Cour d'appel de Limoges, Chambre sociale, 7 janvier 2020, n° 19/00109

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Sur la décision

Référence :
CA Limoges, ch. soc., 7 janv. 2020, n° 19/00109
Juridiction : Cour d'appel de Limoges
Numéro(s) : 19/00109
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

ARRÊT N° .

N° RG 19/00109 – N° Portalis DBV6-V-B7D-BH5JA

AFFAIRE :

F U V-R W AA veuve D DE LA FAVERIE P, B S T R D DE LA FAVERIE P, A Q F R D DE LA FAVERIE P épouse […], J N F D DE LA FAVERIE P épouse X

C/

H C

JPC/PV

Demande en paiement des fermages ou loyers et/ou tendant à faire prononcer ou constater la résiliation du bail pour défaut de paiement et prononcer l’expulsion

COUR D’APPEL DE LIMOGES

CHAMBRE SOCIALE

------------

ARRÊT DU 07 JANVIER 2020

-------------

Le sept Janvier deux mille vingt, la Chambre Sociale de la Cour d’Appel de LIMOGES a rendu l’arrêt dont la teneur suit par mise à la disposition du public au greffe :

ENTRE :

F U V-R W AA veuve D DE LA FAVERIE P, demeurant […]

représentée par Me Z CHASSAGNE de la SCP MADY – GILLET – BRIAND, avocat au barreau de POITIERS

B S T R D DE LA FAVERIE P, demeurant 67 Grand-Rue […]

représenté par Me Z CHASSAGNE de la SCP MADY – GILLET – BRIAND, avocat au barreau de POITIERS

A Q F R D DE LA FAVERIE P épouse […], demeurant […]

représentée par Me Z CHASSAGNE de la SCP MADY – GILLET – BRIAND, avocat au barreau de POITIERS

J N F D DE LA FAVERIE P épouse X, demeurant […]

représentée par Me Z CHASSAGNE de la SCP MADY – GILLET – BRIAND, avocat au barreau de POITIERS

APPELANTS d’un jugement rendu le 14 Janvier 2019 par le Tribunal paritaire des baux ruraux de LIMOGES

ET :

H C, demeurant […]

comparant en personne, assisté de Me Eric BRECY-TEYSSANDIER, avocat au barreau de LIMOGES

INTIME

---==oO§Oo==---

A l’audience publique du 18 Novembre 2019, la Cour étant composée de Madame N O, Présidente de Chambre, de Monsieur Jean-Pierre COLOMER, Conseiller et de Madame Mireille VALLEIX, Conseiller, assistés de Monsieur L M, Greffier, Monsieur Jean-Pierre COLOMER, Conseiller a été entendu en son rapport oral. Les conseils des parties ont été entendus en leur plaidoirie.

Puis, Madame N O, Présidente de Chambre a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 07 Janvier 2020, par mise à disposition au greffe de la Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.

LA COUR

EXPOSE DU LITIGE :

Mme F D de la Faverie P, usufruitière, et ses cinq enfants (Y, Z, A, B, et J D de la Faverie P), nus-propriétaires, sont propriétaires indivis d’un domaine agricole dit «'Domaine de la Biche'», sis commune de Verneuil-Moustiers (87) avec extension sur la commune de Brigueuil-le-Chantre (86).

Ce domaine d’une superficie totale de 96ha'23a'99c comprend, outre diverses parcelles en nature de terre et de pré, une parcelle sise commune de Verneuil-Moustiers (87)cadastrée section […] en un lot A comprenant une maison d’habitation et ses dépendances immédiates avec terrain attenant et un lot B comprenant deux granges et un garage avec terrain.

Le 07 février 2007, Mme F D de la Faverie P, agissant tant en son nom personnel qu’au nom des nus-propriétaires, a mis gratuitement à la disposition de M. C, dans le cadre d’un prêt à usage, la maison d’habitation et ses dépendances constituant le lot A décrit ci-dessus pour une durée de 12 mois renouvelable, prenant effet le 1er décembre 2006.

Aux termes d’un acte reçu le 1er juin 2007 par Me Gavid, notaire, les consorts D de la Faverie P ont donné à bail cette propriété à M. C, exploitant agricole, dans le cadre d’un bail rural à long terme d’une durée équivalente à celle de la carrière professionnelle du preneur.

Il est mentionné dans le bail que le lot A de la parcelle cadastrée section […] est exclu de la

location.

