Cour d'appel de Colmar, Chambre 1 a, 24 mai 2019, n° 15/03795

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Colmar, ch. 1 a, 24 mai 2019, n° 15/03795
Juridiction : Cour d'appel de Colmar
Numéro(s) : 15/03795
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Colmar, 28 juin 2015
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

CP/SD

MINUTE N°

Copie exécutoire à

—  Me Dominique D’AMBRA

— la SCP CAHN G./CAHN T./BORGHI

Le 24.05.2019

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE COLMAR

PREMIERE CHAMBRE CIVILE – SECTION A

ARRET DU 24 Mai 2019

Numéro d’inscription au répertoire général : 1 A N° RG 15/03795 – N° Portalis DBVW-V-B67-F3QO

Décision déférée à la Cour : 29 Juin 2015 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE COLMAR

APPELANTS :

Monsieur Y X

[…]

[…]

[…]

prise en la personne de son représentant légal

[…]

[…]

Représentés par Me Dominique D’AMBRA, avocat à la Cour

INTIMEE :

SA CAISSE D’EPARGNE GRAND EST EUROPE venant aux droits de la CAISSE D’EPARGNE ET DE PREVOYANCE D’ALSACE

prise en la personne de son représentant légal

[…]

[…]

Représentée par Me Thierry CAHN de la SCP CAHN G./CAHN T./BORGHI, avocat à la Cour

Avocat plaidant : Me MORANDI, avocate à PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 25 Février 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme PANETTA, Présidente de chambre, entendue en son rapport

M. ROUBLOT, Conseiller

M. OURIACHI, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme Z-A

ARRET :

— Contradictoire

— rendu par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

— signé par Mme Corinne PANETTA, présidente et Mme Christiane MUNCH-SCHEBACHER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS PROCEDURE PRETENTIONS DES PARTIES :

Monsieur Y X était titulaire de comptes bancaires notamment d’un compte courant et de compte titres ouverts auprès de la caisse d’épargne et de prévoyance d’Alsace.

À compter du 23 novembre 2000, Monsieur Y X a procédé à des achats de titres boursiers principalement sur le marché à règlement mensuel, notamment au moyen d’un prêt consenti par la caisse d’épargne et de prévoyance d’Alsace à hauteur d’un million de francs.

Durant plusieurs mois, la liquidation des valeurs qu’il détenait s’avérant déficitaire, il était opéré un report moyennant perception de commissions et de frais par l’établissement bancaire jusqu’au mois d’avril 2001, date à laquelle la caisse d’épargne a exigé la régularisation de la situation.

Pour atteindre cet objectif, Monsieur Y X a souscrit le 26 avril 2001, un crédit-relais d’un montant de 22 millions de francs sur 24 mois, aux termes duquel il s’engageait à rembourser la somme empruntée au plus tard le 30 avril 2003.

Pour exécuter cet engagement, Monsieur Y X a cédé à la […] , dont qu’il possédait 98 % des parts sociales, un immeuble situé […] à Colmar, versant l’intégralité du prix de vente soit 2 287 000 € à la caisse d’épargne et de prévoyance d’Alsace.

Pour financer l’acquisition de l’immeuble, la […] a souscrit auprès de la caisse d’épargne de prévoyance d’Alsace à nouveau prêt le 11 février 2003 du montant exact du prix de vente.

Par déclaration introductive d’instance du 20 février 2013, Monsieur Y X et la […] ont saisit le tribunal de Grande instance de Colmar afin d’obtenir que soit prononcée la nullité du contrat de crédit-relais en date du 26 avril 2000, ainsi que la nullité de la vente du 11 février 2003 et du prêt du 11 février 2003.

Par jugement rendu le 29 juin 2015, le tribunal de Grande instance de Colmar, première chambre civile, a débouté Monsieur Y X et la […] de l’intégralité de leurs demandes.

Monsieur Y X et la […] ont interjeté appel de cette décision par déclaration faite au greffe le 8 juillet 2015.

La caisse d’épargne de prévoyance d’Alsace s’est constituée intimée le 21 juillet 2015.

Par ordonnance du 21 février 2018, le magistrat chargé de la mise en état a déclaré irrecevable la demande de sursis à statuer présentée par les appelants.

Par des dernières conclusions du 23 octobre 2018, auxquelles était joint le bordereau de communication de pièces récapitulatif, qui n’a fait l’objet d’aucune contestation, Monsieur Y X et la […] ont demandé à la cour d’infirmer le jugement entrepris, de déclarer recevables leurs demandes en nullité pour vice du consentement et illicéité de la cause et en conséquence de prononcer la nullité du contrat de crédit relais du 26 avril 2001, ainsi que la nullité de la vente et du prêt souscrit par la […] le 11 février 2003 avec les conséquences de droit.

