Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 1, 14 décembre 2017, n° 16/04659

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Douai, ch. 1 sect. 1, 14 déc. 2017, n° 16/04659
Juridiction : Cour d'appel de Douai
Numéro(s) : 16/04659
Décision précédente : Tribunal de grande instance d'Arras, 15 juin 2016, N° 14/01364
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Texte intégral

[…]

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 1

ARRÊT DU 14/12/2017

***

N° de MINUTE : 671/2107

N° RG : 16/04659

Jugement (N° 14/01364)

rendu le 16 juin 2016 par le tribunal de grande instance d’Arras

APPELANTE

SARL Foncialys Nord Pas de Calais, prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège social

[…]

[…]

représentée par Me Bernard Franchi, membre de la SCP François Deleforge & Bernard Franchi, avocat au barreau de Douai

assistée de Me Michel Solanet, avocat au barreau de Versailles

INTIMÉS

Mme Z A

née le […] à […]

demeurant

[…]

[…]

Mme B Y

née le […] à […]

demeurant

[…]

[…]

M. C Y

né le […] à […]

demeurant

[…]

[…]

Mme D Y épouse E F

née le […] à […]

demeurant

[…]

[…]

Mme M-N Y épouse X

née le […] à […]

demeurant

[…]

[…]

Mme G Y

née le […] à […]

demeurant

chez Mme H Y

[…]

[…]

représentés par Me Sophie David, avocat au barreau d’Arras

ayant pour conseil Me Claude Vaillant, membre de la SCP Vaillant et associés, avocat au barreau de Paris

DÉBATS à l’audience publique du 09 novembre 2017, tenue par K L magistrat chargé d’instruire le dossier qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : I J

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Maurice Zavaro, président de chambre

K L, conseiller

Emmanuelle Boutié, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 14 décembre 2017 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par M. K L, conseiller en remplacement de M. Maurice Zavaro, président empêché et I J, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 26 octobre 2017

***

Par une promesse unilatérale de vente donnée par acte authentique le 3 février 2011, Z A, M-N Y, D Y, C Y, G Y et B Y (ci-après 'les consorts Y'), propriétaires en indivision d’un terrain situé à Biache-Saint-Vaast (Pas-de-Calais), […], figurant au cadastre section AR n° 420, ont consenti à la SARL Foncialys Nord Pas-de-Calais la faculté, jusqu’au 30 septembre 2012, d’acquérir ce terrain moyennant 794 000 euros

Cet acte stipule plusieurs conditions suspensives devant être remplies au plus tard le 30 septembre 2012 et une indemnité d’immobilisation de 79 400 euros.

Par acte authentique du 29 décembre 2012, les parties ont prorogé et modifié cette promesse de vente, portant son terme au 30 septembre 2013, le prix à 894 000 euros et l’indemnité d’immobilisation à 89 400 euros.

Par lettre recommandée avec demande d’accusé de réception du 26 mars 2014, la société Foncialys Nord Pas-de-Calais s’est prévalue, auprès des consorts Y, de la caducité de la promesse de vente, considérant dès lors les parties comme dégagées de toute obligation.

Le 7 juillet 2014, les consorts Y l’ont assignée devant le tribunal de grande instance d’Arras en paiement, principalement, de l’indemnité d’immobilisation et de dommages et intérêts.

Par jugement contradictoire du 16 juin 2016, le tribunal a condamné la société Foncialys Nord Pas-de-Calais à payer aux consorts Y les sommes de :

—  89 400 euros au titre de l’indemnité d’immobilisation,

—  400 000 euros à titre de dommages et intérêts pour perte de chance,

—  800 euros chacun à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

—  2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

ainsi qu’aux dépens et l’a déboutée de ses demandes.