==oOo==

Des difficultés sont apparues en cours de bail. Ainsi M. C s’est plaint de ce que M. B D de la Faverie P de n’avait procédé ni à l’enlèvement des arbres morts ni à la réparation des clôtures endommagées par leur chute, qu’il avait changé les serrures de la dépendance dans laquelle se trouve le compteur électrique alimentant l’exploitation agricole et avait utilisé cette dépendance alors que les frais d’électricité étaient à son nom, qu’il s’était exercé au tir à la carabine à proximité des bâtiments d’exploitation, qu’il avait dégradé les parcelles louées en les traversant avec des véhicules et qu’il avait organisé des battues sur les parcelles louées provoquant la panique du troupeau.

==oOO==

M. C a saisi le juge du référé du tribunal paritaire des baux ruraux qui par ordonnance en date du 4 mars 2013 a déclaré son action irrecevable. Le 9 septembre 2013, la cour d’appel de Limoges a réformé l’ordonnance sur la recevabilité de l’action et a débouté M. C de ses demandes.

En date du 1er octobre 2013, M. C a saisi le tribunal paritaire des baux ruraux de Limoges qui par un jugement du 24 mars 2014 a déclaré son action irrecevable. Le 19 mai 2015, la cour d’appel de Limoges confirmé la décision des premiers juges au motif que M. C ayant omis de mettre en oeuvre la clause de conciliation.

Ce dernier a alors mis en 'uvre ladite clause et a saisi le président de la chambre des notaires de la Vienne le 30 juin 2015 aux fins de médiation. Un projet de médiation a été rédigé par le médiateur et transmis à l’ensemble des parties, seuls M. C et Mme Z D de la Faverie P ont accepté le projet d’accord.

==oOo==

Le 6 juin 2018, M. C a saisi le tribunal paritaire des baux ruraux de Limoges aux fins d’obtenir la condamnation des bailleurs à satisfaire à leurs obligations contractuelles. Aucun accord n’a pu être établi lors de l’audience de conciliation du 10 septembre 2018.

Par jugement en date du 14 janvier 2019, le tribunal paritaire des baux ruraux de Limoges a':

— constaté que les bailleurs, à l’exception de Mme Z D de la Faverie P, ont manqué à leurs obligations';

— condamné les consorts D de la Faverie P, à l’exception de Mme Z D de la Faverie P, solidairement à':

• transférer à leurs frais le compteur électrique dans les bâtiments loués sous un délai d’une année à compter de la signification du jugement sous astreinte de 100'€ par jour de retard';

• cesser de pratiquer le tir à la carabine';

• cesser de traverser les parcelles louées avec leurs véhicules';

• enlever et abattre les arbres morts dans le délai de deux ans à compter de la signification du jugement ;

• procéder aux réparations des toitures des granges louées dans le délai d’une année à compter de la signification du jugement ;

— débouté M. C de ses autres demandes';

— ordonné l’exécution provisoire du jugement ;

— condamné les bailleurs, à l’exception de Mme Z D de la Faverie P, aux entiers dépens';

Le 14 février 2019 les bailleurs, à l’exception de Mme Z D de la Faverie P ont régulièrement interjeté appel des chefs de jugement portant condamnation à leur encontre et les déboutant de leurs demandes.

==oOo==

Aux termes de leurs écritures déposées le 15 novembre 2019 et développées à l’audience, Mme A K de la Ferrière se désiste de son appel tandis que les autres appelants principaux demandent à la cour de :

— confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a':

• débouté M. C de sa demande tendant à ce que les bailleurs, et plus particulièrement Mme F D de la Faverie P et M. B D de la Faverie P, à l’exception de Mme Z D de la Faverie P, soient condamnés à réparer les clôtures endommagées';

• débouté M. C de sa demande tendant à ce que les bailleurs, et plus particulièrement Mme F D de la Faverie P et M. B D de la Faverie P, à l’exception de Mme Z D de la Faverie P, soient condamnés à cesser de pratiquer des parties de chasse sur les parcelles louées à M. C où il tient ses animaux, sauf à prévenir ce dernier, au moins 48'heures à l’avance, par courrier recommandé ou remis en mains propres contre décharge, de leur volonté d’organiser une chasse en lui précisant alors les références cadastrales des parcelles concernées afin de permettre à M. C de déplacer ses animaux';

• débouté M. C de sa demande de condamnation solidaire des bailleurs et plus particulièrement Mme F D de la Faverie P et M. B D de la Faverie P, à l’exception de Mme Z D de la Faverie P, à lui verser une somme de 5'000'€ à titre de dommages et intérêts';