Monsieur Y X et la […] sollicitent en outre une somme de 6000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Monsieur Y X et la […] soutiennent que Monsieur X s’est vu contraint de céder aux pressions de la caisse d’épargne qui lui intimait l’ordre de rembourser le découvert du compte titre lié aux opérations boursières déficitaires alors même que ce déficit procédait alors exclusivement des fautes de l’établissement de crédit, faute mise en évidence par le jugement du tribunal de Grande instance de Colmar du 26 novembre 2013, que le fait que le prêt d’un montant de 22 millions de francs ne lui a été consenti qu’en contrepartie de nombreuses hypothèques qu’il a dû constituer, établit la persistance des violences, en raison de la jurisprudence antérieure au 26 février 2008, il se trouvait dans l’impossibilité d’agir dès lors qu’en matière d’obligation de couverture la Cour de cassation estimait que le non-respect de cette obligation ne permettait que d’engager la responsabilité disciplinaire de l’organisme bancaire, que cette impossibilité d’agir a suspendu la prescription quinquennale qui a recommencé à courir à compter du 26 février 2008, que la demande sur le fondement du vice du consentement introduite le 20 février 2013, l’a été dans le délai quinquennal et est recevable.

Les parties appelantes font valoir qu’il ne peut leur être opposé le principe de la concentration des moyens relatifs à une demande qu’il convient de ne pas confondre avec une concentration des demandes, que la prétention qui vise à obtenir des dommages-intérêts en compensation de la violation d’une obligation contractuelle n’est pas d’une prétention qui vise à sanctionner la validité d’un contrat et en obtenir l’annulation fondée sur des principes conceptuels différents, et qu’en conséquence ses demandes sont recevables.

Les parties appelantes soutiennent que l’exploitation abusive d’une situation de dépendance aboutissant à l’annulation de la convention pour vice de violence est constituée dès lors qu’elle démontre l’existence d’un état de dépendance, que la partie forte a abusé de cet état de dépendance et que la résultante de l’exploitation de cette situation de dépendance par la contrainte conduit la partie forte a profité d’un avantage manifestement excessif.

Par des dernières conclusions du 30 novembre 2018, auxquelles était joint le bordereau de communication de pièces récapitulatif, qui n’a fait l’objet d’aucune contestation, la caisse d’épargne Grand Est Europe, venant aux droits de la SA Caisse d’Epargne et de Prévoyance d’Alsace venant aux droits de la caisse d’épargne de prévoyance d’Alsace a sollicité la confirmation du jugement entrepris, et la condamnation des parties appelantes à lui verser une somme de 10 000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et celle de 20 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

La caisse d’épargne Grand est Europe, venant aux droits de la SA Caisse d’Epargne et de Prévoyance d’Alsace soutient que le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu’il a constaté la prescription des demandes des parties appelantes fondées sur la violence dès lors qu’elles ne démontrent pas qu’elles se trouvaient dans une impossibilité d’agir, qu’elles ne rapportent pas la preuve de la date de cessation des actes de violence allégués, que l’utilisation de la décision du 26 février 2008 par les appelants ne relève que de l’artifice et ne permet pas de démontrer l’existence d’une supposée suspension de la prescription, que s’agissant du crédit relais, Monsieur X ne peut pas à la fois prétendre être indemnisé de son préjudice matérialisé par le montant du contrat du crédit relais et dans le même temps affirmé que ce contrat est nul.

Sur le fond, la partie intimée soutient que Monsieur X n’a subi aucune violence, qu’il n’a jamais été menacé, qu’il a approuvé le contrat de prêt-relais, que la cause de ce contrat est licite et que l’appel interjeté par Monsieur X et la […] est abusif.

La Cour se référera aux dernières écritures des parties pour un plus ample exposé des faits, et des prétentions des parties.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 12 décembre 2018.

L’affaire a été appelée et retenue à l’audience du 25 février 2019, à laquelle les parties ont développé leur argumentation et déposé les pièces à l’appui de leurs allégations.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la recevabilité et le bien fondé de la demande en nullité pour vice du consentement :

Sur la recevabilité :

Lorsqu’un droit de trouve subordonné à la solution d’une action en justice et si le bénéficiaire de l’action en justice est dans l’impossibilité absolue d’agir, la prescription ne court pas.

En l’espèce, la victime soutient qu’elle ne pouvait pas agir, étant dans l’ignorance de l’action avant l’arrêt de revirement concernant le respect de l’obligation de couverture.

