Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1 6, 12 mai 2022, n° 19/10689

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, ch. 1 6, 12 mai 2022, n° 19/10689
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 19/10689
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Marseille, 13 mai 2019, N° 17/05263
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Date de dernière mise à jour : 15 septembre 2022
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Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-6

ARRÊT AU FOND

DU 12 MAI 2022

N° 2022/182

N° RG 19/10689

N° Portalis DBVB-V-B7D-BERBB

[G] [S] veuve [R]

[B] [R]

C/

Compagnie d’assurances AXA FRANCE IARD

Organisme CPAM

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

— Me Sandra COHEN

— SELARL ABEILLE & ASSOCIES

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de Marseille en date du 14 Mai 2019 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 17/05263.

APPELANTES

Madame [G] [S] veuve [R]

née le [Date naissance 5] 1985 à [Localité 10]

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 1]

représentée et assistée par Me Sandra COHEN, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Manon BONNET, avocat au barreau de MARSEILLE, postulant et plaidant.

Mademoiselle [B] [R]

n° sécurité sociale [XXXXXXXXXXX03]

née le [Date naissance 2] 2013 à [Localité 9]

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 1]

représentée et assistée par Me Sandra COHEN, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Manon BONNET, avocat au barreau de MARSEILLE, postulant et plaidant.

INTIMEES

Compagnie d’assurances AXA FRANCE IARD,

demeurant [Adresse 7]

représentée et assistée par Me Etienne ABEILLE de la SELARL ABEILLE & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE, substitué par Me Léa CAMBIER, avocat au barreau d’AIX EN PROVENCE, postulant et plaidant.

LA CPAM DES BOUCHES DU RHONE,

Assignée le 23/08/2019 à personne habilitée. Assignée le 18/10/2019 avec signification en date du 18/10/2019,

demeurant [Adresse 6]

Défaillante.

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 15 Mars 2022 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Madame Anne VELLA, Conseillère, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président

Madame Anne VELLA, Conseillère

Madame Fabienne ALLARD, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Charlotte COMBARET.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Mai 2022.

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 Mai 2022,

Signé par Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président et Madame Charlotte COMBARET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Exposé des faits et de la procédure

Mme [G] [S] veuve [R] expose que son mari M. [N] [R] est décédé le [Date décès 4] 2015 à la suite d’un accident de la circulation dans lequel a été impliqué un véhicule conduit par M. [L] [O], assuré auprès de la société MGARD.

Elle a saisi le juge des référés qui, par ordonnance du 10 février 2016 a condamné l’assureur à lui payer à titre personnel la somme provisionnelle de 20'000€ ainsi qu’en sa qualité de représentante légale de sa fille mineure née le [Date naissance 2] 2013, [B] [R] celle de 30'000€ à valoir sur l’indemnisation de leur préjudice moral.

Par actes du 2 mai 2017, Mme [R], agissant en son nom personnel ainsi qu’en sa qualité de représentante légale de sa fille mineure [B] [R] a fait assigner la société Axa France Iard (Sa Axa) venant aux droits de la société MGARD devant le tribunal de grande instance de Marseille pour la voir condamner à l’indemniser des préjudices d’affection, du préjudice de souffrances endurées subies par la victime directe, et de leurs préjudices économiques, et cela en présence de la CPAM des Bouches du Rhône.

Selon ordonnance du 4 septembre 2018 le juge de la mise en état a condamné la Sa Axa à payer à Mme [R] une provision complémentaire de 5000€ à valoir sur l’indemnisation de son préjudice moral.

