Cour d'appel de Chambéry, 17 décembre 2013, n° 12/02330

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Chambéry, 17 déc. 2013, n° 12/02330
Juridiction : Cour d'appel de Chambéry
Numéro(s) : 12/02330
Décision précédente : Tribunal de commerce, 2 octobre 2012, N° 2012F00052

Sur les parties

Texte intégral

XXX

COUR D’APPEL de CHAMBÉRY

chambre civile – première section

Arrêt du Mardi 17 Décembre 2013

RG : 12/02330

Décision attaquée : Jugement du Tribunal de Commerce de X en date du 03 Octobre 2012, RG 2012F00052

Appelantes

SAS Z Poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice audit siège

dont le siège social est sis XXX – XXX

SAS C Poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice audit siège

dont le siège social est sis 121 allée Albert Sylvestre Bâtiment Iris – 73000 X

représentées par la SCP MICHEL FILLARD & JULIETTE COCHET-BARBUAT, avocats postulants au barreau de X, assistées de la SCP LEXALP – SCP BOISSON et Associés, avocats plaidants au barreau de X

Intimée

SA A,

dont le siège XXX

représentée par Me Clarisse DORMEVAL, avocat postulant au barreau de X, assistée de la SELAS FIDAL, avocats postulants au barreau de LYON

— =-=-=-=-=-=-=-=-

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors de l’audience publique des débats, tenue le 19 novembre 2013 avec l’assistance de Mme Sylvie LAVAL, Greffier,

Et lors du délibéré, par :

— Monsieur Claude BILLY, Président,

— Monsieur Pascal LECLERCQ, Conseiller,

— Monsieur Jacques MOREL, Conseiller, qui a procédé au rapport.

— =-=-=-=-=-=-=-=-

FAITS ET PROCEDURE

La société A exerce une activité de conception et de réalisation d’équipements de transmission sur fibres optiques notamment pour signaux radiofréquences dans le cadre de la fréquence 107.7 dédiée au réseau Radio Trafic autoroutier (produits de déport optique permettant de conserver la même fréquence radio tout au long d’un axe routier).

Le 6 avril 2010, M. F B, ingénieur, a démissionné du poste qu’il occupait au sein de la société A et, le premier juillet 2010, il a été embauché par la société concurrente C qui avait été constituée en mai 2010.

Se prévalant d’actes de concurrence déloyale et de parasitisme ayant provoqué la baisse brutale du chiffre d’affaires qu’elle réalisait avec son principal client sur la fréquence 107.7, la société STIC, dont le directeur général était le président de la société Z créée en janvier 2010, qui détenait 99% du capital de la société C, la société A, par acte du 27 juin 2012, a assigné C et Z devant le tribunal de commerce de X en cessation des actes de concurrence déloyale et parasitaires, paiement d’une somme de 373.997 euros en dédommagement du préjudice résultant de l’appropriation de son savoir faire, ainsi que d’une somme de 500.000 euros au titre de son manque à gagner, avec publication du jugement.

Par jugement du 3 octobre 2012, le tribunal a :

— dit que la société C et la société Z s’étaient livrées à des actes de concurrence déloyale et de parasitisme au préjudice de la société A,

— ordonné à la société C et à la société Z de cesser, dès la signification du jugement, tout acte de concurrence déloyale ou de parasitisme à l’encontre de la société A s’agissant de la technologie107.7,

— condamné in solidum la société C et la société Z à payer à la société A :

* la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du manque à gagner subi par la société A du fait de l’accomplissement par les société C et Z des agissements ci-dessus,

* la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice complémentaire subi par la société A concernant l’appropriation déloyale et parasitaire de son savoir faire par les sociétés C et Z,

* la somme de 6.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

— ordonné l’exécution provisoire de la décision,

— débouté les parties de leurs autres demandes.