La SARL Foncialys Nord Pas-de-Calais, ayant relevé appel de ce jugement, demande à la cour de l’infirmer et de :

— déclarer irrecevables les demandes des consorts Y au motif tiré de ce qu’elles seraient fondées cumulativement sur les responsabilités contractuelle et délictuelle,

— les en débouter au motif tiré de ce que la promesse unilatérale de vente serait caduque depuis le 30 septembre 2013,

— lui donner acte de son accord pour acquérir le terrain susvisé pour le prix de 59 550 euros, déclarer la vente parfaite et ordonner la publication du présent arrêt au bureau des hypothèques d’Arras,

— condamner 'conjointement et solidairement’ les consorts Y à lui payer 400 000 euros à titre de dommages et intérêts outre 10 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens dont distraction au profit de la SCP Deleforge-Franchi,

— 'ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir’ (sic).

Les consorts Y demandent pour leur part à la cour :

— de dire que la SARL Foncialys Nord Pas-de-Calais a engagé à leur égard sa responsabilité contractuelle ou, subsidiairement et dans l’hypothèse où la cour considérerait la promesse de vente comme caduque au 30 septembre 2013, sa responsabilité délictuelle,

— de confirmer le jugement en ce qui concerne l’indemnité d’immobilisation,

— de le confirmer en ce qui concerne le principe de l’indemnisation d’une perte de chance et d’un préjudice moral mais de l’infirmer en ce qui concerne le quantum et :

* en ce qui concerne la perte de chance : condamner l’appelante à leur verser 179 400 euros à titre de provision et surseoir à statuer jusqu’au 30 septembre 2017, date prévue pour la réitération de l’acte de vente du terrain à la société Nord Lotir,

* en ce qui concerne le préjudice moral, condamner l’appelante à verser 5 000 euros à chacun d’eux,

— de débouter la société Foncialys Nord Pas-de-Calais de ses demandes,

— de la condamner à leur payer 30 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens dont distraction au profit de Me Sophie David,

— d’ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir (sic).

Vu les conclusions récapitulatives de l’appelante en date du 12 octobre 2017 et celles des intimés en date du 25 octobre 2017.

SUR CE

Compte tenu de la date de la promesse unilatérale de vente susvisé, le présent litige est soumis aux dispositions du code civil relatives aux conventions telles qu’elles existaient et étaient numérotées avant l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 10 février 2016.

Sur la fin de non-recevoir tirée de la règle du non-cumul des responsabilités

Celle-ci est soulevée à tort par la société Foncialys Nord Pas-de-Calais dès lors que les consorts Y recherchent à titre principal sa responsabilité contractuelle en arguant d’un manquement de celle-ci à ses obligations résultant de la promesse de vente et seulement à titre subsidiaire sa responsabilité délictuelle dans l’hypothèse où la cour admettrait la caducité, alléguée par l’appelante, de ladite promesse.

Sur le fond

Le code civil dispose que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et doivent être exécutées de bonne foi.

C’est par une motivation n’appelant aucune critique et que la cour adopte que les premiers juges, constatant au-delà du 30 septembre 2013 la poursuite par l’appelante des démarches nécessaires à la réalisation des conditions suspensives stipulées et à la vente, notamment aux fins d’obtenir un permis modificatif et l’assurance de l’absence de prescriptions en matière de fouilles archéologiques, comme la commercialisation par celle-ci de parcelles résultant du lotissement du terrain, et analysant divers courriers des consorts Y et de leur notaire, ont caractérisé la volonté non équivoque des deux parties de prolonger au-delà de cette date les effets de la promesse unilatérale de vente du 29 décembre 2012, réitérant, en modifiant quelques clauses, la promesse initiale du 3 février 2011 et non, comme le soutient l’appelante, un renoncement commun à cette promesse suivi de nouveaux pourparlers.

Il n’est pas contesté qu’au 10 février 2014, toutes les conditions suspensives étaient réalisées.

La société Foncialys Nord Pas-de-Calais ne pouvait donc de bonne foi, le 26 mars 2014, se prévaloir de la caducité de la promesse de vente et se considérer comme libérée de toute obligation à l’égard des promettants.

La promesse de vente du 29 décembre 2012 stipule que l’indemnité d’immobilisation, fixée à 89 400 euros, sera versée au promettant et lui restera acquise de plein droit à titre d’indemnité forfaitaire et non réductible faute par le bénéficiaire ou ses substitués d’avoir réalisé l’acquisition dans les délais ci-dessus, toutes les conditions suspensives ayant été réalisées.