Par jugement du 14 mai 2019, assorti de l’exécution provisoire, la juridiction a :

— donné acte à la Sa Axa qu’elle ne conteste pas devoir indemniser les conséquences dommageables du décès de M. [N] [R] ;

— condamné la Sa Axa à payer à Mme [R] et à [B] [R] en leur qualité respective d’héritière de la victime directe dans la proportion de leur dévolution successorale la somme de 10'000€ en réparation des souffrances endurées avant décès ;

— débouté Mme [R] de sa demande d’indemnisation de son préjudice économique ;

— condamné la Sa Axa à payer à Mme [R] en sa qualité de représentante légale de sa fille mineure [B] [R] la somme de 2770€ en réparation de son préjudice économique ;

— fixé le préjudice moral de Mme [R] à la somme de 25'000€ et le préjudice moral de [B] [R] à la somme de 30'000€, préjudices totalement indemnisés par le versement d’indemnités provisionnelles ;

— condamné la Sa Axa à payer à Mme [R] la somme de 1300€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens ;

— déclaré le jugement commun à la CPAM des Bouches du Rhône.

Elle a rappelé que M. [N] [R] a été fauché le [Date décès 4] 2015 à 12h04 par un véhicule alors qu’il était piéton et qu’il a été transporté aux urgences hospitalières dans un état grave où il est décédé le même jour à 13h. Selon le témoignage de Mme [U], il était encore conscient après le choc, il a pu envisager sa propre mort ce qui justifie une indemnisation à hauteur de 10'000€.

Elle a évalué le préjudice économique de Mme [R] en retenant un revenu du foyer à hauteur de 13'644€, une part d’autoconsommation de chacun des époux pour 25 % et pour l’enfant de 20 %, soit une perte de revenus du foyer à hauteur de 75 % et donc une somme de 10'133€. Mme [R] dispose d’une part de 55 % pour ses besoins personnels et ceux de la maison, soit la somme de 7054€ alors que ses revenus annuels s’élèvent à 12'984€ au titre d’une allocation veuvage remplacée par le RSA, si bien que ses revenus sont supérieurs à la part dont elle bénéficiait dans le foyer avant le décès de son époux et que son préjudice économique n’est pas constitué.

La part d’autoconsommation de l’enfant a été évaluée à 20 % soit la somme de 2728€ par an, alors qu’elle bénéficie de la même part dans les prestations désormais perçues par sa mère soit la somme de 2596,80€. La perte annuelle s’établit à 131, 20€, montant capitalisé en fonction d’un euro de rente pour une personne de sexe féminin âgé d’un an jusqu’à 25 ans en fonction du barème de la Gazette du Palais 2016 soit celle de 2770€.

Par acte du 2 juillet 2019, dont la régularité et la recevabilité ne sont pas contestées, Mme [R] à titre personnel et en sa qualité de représentante légale de sa fille [B] [R] a interjeté appel de cette décision en ce qu’elle a :

— condamné la Sa Axa à payer à Mme [R] et à [B] [R] en leur qualité d’héritière de la victime directe dans la proportion de leur dévolution successorale la somme de 10'000€ en réparation des souffrances endurées avant décès ;

— débouté Mme [R] de sa demande d’indemnisation de son préjudice économique ;

— condamné la Sa Axa à payer à Mme [R] en sa qualité de représentante légale de sa fille mineure [B] [R] la somme de 2770€ en réparation de son préjudice économique.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 1er mars 2022.

Prétentions et moyens des parties

Dans ses conclusions du 27 septembre 2019, Mme [R] à titre personnel et en sa qualité de représentante légale de sa fille mineure [B] [R] née le [Date naissance 2] 2013 demande à la cour de :

' juger que le tribunal de grande instance de Marseille a sous-évalué les souffrances endurées par feu M. [R] et qu’il a procédé à un calcul erroné du préjudice économique tant du conjoint survivant que de l’enfant mineure ;

' juger que les prestations sociales perçues par le foyer postérieurement au décès de feu M. [R] ne devront pas s’imputer sur le montant de la perte annuelle nette subie par le foyer ;

' déclarer en conséquence que l’appel qu’elle forme en son nom et sa qualité de représentante légale de sa fille est recevable et bien fondé ;

' réformer le jugement dans les termes de son acte d’appel ;

' fixer leurs indemnisations de la façon suivante :

— souffrances endurées par M. [R] : 70'000€

— préjudice économique de [B] [R] : 53'831,65€

— préjudice économique de Mme [R] : 460'776,97€ ;

' confirmer le jugement en toutes ses autres dispositions ;

' condamner la Sa Axa à lui payer en son nom propre et en sa qualité de représentante légale de sa fille mineure une somme de 3000€ par application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens distraits au profit de son conseil.

