Cour d'appel de Chambéry, Chbre sociale prud'hommes, 23 novembre 2017, n° 17/00366

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Chambéry, chbre soc. prud'hommes, 23 nov. 2017, n° 17/00366
Juridiction : Cour d'appel de Chambéry
Numéro(s) : 17/00366
Décision précédente : Conseil de prud'hommes d'Annecy, 12 janvier 2017, N° 15/224
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE CHAMBÉRY

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 23 NOVEMBRE 2017

RG : 17/00366 ADR / NC

S.A.S. BUBENDORFF agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié es qualité audit siège

C/ Z X

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation de départage d’ANNECY en date du 13 Janvier 2017, RG 15/224

APPELANTE :

S.A.S. BUBENDORFF

[…]

[…]

[…]

représentée par la SCP BOLLONJEON ARNAUD BOLLONJEON, avocat au barreau de CHAMBERY, postulant

et par la SCP LEXOCIA, avocats au barreau de Mulhouse, plaidant

INTIME :

Monsieur Z X

[…]

[…]

représenté par Me Paul DARVES BORNOZ, avocat au barreau d’ANNECY

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 17 Octobre 2017 en audience publique devant la Cour composée de :

Madame Claudine FOURCADE, Président

Madame Anne DE REGO, Conseiller, qui s’est chargée du rapport

Madame Françoise SIMOND, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Madame A B,

********

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La SA BURDENDORFF a pour activité la fabrication et la commercialisations de volets roulants.

Monsieur Z X a été embauché par la SA BURDENDORFF dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée le 14 février 2011 en qualité de technicien qualité, niveau 4, échelon 1, coefficient 255, statut ETAM, moyennant en dernier état de la relation de travail un salaire moyen brut mensuel de 2 064,42 euros.

Les relations contractuelles entre les parties sont soumises à la convention collective de la métallurgie du Haut-Rhin.

Monsieur Z X a été convoqué par lettre recommandée avec accusé réception du 16 janvier 2015, portant mise à pied conservatoire, à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour le 26 janvier 2015.

Par lettre recommandée avec accusé réception du 29 janvier 2015, la SA BURDENDORFF lui a notifié son licenciement pour faute grave.

Monsieur Z X a saisi le conseil de prud’hommes d’Annecy le 16 juin 2015 pour contester son licenciement.

Après une tentative de conciliation infructueuse qui s’est tenue le 7 septembre 2015, l’affaire a été renvoyée devant le bureau de jugement qui s’est mis en partage de voix selon jugement du 9 mai 2016.

Par jugement en date du 13 janvier 2017, le conseil de prud’hommes d’Annecy statuant en formation de départage, a :

— dit que le licenciement de Monsieur Z X n’est pas fondé sur une faute grave,

— dit que la mise à pied conservatoire prononcée est injustifiée,

— dit que le licenciement de Monsieur Z X est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

— condamné en conséquence la SA BURDENDORFF à verser à Monsieur Z X les sommes suivantes :

* 955,78 euros au titre du remboursement de la mise à pied conservatoire, outre 95,58 euros au titre des congés payés afférents,

* 1 651,54 euros au titre de l’indemnité légale de licenciement,

* 4 128,84 euros à titre d’indemnité de préavis outre 412,88 euros pour congés payés afférents,

* 12'386,52 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 1 200 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné la SA BURDENDORFF aux entiers dépens.

La décision a été notifiée aux parties par lettres recommandées avec demande d’accusé de réception envoyée le 17 janvier 2017.

La SA BURDENDORFF a interjeté appel de la décision par RPVA le 10 février 2017.