• débouté M. C de sa demande de condamnation solidaire des bailleurs et plus particulièrement Mme F D de la Faverie P et M. B D de la Faverie P, à l’exception de Mme Z D de la Faverie P, à lui verser la somme de 3'000'€ à titre d’indemnité pour frais irrépétibles sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile';

De réformer le jugement entrepris pour le surplus et, statuant à nouveau, de':

— dire que les bailleurs, à l’exception de Mme Z D de la Faverie P, n’ont pas manqué à leurs obligations découlant du bail de carrière signé le 1er juin 2007 à l’égard de M. C, locataire';

— débouter M. C de l’ensemble de ses demandes, fin et prétentions élevées à l’encontre des consorts D de la Faverie P, à l’exception de Mme Z D de la Faverie P';

— condamner M. C à payer aux consorts D de la Faverie P, à l’exception de Mme Z D de la Faverie P, la somme de 3'000'€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’à tous les frais et dépens tant de première instance que d’appel.

A l’appui de leur recours, ils soutiennent que les demandes de leur fermier ne sont pas fondées.

Aux termes de ses écritures déposées le 19 août 2019 et développées à l’audience, M. C demande à la cour de :

— débouter les bailleurs de leur appel ainsi que de toutes leurs demandes ;

— confirmer en conséquence les dispositions du jugement rendu ayant':

• constaté que les bailleurs, à l’exception de Z D de la Faverie P, ont manqué à leurs obligations';

• condamné les bailleurs, à l’exception de Z D de la Faverie P, solidairement à':

• enlever et abattre les arbres morts';

• transférer à leurs frais le compteur électrique dans les bâtiments loués';

• cesser de pratiquer les tirs à la carabine';

• cesser de traverser les parcelles louées avec leurs véhicules';

• procéder aux réparations des toitures des granges louées';

• condamné les bailleurs, à l’exception de Z D de la Faverie P, aux entiers dépens';

— réformer le jugement pour le surplus';

Recevant l’appel incident de M. C et statuant à nouveau, de :

— dire que la condamnation à intervenir d’avoir à enlever et abattre les arbres morts, sera assortie d’une astreinte à la charge des consorts D de la Faverie P, à l’exception de Z D de la Faverie P, de 100'€ par jour à compter de la signification de l’arrêt à intervenir';

— condamner solidairement les bailleurs, à l’exception de Z D de la Faverie P, à supporter le coût de la remise en état des clôtures endommagées par les arbres qui se sont abattus';

— dire que la condamnation à intervenir d’avoir à transférer le compteur électrique dans les bâtiments d’exploitation loués sera assortie d’une astreinte à la charge des consorts D de la Faverie P, à l’exception de Z D de la Faverie P, de 100'€ par jour à compter de la signification de l’arrêt à intervenir';

— dire et juger que dans l’attente du transfert du compteur dans les bâtiments d’exploitation loués, M. C aura la jouissance exclusive de la maison où il se trouve actuellement implanté';

— dire que la condamnation à intervenir d’avoir à cesser les tirs à la carabine sera assortie d’une astreinte d’un montant de 1'000'€ à la charge de tout contrevenant, pour chaque infraction constatée';

— dire que la condamnation à intervenir d’avoir à cesser de passer sur les parcelles louées à M. C, avec des véhicules, sera assortie d’une astreinte d’un montant de 1'000'€ à la charge de tout contrevenant, pour chaque infraction constatée';

— ordonner aux consorts D de la Faverie P de cesser leurs agissements à l’égard de Mme C';

— ordonner aux consorts D de la Faverie P, à l’exception de Z D de la Faverie P, de cesser de pratiquer des parties de chasse sur les parcelles louées à M. C où il

tient ses animaux, sauf à prévenir ce dernier, au moins 48 heures à l’avance, par courrier recommandé ou remis en mains propres contre décharge, de leur volonté d’organiser une chasse en lui précisant alors les références cadastrales des parcelles concernées afin de permettre à M. C de déplacer ses animaux';

— dire que la condamnation à intervenir d’avoir à cesser de pratique des parties de chasse sur les parcelles louées, sera assortie d’une astreinte d’un montant de 1'000'€ à la charge de tout contrevenant, pour chaque infraction constatée';

— dire que la condamnation à intervenir d’avoir à réparer les toitures des granges louées, sera assortie d’une astreinte à la charge des consorts D de la Faverie P, à l’exception de Z D de la Faverie P, de 100'€ par jour à compter de la signification de l’arrêt à intervenir';

— condamner les bailleurs, à l’exception de Z D de la Faverie P, à verser à M. C une somme de 3'000'€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles qu’il s’est vu contrait d’exposer dans le cadre de la procédure en première instance, ainsi que 3'000'€ pour la procédure en cause d’appel';

— condamner solidairement les bailleurs, à l’exception de Z D de la Faverie P, aux entiers dépens de première instance et d’appel.