Elle soutient que pour indemniser les souffrances endurées, il convient de prendre en compte l’angoisse éprouvée par la victime qui a présenté un état de conscience suffisant pour ressentir des douleurs physiques et morales et envisager sa propre fin. Pendant l’heure qui a séparé l’accident du décès, la victime a subi le plus haut degré de souffrance qu’un homme puisse endurer, et le témoignage de Mme [U] vient démontrer la panique qu’elle a pu lire dans les yeux de la victime. Ce poste peut légitimement être quantifié à 7/7 soit la somme de 70'000€.

S’agissant du préjudice économique, elle soutient que M. [R] percevait lors de son dernier emploi un revenu net mensuel moyen de 1377,60€ issu de son activité d’agent de sécurité qu’il a exercée du mois de novembre 2011 au 12 juillet 2013 et ce, même s’il était au chômage au jour de son décès. À cette somme il convient d’ajouter la prestation d’accueil du jeune enfant pour un montant de 184,62€ outre une allocation logement pour 318,30€ soit au total une somme mensuelle de 1880,52€ et donc un montant annuel de 22'566,24€.

La part d’autoconsommation de M. [R] doit être fixée à 20 % et non pas à 25 % soit une somme de 4523,25€ et donc une perte de 18'052,99€, dont sont déduites les prestations sociales pour un montant de 6035,04€ soit une perte du foyer égal à 12'017,95€.

C’est à tort que le premier juge a déduit les prestations sociales perçues par Mme [R] après le décès de son époux au titre d’une allocation logement pour 377€, d’une allocation de soutien familial pour 109,65€ et du RSA remplaçant l’allocation veuvage pour 595,54€, somme perçue jusqu’en juin 2017. Il est de jurisprudence constante qu’il n’y a pas lieu de prendre en considération les prestations sociales versées par la caisse d’allocations familiales.

La somme de 12'017,95€ sera capitalisée en fonction d’un euro de rente viagère à la date du décès de M. [R] soit une somme de 514'608,62€.

Le préjudice économique de l’enfant correspond à 20 % de la somme de 12'017,95€, soit 2403,59€ et donc sur la période échue du [Date décès 4] 2015 au 1er octobre 2019 celle de 10'415,60€ et pour le futur une capitalisation jusqu’à ses 25 ans soit 53'831,65€.

En conséquence le préjudice de Mme [R] s’établit à la différence entre la perte du foyer capitalisée dont doit être déduit le préjudice économique de l’enfant soit la somme de 460'776,97€.

Dans ses conclusions d’intimée d’appel incident du 19 décembre 2019, la SA Axa France Iard demande à la cour de :

' réformer le jugement qui a alloué la somme de 10'000€ au titre des souffrances endurées, alors qu’en l’absence de conscience de mort imminente de la victime aucune somme ne saurait être allouée pour ce poste de préjudice ;

' confirmer le jugement qui a débouté Mme [R] de sa demande au titre de son préjudice économique, qui a alloué la somme de 2770€ à [B] [R] au titre de ce même préjudice, qui a alloué la somme de 25.000€ en réparation du préjudice moral de Mme [R] et celle de 30'000€ en réparation du préjudice moral de [B] [R] ;

' déduire les provisions d’ores et déjà allouées ;

' réduire de manière très significative les indemnités réclamées au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et statuer ce que de droit sur les dépens.

