément de ressources constitue, avec l’allocation aux adultes handicapés, une garantie de ressources mensuelles ; qu’il s’agit d’une allocation forfaitaire s’ajoutant à l’allocation aux adultes handicapés afin de compenser l’absence durable de revenus d’activité des personnes handicapées dans l’incapacité de travailler ; qu’elle est versée jusqu’à la reprise d’une activité professionnelle ou jusqu’à l’âge légal de la retraite ; que Mme X, qui a été admise au bénéfice de la retraite le 1er août 2013, ne peut donc pas prétendre avoir recouvré un droit au complément de ressources à partir de cette date ;

Qu’en statuant ainsi, alors qu’elle constatait que l’intéressée percevait l’allocation aux adultes handicapés en complément d’un avantage de vieillesse, ce dont il résultait qu’elle pouvait prétendre au rétablissement du complément de ressources, la cour d’appel a violé les textes susvisés.

Par acte du 23 octobre 2019, Mme X a saisi la présente cour désignée comme cour de renvoi.

Par conclusions déposées et développées oralement à l’audience, Mme X demande à la Cour de :

— la juger recevable et fondée à solliciter le bénéfice du complément de ressources à compter du 1er août 2013.

— condamner la CAF du VAR à rétablir les droits de son allocataire compter du 1er août 2013, au titre du Complément de ressources.

— condamner la CAF DU VAR à lui payer la totalité du complément de ressources à compter du 1er août 2013.

— condamner la CAF DU VAR à lui payer une somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

Sur la procédure :

Elle s’en remet à justice sur l’impartialité de la Cour.

Elle soutient produire les demandes formulées devant le TASS, prouvant avoir saisi de demandes de rétablissement au bénéfice de l’AAH et de son complément de ressources et explique que le TASS, en 2016, avait déclaré recevable sa requête en omission de statuer mais l’avait déboutée de sa demande.

Sur le fond :

Au visa des articles L.821-1 et suivants et R.821-7-1 du code de la sécurité sociale, elle soutient bénéficier du complément de ressources, même en cas d’atteinte de l’âge de la retraite.

Elle estime avoir juridiquement fait valoir ses droits, lesquels ont été confirmés par la Cour de cassation.

La CAF du Var reprenant oralement ses conclusions déposées à l’audience, s’en rapporte à la Justice sur l’impartialité et l’identité éventuelle de magistrats composant la Cour d"appel de renvoi et demande de :

Sur la procédure :

— déclarer l’irrecevabilité de la requête en omission de statuer de Mme X, l’appelante ne

rapportant pas la preuve de l’existence de l’omission de statuer, ni dans son principe et ni dans son étendue.

Sur le fond :

— débouter Mme X de l’intégralité de ses demandes fins et prétention comme étant infondée, inopérante ou injustifiée, l’appelante d’une part ne rapportant la preuve qu’elle remplit les conditions exigées par les textes susvisés pour bénéficier du complément de ressources, et d’autre part sa demande se heurtant à l’autorité de la chose jugée le 25/01/2016.

— confirmer purement et simplement le jugement rendu par le TASS du Var le 06 juin 2016.

A titre subsidiaire,

— confirmer purement et simplement le jugement rendu par le TASS du Var le 06 juin 2016, en ce qu’il a estimé que la suppression du complément de ressources qui cesse impérativement, selon l’article L 821-1-1 dernier alinéa du Code de la sécurité sociale, à l’âge auquel le bénéficiaire est réputé inapte au travail.

— débouter Mme X de l’intégralité de ses demandes fins et prétention comme étant

infondée, inopérante ou injustifiée.

A titre infiniment subsidiaire,

— ordonner la régularisation des droits au complément de ressources de Mme X à compter du 1er janvier 2017.

En tout état de cause,

— condamner Mme X à lui payer la somme de 3.600 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile outre sa condamnation aux entiers dépens de l’instance.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs écritures déposées et soutenues oralement lors de l’audience.