La SA BURDENDORFF, par conclusions du 10 mai 2017 demande à la cour de :

— infirmer la décision entreprise,

Et statuant à nouveau,

— débouter le salarié de l’intégralité de ses demandes,

À titre subsidiaire,

— fixer à 150 € le montant éventuellement dû à Pôle Emploi sur le fondement de l’article L.1235-4 du code du travail,

Et en tout état de cause,

— condamner Monsieur X à lui verser la somme de 2 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Elle soutient que Monsieur X a créé une activité d’électricien en auto- entreprise postérieurement à la signature de son contrat de travail en ne l’informant qu’ultérieurement de ce fait (par courrier du 12 mars 2014) ; que malgré de nombreux rappels concernant son obligation de loyauté à l’égard de l’employeur, le salarié a utilisé son activité au sein de l’entreprise pendant son temps de travail pour démarcher la clientèle en proposant au client de la société la réalisation de travaux d’électricité injustifiés ; qu’il utilisait de plus le véhicule de la société malgré l’interdiction faite par l’employeur par courrier du 16 décembre 2014 ;

Monsieur X par conclusions du 3 juillet 2017 demande à la cour de :

— confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

— condamner en conséquence la SA BURDENDORFF à lui verser la somme de 2 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Il fait valoir que :

— depuis la création de son activité le 21 mars 2011, il n’a eu qu’une activité mineure en sa qualité d’auto-entrepreneur (pièce 4) ; son employeur qui connaissait son activité annexe a accepté celle-ci ;

— les interventions effectuées pour la SA BURDENDORFF consistaient à vérifier la nature des défectuosités rencontrées dans les installations mises en place chez les clients, et de se positionner sur la prise en charge au titre de la garantie dès lors que les installations avaient été réalisées conformément aux préconisations de son employeur ; celui-ci rejette toute garantie si la pause n’a pas été réalisée conformément aux règles de l’art, aux dispositions normatives et/ou à ses prescriptions ; chez le client Y, l’installation mise en place a été réalisée par le sous-traitant ADF-STORES ; la réalisation n’était pas conforme aux règles de l’art, et ne permettait pas un fonctionnement harmonieux de la centralisation des commandes des volets roulants ; le client ne pouvait fermer ses volets simultanément ; le commercial de la SA BURDENDORFF préconisait la mise en place de 'moteurs RG2 courant porteur’ alors que le 21 octobre 2014 il a constaté que le tableau électrique du client était non conforme et obsolète ce qui rendait la programmation centrale impossible puisque 'les alimentations étaient séparées et que le courant porteur ne parvenait pas à passer’ ; en conséquence le problème n’était pas imputable à la garantie du matériel ; les volets roulants avaient été installés et branchés indépendamment les uns des autres sur des circuits électriques différents (et notamment certains sur la VMC), alors que la commande groupée nécessite qu’ils soient branchés sur le même circuit électrique ; il a donc procédé à l’établissement d’un devis qui concerne la réfection et la mise aux normes du tableau électrique du client qui n’a jamais donné suite ;

— l’employeur ne rapporte pas la preuve de ce qu’il exerçait son activité à titre personnel pendant la durée de son travail ; le devis ayant été effectué en dehors de son temps de travail ;

L’ordonnance de clôture a été rendue le 5 septembre 2017.

SUR QUOI,

1) Sur le licenciement :

Attendu que la faute grave qui justifie la cessation immédiate du contrat de travail sans préavis, est définie comme la faute qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise pendant la durée du préavis ;

Que l’employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve ;

Attendu qu’il convient de rappeler que la lettre de licenciement fixe les limites du litige ;

Attendu qu’en l’espèce Monsieur X a été licencié pour faute grave par lettre recommandée avec accusé de réception du 29 janvier 2015 dans laquelle l’employeur formule les quatre reproches suivants :

— diverses attitudes fautives concernant le soin et la propreté de ses interventions,

— avoir procédé le 21 octobre 2014 à la réalisation d’un devis concernant le système électrique du client alors qu’il n’était pas nécessaire de modifier le tableau électrique, ce qui n’est pas dans les attributions de la société mais qu’il aurait dû procéder au remplacement des moteurs sans intervention sur le système électrique puisqu’ 'il s’avère que vous avez conclu à la nécessité de modifier le tableau électrique or une telle prestation n’est pas dans les attributions de notre société.

