Cour d'appel de Besançon, Chambre sociale, 22 décembre 2017, n° 16/02434

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Besançon, ch. soc., 22 déc. 2017, n° 16/02434
Juridiction : Cour d'appel de Besançon
Numéro(s) : 16/02434
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Lons-le-Saunier, 24 novembre 2016
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

ARRET N° 17/

JC/GB

COUR D’APPEL DE BESANCON

— […]

ARRET DU 22 DECEMBRE 2017

CHAMBRE SOCIALE

Contradictoire

Audience publique

du 10 Novembre 2017

N° de rôle : 16/02434

S/appel d’une décision

du CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE LONS LE SAUNIER

en date du 25 novembre 2016

code affaire :

80A

Demande d’indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution

Monsieur X Y, demeurant […]

APPELANT

représenté par Me Jean-Baptiste GAVIGNET, avocat au barreau de DIJON, substitué par Me DELAVICTOIRE Isabelle-Marie, avocat au barreau de DIJON

SARL FLEXICO, […]

INTIMEE

représentée par Me Claire LAVERGNE, avocat au barreau de PARIS, substituant Me RICARD, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile l’affaire a été débattue le 10 Novembre 2017, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Monsieur COTTERET Jérôme, Conseiller, entendu en son rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Christine K-DORSCH, Présidente de Chambre

M. Jérôme COTTERET, Conseiller

Monsieur Patrice BOURQUIN, Conseiller

qui en ont délibéré,

Mme Gaëlle BIOT, Greffier lors des débats

Les parties ont été avisées de ce que l’arrêt sera rendu le 22 Décembre 2017 par mise à disposition au greffe.

**************

FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

M. X Y a été embauché par la société ANDRÉ MOREAU & Cie à compter du 16 juillet 1990 comme cadre commercial..

La société ANDRÉ MOREAU & Cie a été rachetée par le groupe FLEXICO-MINIGRIP-GEFREM en mai 2002 lequel a alors pris la dénomination FLEXICO.

La S.A.R.L. FLEXICO est une entreprise spécialisée dans la fabrication de solutions de fermeture de sacs et sachets de tout format et matériaux destinés au commerce agroalimentaire, ainsi qu’au luxe. Elle compte plus de 300 salariés en France et est détenue à 100 % par une société holding S2F FLEXICO. Le groupe FLEXICO compte pour sa part plus de 700 personnes en incluant les filiales étrangères de S2F FLEXICO et de MINIGRIP Belgique.

Par courrier du 13 mai 2015, la S.A.R.L. FLEXICO a convoqué M. X Y à un entretien préalable à son licenciement pour motif économique.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 29 juin 2015, la S.A.R.L. FLEXICO a notifié à M. X Y son licenciement pour motif économique et les relations de travail entre les parties ont pris fin le 31 octobre 2015 après un préavis de trois mois.

Par requête enregistrée au greffe le 2 février 2016, M. X Y a saisi le conseil de prud’hommes de Lons-le-Saunier afin d’obtenir la condamnation de la S.A.R.L. FLEXICO à lui verser les sommes suivantes :

—  10'000 € de dommages et intérêts pour procédure de licenciement irrégulière, – 150'000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

—  1 500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

M. X Y a également sollicité la remise d’une attestation Pôle Emploi rectifiée.

À titre subsidiaire, il a demandé la condamnation de la S.A.R.L. FLEXICO à lui payer la somme de 150'000 € à titre de dommages et intérêts pour non respect des critères d’ordre du licenciement.

Par jugement rendu le 25 novembre 2016, le conseil de prud’hommes a déclaré la procédure de licenciement irrégulière et a condamné la S.A.R.L. FLEXICO à verser à M. X Y la somme de 7 000 € à titre de dommages et intérêts.

Le jugement a en revanche dit que le licenciement repose sur une cause économique réelle et sérieuse, que l’employeur a respecté les critères d’ordre, et a ainsi débouté M. X Y des

demandes formées à ce titre.

Le conseil a ordonné à M. X Y de rembourser à la S.A.R.L. FLEXICO la somme de 7 471,55 € à titre de trop-perçu sur l’indemnité de licenciement et a condamné la S.A.R.L. FLEXICO à verser à M. X Y une indemnité de 1 500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

*

Par déclaration enregistrée au greffe de la Cour le 5 décembre 2016, M. X Y a interjeté appel de cette décision.