Il est de jurisprudence constante que l’indemnisation des souffrances endurées dans l’hypothèse d’un décès qui est survenu rapidement après l’accident n’est admise que dans le cas très particulier où il est démontré que la victime a pu avoir conscience de l’imminence de son décès, ce qui ne résulte pas des pièces de la procédure de police et alors que les tentatives de réanimation n’ont pas abouti. La victime est décédée sans reprendre connaissance et ne semble donc pas avoir eu conscience de l’imminence de son décès. L’unique témoignage versé aux débats ne peut suffire pour justifier l’indemnisation de ce poste. Le jugement sera réformé et aucune somme ne sera allouée de ce chef.

S’agissant du préjudice économique, il résulte de l’ordonnance du juge de la mise en état que M. [R] a cessé de travailler le 18 juillet 2013 date à laquelle il a été licencié, et que jusqu’au 30 avril 2015 il a perçu une allocation de retour à l’emploi, ce qui signifie qu’entre le 1er mai 2015 et l’accident survenu le [Date décès 4] 2015 il ne percevait plus aucun revenu. D’autre part, en l’état des prestations perçues par Mme [R], elle ne justifie d’aucune perte de revenus du foyer.

Les montants alloués au titre du préjudice moral seront confirmés

La CPAM des Bouches du Rhône, assignée par Mme [R], par acte d’huissier du 23 août 2019, délivré à personne habilitée et contenant dénonce de l’appel n’a pas constitué avocat.

Elle n’a pas fait connaître l’existence de débours.

L’arrêt sera réputé contradictoire conformément aux dispositions de l’article 474 du code de procédure civile.

Motifs de la décision

L’appel porte sur :

Sur l’indemnisation du préjudice d’angoisse de mort imminente

Le préjudice d’angoisse de mort imminente répare la souffrance psychique résultant d’un état de conscience suffisant pour envisager sa propre fin.

Ce préjudice est établi en l’espèce au regard de la nature et de l’importance des blessures, rapportées au temps de survie de la victime, âgée seulement de 32 ans, blessée à 12h04 et décédée à 13h, dont l’état de conscience ressort du témoignage de Mme [X] [U] qui a expliqué qu’elle avait entendu le bruit d’un gros choc consécutif à la collision entre le tramway en mouvement et la voiture qui a été propulsée sur le piéton, en l’occurrence M. [R], en précisant qu’il saignait énormément des oreilles, de la bouche. Elle a déclaré : Je me suis précipitée vers lui, j’ai essayé de lui parler, il essayait de me parler mais en vain, il avait les yeux grand ouverts et était paniqué… comme il s’étouffait avec le sang dans sa bouche, avec d’autres personnes, nous l’avons mis en PLS (position latérale de sécurité) afin qu’il puisse cracher son sang et respirer au mieux. Je me souviens qu’il avait des éclats de verres dans les yeux…. la victime était encore en vie à l’arrivée des pompiers mais il a fait un arrêt cardiaque très vite par la suite, ce qui démontre que M. [R] a souffert d’un préjudice spécifique lié à la conscience de sa mort imminente, et pendant près d’une heure, du fait de la dégradation rapide et inéluctable de fonctions vitales en région crânienne, à la suite de la collision d’un véhicule en pleine vitesse et d’un tramway.

Ces données conduisent la cour à évaluer ce poste de préjudice à la somme de 20.000€.

Sur le préjudice économique

Sur le préjudice économique du foyer

En cas de décès de la victime directe, le préjudice patrimonial subi par l’ensemble de la famille proche du défunt doit être évalué en prenant pour élément de référence le revenu annuel du foyer avant le dommage ayant entraîné le décès de la victime directe, en tenant compte de la part de consommation personnelle de celle-ci, et des revenus que continue à percevoir le conjoint, le partenaire d’un pacte civil de solidarité ou le concubin survivant.

Il s’agit de calculer la totalité des revenus qui ont été et qui seront perdus pour la famille en raison du décès.

