Cour d'appel d'Angers, 1ère chambre section b, 27 décembre 2019, n° 19/00055

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Angers, 1re ch. sect. b, 27 déc. 2019, n° 19/00055
Juridiction : Cour d'appel d'Angers
Numéro(s) : 19/00055
Décision précédente : Tribunal de grande instance d'Angers, 16 décembre 2019, N° 19/00055
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

D’ANGERS

1re CHAMBRE B

FB/MCC

Ordonnance N°: 55

Ordonnance du Juge des libertés et de la détention d’ANGERS du 17 Décembre 2019

N° RG 19/00055 – N° Portalis DBVP-V-B7D-ETNW

AFFAIRE : X C/ LE DIRECTEUR DU CESAME, MADAME LA PROCUREURE GENERALE PRES LA COUR D’APPEL D’ANGERS

ORDONNANCE

DU 27 DECEMBRE 2019

Nous, F-Christine COURTADE, Présidente de chambre à la Cour d’Appel d’ANGERS, agissant par délégation du Premier Président en date du 18 décembre 2019, assistée de F. BOUNABI, Greffier,

Statuant sur l’appel formé par :

Mme F-G X

née le […] à […]

[…]

[…]

non comparante, représentée par Me Nicolas JERUSALEMY, avocat au barreau d’Angers, commis d’office

APPELÉS A LA CAUSE :

M. LE DIRECTEUR DU CESAME

centre hospitalier spécialisé

Sainte-Gemmes sur Loire – BP 50089

[…]

MME LA PROCUREURE GENERALE PRES LA COUR D’APPEL D’ANGERS

[…]

[…]

[…]

Non comparants, ni représentés,

Après débats à l’audience publique tenue au […] le 26 Décembre 2019 à 11 H 05, avons mis l’affaire en délibéré au 27 décembre 2019 à 11 H 00, date à laquelle avons rendu l’ordonnance ci-après.

FAITS ET PROCEDURE

Sur décision du directeur du centre hospitalier spécialisé du Césame à Saint Gemmes Sur Loire en date du 23 juillet 2019, Mme F-G X, née le […], a été admise en soins psychiatriques sans consentement sur péril imminent au visa de l’article L3212-1 II 2° du code de la santé publique.

Cette décision a été prise sur la base d’un certificat médical rédigé le 23 juillet 2019 par le docteur Z A, n’exerçant pas au Césame, relevant que l’intéressée tient des 'propos interprétatifs et délirants, évoque des gens qui rentrent chez elle la nuit, la vole, de la surveillance de ses comptes bancaires, du fait que l’on se sert de sa carte bleue. Ses balcons sont jonchés de sel qu’elle dit utiliser pour les nettoyer et faire disparaître les fissures et aussi à la demande de Dieu pour chasser les mauvais esprits de la résidence ... Elle évoque également des menaces au couteau contre elle de la part de l’homme de ménage de la résidence. C’est un complot.'

Ce praticien a conclu que les troubles mentaux ainsi constatés rendent impossible son consentement et justifient des soins immédiats assortis d’une surveillance complète dans un établissement de santé portant sur une admission en soins psychiatriques sans consentement.

Un relevé des démarches de recherche et d’information de tiers en vue d’une admission en soins psychiatriques en péril imminent a été dressé le 23 juillet 2019.

Au vu de certificats médicaux des 24 et 72 heures dressés respectivement les 24 et 26 juillet 2019 par les docteurs D E et B C, psychiatres de l’établissement de soins, le directeur du centre hospitalier spécialisé du Césame à Saint Gemmes Sur Loire a, le 29 juillet 2019, décidé du maintien de la mesure de soins psychiatriques sans consentement de Mme F-G X, dans cet établissement sous la forme d’une hospitalisation complète.

Le 30 juillet 2019, le Directeur du centre hospitalier spécialisé du Césame à Saint Gemmes Sur Loire a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance d’Angers d’une requête aux fins de statuer sur la poursuite de l’hospitalisation complète au visa de l’article L 3211- 12-1 du code de la santé publique en joignant l’avis motivé du 29 juillet 2019 émis par le docteur D E, psychiatre de l’établissement.

Suivant ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance d’Angers, en date du 2 août 2019, la poursuite de l’hospitalisation complète de Mme X a été autorisée.

Selon décisions du 27 août 2019, 26 septembre 2019, 22 octobre 2019, 27 novembre 2019, le directeur du centre hospitalier spécialisé du Césame à Saint Gemmes Sur Loire a maintenu Mme F-G X en soins psychiatriques sous forme d’hospitalisation complète, au visa de certificats médicaux du docteur D E, médecin psychiatre.