MOTIFS

Sur la recevabilité de la requête en omission de statuer

Outre que ce moyen n’a pas été soulevé devant la présente cour lors de son audience du 28 juin 2017, le tribunal des affaires de Sécurité Sociale du Var, dans son jugement du 6 juin 2016 dont il convient de rappeler que les énonciations font foi jusqu’à inscription de faux en application des dispositions de l’article 457 du code de procédure civile, a relevé que Mme X sollicitait dans ses écritures développées oralement une somme de 3938 euros au titre du complément de ressources dû au titre de la période du 1er août 2013 au 30 juin 2015 et la somme de 179 euros indexée et revalorisée du 1er août 2015 jusqu’en octobre 2019, date de la retraite de Mme X, et le tribunal a constaté qu’il n’avait pas statué de ce chef. En effet, Mme X produit ses conclusions déposées devant le tribunal des affaires de Sécurité Sociale lors de l’audience du 13 novembre 2015 lesquelles contiennent effectivement cette demande.

C’est à bon droit que le tribunal a jugé la requête recevable.

Au fond

L’article L.821-1 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable au litige, prévoyait que «Le droit à l’allocation aux adultes handicapés est ouvert lorsque la personne ne peut prétendre, au titre d’un régime de sécurité sociale, d’un régime de pension de retraite … à un avantage de vieillesse ou d’invalidité… d’un montant au moins égal à cette allocation…

Lorsqu’une personne bénéficiaire de l’allocation aux adultes handicapés fait valoir son droit à un avantage de vieillesse… l’allocation aux adultes handicapés continue de lui être servie jusqu’à ce qu’elle perçoive effectivement l’avantage auquel elle a droit…»

L’article L.821-1-1 poursuivait : «Il est institué une garantie de ressources pour les personnes handicapées composée de l’allocation aux adultes handicapés et d’un complément de ressources. Le montant de cette garantie est fixé par décret.

Le complément de ressources est versé aux bénéficiaires de l’allocation aux adultes handicapés au titre de l’article L.821-1 :

-dont la capacité de travail, appréciée par la commission mentionnée à l’article L.146-9 du code de l’action sociale et des familles, est, compte tenu de leur handicap, inférieure à un pourcentage fixé par décret ;

-qui n’ont pas perçu de revenu d’activité à caractère professionnel propre depuis une durée fixée par décret ;

-qui disposent d’un logement indépendant ;

-qui perçoivent l’allocation aux adultes handicapés à taux plein ou en complément d’un avantage de vieillesse ou d’invalidité ou d’une rente d’accident du travail.

Le complément de ressources est également versé aux bénéficiaires de l’allocation supplémentaire du fonds spécial d’invalidité mentionnée à l’article L.815-24 dont l’incapacité permanente est au moins égale au pourcentage fixé par le décret mentionné au premier alinéa de l’article L. 821-1 et qui satisfont aux conditions prévues aux troisième, quatrième et cinquième alinéas du présent article.

Le versement du complément de ressources pour les personnes handicapées prend fin à l’âge auquel le bénéficiaire est réputé inapte au travail dans les conditions prévues au dixième alinéa de l’article L. 821-1. Il prend fin pour les bénéficiaires de l’allocation supplémentaire du fonds spécial d’invalidité mentionnée à l’article L. 815-24 à l’âge minimum auquel s’ouvre le droit à pension de vieillesse.

Toute reprise d’activité professionnelle entraîne la fin du versement du complément de ressources.

Un décret en Conseil d’Etat précise les conditions dans lesquelles le complément de ressources est versé aux intéressés hébergés dans un établissement social ou médico-social, hospitalisés dans un établissement de santé ou incarcérés dans un établissement relevant de l’administration pénitentiaire.

Les dispositions de l’article L.821-5 sont applicables au complément de ressources».

L’article 266 V de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018, précisait que les bénéficiaires des

dispositions de l’article L. 821-1-1 du code de la sécurité sociale dans leur rédaction antérieure à ladite loi qui, au 1er décembre 2019, ont des droits ouverts au complément de ressources continuent, tant qu’ils en remplissent les conditions d’éligibilité, à bénéficier de ces dispositions, dans la limite d’une durée de dix ans, selon les modalités en vigueur avant cette date.

