Cour d'appel de Colmar, Premiere chambre civile - section a, 7 juin 2011, n° 10/02410

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Colmar, premiere ch. civ. - sect. a, 7 juin 2011, n° 10/02410
Juridiction : Cour d'appel de Colmar
Numéro(s) : 10/02410
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Strasbourg, 19 avril 2010

Texte intégral

PA/KG

MINUTE N°

Copie exécutoire à

— Me Joëlle LITOU-WOLFF

— Me Anne CROVISIER

Le 7 juin 2011

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE COLMAR

PREMIERE CHAMBRE CIVILE – SECTION A

ARRET DU 07 Juin 2011

Numéro d’inscription au répertoire général : 1 A 10/02410

Décision déférée à la Cour : 20 Avril 2010 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE STRASBOURG

APPELANTE :

XXX, représentée par ses gérants en exercice Maître Cathia SCHAEFFER-MOESSNER et Maître Damien MOESSNER

XXX

XXX

Représentée par Me Joëlle LITOU-WOLFF, avocat à la Cour

Plaidant : Me BRETEL, avocat à STRASBOURG

INTIMEE :

SA CAFES Z

XXX

XXX

Représentée par Me Anne CROVISIER, avocat à la Cour

Plaidant : Me Sarah ZIMMERMANN, avocat à STRASBOURG

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 03 Mai 2011, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. HOFFBECK, Président de Chambre, entendu en son rapport

M. CUENOT, Conseiller

M. ALLARD, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme MUNCH-SCHEBACHER,

ARRET :

— Contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

— signé par M. Michel HOFFBECK, président et Mme Christiane MUNCH-SCHEBACHER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Selon acte sous seing privé en date du 1er mars 1982, la SCI MESANGE 8 a donné en location à la société Y Z un magasin destiné à la 'vente au détail de cafés, thés, confiseries, biscuiteries’ située à XXX, pour une durée de neuf ans à compter du 1er janvier 1982. Ce bail a été suivi de plusieurs avenants signés les 21 décembre 1984, 14 décembre 1987, 18 décembre 1990, 24 juin 1996 et 4 décembre 2001.

Par acte notarié en date du 4 mai 2005, la SCI MESANGE 8 a cédé le local à la XXX.

Selon exploit de Me Brugger, huissier de justice à Strasbourg, en date du 5 août 2008, la société MESANGE DU TRIANGLE a fait délivrer à sa locataire un commandement d’avoir à se conformer au bail, en lui reprochant une modification de la destination des lieux.

Selon assignation du 16 mars 2009, la XXX a attrait la société Y Z devant le tribunal de grande instance de Strasbourg pour faire constater l’acquisition de la clause résolutoire et subsidiairement faire prononcer la résiliation du bail.

La société Y Z s’est opposée à cette demande en soutenant que la demanderesse avait accepté l’exercice des activités litigieuses.

Par jugement du 20 avril 2010, le tribunal de grande instance de Strasbourg a :

— déclaré nul et de nul effet le commandement du 5 août 2008,

— débouté la XXX de sa demande en résiliation du bail,

— débouté la société Y Z de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts,

— débouté les parties de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné la XXX aux dépens.

Le premier juge a principalement retenu :

— que la bailleresse, qui avait parfaite connaissance au moins depuis 1995 de l’activité litigieuse de débit de boissons, avait accepté le renouvellement du bail à deux reprises, les 24 juin 1996 et 4 décembre 2001, sans faire état d’une exploitation non contractuelle ;

— que l’inobservation de la clause de destination ayant été amplement acceptée et confirmée par la bailleresse, le commandement délivré le 5 août 2008 était nul ;

— que l’infraction à la clause de destination tenant à la vente de machines à café et d’accessoires, dont se plaignait également la XXX, n’avait pas été visée dans le commandement du 5 août 2008 ;

— qu’il n’était pas démontré que cette infraction était d’une gravité suffisante pour entraîner la résiliation du bail.