Les sociétés C et Z ont relevé appel de ce jugement.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Les sociétés C et Z demandent à la cour :

— de réformer le jugement,

— de dire qu’elles ne se sont livrées à aucun agissement déloyal ou parasitaire,

— de débouter la société A de toutes ses demandes,

— de la condamner au paiement de la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure manifestement abusive et de la somme de 5.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Elles font valoir :

— qu’elles ne se sont pas rendues coupables d’agissements déloyaux et parasitaires :

* absence de débauchage fautif de M. B: principe de la liberté du travail, le salaire qui lui a été proposé n’était que légèrement plus élevé (400 euros), celui-ci n’a jamais été investi d’un rôle prépondérant chez A (salaire 2.500 euros par mois), il a quitté A car il cherchait depuis 2009 un travail mieux payé et plus proche de chez lui,

* absence de captation fautive du client STIC: principe de la liberté du commerce et du démarchage des clients, A ne peut prétendre que C aurait bénéficié d’un transfert de clientèle et de chiffre d’affaires au premier semestre 2010 puisqu’elle n’était pas encore constituée, pas de preuve d’agissements déloyaux, en 2010 le CA de C n’a été que de 108.550 euros et le résultat a été déficitaire, la baisse du CA avec la société STIC est imputable l’attitude d’A, fourniture de fibres au seul concurrent de STIC, refus de réparer les produits déports optiques, contexte économique désastreux, mauvaise santé financière de STIC,

* absence de captation du savoir faire de la société A : A n’a développé aucun savoir faire spécifique, les composants utilisés sont des pièces standards, il n’y avait pas de conception originale de la part d’A, le produit « déport optique » n’avait guère évolué depuis 2001, en aucun cas la société C ne s’est servie du savoir faire et des plans spécifiques de la société A, s’agissant de références quasiment tombées dans le domaine public et fournies par le client lui-même,

— qu’en ce qui concerne les demandes indemnitaires d’A, aucun préjudice et lien de causalité ne sont établis,

La société A demande à la cour :

— de confirmer le jugement en ce qu’il a retenu l’existence d’actes de concurrence déloyale et parasitaire commis à son préjudice par les société C et Z,

— d’ordonner la cessation des agissements déloyaux et parasitaires des sociétés C et Z sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard après la signification de l’arrêt,

— de les condamner in solidum à lui payer :

* la somme de 373.997 euros au titre du préjudice résultant de l’appropriation déloyale et parasitaire de son savoir faire,

* la somme de 500.000 euros au titre du manque à gagner du fait des agissements déloyaux et parasitaires,

* la somme de 50.000 euros au titre des actes de concurrence déloyale commis depuis le jugement entrepris,

* la somme de 20.000 euros au titre du préjudice moral subi,

* la somme de 10.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

— d’ordonner la publication de l’arrêt à intervenir sur son site internet et dans trois journaux ou revues professionnelles au choix des sociétés C et Z, aux frais de ces dernières, sans que ces frais n’excèdent 3.000 euros HT par insertion supportée et ce, pendant une durée de six mois et sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard après signification de l’arrêt,

— de se réserver la faculté de liquider les astreintes.

Elle fait valoir :

— que les sociétés C et Z ont commis des agissements déloyaux et parasitaires à son encontre :

* débauchage déloyal de M. B aux fins de concurrence déloyale : M. B connaissait le savoir faire technique de A pour répondre au besoin du client STIC, depuis 2008 il était chef de projet sur le développement des produits conçus pour STIC (produits déport optique radiofréquence) son recrutement avait dès lors vocation à capter le savoir faire acquis grâce aux investissements réalisés par A et à la formation qu’elle lui avait fournie, ce qui est confirmé par son embauche seulement 19 jours après la fin de son préavis, sa démission ayant été donnée en connaissance de ladite embauche,