Mme [R] justifie aux débats par la production des bulletins de salaire de son époux du 1er janvier 2013 au 18 juillet 2013 qu’il travaillait alors comme agent de sécurité au sein de la société Answer Securité, et ce depuis le 22 novembre 2011. Sur les six premiers mois de l’année 2013 il a perçu un revenu net à payer de 8014,26€, soit une moyenne mensuelle de 1335,71€. Au moment de son accident qui lui a coûté la vie, il était sans activité. Cependant et alors qu’il était âgé de 30 ans, il convient de retenir qu’il était susceptible de percevoir un salaire équivalent.

Mme [R] n’avait pas d’activité professionnelle au moment du décès.

C’est ce montant qu’il convient de retenir, sans qu’il y ait lieu d’y ajouter les sommes perçues au titre de la prestation d’accueil du jeune enfant (PAJE), qui est versée pendant trois ans à compter de la naissance de l’enfant en l’occurrence la petite [B] née le [Date naissance 2] 2013 et donc jusqu’au [Date naissance 2] 2016. Il ressort des pièces versées qu’elle a été d’un montant de 184,62€ de janvier à mai 2015, et son versement n’a pas été interrompu par le décès de M. [R]. Cette prestation sociale ne constitue pas un revenu issu du salaire.

L’allocation logement versée aux époux [R] était d’un montant de 318,30€ au mois de janvier 2015, elle a continué d’être versée après le décès de monsieur, puisque Mme [R] produit un courrier émanant de la caisse d’allocations familiales établissant qu’elle était toujours servie au début de l’année 2018 et pour un montant mensuel de 377€. Cette prestation ne constitue pas non plus un revenu issu du salaire.

Les revenus de monsieur

C’est donc sur la base d’un revenu mensuel de 1335,71€ qu’il convient de calculer le revenu du défunt soit la somme de 16'028,52€ (1335,71€ x 12).

Le revenu de référence du foyer

Mme [R] étant femme au foyer, ce revenu de référence est constitué des seuls revenus de monsieur, soit 16'028,52€.

La part d’autoconsommation de M. [R]

Pour une famille composée de trois personnes, en l’occurrence les deux époux et un jeune enfant, la part des revenus du foyer qui était consommé par le défunt doit être évaluée à 25%. En conséquence le revenu consommé par le défunt était de 4007,13€. (16'028,52€ x 25%).

Le revenu disponible pour l’épouse et l’enfant au jour du décès

Il s’établit à la somme de 12.021,39€ (16'028,52€ – 4007,13€).

Les revenus actuels du foyer

Comme cela a été dit plus avant, Mme [R] a continué de percevoir la prestation d’accueil du jeune enfant (PAJE) qui a été servie pour une période limitée du [Date naissance 2] 2013 et jusqu’au [Date naissance 2] 2016, et qui ne constitue pas un revenu.

L’allocation logement qui était versée du vivant de monsieur et qui continue de l’être au profit du foyer du conjoint survivant ne constitue pas un revenu.

En revanche, Mme [R] perçoit depuis le décès de son époux des prestations dont le versement est en lien direct avec ce décès et qui sont des revenus de substitution à savoir une allocation de soutien familial d’un montant mensuel de 109,65€, une allocation de veuvage d’un montant mensuelle de 602,12€ qui lui a été versée à compter du 1er mai 2015 et jusqu’en juin 2017, soit sur 25 mois, outre un revenu de solidarité active (RSA) d’un montant de 595,54€, dont elle dit que le versement est venu remplacer la prestation d’allocation de veuvage, et qui constitue un revenu minimum dont il convient de tenir compte même s’il ne donne pas lieu à une déclaration fiscale.

Les revenus actuels du foyer s’élèvent à la somme annuelle de 8462,28€ qui correspond aux montants cumulés :

— de l’allocation de soutien familial de 1315,80€ (109,65€ x 12)

— du revenu de solidarité active pour la somme annuelle de 7146,48€ (595,54€ x 12).