Dans ses écrits déposés le 31 janvier 2017, il conclut à l’infirmation du jugement, maintenant l’intégralité de ses prétentions et portant la demande au titre de l’article 700 à la somme de 2 500 €.

Il fait valoir que la notification verbale de son licenciement entraîne l’absence de cause réelle et sérieuse de celui-ci.

Il ajoute que la S.A.R.L. FLEXICO n’a pas cherché à le reclasser dans l’ensemble des sociétés du groupe et soutient à titre subsidiaire que les critères d’ordre des licenciements n’ont pas été respectés.

Il estime subir un préjudice d’autant plus important qu’il a été contraint d’accepter sa mise à la retraite par Pôle Emploi alors qu’il comptait travailler encore 4 ans.

*

Pour sa part, en réponse dans ses écrits déposés le 28 mars 2017, la S.A.R.L. FLEXICO forme un appel incident et sollicite l’infirmation du jugement en ce qu’il a octroyé à M. X Y la somme de 7 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure irrégulière.

Elle conclut en tout état de cause au rejet des prétentions de M. X Y et à sa condamnation à lui verser une indemnité de 500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle affirme que le motif économique a une cause réelle et sérieuse, que la procédure est régulière et qu’elle a loyalement recherché à reclasser le salarié.

Elle ajoute avoir respecté les critères d’ordre des licenciements.

*

En application de l’article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère, pour l’exposé des moyens des parties, à leurs conclusions visées par le greffe et développées lors de l’audience de plaidoirie du 10 novembre 2017.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 3 juillet 2017.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

) Sur le licenciement économique :

En application de l’article L. 1233-4 al. 1er du code du travail, le licenciement pour motif économique d’un salarié ne peut intervenir que lorsque le reclassement de l’intéressé ne peut être opéré dans l’entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l’entreprise appartient.

Aux termes d’une jurisprudence constante de la Cour de Cassation, l’obligation de reclassement étant un préalable au licenciement économique, il appartient ainsi à la Cour d’en vérifier l’exécution par l’employeur avant d’examiner la réalité des motifs économiques invoqués.

En effet, quand bien même les éléments constitutifs du motif économique sont réunis, le licenciement n’est justifié que si l’employeur prouve avoir sérieusement, mais vainement, tenté de reclasser le salarié. À défaut, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse. (Cass. soc., 22 janvier 1992, n° 89-41.242, Bull. Civ. V, n° 31 ou Cass. soc., 24 octobre 2000, n° 98-40-950 et n° 98-44.105).

En l’espèce, il y a lieu également de rappeler que si l’obligation de reclassement n’est qu’une obligation de moyens renforcée, il revient néanmoins à l’employeur de rapporter la preuve, non seulement de l’impossibilité de reclassement mais également de la réalité de ses recherches, y compris dans des postes de catégorie inférieure.

Or, force est de constater que si l’employeur justifie, par une attestation de son directeur des ressources humaines, avoir proposé à M. X Y un poste de responsable commercial régional situé à Paris et en région parisienne, il ne produit aucune pièce démontrant l’existence de recherches étendues au niveau du groupe, étant rappelé d’une part que la S.A.R.L. FLEXICO compte plus de 300 salariés en France et qu’elle est détenue à 100 % par une société holding S2F FLEXICO et que le groupe FLEXICO d’autre part compte plus de 700 personnes en incluant les filiales étrangères de S2F FLEXICO et de MINIGRIP Belgique.

Il convient donc d’infirmer le jugement déféré et de déclarer le licenciement économique invoqué par la S.A.R.L. FLEXICO, en raison de la violation par cette dernière de son obligation de reclassement, dépourvu de cause réelle et sérieuse.

) Sur l’indemnité due à M. X Y suite au licenciement abusif:

La S.A.R.L. FLEXICO comptant plus de 11 salariés au moment du licenciement et M. X Y ayant plus de 2 ans d’ancienneté, les dommages et intérêts pour licenciement abusif ne peuvent être inférieurs à l’équivalent de 6 mois de salaire.