Dès lors qu’en matière d’obligation de couverture, la Cour de cassation estimait que le non-respect de cette obligation ne permettait que d’engager la responsabilité disciplinaire de l’organisme bancaire, cette impossibilité d’agir a suspendu la prescription quinquennale qui a recommencé à courir à compter du 26 février 2008.

La demande sur le fondement du vice du consentement introduite le 20 février 2013, l’a été dans le délai quinquennal et doit en conséquence, être déclarée recevable.

Cependant, la demande présentée au titre du défaut de couverture a été présentée devant le Tribunal de Grande Instance de Colmar qui a statué sur les prétentions de Monsieur X par décision du 26 Novembre 201, dans le cadre d’une demande en dommages-intérêts.

En l’espèce, les appelants sollicitent l’infirmation de la décision entreprise et demande à la Cour de déclarer recevables leurs demandes en nullité pour vice du consentement et illicéité de la cause et en conséquence de prononcer la nullité du contrat de crédit relais du 26 avril 2001, ainsi que la nullité de la vente et du prêt souscrit par la […] le 11 février 2003 avec les conséquences de droit.

Ces demandes sont différentes de celles dont a été saisi le Tribunal de Grande Instance de Colmar et dont est actuellement saisie la Cour d’Appel de Nancy, après cassation de l’arrêt confirmatif rendu par la Cour d’Appel de Colmar le 16 Juillet 2016 et l’obligation de concentration des moyens ne peut pas être opposée aux parties appelantes.

Par ailleurs, les actions engagées par les parties appelantes ayant des fins différentes, l’estopel ne peut pas être invoquée à leur encontre.

L’action en nullité pour vice du consentement, présentée par les appelants doit être déclarée recevable.

Sur le bien fondé de cette demande :

La Cour doit apprécier si Monsieur X se trouvait dans un état de dépendance, si la banque a abusé de cet état de dépendance et si elle en a tiré un avantage excessif.

Il résulte de la lecture des 10 pièces versées aux débats par Monsieur X et la […], que les parties appelantes ne produisent aucun document établi antérieurement au 12 Avril 2001, alors qu’elles soutiennent que la Caisse d’Epargne a manqué à son obligation de couverture pour le mois de décembre 2000, et pour ceux de février et mars 2001 et qu’au mois de janvier 2001, le taux de couverture était insuffisant, que la Banque a imposé la signature d’un contrat de prêt pour pallier les fautes qu’elle avait commises en ne respectant pas ses obligations.

En raison de cette absence de pièce, la Cour ne trouve pas dans les seules pièces produites par les parties appelantes, celles qui permettraient d’examiner le bien fondé de sa demande de nullité pour vice du consentement.

Monsieur X et la […] seront déboutés de leur demande de ce chef.

Sur la demande en nullité pour cause d’illicéité de la cause :

C’est par des motifs propres et pertinents, que la Cour adopte que Monsieur X et la […] ont été déboutés de leur demande en nullité du contrat de crédit relais du 26 avril 2001, ainsi que de leur demande en nullité de la vente et du prêt souscrit par la […] le 11 février 2003, sur le fondement de la cause illicite.

Succombant dans leurs prétentions, Monsieur X et la […] seront condamnés aux entiers dépens.

La Caisse d’épargne GRAND EST Europe, venant aux droits de la SA Caisse d’Epargne et de

Prévoyance d’Alsace ne démontre pas que les parties appelantes ont agi de mauvaise foi ou dans l’intention de lui nuire.

Elle sera, en conséquence, déboutée de sa demande en dommages et intérêts pour procédure abusive.

L’équité ne commande pas l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile tant au profit des parties appelantes que de la partie intimée.

P A R C E S M O T I F S

La Cour,

Infirme le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Colmar le 20 Juin 2015, en ce qu’il a déclaré irrecevable la demande de Monsieur Y X et de la […] fondée sur la nullité pour violence,

Statuant sur le chef infirmé,

Déclare recevable la demande de Monsieur Y X et de la […] fondée sur la nullité pour violence,

Confirme le jugement entrepris pour le surplus,

Y ajoutant,

Déboute la Caisse d’Epargne GRAND EST Europe, venant aux droits de la SA Caisse d’Epargne et de Prévoyance d’Alsace de sa demande en dommages et intérêts pour procédure abusive,

Condamne Monsieur Y X et la […] aux dépens,

Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile tant au profit de Monsieur Y X et la […], qu’au profit de la Caisse d’Epargne Grand Est Europe, venant aux droits de la SA Caisse d’Epargne et de Prévoyance d’Alsace.

Le Greffier : la Présidente :

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