Le client disposait de moteurs RG2 qui utilisent le courant porteur pour communiquer entre les volets lorsque l’on utilise la commande groupée. Nous préconisons pour garantir le bon fonctionnement de celle-ci, de brancher tous les volets sur le même différentiel. Ce qui n’était manifestement pas le cas puisque vous avez préconisé de changer le tableau électrique.

La solution était donc de remplacer les moteurs par des types R qui permettent de ne pas dépendre de l’installation électrique pour les communications entre volets, en utilisant un protocole radio.

Cette solution était commercialement la meilleure pour notre société et la moins onéreuse pour le client.',

— cette proposition n’était pas désintéressée pour lui puisqu’il a réalisé le jour même le devis des travaux électriques en sa qualité d’électricien auto entrepreneur ; cette attitude est déloyale et constitue une faute grave dans l’exécution de son contrat de travail et constitue une tentative de détournement de clientèle,

— il a utilisé son activité de technicien pour démarcher une clientèle pendant son temps de travail avec les moyens de travail mis à disposition par son employeur et contrairement à la vie de ce dernier notamment au regard du courrier dont il a été destinataire le 13 février 2014 et qu’il n’a pas respecté, ce qui constitue une insubordination,

Sur le premier reproche, l’employeur communique le mail de la société ADF datée du 15 janvier 2015 selon lequel ADF (aucun nom ni signature) se plaint de la qualité des interventions effectuées par Monsieur X auquel il est reproché de ne pas être consciencieux à propos de quatre interventions effectuées pour deux d’entre elles le 21 octobre 2014, ainsi que les 24 octobre 2014 et 12 janvier 2015 ;

qu’il est dans ce cadre, reproché au salarié un manque de soin dans l’exécution de ses interventions ainsi que l’absence de nettoyage avant de repartir ;

Qu’il convient de constater que ces affirmations ne sont corroborées par aucun autre élément ne serait-ce que par la copie de plaintes de clients insatisfaits ;

qu’il ne peut donc qu’être constaté que ce grief n’est pas établi ;

Attendu que les trois autres griefs formulés par l’employeur dans la lettre de licenciement consistent à reprocher au salarié d’avoir procédé à un diagnostic erroné chez ce client lorsqu’il a considéré que le problème rencontré était électrique et nécessitait la modification du tableau électrique, alors que la réparation aurait pu être faite par le remplacement des moteurs RG2 des stores par des moteurs de type R qui permettent de ne pas dépendre de l’installation électrique pour les communications entre volets, en utilisant un protocole radio, alors que cette solution était commercialement la meilleure pour la société BUBENDORFF et la moins onéreuse pour le client ;

que l’employeur lui reproche encore à ce titre d’avoir établi un devis de travaux électriques de façon intéressée puisqu’il est lui-même électricien et qualifie cet acte d’attitude particulièrement déloyale qui constitue une faute grave avec tentative de détournement de clientèle et utilisation de son activité de technicien BUBENDORFF pour démarcher et détourner la clientèle en utilisant le matériel et le véhicule appartenant à la société ;

Attendu que l’employeur communique sur ce point un courrier du 16 décembre 2014 qu’elle a adressé au salarié par lequel elle lui rappelle que l’exercice d’un cumul d’activité n’est autorisé qu’aux conditions de respecter son obligation de loyauté et des règles relatives à la durée maximale du travail, et qu’elle produit encore le mail ADF du 15 janvier 2015 ;

Attendu que la première pièce est insuffisante pour démontrer que l’activité secondaire d’auto entrepreneur électricien de Monsieur X posait difficulté à son employeur au regard de plusieurs courriers produits notamment par ce dernier, qui permettent de constater que Monsieur X lui avait bien indiqué qu’il était auto entrepreneur électricien, et qu’il a précisé à ce titre notamment par un courrier daté du 12 mars 2014 qu’il exerçait cette activité à temps très partiel les samedis matin en complément de son travail avec son propre véhicule et à hauteur de 37 heures de travail total pour l’année 2013 (pièce 2 de l’employeur) ;

Que l’employeur communique encore :

