Cour d'appel de Caen, 1ère chambre civile, 3 décembre 2019, n° 12/03569

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Caen, 1re ch. civ., 3 déc. 2019, n° 12/03569
Juridiction : Cour d'appel de Caen
Numéro(s) : 12/03569
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Coutances, 1er août 2012, N° 12/00653
Dispositif : Sursis à statuer

Sur les parties

Texte intégral

AFFAIRE : N° RG 12/03569 -

N° Portalis DBVC-V-B64-ESM7

Code Aff. :

ARRÊT N° JB.

ORIGINE : Décision du Tribunal de Grande Instance de COUTANCES en date du 02 Août 2012
-

RG n° 12/00653

COUR D’APPEL DE CAEN

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 03 DECEMBRE 2019

APPELANTES :

La SCI HERMAINVEST

prise en la personne de son représentant légal

N° SIRET : 478 772 114

[…]

[…]

La SAS AGNEAUX DISTRIBUTION

prise en la personne de son représentant légal

N° SIRET : 307 615 757

[…]

[…]

représentées par Me Diane BESSON de la SELARL UNITED AVOCATS, avocat au barreau de CAEN,

assistées de Me Emmanuelle BRUDY, avocat au barreau de CHERBOURG

INTIMÉE :

La SARL G2M INGENIERIE

prise en la personne de son représentant légal

N° SIRET : 500 366 232

[…]

[…]

représentée par Me Z TESNIERE, avocat au barreau de CAEN

assistée de Me Xavier GRIFFITHS de la SAS CABINET GRIFFITHS DUTEIL ASSOCIÉS, avocat au barreau de LISIEUX,

DÉBATS : A l’audience publique du 15 octobre 2019, sans opposition du ou des avocats, M. BRILLET, Conseiller et Mme VELMANS, Conseillère, ont entendu les plaidoiries et en ont rendu compte à la cour dans son délibéré

GREFFIER : Mme FLEURY

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

M. BRILLET, Conseiller, faisant fonction de Président,

Mme X, Conseillére,

Mme VELMANS, Conseillère,

ARRÊT : rendu publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile le 03 Décembre 2019 et signé par M. BRILLET, Conseiller, faisant fonction de président, et Mme FLEURY, greffier

* * *

FAITS ET PROCEDURE

La SCI Hermainvest est propriétaire d’un ensemble commercial situé à Agneaux dont la SAS Agneaux Distribution est l’exploitante.

Lors de la réalisation de travaux dans le centre commercial (dont réception provisoire en novembre 2005), des désordres sont apparus (fissuration généralisée du carrelage/condensation en sous-sol). Une expertise judiciaire a été ordonnée par le juge des référés le 26 octobre 2006 et confiée à M. Y. Une action a été exercée par les maîtres de l’ouvrage à l’encontre des constructeurs par assignation du 20 août 2008.

Dans ce cadre, un mandat de gestion de sinistre a été confié par les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution à la société GRC Consulting (par convention avec effet au 27 novembre 2009) puis une convention d’assistance à maîtrise d’ouvrage a été conclue le 19 mars 2010 entre les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution et la société G2M Ingénierie (appartenant au même groupe que la société GRC Consulting).

Par courrier du 24 janvier 2012 les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution ont unilatéralement résilié la dite convention sans préavis ni mise en demeure.

La société G2M Ingénierie a fait assigner le 3 avril 2012 les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution devant le tribunal de grande instance de Coutances en paiement d’une somme de 716 619,92 euros au titre de factures d’honoraires, outre une indemnité de procédure de 10 000 euros.

Par jugement du 2 août 2012 le tribunal de grande instance de Coutances a constaté la résiliation de la convention l’unissant aux maîtres de l’ouvrage aux torts de ceux-ci et les a condamnés au paiement des sommes de 127 395 euros au titre d’un solde d’honoraires et de 2 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

La SCI Hermainvest et la SAS Agneaux Distribution ont interjeté appel de ce jugement le 16 novembre 2012.

La SARL G2M Ingénierie s’est également portée appelante le 19 novembre 2012.