En l’espèce, il est constant que M. X Y avait 25 ans d’ancienneté et qu’il était âgé de 62 ans au moment de la rupture du contrat de travail.

Par ailleurs, après avoir rappelé que le salaire de référence est déterminé en y incluant les treizièmes mois, primes et bonus, il y a lieu de fixer à la somme de 7 067 € brut la moyenne des 12 derniers mois de salaire.

Pour solliciter à titre de dommages et intérêts la somme de 150'000 €, M. X Y affirme qu’il aurait continué à travailler jusqu’en 2020 et que son départ anticipé en retraite lui occasionne une perte non seulement de salaire mais également de pension qu’il chiffre de manière globale à la somme de 238'000 €.

Toutefois, il convient de rappeler que M. X Y a perçu au moment de son licenciement une indemnité de 112'875,21 € brut qui ne lui aurait pas été versée s’il avait continué à travailler.

Au regard de ces observations, il y a lieu de fixer les dommages et intérêts dus à M. X Y au titre du licenciement abusif à la somme de 120'000 €.

Dès lors qu’il a été fait droit à la demande de dommages et intérêts pour licenciement abusif, la Cour n’a pas à examiner la demande subsidiaire pour non-respect des critères d’ordre du licenciement, ni

même celle formée également à titre principal pour irrégularité de la procédure, les dommages et intérêts éventuellement alloués à ce titre ne pouvant se cumuler avec ceux octroyés au titre du licenciement abusif.

) Sur la demande reconventionnelle de la S.A.R.L. FLEXICO :

La S.A.R.L. FLEXICO fait valoir qu’elle a commis une erreur en omettant de soumettre aux cotisations sociales l’indemnité conventionnelle de licenciement pour la fraction excédant deux fois le plafond annuel de la sécurité sociale.

Dans la mesure où la S.A.R.L. FLEXICO justifie avoir régularisé la situation auprès des organismes sociaux, notamment par l’intermédiaire de son logiciel de paye qui comporte un module relatif à la déclaration des données sociales, c’est à juste titre qu’elle sollicite le remboursement d’un trop-perçu au titre de l’indemnité de licenciement à hauteur de 7 471,55 €, le jugement étant en conséquence confirmé sur ce point.

) Sur les dépens et les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile :

La S.A.R.L. FLEXICO ayant succombé à hauteur de Cour, elle devra supporter les entiers dépens d’appel sans pouvoir prétendre elle-même à l’indemnisation de ses frais irrépétibles.

L’équité commande en revanche d’allouer à M. X Y une indemnité de 1 500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, Chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

CONFIRME le jugement rendu le 25 novembre 2016 par le conseil de prud’hommes de Lons-le-Saunier en ce qu’il a ordonné à M. X Y le remboursement de la somme de 7 471,55 € au titre du trop-perçu sur l’indemnité de licenciement et en ce qu’il a condamné la S.A.R.L. FLEXICO au paiement d’une indemnité de 1 500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

INFIRME le jugement en ses autres dispositions ;

Statuant à nouveau,

DÉCLARE le licenciement de M. X Y dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

CONDAMNE la S.A.R.L. FLEXICO à verser à M. X Y la somme de cent vingt mille euros (120'000 €) à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif ;

DÉBOUTE M. X Y de sa demande de dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement ;

RAPPELLE que les condamnations porteront intérêt à compter de la saisine du conseil de prud’hommes s’agissant des créances salariales et à compter de la présente décision en ce qui concerne les créances indemnitaires ;

ORDONNE à la S.A.R.L. FLEXICO de remettre à M. X Y les documents de fin de contrat rectifiés conformément à la présente décision ;

DÉBOUTE la S.A.R.L. FLEXICO de sa demande au titre des frais irrépétibles ;

CONDAMNE la S.A.R.L. FLEXICO à verser à M. X Y une indemnité de mille cinq cents euros (1 500 €) en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens d’appel.

LEDIT ARRÊT a été rendu par mise à disposition au greffe le vingt deux décembre deux mille dix-sept et signé par Mme Christine K-DORSCH, Présidente de Chambre, et par Mme Gaëlle BIOT, Greffier.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT DE CHAMBRE,

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Textes cités dans la décision

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  2. Code du travail
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