En réponse, M. C soutient que les bailleurs ont obligation de lui assurer une jouissance paisible des lieux donnés à bail et, en conséquence, il demande que les bailleurs mettent fin aux troubles qu’ils lui causent sous astreinte.

Pour un plus ample exposé des moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures soutenues.

SUR CE,

Sur les manquements des bailleurs à leurs obligations :

Il résulte des dispositions du 1° et du 3 ° de l’article 1719 du code civil que le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu’il soit besoin d’aucune stipulation particulière de délivrer au preneur la chose louée et d’en faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail.

En l’espèce, M. C invoque divers manquements des bailleurs à leurs obligations qu’il convient d’examiner successivement.

— L’enlèvement et l’abattage des arbres morts :

Les arbres, même morts, restent la propriété du bailleur. Il appartient donc à ce dernier de procéder à leur enlèvement.

En l’espèce, M. C a fait établir un constat d’huissier le 8 janvier 2013 et un second le 15 mars 2018. L’examen de ces deux constats fait apparaître qu’il existe sur les parcelles données à bail de nombreux arbres morts, les uns sur pied présentant des signes de décomposition, les autres couchés.

Les bailleurs ne démontrent pas qu’ils ont procédé à leur abattage et/ou à leur enlèvement et ils ne sauraient s’exonérer de leur responsabilité en se prévalant de la constatation, le 8 janvier 2013, de l’existence d’un arbre en cours de débitage.

En s’abstenant de procéder à l’enlèvement de ces arbres, les bailleurs causent à leur fermier un trouble de jouissance puisque celui-ci ne peut utiliser les zones sur lesquelles les arbres se sont

couchés. Par ailleurs, s’agissant des arbres encore sur pied, il existe un risque de chute et donc de danger pour les animaux venant paître à proximité.

La décision des premiers juges sera donc confirmée en ce qu’ils ont condamné les bailleurs à procéder à l’enlèvement et à l’abattage des arbres morts. Afin de garantir la bonne exécution de cette condamnation, il y a lieu de l’assortir d’une astreinte telle que précisée dans le dispositif de la présente décision, laquelle commencera à courir de ce chef à l’issue d’un délai de quatre mois à compter de la signification de la présente décision.

La chute des arbres morts a endommagé certaines clôtures comme cela a pu être constaté par les huissiers de justice ayant établi les constats des 8 janvier 2013 et 15 mars 2018. Ces dégradations ont pour origine un manquement des bailleurs à leur obligation d’abattre les arbres morts encore sur pied. Ils seront donc condamnés à réparer les clôtures dégradées telles que figurant dans les constats précités, dans un délai de quatre mois à compter de la signification de la présente décision et sous astreinte passé ce délai afin d’en garantir la bonne exécution.

La décision des premiers juges sera réformée sur ce point.

— L’accès au compteur électrique :

Il est constant que les bâtiments d’exploitation sont alimentés en électricité à partir du compteur électrique situé dans la maison d’habitation qui avait été mise à la disposition de M. C dans le cadre du prêt à usage du 7 février 2007.

M. C affirme que les propriétaires ont dénoncé le commodat à une date qui n’est pas précisée. Ces derniers qui ne contestent pas l’avoir dénoncé, indiquent dans leurs écritures que la clé de la seconde serrure de la porte d’entrée de la maison d’habitation a été adressée par lettre recommandée à M. C avant l’audience devant la cour d’appel. M. C n’a ni confirmé ni infirmé cette affirmation dont il n’est pas justifié par la production d’un justificatif d’envoi.

Au vu de ces éléments, il convient donc de considérer que le commodat a bel et bien été dénoncé, ce qui explique que B D de la Faverie P ait utilisé la maison pour ses rendez-vous de chasse et que les bailleurs aient ensuite remis la clé du nouveau verrou au fermier pour qu’il puisse accéder au compteur électrique.