* captation du client historique de la société A et du chiffre d’affaires correspondant : les sociétés C et Z ont tiré indûment profit des connaissance de M. B pour s’approprier de manière déloyale le client le plus important de la société A depuis 2003 pour le marché des produits de déport optique, en 2010 rupture brutale par STIC des relations commerciales avec A, perte de chiffre d’affaire brutale (2008: 473.142 euros, 2009: 323.101 euros, 2010: 2.285 euros, 2011: 2.561 euros), STIC réalise la majorité de son CA au deuxième semestre (saisonnalité), les motifs allégués pour justifier la rupture de STIC ne sont pas établis,

* captation par C et Z du savoir faire technique développé par la société A : pillage parasitaire des droits de la société A afin de profiter des investissements réalisés par cette dernière pour mettre sur le marché des produits de déport optique, le savoir faire spécifique d’A repose sur de longues années de recherche et de développement, les composants ne sont pas standard, leur assemblage est spécifique à A, il s’agit d’une conception parfaitement originale, un assemblage à l’identique ne peut être fortuit, M. B en sa qualité de chef de projet avait une connaissance approfondie de ce savoir faire ainsi qu’un accès à l’ensemble des plans, les société C et Z se sont appropriés les travaux de conception et les plans élaborés par A :

— que ces agissement lui ont causé divers préjudices :

* préjudice résultant de l’appropriation de son savoir faire : 373.997 euros correspondant à ses investissements de recherche et de développement,

* préjudice résultant du manque à gagner en raison de l’exploitation de son savoir faire :500.000 euros correspondant à la perte de marge brute (50% du CA) sur 4 ans dès lors qu’elle pouvait espérer réaliser un CA annuel de 250.000 euros avec STIC,

* préjudice subi du fait du non respect par C et Z du jugement rendu par le tribunal de commerce de X : 50.000 euros,

* préjudice moral : 20.000 euros.

MOTIFS

Attendu que, dans la deuxième moitié de l’année 2010, la société A a eu son attention attirée par plusieurs de ses fournisseurs ;

Que dans un courrier du 20 septembre 2010, la société MITSUBISHI ELECTRIC l’informait de ce qu’elle avait été contactée par la société Z pour une demande urgente d’achat de lasers analogiques, cette demande l’ayant interpellée dans le sens où son interlocuteur lui demandait de lui faire une offre de prix urgente pour des lasers dont la référence commerciale « FU-650SDF-FL49M55 » était la même que celle utilisée par A, alors que pour chacun des autres clients il y avait toujours eu consultation, conseil et validation technique du produit avant la vente, ce qui n’était pas le cas pour Z qui demandait directement cette référence particulière ;

Que l’attestation ultérieurement délivrée par le représentant de cette même société MITSUBISHI ELECTRIC confirme les termes de ce courrier en soulignant particulièrement tant le caractère inhabituel de la démarche de Z, qui ne se constate que chez les sous traitants, que le caractère complet et précis de la référence demandée, qui ne figure même pas sur le boitier du produit et qui était donc, selon l’attestant, assurément préconisée par un utilisateur averti ;

Que dans un courrier du 5 novembre 2010 la société D informait la société A qu’elle s’était interrogée à la suite de la réception de plans que lui avaient adressés la société C, car ils étaient identiques à ceux qu’elle avait l’habitude de recevoir de la société A, le cartouche et les termes employés dans ce cartouche étant les mêmes que ceux employés par A, les côtes et la précision dans le dessin des connecteurs étant semblables, toutes choses lui ayant fait d’abord fait croire qu’elle venait de recevoir une consultation d’un sous-traitant d’A ;

Que, dans un courrier du 17 novembre 2010, la société INFRACTIVE écrivait à la société A :" … nous vous confirmons que nous avons bien vendu 25 exemplaires de diodes PIN de détection pour transmissions analogiques radiofréquences sur fibres optiques ref RPD 3000-SA-BM-H-B à la société Z, en date du 18 août 2010.

Il est vrai que la demande de cette nouvelle société nous avait quelque peu surpris à l’époque d’autant que nous n’avions pas été sollicités pour une demande d’échantillon de qualification, comme il est d’usage dans la profession. En effet, il s’agit d’une référence très spécifique que nous sommes les seuls à vendre en France et dont vous étiez en fait jusqu’alors le seul utilisateur parmi nos clients. Nous en avions déduit que Z devait être un de vos sous-traitants.