Les deux procédures ont été jointes par ordonnance du 5 décembre 2012.

Par arrêt du 4 octobre 2016, a cour a :

— confirmé le jugement déféré en ce qu’il avait constaté à la date du 21 janvier 2012 la résiliation de la convention du 19 mars 2010 aux torts exclusifs de la Société Hermainvest et de la société Agneaux Distribution.

— sursis à statuer sur la demande de la société G2M Ingénierie tendant à l’obtention d’une rémunération ou d’une indemnisation jusqu’à ce que les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution justifient de l’état d’avancement de la procédure engagée au fond devant le tribunal de grande instance de Coutances contre les constructeurs et du sort des opérations d’expertise judiciaire.

— dit qu’elles devraient y procéder avant le 16 novembre 2016 dans le cadre de la mise en état,

— réservé les dépens et l’application de l’article 700 du code de procédure civile.

M. Y a dressé son rapport final dans le cadre du litige principal entre les sociétés Agneaux Distribution et Hermainvest et les constructeurs et leurs assureurs le 22 juin 2018.

Par conclusions d’incident du 4 septembre 2018 complétées par écritures du 13 décembre suivant, les sociétés Agneaux Distribution et Hermainvest ont saisi le conseiller de la mise en état d’une demande tendant à voir ordonner un sursis à statuer dans l’attente de l’arrêt à intervenir de la Cour de cassation statuant sur leur pourvoi formé le 4 septembre 2018 contre l’arrêt du 4 octobre 2016.

Par ordonnance en date du 20 mars 2019, le conseiller de la mise en état a principalement débouté la SCI Hermainvest et la SAS Agneaux Distribution de leur demande et fixé un nouveau calendrier de procédure.

Vu les dernières conclusions récapitulatives remises au greffe et notifiées via le RPVA le 5 septembre 2018 par les sociétés Agneaux Distribution et Hermainvest,

Vu les dernières conclusions récapitulatives remises au greffe et notifiées via le RPVA le 31 août 2018 par la SARL G2M Ingenierie,

L’ordonnance de clôture est intervenue le 18 septembre 2019.

A l’audience, la SARL G2M Ingenierie a renoncé à son incident déposé et notifié par conclusions du 9 octobre 2019 saisissant le conseiller de la mise en état d’une demande de sursis à statuer.

Il est renvoyé aux écritures des parties s’agissant de la présentation détaillée de leurs prétentions respectives et des moyens développés à leur soutien.

MOTIFS

- sur la demande de sursis à statuer

L’existence d’un pourvoi formé contre l’arrêt de cette cour en date du 4 octobre 2016 ne justifie pas le prononcé d’un sursis à statuer, état rappelé que l’exécution d’une décision de justice se fait aux risques et périls de celui qui l’exécute.

- sur la demande de production des dires produits par les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution au cours des années 2017 et 2018 ayant concouru à la finalisation du rapport d’expertise judiciaire et le renvoi des parties à s’expliquer plus complètement.

Au soutien de ces demandes, la SARL G2M Ingenierie allègue que :

— les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution ont informé la cour qu’elles auraient satisfait à sa demande ayant justifié le sursis à statuer du 4 octobre 2016 en produisant 45 pièces le 8 novembre 2016, complété le 24 novembre 2016.

— dans le dernier état, par une communication intervenue le 17 juillet 2018, il a été procédé à la transmission contradictoire du rapport d’expertise enfin déposé par Monsieur Z-A Y le 22 juin 2018. A ce rapport sont annexées 354 pièces dont certaines n’ont jamais été portées à sa connaissance.

— en référence au bordereau de communication de pièces n° 7 du 29 juin 2018 des sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution, la cour pourra constater que les derniers dires à expert, indispensables à l’étude du présent dossier, versés aux débats remontent au dire n° 69, pièce 95 de la présente procédure, en date du 1 er septembre 2016 complété par la pièce 105 CD-ROM et au dire n° 70 du 28 octobre 2016 comportant divers éléments relatifs à la détermination et au chiffrage des travaux revendiqués par les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution.