Cela étant, il résulte d’un écrit non contesté établi le 27 juillet 2012 par M. Y D de la Faverie P que ce dernier a constaté ce jour-là que le courant électrique de 380 V ne fonctionnait pas pour la partie extérieure.

Il est donc établi que M. C a bien été victime d’un trouble de jouissance imputable aux bailleurs qui ne lui ont pas permis d’avoir accès de manière continue au courant électrique alimentant les bâtiments d’exploitation.

Au vu de ces éléments, il y a lieu de confirmer la décision des premiers juges en ce qu’elle a ordonné le transfert du compteur électrique dans les bâtiments d’exploitation. Afin de garantir la bonne exécution de cette condamnation celle-ci sera assortie d’une astreinte commençant à courir à l’issue d’un délai de quatre mois à compter de la signification de la présente décision.

— La pratique du tir à la carabine :

M. C entend faire cesser la pratique du tir à la carabine sur les parcelles données à bail en prenant comme cible ses balles de foin.

B D de la Faverie P a été entendu par les services de gendarmerie de Bellac (87) le

24 mars 2011. Lors de cette audition, il a notamment été interrogé sur le fait que M. C avait découvert des douilles de carabine dans son fourrage et il a reconnu que ses enfants avaient pratiqué le tir à la carabine.

Il est donc établi qu’il a laissé ses enfants pratiquer cette activité sur les terres données à bail sans avoir reçu l’autorisation du fermier.

En agissant ainsi, il s’est comporté comme s’il avait la libre utilisation des terres données à bail et a donc manqué à son obligation de garantir au fermier la jouissance paisible des terres.

La décision des premiers juges sera confirmée en ce qu’elle a fait interdiction au bailleur de pratiquer le tir à la carabine. Afin de garantir la bonne exécution de cette interdiction, il y a lieu de l’assortir d’une astreinte telle que précisée dans le dispositif de la présente décision.

— La circulation en voiture sur les parcelles louées :

Lors de son audition par les services de gendarmerie le 24 mars 2011, B D de la Faverie P a reconnu avoir circulé avec son véhicule 4x4 dans le champ de céréales de son fermier pour se rendre à son étang. Il a minimisé les faits en expliquant qu’il avait toutefois longé le bois et qu’à cette époque, les plants ne faisaient pas plus de 3 ou 4 cm de hauteur.

En agissant de la sorte, le bailleur s’est comporté comme s’il avait la libre disposition des terres données à bail et a circulé en voiture dans un champ cultivé. Ce comportement fautif a porté atteinte au droit de jouissance paisible du fermier.

La décision des premiers juges sera confirmée en ce qu’elle a fait interdiction aux bailleurs de traverser les parcelles louées avec leurs véhicules. Afin de garantir la bonne exécution de cette interdiction, il y a lieu de l’assortir d’une astreinte telle que précisée dans le dispositif de la présente décision.

— Le comportement de M. B P à l’égard de Mme C :

M. C soutient que B D de la Faverie P insultait son épouse. Il produit à l’appui de son affirmation le témoignage de cette dernière qui doit être reçue avec les précautions d’usage comme tenu du lien existant entre eux.

Ce témoignage n’est corroboré par aucun autre élément objectif et, quelle que soit la bonne foi du fermier, il apparaît que la preuve de ce fait n’est pas suffisamment établie.

La décision des premiers juges sera confirmée en ce qu’elle a débouté le fermier de ce chef de demande.

— L’exercice du droit de chasse :

Le contrat de bail contient une clause relative au droit de chasse selon laquelle : « Le droit de chasse appartient au bailleur, pour lui-même, les personnes qu’il autoriseraient à exercer ou auxquelles il le louerait ou le céderait sans limitation ».

M. B D de la Faverie P, en sa qualité de bailleur, disposait donc du droit de chasser sur les terres données à bail et d’autoriser d’autres personnes à venir chasser.

La clause du contrat ne contient aucune limitation au droit de chasse qui est donc général et s’applique à tout type de gibier et à tout mode de chasse légal. Les parties n’ont pas prévu de délai de prévenance à la charges des bailleurs.

M. C soutient que l’intéressé a organisé des parties de chasse aux gros gibiers sur des parcelles louées sur lesquelles se trouvait son troupeau de bovins et qu’il n’avait pas pris l’initiative de l’en avertir au préalable. Quelle que soit la bonne foi du fermier, ses seules affirmations sont insuffisantes pour établir la réalité du fait qu’il dénonce et encore moins pour caractériser l’existence d’un abus du droit de chasser portant atteinte à son droit de jouissance des biens donnés à bail et dont il conviendrait de prévenir le renouvellement.