Si … Z n’est pas votre sous-traitant, leur processus de sélection de ce composant paraît pour le moins suspect." ;

Attendu que la société A a fait analyser et comparer des circuits réalisés par C ;

Que M. H I J, chef du département réseaux et télécommunication à l’Institut Universitaire de Technologie de Y, a procédé à une étude de similitude entre deux cartes circuits imprimés, l’une réalisée par A, l’autre par C, aux termes de laquelle il indique que, malgré un redesign certain du circuit imprimé, l’implémentation des composants est trop similaire pour ne pas avoir été réalisée en utilisant les travaux antérieurs des cartes conçues par A, étant quasiment impossible de concevoir un produit présentant autant de similitudes sur la partie RF (composants avec des empreintes et des orientations similaires), formes et plans de masse pour la protection des rayonnements parasites, implantation des étages de conversion RF ;

Que la Société d’Etudes et de Service appliqué à la Mécanique et à l’Electronique (SESAME), qui a également procédé à une étude comparative relève , concernant le circuit 1, que la carte de circuit imprimé 1000 10 10 01 SMA de C destinée à équiper un système de transmission par fibre optique pour trois programmes RF est identique au produit développé et fabriqué par A, le dessin de cette carte présentant de très nombreuses similitudes avec celui de la carte A, tant sur le schéma des fonctions réalisées que sur leur implantation routage et leur raccordement dans le coffret, et, concernant le circuit 2, qu’on retrouve à l’identique toutes les orientations techniques imaginées et mises au point par A, tant sur la technologie de retard numérique, que sur les composants utilisés et sur le circuit imprimé ;

Qu’il ressort encore de la comparaison des productions que la société C utilise des visuels de la société A sur son site internet (produits de déport optique) et sur son catalogue (produits « Stand alone housing » et « 7TE rackmount housing ») ;

Attendu qu’il ressort des productions, notamment du rapport établi par la société SESAME que depuis 1999 , A développe des produits de déport par fibre 107.7 pour STIC, qu’en 2001, elle a développé un système de retard programmable de signaux RF basé sur une technologie originale de double transposition en fréquence et numérisation des signaux pour les retarder numériquement, en 2003 des coffrets émetteurs optiques et récepteurs optiques avec retardateur complet, en 2005 des coffrets émetteurs et récepteurs optiques avec retardateur pour transmission sur une seule fibre pour 2 programmes FM avec multiplexage, après 2006 plusieurs redesign ;

Que SESAME indique encore que la conception de circuits imprimés nécessite au préalable de tracer les schémas électriques avec le choix des composants et de leur valeur, il faut ensuite introduire chaque composant avec son empreinte dans la base de données du logiciel, la base de données se construit au fur et à mesure de l’introduction de nouveaux composants, les bases de données de composants standards peuvent être achetées avec les logiciels de conception électronique mais chaque entreprise construit sa base de données de composants spécifiques, cette base de données construite au fil du temps, qui représente de nombreuses heures de travail, est propriété de l’entreprise ;

Qu’il en ressort que la société A avait, depuis 1999, concernant la fréquence 107.7, personnellement développé un savoir faire spécifique, une conception originale, des assemblages de composants particuliers, une reproduction à l’identique ne pouvant en aucun cas être fortuite ;

Attendu qu’il est donc établi que les sociétés Z et C se sont approprié des travaux de conception, des produits et des plans élaborés par A dans le domaine des déports optiques, étant au demeurant observé qu’il est impossible que les sociétés naissantes Z, créée en janvier 2010 et C, constituée en mai 2010, aient pu en aussi peu de temps et même quasi instantanément en ce qui concerne C, développer par elles-mêmes une telle technologie ;

Attendu que ces actes sont intervenus peu de temps après le premier juillet 2010, date de l’embauche de M. B par la société C ;