La perte annuelle du foyer

Cette perte s’établit à 3559,11€ (12.021,39€ -8462,28€).

Le préjudice économique total du foyer

Il s’établit :

— pour la période échue du [Date décès 4] 2015 au prononcé du présent arrêt le 12 mai 2022 et donc sur sept ans à la somme de 24.913,77€ (3559,11€ x 7),

— pour la période future par capitalisation en fonction d’un euro de rente de 36,764 pour un homme né le [Date naissance 8] 1984 et qui aurait été âgé de 38 ans à ce jour, selon le barème publié à la Gazette du Palais 2018, et dont Mme [R] sollicite l’application, soit 130.847,12€ (3559,11€ x 36,764),

et au total 155.760,89€ (24.913,77€ + 130.847,12€ ).

Le préjudice économique de [B] [R]

Au regard de la situation de la famille, il y a lieu de retenir que [B] consomme 20% des revenus du foyer, part dont la société Axa ne conteste pas le montant, et il convient d’admettre qu’elle pourra poursuivre ses études jusqu’à l’âge de 25 ans.

Son préjudice s’établit de la façon suivante :

— pour la période échue du décès au prononcé du présent arrêt le 12 mai 2022 et donc sur sept ans la somme de 4.982,75€ (3559,11€ x 20% x 7 ans),

— pour la période à échoir, en fonction d’un euro de rente temporaire de 16,242 issu de la Gazette du Palais 2018 pour une fille née le [Date naissance 2] 2013, âgée de 8 ans à ce jour, jusqu’à l’âge de 25 ans, la somme de 11.561,41€ (3559,11€ x 20% x 16,242),

et au total 16.544,16€ (4.982,75€ + 11.561,41€).

Le préjudice économique de Mme [R], conjoint survivant

Il revient à Mme [R] la somme de 139.216,73€ (155.760,89€ – 16.544,16€ ).

Il y a lieu d’imputer le capital décès versé par la CPAM en application des articles 29 de la loi du 5 juillet 1985 et L. 361-1 du code de la sécurité sociale, de telle sorte qu’il revient à Mme [R] la somme de 135.815,85€ (139.216,73 – 3400,88€).

Les préjudices d’affection telle qu’ils ont été indemnisés par le premier juge ne font l’objet d’aucun appel principal ou incident

Sur les demandes annexes

La société Axa France Iard qui succombe partiellement dans ses prétentions et qui est tenue à indemnisation supportera la charge des entiers dépens d’appel.

L’équité justifie d’allouer à Mme [R] agissant à titre personnel et en qualité de représentante légale de sa fille mineure [B] [R] une indemnité de 2000€ au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour.

Par ces motifs

La Cour,

— Confirme le jugement,

hormis sur le montant de l’indemnisation de la victime directe et des victimes indirectes et les sommes leur revenant,

Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,

— Condamne la société Axa France Iard à payer à Mme [R] agissant à titre personnel la somme de 135.815,85€ en réparation de son préjudice économique consécutif au décès de M. [R] ;

— Condamne la société Axa France Iard à payer à Mme [R] agissant en qualité de représentante légale de sa fille mineure [B] [R] la somme de 16.544,16€ en réparation de son préjudice économique consécutif au décès de M. [R] ;

— Fixe le préjudice d’angoisse de mort imminente de M. [R] à la somme de 20.000€ ;

— Condamne la société Axa France Iard à payer à Mme [R] agissant à titre personnel et en qualité de représentante légale de sa fille mineure [B] [R], la somme de 20.000€ à répartir entre elles selon la dévolution successorale de feu M. [R] ;

— Condamne la société Axa France Iard à payer à Mme [R] agissant à titre personnel et en qualité de représentante légale de sa fille mineure [B] [R] la somme de 2000€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel ;

— Condamne la société Axa France Iard aux entiers dépens d’appel et accorde aux avocats qui en ont fait la demande, le bénéfice de l’article 699 du code de procédure civile.

Le greffier Le président

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