— un courrier du 16 décembre 2014 adressé à Monsieur X selon lequel il lui rappelle que l’exercice d’un cumul d’activité n’est autorisé qu’aux conditions de respecter son obligation de loyauté et de ne pas exercer d’activité concurrente ainsi que les règles relatives à la durée du travail ;

— un courrier du salarié du 12 janvier 2015 dans lequel Monsieur X lui transmet les justificatifs de ce qu’il n’a exercé aucune activité en qualité d’auto entrepreneur pour l’année 2014 (pièce 4 de l’employeur) ;

Attendu que la SAS BUBENDORFF, contrairement à ses allégations ne communique donc aucun courrier ni aucune pièce permettant de vérifier qu’elle a bien rappelé à plusieurs reprises au salarié son obligation de loyauté alors que celui-ci démarchait les clients pendant son temps de travail et leur proposait des travaux électriques injustifié ;

qu’elle ne justifie donc d’aucun incident relatif au non respect par le salarié de son obligation de loyauté ;

Attendu que sur les faits reprochés par l’employeur à propos du client Y, il résulte des pièces versées aux débats et de la lecture des notes de l’audience qui s’est tenue le 21 octobre 2016, que le salarié a constaté sur place chez Monsieur Y que les volets roulants avaient été installés et branchés indépendamment les uns des autres sur des circuits électriques différents (et notamment sur la VMC), alors que la commande groupée nécessite qu’ils soient branchés sur le même circuit électrique, il a indiqué sur sa fiche d’intervention, 'la programmation centrale est impossible, les alimentations sont séparées, le courant porteur ne parvient pas à passer’ et a préconisé la solution qui consiste à organiser une alimentation électrique indépendante pour les volets roulants, ce qui est conforme à la proposition de la SAS BUBENDORFF qui dans sa lettre de licenciement propose de brancher tous les volets roulants sur un même différentiel ;

Attendu par ailleurs que rien ne permet de retenir que Monsieur X a fait sur place et pendant ses heures de travail le devis de réparation pour le client ainsi que l’affirme l’employeur sans le démontrer, le salarié affirmant avoir rédigé le devis le soir même et l’avoir envoyé au client ;

Qu’ainsi l’employeur ne démontre pas que Monsieur X ait agi de façon déloyale ou encore qu’il ait commis un acte d’insubordination à son égard ; ni que le salarié ait commis un acte de concurrence déloyale son encontre ;

Que l’existence de l’inexécution fautive qu’il reproche à Monsieur X n’est donc pas démontrée ;

Qu’ainsi l’employeur ne démontrant l’existence d’aucune faute, le licenciement prononcé n’est fondé sur aucune cause réelle et sérieuse ;

Qu’en conséquence le salarié peut prétendre aux salaires non perçus du fait de sa mise à pied conservatoire et congés payés afférents, à l’indemnité de préavis, à l’indemnité légale de licenciement et congés payés afférents ainsi qu’à des dommages et intérêts ;

Attendu que le salarié qui justifie d’une ancienneté de quatre ans n’a jamais fait l’objet d’aucune sanction ;

qu’il percevait un salaire moyen brut d’un montant de 2 064,42 euros ;

Que c’est donc à juste titre que le conseil de prud’hommes a condamné la SAS BUBENDORFF à lui verser les sommes suivantes :

—  955,78 euros bruts au titre de la mise à pied conservatoire outre 95,58 euros bruts pour congés payés afférents,

—  1 651,54 euros nets au titre de l’indemnité légale de licenciement,

—  4 128,84 euros bruts au titre de l’indemnité de préavis outre 412,88 euros bruts pour congés payés afférents,

—  12'386,52 euros nets à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

2) Sur les demandes accessoires :

Attendu que la SAS BUBENDORFF qui succombe sera condamnée à verser à Monsieur X une somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’ aux entiers dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Et y ajoutant :

Condamne la SAS BUBENDORFF qui succombe à verser à Monsieur X une somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en cause d’appel,

Condamne la SAS BUBENDORFF aux entiers dépens d’appel.

Ainsi prononcé le 23 Novembre 2017 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Claudine FOURCADE, Présidente, et Madame A B, Greffier.

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