Suivant ordonnance en date du 3 décembre 2019, le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance d’Angers a rejeté la demande de mainlevée d’hospitalisation complète présentée par Mme X.

Par requête reçue le 5 décembre 2019, Mme X a sollicité la mainlevée de la mesure d’hospitalisation complète au motif qu’elle n’est pas malade et qu’elle a besoin d’être sécurisée par rapport à des personnes dangereuses qui viennent la menacer de mort à son domicile.

Par ordonnance en date du 17 décembre 2019, le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance d’Angers a rejeté la requête en mainlevée de l’hospitalisation complète de Mme X et autorisé a poursuite de l’hospitalisation complète à l’égard de l’intéressée.

Par lettre simple adressée au greffe de la cour d’appel d’Angers et portant la date d’expédition du 17 décembre 2019, reçue le 19 décembre 2019 à 10 h 10, Mme X a relevé appel de cette décision en toutes ses dispositions. Au soutien de son appel, elle a dit souhaiter que 'ce jugement classe définitivement un dossier médical qui l’empêche de vivre comme toute personne de sa famille de Cossé Brissac'.

A l’audience publique du 26 décembre 2019, Mme F-G X n’a pas comparu ayant manifesté son refus de comparaître selon avis du Césame le matin de l’audience. Elle était représentée par Maître Jerusalemy, avocat au barreau d’Angers.

Maître Jerusalemy, a été entendu en ses observations tendant à la main-levée de la mesure de soins contraints dont Mme F-G X est l’objet.

En la forme, il a observé que le certificat médical rédigé par le docteur Y est mot pour mot celui établi précédemment et a remis en cause l’objectivité de cet avis. Au fond, il a fait le constat d’une amélioration de l’état de santé de Mme X intervenue courant août et disparue en octobre, pour en déduire que le traitement n’est pas adapté et qu’il convient de lui substituer un programme de soins à l’extérieur de l’établissement, solution dont il a sollicité l’adoption par la cour, au besoin en différant sa décision de 24 heures.

Par avis écrit du 20 décembre 2019 mis à disposition des parties et communiqué oralement au conseil de Mme F-G X lors de l’audience, le procureur général conclut à la confirmation de l’ordonnance du juge des libertés et de la détention.

Dûment convoquée, Mme la directrice du centre hospitalier spécialisé du Césame de Saint Gemmes Sur Loire est absente. La présente décision est par conséquent réputée contradictoire.

Dans un avis motivé du 23 décembre 2019 transmis au greffe de la cour le même jour et communiqué oralement aux parties présentes à l’audience, le docteur Y, psychiatre au centre hospitalier spécialisé du Césame de Saint Gemmes sur Loire, s’est prononcé sur la nécessité de poursuivre l’hospitalisation complète de Mme F-G X. Cet avis a été mis à disposition des parties.

SUR QUOI

Sur la recevabilité de l’appel

L’appel de Mme F-G X a été relevé dans les formes et délais prévus par les articles R. 3211-18 et R. 3211-19 du code de la santé publique.

Il est donc parfaitement recevable.

Sur la poursuite des soins

Aux termes de l’article L. 3212-1 du code de la santé publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l’objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d’un établissement

mentionné à l’article L. 3222-1 du même code que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :

1°- ses troubles mentaux rendent impossible son consentement,

2°- son état mental impose des soins immédiats assortis soit d’une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d’une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° de l’article L. 3211-2-1.

Selon l’article L 3211-12-1 I et II du même code, l’hospitalisation complète d’un patient ne peut se poursuivre sans que le juge des libertés et de la détention, préalablement saisi par le directeur de l’établissement lorsque l’hospitalisation a été prononcée en application du chapitre II du présent titre, ait statué sur cette mesure avant l’expiration d’un délai de 12 jours à compter de l’admission. Le juge des libertés et de la détention est alors saisi dans un délai de 8 jours à compter de cette décision. Cette saisine est accompagnée d’un avis motivé rendu par un psychiatre de l’établissement d’accueil se prononçant sur la nécessité de poursuivre l’hospitalisation complète.

L’article L 3211-12 du code de la santé publique dispose encore que le juge des libertés et de la détention dans le ressort duquel se situe l’établissement d’accueil peut être saisi à tout moment aux fins d’ordonner à bref délai la mainlevée immédiate d’une mesure de soins psychiatriques prononcée en application des chapitres II à IV du présent titre…, quelle qu’en soit la forme.

Enfin, il est admis que le juge qui se prononce sur le maintien de l’hospitalisation complète doit apprécier le bien fondé de la mesure au regard des certificats médicaux qui lui sont communiqués et ne peut substituer son avis à l’évaluation par des médecins des troubles psychiques du patient et de son consentement aux soins.