Par déclaration reçue le 28 avril 2010, la XXX a interjeté appel de cette décision. la société Y Z a formé un appel incident.

Aux termes de ses conclusions déposées le 15 décembre 2010, la XXX demande à la cour de :

sur appel principal,

— infirmer le jugement entrepris ;

— constater la résiliation de plein droit du bail commercial ;

— subsidiairement, ordonner la résiliation de ce bail pour inexécution et violation de la clause de destination ;

— ordonner l’expulsion de la société Y Z et de tous occupants de son chef dans un délai de 10 jours à compter de la signification de l’arrêt, sous astreinte de 500 € par jour de retard ;

sur appel incident,

— débouter la société Y Z de ses fins et conclusions ;

en tout état de cause,

— condamner la société Y Z à lui payer une somme de 5.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamner la société Y Z aux dépens qui comprendront le coût du constat.

Au soutien de son appel, elle fait valoir en substance :

— que la société Y Z exerce des activités de vente de boissons à consommer sur place et de vente d’électroménager qui ne sont pas autorisées par la clause de destination du bail ;

— que la locataire ne justifie pas avoir obtenu une autorisation écrite de modifier son activité ;

— que celle-ci ne peut pas même se prévaloir d’un accord tacite ou implicite ;

— que la société Y Z n’ayant pas mis fin à son activité de débit de boissons dans le délai imparti par le commandement, la clause résolutoire est acquise ;

— que subsidiairement, le nombre et la persistance des infractions justifient que soit prononcée la résiliation judiciaire du bail.

Selon conclusions récapitulatives remises le 11 janvier 2011, la société Y Z rétorque:

— que le commandement a été délivré de mauvaise foi dans la mesure où la bailleresse était parfaitement informée de l’exercice de l’activité de consommation sur place des produits vendus et avait donné son accord implicite à l’exercice de cette activité ;

— qu’elle n’a jamais exploité un débit de boissons mais proposé à sa cliente la consommation sur place des produits vendus ;

— qu’il est conforme aux usages actuels d’admettre que l’activité de consommation sur place est incluse dans l’activité de vente ;

— que la vente de machines à café, de vaisselle ou des accessoires n’est que l’accessoire de la vente au détail de cafés ou thés et est naturellement incluse dans la destination du bail ;

— que les manquements invoqués ne sont pas suffisamment graves pour justifier la résiliation du bail.

En conséquence, elle prie la cour de :

— confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a déclaré nul et de nul effet le commandement délivré le 5 août 2008 et a débouté la XXX de sa demande en résiliation du bail ;

— infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la concluante de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts et de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamner la XXX à lui payer une indemnité de 5.000 € pour procédure abusive ;

— condamner la XXX à lui payer 5.000 € pour les frais irrépétibles de première instance et 5.000 € pour les frais irrépétibles d’appel ;

— confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la XXX aux dépens de première instance ;

— condamner la XXX aux dépens d’appel.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 18 février 2011.

SUR CE, LA COUR,

Vu les pièces et les écrits des parties auxquels il est renvoyé pour l’exposé du détail de leur argumentation,

Attendu que la recevabilité de l’appel de la XXX en la forme n’est pas discutée ;

Attendu que selon la clause de destination insérée dans le bail du 1er mars 1982, les locaux doivent être consacrés par le preneur à l’exploitation d’une activité de 'vente au détail de cafés, thés, confiseries, biscuiteries’ ;

Attendu que la XXX reproche, dans son commandement du 5 août 2008, à la société Y Z d’avoir, en violation de la clause 'Destination’ du bail, et sans avoir obtenu son accord, … modifié la destination des lieux et … étendu son activité en affectant une partie des locaux loués à l’exploitation d’un débit de boisson avec installation d’un bar où sont servies au public des boissons diverses ainsi que des petits déjeuners et viennoiseries’ ;