C’est donc à bon droit que le tribunal a condamné la société Foncialys au paiement de cette indemnité.

Le contrat précise également que cette indemnité, due en cas de défaut de signature de l’acte de vente par le bénéficiaire de la promesse malgré la réalisation de toutes les conditions, est, comme son nom l’indique d’ailleurs, la contrepartie de la période d’immobilisation du bien objet de la promesse de vente.

Elle n’est donc pas exclusive de la réparation d’un préjudice distinct qui résulterait pour les promettants du défaut de réalisation de la vente, la société Foncialys ayant manqué à ses obligations et, ce faisant, engagé sa responsabilité contractuelle.

Les premiers juges, prenant en considération l’information donnée aux consorts Y par la municipalité de Biache-Saint-Vaast selon laquelle la délivrance d’un nouveau permis d’aménager paraissait peu envisageable compte tenu de contraintes nouvelles en termes d’urbanisme et de logements sociaux, ce dont il résultait que le terrain en question risquait de redevenir un terrain agricole et sa valeur ramenée à 59 550 euros, a retenu que les consorts Y subissaient un préjudice constitué par la perte d’une chance de vendre leur bien au prix de 894 000 euros et a condamné la société Foncialys Nord Pas-de-Calais à les indemniser de ce préjudice par la somme de 400 000 euros.

Il est aujourd’hui établi que les consorts Y, par acte authentique du 7 décembre 2017, ont vendu leur terrain à la société Nord Lotir moyennant 714 600 euros.

Il y a tout lieu de penser que les négociations de cette vente ne leur ont pas permis d’obtenir un prix supérieur et non qu’ils ont consenti une faveur à l’acquéreur.

Si la société Foncialys Nord Pas-de-Calais soutient qu’elle a transmis gratuitement à la société Nord Lotir le permis d’aménager qu’elle avait obtenu et a ainsi favorisé la vente, les accords susceptibles d’avoir été conclus entre les deux sociétés ne sont pas connus de la cour et il n’y a pas lieu de tenir compte de cette allégation.

Les consorts Y sont dès lors bien fondés à soutenir avoir subi, par la faute de la société Foncialys, un préjudice égal à la différence entre le prix qu’ils auraient dû percevoir et celui qu’il vont tirer de la vente à Nord Lotir, soit 179 400 euros. Il doit être fait droit à leur demande de ce chef, ladite somme produisant des intérêts au taux légal à compter du jugement qui leur avait alloué une somme supérieure et est donc confirmé dans cette limite.

La demande de la société Foncialys tendant à voir déclarer la vente du terrain à son profit parfaite moyennant 59 550 euros au motif qu’il y aurait accord sur la chose et ce prix est sans fondement dès lors que, si les consorts Y ont affirmé que telle serait la valeur dudit terrain s’il retrouvait sa vocation agricole, ils ne lui ont nullement proposé de le lui vendre à ce prix.

La cour approuve et adopte la motivation par laquelle le tribunal a retenu l’existence d’un préjudice moral subi par les consorts Y et l’appréciation qu’il a faite de ce préjudice.

Les considérations qui précèdent conduisent au rejet des demandes de la société appelante.

Il n’est apparemment pas superflu de rappeler que le pourvoi en cassation susceptible d’être exercé contre les arrêts de cours d’appel n’est pas suspensif d’exécution ; la demande d’exécution provisoire présentée par chacune des parties n’a donc pas d’objet.

Vu les articles 696 et 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

confirme le jugement entrepris, sauf en ce qu’il a condamné la société Foncialys Nord Pas-de-Calais à payer aux consorts Y la somme de 400 000 euros à titre de dommages et intérêts,

statuant à nouveau de ce chef, condamne la société Foncialys Nord Pas-de-Calais à payer aux consorts Y la somme de cent soixante-dix-neuf mille quatre cents euros (179 400 €) à titre de dommages et intérêts, avec intérêts au taux légal à compter du 16 juin 2016,

la déboute de ses demandes,

la condamne aux dépens et au paiement aux consorts Y, ensemble, d’une indemnité de cinq mille euros (5 000 €) par application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

Le greffier, Pour le président,

I J K L

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
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