Qu’il ressort des productions (étude de poste 2006, fiche d’entête classeur « SAM » GAMME STIC, fiche « defriefing à froid » 2008) que M. B, ingénieur, a été, lorsqu’il était au service de la société A, chargé de projet puis chef de projet au sujet du développement des produits conçus pour la société STIC (déport optique FM 107.7) ;

Qu’il est donc établi que M. B a été le vecteur de la captation de technologie intervenue au préjudice de la société A ;

Attendu qu’il y a lieu de rappeler la chronologie suivante :

— en janvier 2010, création de la société Z dont le dirigeant et associé n’est autre que M. E, dirigeant de la société STIC, principale cliente d’A pour la fréquence 107.7,

— en avril 2010, démission de M . B de la société A,

— en mai 2010, création de la société C dont 99% du capital est détenu par la société Z,

— en juillet 2010, M. B commence à travailler pour la société C,

— à partir d’août 2010, la société C, qui, via M. B a capté la technologie d’A, est en mesure de disposer de produits similaires à ceux que la société STIC se procurait auprès de la société A,

— la société STIC, dont le dirigeant est aussi celui de la société Z, a donc désormais tout loisir d’abandonner A pour se fournir auprès de la société C, fille de Z, ce qu’elle fait effectivement, le chiffre d’affaire réalisé par A avec STIC à la clôture de l’exercice 2010 tombant brutalement à 2.285,41 euros seulement, alors qu’en 2009 il avait été de 323.101,82 euros ;

Attendu qu’il est ainsi démontré qu’il s’agissait d’une action concertée et délibérée destinée, via une captation de technologie par le truchement de l’embauche de M. B, qui serait qualifié de directeur technique et percevrait un salaire plus élevé (+ 400 euros brut) tout en travaillant à côté de son domicile, à détourner le client STIC au préjudice de la société A et au profit de la société C et de sa mère Z, étant précisé, compte tenu de sa proximité avec les appelantes, qu’il ne peut être tenu compte des explications tardivement avancées dans le courrier rédigé le 12 avril 2012 par M. E, dirigeant de la société STIC, qui a été le dirigeant de la société Z jusqu’en août 2011 et l’un de ses associés fondateurs ;

Attendu que c’est donc à juste titre que les premiers juges ont dit que les sociétés C et Z s’étaient livrées à des actes de concurrence déloyale ou de parasitisme au préjudice de la société A et qu’ils ont ordonné à ces sociétés de cesser tous lesdits actes s’agissant de la technologie 107.7 ;

Qu’il y a toutefois lieu, pour la rendre plus efficace, d’assortir cette interdiction d’une astreinte de 1.000 euros par jour supplémentaire de retard à s’exécuter passé le délai d’un mois de la signification du présent arrêt, sans qu’il soit nécessaire que la cour se réserve le droit de liquider ladite astreinte ;

Attendu que la société A réclame une somme de 500.000 euros en réparation du préjudice qu’elle prétend avoir subi du fait du manque à gagner résultant de l’exploitation de son savoir faire ;

Qu’il ressort des productions que la société A réalisait depuis 2003 avec la société STIC un chiffre d’affaire annuel moyen 294.343 euros, alors qu’ il n’a plus été que de 2.285 euros en 2010 et de 2.561 euros en 2011 ;

Que les actes de concurrence déloyale ayant débuté à partir de juillet 2010, leur lien de causalité avec la perte de chiffre d’affaires est ainsi établi, étant observé qu’il ressort du rapport du groupe ICE auquel appartient la société STIC, que l’activité de cette dernière se concentre en fin d’année, le chiffre d’affaire de 108.550 euros réalisé en 2010 sur une période de 6 mois seulement par la société naissante C ne pouvant résulter que de la captation de la société STIC, de même que celui de 57.464 euros réalisé par la société Z ;