— après cette date, le Cabinet FIDAL, avocat conseil des sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution, a transmis à l’expert Judiciaire de très nombreux dires les 2 février, 18 mai, 2 juin, 6 juin, 14 juin, 19 juin, 31 juillet, 29 août, 6 septembre, 5 octobre, 14 novembre 2017, 13 février, 9 mars, 14 mars 2018, de telle sorte que tous ces éléments ayant concouru à l’établissement du rapport d’expertise constituent des éléments de preuve utiles à l’instruction de la présente instance.

— elle a dans ces conditions sollicité la communication de l’ensemble des annexes du rapport d’expertise et qu’il lui a été opposé un refus le 25 juillet 2018, au prétexte qu’étant donné l’importance de leur volume, ces documents ne seraient pas annexés au rapport d’expertise. Ainsi, le principe du respect du contradictoire n’est pas assuré.

Cependant, d’une part, la SARL G2M Ingenierie ne démontre pas en quoi la production de ces dires serait utile pour le règlement du litige, dès lors notamment qu’elle prétend bénéficier d’une indemnité réparatoire évaluée sur la base du rapport d’expertise judiciaire lui-même déjà versé au débat.

D’autre part, force est de constater qu’en suite des conclusions des sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution saisissant, la veille de l’ordonnance de clôture annoncée pour le 5 septembre 2018, le conseiller de la mise en état d’une demande de sursis à statuer pour cause de pourvoi formé le 4 septembre 2018 contre l’arrêt du 4 octobre 2016, l’affaire, qui devait être plaidée à l’audience du 18 septembre 2018, a finalement était maintenue à la mise en état pour permettre au conseiller de la mise en état de vider sa saisine. Or, pendant ce délai d’instruction supplémentaire d’un an, la SARL G2M Ingenierie n’a pas saisi le conseiller de la mise en état d’un incident de communication de pièces.

Les demandes de la SARL G2M Ingenierie sont en conséquence rejetées.

- Sur la réparation du préjudice de la SARL G2M Ingenierie

Dans son précédent arrêt du 16 octobre 2016, la cour a déjà indiqué que sur le fondement de la responsabilité pour faute, la société G2M Ingénierie avait droit à l’indemnisation du préjudice que lui cause la résiliation unilatérale et injustifiée du contrat, ce qui conduit à examiner quel aurait été son droit à indemnisation si la résiliation n’était pas intervenue.

A cet égard, le contrat d’assistance à maîtrise d’ouvrage convenu le 19 mars 2010 entre ces dernières et la SARL G2M Ingénierie avait prévu comme suit la rémunération de celle-ci :

«3. Montant des honoraires

— Phase Etude

7 % du montant des travaux retenus par Monsieur l’expert judiciaire dans son rapport.

4. Règlement des honoraires

En phase études

Acompte de 20 000 euros hors taxes, TVA en vigueur au jour du paiement, le solde des honoraires sera facturable à l’obtention des fonds provenant soit d’un accord amiable soit d’une première décision de justice exécutoire.

Actualisation des sommes suivant BT 01 ».

Un avenant a été stipulé entre les parties le 7 avril 2010 comme suit : « il a été convenu de modifier l’article 3 montant des honoraires de la convention du contrat d’honoraires d’assistance à maîtrise d’ouvrage de la manière suivante :

« - Phase Etude,

7 % du montant des travaux retenus par l’expert judiciaire dans son rapport,

5 % à la charge de la SCI Hermainvest et de la SAS Agneaux Distribution

2 % à la charge de la SARL GRC Consulting »

Le contrat d’honoraires d’assistance à maîtrise d’ouvrage du 26 janvier 2010 mentionne la réfection des désordres du centre E. Leclerc tels que répertoriés dans l’ordonnance du 12 octobre 2006 ayant commis Monsieur Y en qualité d’expert judiciaire.