La décision des premiers juges sera donc confirmée en ce qu’elle a débouté M. C de ce chef de demande.

— La réparation des toitures :

Il résulte des dispositions de l’article L. 415-3 du code rural et de la pêche maritime que les grosses réparations relatives un bien donné à bail rural sont à la charge exclusive du propriétaire.

En l’espèce, M. C fait valoir que les toitures des granges dépendant du domaine donné à bail présentent des infiltrations qui mouillent les récoltes et rendent ainsi les lieux impropres à l’usage auquel ils sont destinés.

A l’appui de cette demande, il produit le constat dressé le 15 mars 2018 par Me Landelle, huissier de justice, qui a constaté la présence d’espaces entre les tuiles disséminés sur l’ensemble de la surface des toitures. Il a également constaté la présence de marques caractéristiques sur le sol ainsi que des marques de pourrissement en surface de certaines balles de foin.

Il résulte de ces éléments que la toiture de la grange présente de nombreuses infiltrations qui la rendent impropre au stockage des balles de foin. La réparation de la toiture constitue une grosse réparation au sens de l’article précité.

Les bailleurs ne sauraient s’exonérer de la responsabilité en produisant une facture de l’entreprise de M. E qui concerne la réparation de la toiture, non pas de la grange, mais de la maison.

La décision des premiers juges sera donc confirmée en ce qu’elle a ordonné aux bailleurs de procéder à la réparation des toitures des granges louées. Afin de garantir la bonne exécution de cette condamnation, il y a lieu de l’assortir d’une astreinte telle que précisée dans le dispositif de la présente décision passée un délai de quatre mois à compter de la signification de la présente décision.

Sur les autres demandes :

A la suite de la présente procédure, M. C a exposé des frais non compris dans les dépens en première instance et en appel. L’équité commande de l’en indemniser. Mme F D de la Faverie P, M. B D de la Faverie P, Mme J D de la Faverie P seront condamnés in solidum à lui payer la somme de 1 500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile au titre des frais exposés en première instance et celle de 1 500 € au titre de ceux exposés en cause d’appel. La décision des premiers juges sera réformée en ce sens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt contradictoire, en dernier ressort, par mise à disposition au greffe, après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Constate le désistement d’appel de Mme A K de la Ferrière ;

Infirme le jugement du tribunal paritaire des baux ruraux de Limoges en date du 14 janvier 2019 en ses dispositions ayant :

— fixé à une année à compter de la signification du jugement le délai pour transférer aux frais des bailleurs le compteur électrique dans les bâtiments loués et sous astreinte de 100'€ par jour de retard’passé ce délai ;

— fixé à deux ans à compter de la signification du jugement le délai pour enlever et abattre les arbres morts ;

— fixé à une année à compter de la signification du jugement le délai pour procéder aux réparations des toitures des granges louées ;

— débouté M. C de sa demande relative à la réparation des clôtures, de sa demande tendant à garantir les condamnations d’une astreinte et de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile ;

Le confirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau,

Condamne Mme F D de la Faverie P, MM. Y et B D de la Faverie P ainsi que Mmes Z, A et J D de la Faverie P, ès qualités de bailleur à procéder à la réparation des clôtures endommagées décrites dans le constat dressé le 8 janvier 2013 par Me Carron, huissier de justice, et dans le constat dressé le 15 mars 2018 par Me Landelle, huissier de justice ;

Fixe à quatre mois à compter de la signification du présent arrêt le délai pour exécuter les condamnations suivantes :

— transférer à aux frais des bailleurs le compteur électrique dans les bâtiments loués

— enlever et abattre les arbres morts ;

— procéder aux réparations des toitures des granges louées ;

— procéder à la réparation des clôtures ;

Dit que passé ce délai, les bailleurs seront redevables d’une astreinte provisoire de 50 € par jour de retard ;

Dit que les bailleurs seront redevables d’une astreinte de 500 € par infraction constatée à l’interdiction qui leur est faite de pratiquer le tir à la carabine’et de traverser les parcelles louées avec leurs véhicules';

Condamne in solidum Mme F D de la Faverie P, M. B D de la Faverie P, Mme J D de la Faverie P aux dépens de l’appel et à payer à M. C, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, la somme de 1 500 € au titre des frais exposés en première instance et celle de 1 500 € au titre de ceux exposés en cause d’appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

L M. N O

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
  3. Code rural
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