Cour d'appel de Grenoble, Expropriations, 6 février 2019, n° 18/02029

  • Indemnité·
  • Expropriation·
  • Remploi·
  • Parcelle·
  • Commissaire du gouvernement·
  • Département·
  • Accessoire·
  • Terrain à bâtir·
  • Usage·
  • Route

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Grenoble, expropriations, 6 févr. 2019, n° 18/02029
Juridiction : Cour d'appel de Grenoble
Numéro(s) : 18/02029
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Valence, EXPRO, 8 mars 2018, N° 17/13
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

N° RG 18/02029 -

Grosse délivrée

le :

à

N° Minute :

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE DES EXPROPRIATIONS

ARRET DU MERCREDI 06 FEVRIER 2019

Appel d’un jugement (dossier 17/13)

rendu par le juge de l’expropriation de VALENCE

en date du 09 mars 2018

suivant lettre recommandée avec accusé de réception

postée le 03 Mai 2018.

APPELANT :

LE DEPARTEMENT DE LA DROME

[…]

[…]

[…]

non comparant

représenté par Me Gilles RIGOULOT, avocat au barreau de VALENCE,

substitué par Me Olivier GRAF, avocat au barreau de VALENCE

INTIME :

Monsieur X Y

né le […] à […]

Pinfre

[…]

[…]

non comparant

représenté par Me Typhaine DE RENTY, avocat au barreau de VALENCE

COMPOSITION DE LA COUR : LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Madame Hélène COMBES, Président de chambre,

Madame Dominique JACOB, Conseiller,

Madame Claudine PHILIPPE, Conseiller,

Toutes désignées conformément aux dispositions de la loi d’habilitation du 12 novembre 2013, l’ordonnance n° 2014-1345 du 06 novembre 2014 et l’article R. 211-2 du code de l’expropriation et par ordonnance de Monsieur le Premier Président du 05 juillet 2018

Assistées lors des débats de Madame Denise GIRARD, greffier, désignée à cette fonction conformément aux dispositions des articles R. 211-5 du code de l’expropriation.

En présence lors des débats de Monsieur Z A

Commissaire du Gouvernement

Direction Départementale des

Finances Publiques de l’Isère

[…]

Service France Domaine

[…]

DEBATS :

A l’audience publique du 05 Décembre 2018 à laquelle les parties et le commissaire du gouvernement ont été convoqués conformément aux dispositions de l’article R 311-27 du code de l’expropriation.

Madame JACOB, conseiller, a été entendue en son rapport.

Les avocats ont été entendus en leurs plaidoiries et le commissaire du gouvernement en ses observations.

Puis l’affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l’arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe, les parties en étant préalablement avisées.

Vu les conclusions de Maître RIGOULOT, avocat de l’appelant, reçues les 03 août 2018 et 03 décembre 2018, notifiées par courriers recommandés expédiés les 03 août 2018 et 03 décembre 2018,

Vu les conclusions de Maître DE RENTY, avocat de l’intimé, reçues le 02 novembre 2018, notifiées

par courrier recommandé expédié le 02 novembre 2018,

Vu les conclusions de Monsieur le commissaire du gouvernement, reçues le 09 octobre 2018, notifiées par courrier recommandé expédié le 09 octobre 2018,

***

EXPOSE DU LITIGE

Dans le cadre d’une opération d’aménagement et de calibrage de la route départementale 193 sur les territoires des communes de Tulette et de Sainte D E, le département de la Drôme a exproprié pour cause d’utilité publique les parcelles P 365 et P 367 situées à Tulette et appartenant à X Y.

Ces parcelles, d’une superficie respective de 69 m² et 76 m², constituent une bande de terrain situées entre la route départementale et les parcelles bâties P 366 et 368 appartenant également à C Y.

Le 20 octobre 2017, le département de la Drôme a saisi le juge de l’expropriation d’une demande de fixation de l’indemnité due à celui-ci.

La visite des lieux et l’audition des parties ont eu lieu le 24 janvier 2018.

Par jugement du 9 mars 2018, la juridiction de l’expropriation, considérant que les parcelles litigieuses étaient un terrain d’agrément, a fixé les indemnités comme suit :

— indemnité principale : 5.800 euros (40 euros x 145 m²)

— indemnité de remploi : 1.120 euros

— indemnité accessoire : 1. 612 euros.

Elle a donné acte au département de la Drôme son accord pour prendre en charge le coût du déplacement de tout compteur et dit n’y avoir lieu de statuer sur la demande de X Y tendant au maintien d’un passage pour accéder à l’arrière de sa maison et aux compteurs électriques.

Par courrier recommandé avec accusé de réception envoyé le 3 mai 2018, le département de la Drôme a relevé appel de cette décision, les chefs du jugement critiqués étant ceux relatifs à la fixation des indemnités.

Aux termes de son mémoire reçu au greffe le 3 août 2018 et du mémoire récapitulatif du 3 décembre 2018, il demande à la cour d’infirmer le jugement, de fixer le montant des indemnités comme suit:

— indemnité principale : 435 euros

— indemnité de remploi : 87 euros

— indemnité accessoire : 1.200 euros,

et de débouter X Y de ses demandes.

Il rappelle que les deux parcelles sont situées en zone non constructible et ne sauraient dès lors constituer un terrain à bâtir.