Il n’est donc pas justifié de prétendre que la convention avait prévu de limiter l’assiette de l’honoraire dû à la société G2M ingénierie au seul montant des travaux retenus par l’expert pour reprendre le désordre de carrelage. L’assiette était le montant des travaux retenus par l’expert pour reprendre l’ensemble des désordres dont il était saisi.

La société G2M ingénierie prétend qu’il résulte du rapport d’expertise de M. Y que le coût global des travaux s’établit à 5 889 609,81 euros HT, soit 7 067 531,76 euros TTC hors préjudices divers et y compris la construction du bâtiment de 1 500 m² imaginé désormais au titre des constructions de réserves en extension du bâtiment. Elle ajoute que la TVA étant neutre pour les sociétés commerciales ou sociétés civiles immobilières assujetties à TVA, ce qui est le cas en l’espèce, l’assiette de calcul des honoraires qui lui sont dus est le montant HT soit 5 889 609,80 euros ce qui, moyennant un taux de 7 %, doit conduire au règlement de la somme de 412 272,68 euros HT, auquel se rajouterait la TVA s’il s’agissait d’un honoraire et sans TVA s’il s’agit d’une indemnité compensatrice.

Elle sollicite cette somme à titre d’indemnité compensatoire.

Elle allègue, pour le cas où les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution soutiendraient que, par la voie d’un avenant, elle aurait accepté de voir réduire ses honoraires à 5 % payé par elles et complétés de 2 % à régler par la suite par GRC CONSULTING, la cour pourra alors retenir que, dans la mesure où la Société GRC CONSULTING serait réglée de l’indemnité compensatoire qu’elle réclame, elle sera en mesure de lui régler les 2 % considérés et en tenir compte dans la décision à intervenir.

S’appuyant notamment sur l’article 4 de la convention, les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution répliquent que la demande doit être rejetée faute par la société G2M Ingenierie de démontrer subir un préjudice certain et actuel du fait de la résiliation de son contrat.

De fait, comme également rappelé par la cour dans son précédent arrêt, la convention passée entre les parties a prévu un prix de la prestation constitué d’un honoraire de résultat dépendant de facteurs aléatoires, en ce compris l’obtention de fonds en exécution d’un accord amiable ou d’une première décision de justice exécutoire autorisant seule sa facturation.

Cela ne peut toutefois justifier de d’ores et déjà débouter la société G2M Ingenierie dans la mesure où il ne s’agit pas d’exécuter purement et simplement la convention résiliée.

Cependant, en l’état, la cour n’est pas en mesure d’évaluer le préjudice de la société G2M Ingenierie dans la mesure où l’évaluation de la perte d’avoir pu le moment venu facturer ses honoraires conformément à la convention dépend du contenu de la décision judiciaire à venir (ou d’un accord). Sur ce point, le seul dépôt d’un rapport d’expertise chiffrant les divers préjudices et donnant son avis sur les responsabilités des constructeurs est insuffisant pour garantir une décision de condamnation exécutoire et l’obtention de fonds correspondante.

Il sera donc sursis à statuer sur l’intégralité des demandes dans l’attente de la production par la partie la plus diligente d’un accord amiable ou d’une première décision de justice exécutoire, au sens de la convention.

Il sera tiré toute conséquence des diligences accomplies ou non par les sociétés appelantes au principal pour mener à son terme judiciaire ou transactionnel la procédure intentée contre les constructeurs.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant publiquement et contradictoirement,

Dit n’y avoir lieu à surseoir à statuer dans l’attente de l’arrêt de la cour de cassation statuant sur le pourvoi formé contre l’arrêt de cette cour du 16 octobre 2016,

Déboute la SARL G2M Ingenierie de sa demande de production des dires produits par la SCI Hermainvest et la SAS Agneaux Distribution au cours des années 2017 et 2018 ayant concouru à la finalisation du rapport d’expertise judiciaire et de sa demande de renvoi des parties à s’expliquer plus complètement,

Sursoit à statuer sur tous les autres chefs du litige dans l’attente de la production par la partie la plus diligente d’un accord amiable ou d’une première décision de justice exécutoire, au sens de la convention résiliée.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

E. FLEURY P. BRILLET

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