Attendu, sans doute, que l’exercice d’une activité de vente de boissons fabriquées par le preneur et destinées à être consommées sur place n’est pas prévu par la clause susvisée ;

Mais attendu, ainsi que l’a relevé le premier juge, que la société Y Z justifie exercer cette activité de longue date, comme le démontrent les travaux d’aménagement facturés le 13 octobre 1982 (annexe n° 14) ; qu’il ressort du rapport daté du 17 janvier 1995, déposé par M. X, expert commis dans le cadre de la procédure de fixation du loyer du bail renouvelé, que la locataire a obtenu une licence de première catégorie dès le 1er décembre 1982 ; que cet expert a expressément relevé dans son rapport que la société Y Z exerçait, en sus de l’activité précisée dans le bail, 'une activité connexe : la dégustation de café (cafétéria)' ; que non seulement la bailleresse, qui était assistée d’un conseil, n’a alors émis aucune objection à cette adjonction, mais encore l’expertise judiciaire a débouché sur la conclusion d’un avenant daté du 24 juin 1996 fixant à 15.000 F par trimestre le loyer dû à compter du 1er novembre 1994 ; que par un nouveau avenant daté du 4 décembre 2001, les SCI MESANGE 8 et Y Z ont conclu un nouveau bail d’une durée de neuf années commençant à courir à compter du 1er janvier 2002, moyennant un loyer trimestriel de 18.000 F ;

Attendu que la poursuite des relations contractuelles ne peut pas être regardée comme une simple tolérance dans la mesure où l’expert judiciaire avait pris le soin de souligner que la locataire ne se conformait pas à la clause de destination ; qu’elle a traduit une acceptation implicite par la SCI MESANGE 8 de l’activité connexe litigieuse, sur laquelle l’appelante ne peut revenir ;

Attendu qu’il ressort du constat effectué le 3 mars 2009 par Me Brugger, huissier de justice à Strasbourg, et notamment de la carte ('Tarif dégustation') annexée à son procès-verbal que la société Y Z ne propose qu’un nombre restreint de boissons à base de café, de thé ou de chocolat, c’est à dire de produits visés par la clause de destination ;

Attendu, dans ces conditions, que c’est à bon droit que le premier juge a dénié tout effet au commandement du 5 août 2008 puisque l’infraction visée dans cet acte n’est pas constituée ;

Attendu que la commercialisation de chocolats et de sirops n’appelle aucune critique dès lors que ces produits constituent des confiseries ;

Attendu qu’en dénonçant une 'activité de vente d’électroménager', la XXX procède à une présentation tendancieuse de l’activité de vente de machines à café et autres accessoires (tasses, théières, etc.) liés à la consommation à domicile du café et du thé ; que selon les informations communiquées par l’intimée, cette activité litigieuse lui a procuré moins de 6 % de son chiffre d’affaires en 2009 ;

Attendu que l’évolution des habitudes des consommateurs, qui utilisent notamment de plus en plus des 'dosettes’ de café mises en oeuvre dans des machines spécifiques, et l’évolution parallèle des pratiques commerciales commandent de retenir que la vente de cafetières et de théières destinées à un usage domestique et d’accessoires liés à la consommation du café et du thé se rattachent naturellement à l’activité contractuellement spécifiée ; qu’en l’absence de toute infraction, la SCI MESANGE DU TRIANGLE doit être déboutée de sa demande de résiliation du bail ;

Attendu que la XXX qui succombe supportera les dépens ; que si l’appel s’est avéré mal fondé, il n’en résulte pas pour autant que la procédure de la XXX était abusive : que la demande de dommages-intérêts présentée par l’intimée sera rejetée ; qu’il n’est pas inéquitable de laisser à l’intimée la charge de ses frais irrépétibles ;

PAR CES MOTIFS :

Confirme le jugement entrepris ;

Déboute la société Y Z de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Déboute la société Y Z de sa demande présentée en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la XXX aux dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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