Il relève que le premier juge n’a pas explicité en quoi les parcelles bénéficieraient d’une situation privilégiée au sens de la jurisprudence, alors que ni leur nature, ni leur usage de mince ruban boisé (haie de cyprès prolongée d’une végétation hétérogène), ni la pression foncière ou l’urbanisation de la commune de Tulette ne justifient l’usage de la méthode d’indemnisation retenue par le juge.

Il demande que les indemnités soient ramenées à de plus justes proportions au regard de l’usage effectif des parcelles.

X Y a déposé le 2 novembre 2018 un mémoire dans lequel il conclut à l’infirmation du jugement et demande à la cour de fixer les indemnités comme suit :

— indemnité principale : 7.250 euros (50 euros x 145 m² )

— indemnité de remploi : 1.450 euros

— indemnité accessoire : 16.260 euros.

Il sollicite subsidiairement la confirmation du jugement et, en tout état de cause, la condamnation du département à lui verser la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.

Il fait valoir que le terrain exproprié longe la RD 193 et est à proximité de sa maison ; que la haie de cyprès s’y trouvant apportait une plus-value à l’ensemble immobilier en lui assurant une sécurité et une protection contre les nuisances sonores et visuelles, dont il va être privé.

Il ajoute que l’indemnité de remploi doit lui permettre de faire construire un mur lui permettant à la fois de se clore et de faire écran à la route, tant sur le plan visuel que sonore.

Le commissaire du gouvernement a déposé le 9 octobre 2018 un mémoire au terme duquel il propose les indemnités suivantes :

— indemnité principale : 3.625 euros (25 euros x 145 m²)

— indemnité de remploi : 725 euros

— indemnité accessoire : 1. 200 euros.

Il rappelle qu’à la date de référence, le terrain ne peut être qualifié de terrain à bâtir et doit être évalué selon son usage effectif, comparativement aux ventes sur le secteur de terrains comparables.

Il retient que, bien que classé en zone non constructible, il constitue une portion de terrain d’aisance

d’une maison individuelle et doit, par conséquent, être estimé dans le haut de la fourchette des prix des terrains en zone agricole vendus à proximité.

S’agissant de l’indemnité accessoire, il estime que l’édification d’un mur, non existant à ce jour, ne peut être retenue, mais qu’il y a lieu à reconstitution de la haie à l’identique.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées.

Selon l’article L. 321-1 du code de l’expropriation, les indemnités allouées couvrent l’intégralité du

préjudice direct, matériel et certain causé par l’expropriation.

Elles doivent correspondre à la valeur du bien exproprié et permettre aux propriétaires d’acquérir un bien semblable et de même nature.

A cette indemnité, doivent être ajoutées une indemnité de remploi destinée à couvrir les frais que l’exproprié devra normalement exposer lors de l’acquisition d’un bien de même nature que celui exproprié et, le cas échéant, des indemnités accessoires correspondant aux chefs annexes de préjudice.

Les biens expropriés sont estimés à la date du jugement de première instance, en fonction de leur consistance, matérielle et juridique, à la date de l’ordonnance portant transfert de propriété, en l’occurrence le 30 juin 2017.

Sauf s’ils peuvent recevoir la qualification de terrain à bâtir, ils sont évalués en fonction de leur usage effectif à la date de référence, dont il n’est pas contesté en l’espèce qu’elle se situe au 14 octobre 2012.

Les parcelles expropriées P 365 et 367 consistent une bande de terrain de 145 m² plantée d’une haie de cyprès prolongée par une végétation hétérogène, qui longe la route départementale 193 et jouxte la maison de X Y.

Les parties ne contestent pas que ces parcelles ne peuvent recevoir la qualification de terrain à bâtir au sens de l’article L 322-3 du code de l’expropriation.

Elles doivent donc être évaluées selon leur usage effectif, à la date de référence susvisée.

Ainsi que le relève le commissaire du gouvernement, elles constituent une portion du terrain d’aisance d’une maison individuelle mais ne peuvent pour autant être considérées comme présentant, de ce seul fait, une situation privilégiée.

Elles doivent donc être évaluées sur la base de terrains agricoles présentant les mêmes caractéristiques.

Au vu des éléments de comparaison produits, il y a lieu de retenir le prix de 25 euros le m² et de fixer l’indemnité principale à la somme de 3.625 euros.

L’indemnité de remploi sera arrêtée à la somme de 725 euros (3.625 euros x 20 %).

X Y sollicite une indemnité accessoire de 16.260 euros pour la suppression de la haie de cyprès.

L’indemnisation de ce préjudice ne saurait, ainsi que l’a retenu le premier juge, prendre en compte la construction d’un mur en remplacement de la haie.

La somme de 1.612 euros allouée par référence au protocole d’indemnisation à l’occasion de la ligne TGV Méditerranée, doit être confirmée.

Aucune considération d’équité ne commande de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

— Infirme le jugement déféré en ce qu’il a fixé l’indemnité principale à 5.800 euros et l’indemnité de remploi à 1.120 euros,

— statuant à nouveau, fixe l’indemnité principale due par le département de la Drôme à X Y à la somme de 3.625 euros et l’indemnité de remploi à celle de 725 euros,

— Confirme le jugement en ses autres dispositions,

— Dit n’y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

— Condamne le département de la Drôme aux dépens d’appel.

Signé par Madame COMBES, Président et par Madame GIRARD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

Extraits similaires
highlight
Extraits similaires
Extraits les plus copiés
Extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Grenoble, Expropriations, 6 février 2019, n° 18/02029