Enfin, l’article R.821-7-1 disposait que : «Lorsque l’allocation aux adultes handicapés continue d’être versée en application du onzième alinéa de l’article L. 821-1, la majoration pour la vie autonome et le complément de ressources ne sont pas maintenus. Ces prestations sont rétablies dès lors qu’est ouvert un droit à l’allocation aux adultes handicapés dans les conditions prévues au neuvième alinéa du même article et que les autres conditions d’ouverture des droits à la majoration et au complément continuent d’être remplies».

Mme X était bénéficiaire de l’allocation aux adultes handicapés depuis 1991. Par jugement à présent définitif du tribunal des affaires de Sécurité Sociale du Var, il a été reconnu à Mme X le bénéfice subsidiaire d’une allocation différentielle égale à la différence entre le montant de son avantage [vieillesse] et le montant de l’AAH.

Il en résulte que Mme X peut prétendre au bénéfice du complément de ressources. En effet, il est expressément prévu par les textes susvisés que l’allocation aux adultes handicapés peut être versée en complément d’un avantage de vieillesse et que le complément de ressource est rétabli dès l’ouverture du droit à allocation aux adultes handicapés comme tel est le cas en l’espèce.

Enfin, l’affirmation de la Caisse d’allocation familiales du Var selon laquelle « s’il n’est pas contestable que depuis le 1er janvier 2017, il n’y a plus obligation pour les personnes bénéficiaires de l’AAH de faire valoir leur droit à l’ASPA, à contrario les personnes ayant atteint l’âge minimum auquel s’ouvre le droit à pension de vieillesse avant le 01/01/2017 sont toujours dans l’obligation de faire valoir prioritairement leur droit à l’allocation de solidarité aux personnes âgées» est sans application en l’espèce, l’ouverture du droit à allocation aux adultes handicapés de Mme X découlant de la décision précitée.

Sur la date d’effet du droit au complément de ressources, la Caisse d’allocation familiales du Var prétend que la régularisation ne saurait remonter avant le 1er janvier 2017 au motif qu’une décision de justice ne saurait prononcer l’ouverture des droits avec effet rétroactif en contemplation d’une loi qui n’était pas entrée en vigueur à la date dudit effet. Or, c’est bien sur le fondement des textes antérieurs à l’entrée en vigueur de la loi n°2016-1917 du 29 décembre 2016 que Mme X a présenté ses demandes.

L’équité commande de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et de condamner la Caisse d’allocation familiales du Var à payer à Mme X la somme de 3.000,00 euros à ce titre.

La Caisse d’allocation familiales du Var supportera les dépens de l’instance, étant précisé que l’article R 144-10 du code de la sécurité sociale a été abrogé par le décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018 relatif au contentieux de la sécurité sociale et de l’aide sociale, dont l’article 17 III prévoit que les dispositions relatives à la procédure devant les juridictions sont applicables aux instances en cours.

PAR CES MOTIFS,

Par arrêt contradictoire,

Vu l’arrêt de cassation du 19 septembre 2019,

— Infirme en toutes ses dispositions le jugement déféré,

— Et statuant à nouveau,

— Dit la requête en omission de statuer présentée par Mme X recevable,

— Dit que Mme X est fondée à solliciter le bénéfice du complément de ressources à compter du 1er août 2013.

— Condamne la Caisse d’allocation familiales du Var à rétablir les droits de son allocataire compter du 1er août 2013, au titre du Complément de ressources,

— Condamner la Caisse d’allocation familiales du Var à payer à Mme X la totalité du complément de ressources à compter du 1er août 2013,

— Condamne la Caisse d’allocation familiales du Var à payer à Mme X la somme de 3.000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— Condamne la Caisse d’allocation familiales du Var aux éventuels dépens de l’instance

Le Greffier Le Président

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