Que toutefois, la perte de chiffre d’affaire imputable à Z et C en 2010 et 2011 ne saurait excéder le total des chiffres d’affaires réalisés par ces deux sociétés au titre des mêmes exercices, soit la somme de 327.005 euros (CA KYOLYS 2010 : 57.464 euros, 2011: 0 euro, CA C 2010: 108.550 euros, 2011: 160.991 euros), le lien de causalité n’étant pas établi en ce qui concerne le surplus de la perte enregistrée par A qui peut avoir d’autres causes, notamment la crise économique et les modifications des données du marché ;

Que, sur cette base et par application du taux marge brut moyen de 50 % attesté par l’expert comptable commissaire aux comptes de la société A, le manque à gagner imputable aux société Z et C se chiffre à la somme de 327.005 x 50% = 163.502,50 euros arrondie à 163.502 euros ;

Que les appelantes ne produisent aucun élément susceptible de remettre en cause cette évaluation ;

Qu’il n’est en revanche pas établi que les relations entre A et la société STIC se seraient poursuivies au delà de 2011, l’indemnisation devant être ainsi limitée à 2010 et 2011 ;

Qu’il y a donc lieu de condamner in solidum les sociétés Z et C à payer la somme de 163.502 euros à la société A à titre de dommages et intérêts au titre du manque à gagner ;

Attendu que la société A réclame une somme de 373.997 euros en réparation du préjudice qu’elle prétend avoir subi du fait de l’appropriation de son savoir faire ;

Qu’elle indique que cette somme correspond aux investissements de recherche et de développement qu’elle a supportés pour la réalisation des produits de déport optique captés par les appelantes, ainsi qu’il ressort d’une attestation établie par son expert comptable ;

Que, toutefois, ainsi que l’ont relevé à juste titre les premiers juges, par des motifs que la cour adopte, les investissements dont s’agit ont été en grande partie amortis, la société A ayant réalisé avec la société STIC depuis 1999 un chiffre d’affaires relatif à l’activité 107.7 d’un montant de 2.317.243 euros, de sorte que c’est à raison qu’ils ont estimé ce préjudice à la somme de 20.000 euros ;

Attendu que la société A réclame une somme de 50.000 euros au titre du préjudice qu’elle prétend avoir subi du fait du non respect par les sociétés C et Z du jugement rendu par le tribunal de commerce de X, refus de paiement spontané et maintien de ses visuels sur le site internet de C ;

Mais attendu qu’aucun préjudice n’est établi au titre du retard à payer ou en relation avec le maintien des visuels ;

Que ce poste ne peut donc être retenu ;

Attendu que la société A réclame une somme de 20.000 euros en réparation du préjudice moral qu’elle prétend avoir subi ;

Que la réalité et le quantum de ce préjudice n’étant pas démontrés, il ne peut être fait droit à cette demande ;

Attendu que, compte tenu des circonstances de la cause, la publication de la décision ne s’impose pas ;

Attendu que les sociétés appelantes succombant au principal, elles doivent être déboutées de leurs demandes reconventionnelles ;

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirmant,

Condamne in solidum la société Z et la société C à payer à la société A la somme de 163.502 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du manque à gagner,

Ajoutant,

Dit que l’interdiction faite par le tribunal aux sociétés Z et C de cesser tout acte de concurrence déloyale ou de parasitisme à l’encontre de la société A s’agissant de la technologie 107.7 est assortie d’une astreinte de 1.000 euros par jour supplémentaire de retard à s’exécuter passé le délai d’un mois à compter de la signification du présent arrêt,

Confirme, pour le surplus, le jugement entrepris en ses autres dispositions,

Condamne in solidum la société Z et la société C à verser à la société A la somme de 3.000 euros en dédommagement de ses frais irrépétibles d’appel,

Rejette toute autre demande,

Condamne in solidum la société Z et la société C aux dépens d’appel, dont distraction au profit de M° Clarisse DORMEVAL.

Ainsi prononcé publiquement le 17 décembre 2013 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, et signé par Claude BILLY, Président et Sylvie LAVAL, Greffier.

Le Greffier, Le Président,

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