Maître Jerulasemy a critiqué l’avis médical émis par le docteur Y en ce qu’il serait la copie du précédent avis médical donné et ne présenterait donc pas l’objectivité suffisante. La lecture des certificats médicaux établis par les docteurs E et Faraï mettent en évidence des reprises inévitables tenant à l’énoncé des faits constants, notamment quant aux conditions de l’admission de Mme X. Ils font le constat d’un état non évolutif, Mme X elle-même ayant, devant le juge des libertés et de la détention, fait rappel de l’admission de son enfant de quatre mois en service pédiatrique, leitmotiv de son argumentation au soutien de sa demande de main-levée.

L’appréciation de l’état de santé de Mme X en des termes proches présente une objectivité suffisante dés lors que la persistance des troubles est circonstanciée, quand bien même conclut elle de la même façon à la poursuite de l’hospitalisation sous contrainte.

Sur le bien-fondé de la poursuite des soins, les pièces versées au dossier notamment les certificats médicaux circonstanciés légalement exigés établissent que Mme F-G X, âgée de 75 ans et suivie depuis des années en psychiatrie, est hospitalisée sur péril imminent depuis le 23 juillet 2019 en raison de troubles du comportement constatés à son domicile liés à un vécu délirant avec anosognosie totale des troubles et refus de soins, dans un contexte de rupture de soins et de traitement depuis environ un an avant son hospitalisation.

Le docteur D E, psychiatre, dans le cadre de son certificat mensuel du 26 novembre 2019, précédant la demande de main-levée présentée par Mme X, a constaté que celle-ci ' se montre méfiante, ne comprenant pas les raisons du maintien de l’hospitalisation actuelle. Elle exprime des propos délirants (délire de filiation, vécu persécutif majeur) sur un mode intuitif et interprétatif, avec une conviction inébranlable… Il n’existe aucune critique quant aux troubles constatés à son domicile et l’ayant conduit en hospitalisation. Elle ne perçoit pas l’intérêt du traitement psychotrope qu’elle prend néanmoins en hospitalisation et refuse de poursuivre les soins au CMP lorsqu’elle sortira d’hospitalisation.'

Le docteur Y, a dans des certificats médicaux circonstanciés en date des 16 et 23 décembre 2019, établis pour les audiences du juge des libertés et de la détention puis de la cour, noté notamment que 'Mme X reste méfiante vis à vis du soin … demande de contacter son mari et son fils de six mois alors qu’elle est célibataire et sans enfant … les traitements proposés jusqu’à maintenant n’ont pas réussi à abraser son délire et elle reste convaincue que son mari va venir la chercher … elle ne perçoit pas l’intérêt du traitement psychotrope.'

Ces considérations médicales circonstanciées et actualisées tenant à l’existence et la persistance des troubles objectivés sous la forme d’un délire de persécution imposant toujours des soins, le déni des troubles encore constaté à l’audience du juge des libertés et de la détention et la persistance d’un refus des soins hors de la structure hospitalière sont autant d’éléments qui rendent nécessaire la poursuite des soins psychiatriques de Mme X dans un cadre contraint, les troubles mentaux rendant impossible son consentement.

La mise en place d’un programme de soins relève d’une appréciation d’ordre médical qui ne relève pas de la cour. Si le juge des libertés et de la détention peut, aux termes des dispositions de l’article L3211-12-1 du code de la santé publique, différer sa décision de 24 heures notamment pour la mise en place d’un programme de soins, c’est dans l’hypothèse où il ordonne la mainlevée de la mesure d’hospitalisation complète, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

L’ordonnance déférée sera donc confirmée puisque l’atteinte portée à l’exercice des libertés constitutionnelles garanties est adaptée, nécessaire et proportionnée à l’état de santé mental de Mme F-G X et à la mise en oeuvre du traitement requis.

Sur les dépens

Conformément aux dispositions des articles R. 93 et R. 93-2 du code de procédure pénale, il convient de laisser les dépens à la charge de l’Etat.

PAR CES MOTIFS

Le Délégué du premier président de la cour d’appel,

Statuant publiquement et par décision réputée contradictoire,

DÉCLARONS l’appel recevable en la forme ;

Au fond, REJETONS l’appel formé par Mme F-G X ;

CONFIRMONS l’ordonnance rendue le 17 décembre 2019 par le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance d’Angers autorisant la poursuite de l’hospitalisation complète sans consentement de Mme F-G X née le […] à […].

LAISSONS les dépens à la charge de l’État.

LE GREFFIER LE DÉLÉGUÉ

DU PREMIER PRÉSIDENT

F. BOUNABI M. C. COURTADE

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