Cour d'appel de Lyon, du 13 mai 2004, 2003/01178

  • Pénalités et sanctions·
  • Intérêt de retard·
  • Impôts et taxes·
  • Recouvrement·
  • Droit d'enregistrement·
  • Impôt·
  • Administration fiscale·
  • Pénalité de retard·
  • Réquisition·
  • Régime fiscal

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Il résulte de l’article 1727 du Code général des impôts que l’intérêt de retard, distinct des pénalités de retard que l’administration fiscale peut, par ailleurs, réclamer, est dû indépendamment de toute sanction et constitue une dette du seul fait du retard pris pour le règlement de l’impôt. D’autre part, l’intérêt de retard n’entre pas dans le champ d’application de l’article 6-1 de la Convention européenne des droits de l’homme qui ne trouve à s’appliquer qu’aux seules pénalités de retard

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Lyon, 13 mai 2004, n° 03/01178
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 2003/01178
Importance : Inédit
Dispositif : other
Date de dernière mise à jour : 15 septembre 2022
Identifiant Légifrance : JURITEXT000006944655
Lire la décision sur le site de la juridiction

Texte intégral

1 RG : 2003/1178 La première chambre de la cour d’appel de Lyon, composée, lors des débats et du délibéré, de : Monsieur JACQUET, président, Madame BIOT, conseiller, Monsieur GOURD, conseiller, en présence, lors des débats en audience publique, de Madame JANKOV, greffier, a rendu l’arrêt contradictoire suivant, EXPOSE DU LITIGE:

La SCI les Bouleaux a acquis le 26 mai 1989 un terrain à bâtir à Divonne les Bains au prix de dix millions de francs. Elle s’est engagée à édifier un immeuble sur ce terrain dans un délai de quatre ans. Elle a sollicité auprès de la direction des services fiscaux des délais pour construire et a, en définitive, obtenu une prorogation réitérée jusqu’au 30 juin 1999. Le 9 septembre 1999, elle a sollicité l’octroi d’une nouvelle prorogation qui lui a été refusée par courrier des services fiscaux en date du 26 novembre 1999. Le 31 janvier 2000, elle a fait l’objet d’un redressement fiscal, Monsieur le directeur des services fiscaux de l’Ain lui notifiant un rappel des droits d’enregistrement dont elle avait été initialement exonérée du fait de son engagement de construire, y compris le droit supplémentaire de 1% prévu par l’article 1840 G ter du code général des impôts, et ce, à compter du 26 mai 1989, date de l’acquisition de l’immeuble. L’administration fiscale a accepté d’imputer, sur le montant de ce redressement, le crédit de taxe à la valeur ajoutée mais a rejeté, le 29 mars 2001, le surplus des réclamations de la SCI les Bouleaux. Le 23 mai 2002, la SCI les Bouleaux a fait assigner Monsieur le directeur des services fiscaux de l’Ain devant le tribunal de grande instance de Bourg en Bresse et a demandé la décharge totale des intérêts d’un montant de 79.514 euros 36 (521.580 francs) et la condamnation de son adversaire à lui payer 1.524 euros 49 en application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile. Monsieur le directeur des services fiscaux de l’Ain s’est opposé à ces demandes. Par jugement en date du 9 janvier 2003, le

tribunal de grande instance de Bourg en Bresse a : -

annulé la décision de rejet rendue par l’administration le 29 mars 2001 en ce qu’elle a appliqué des intérêts de retard sur le rappel de droit au titre de la période antérieur au 1er octobre 1999 pour un montant de 510.945 francs, -

pour le surplus, o

débouté la demanderesse de ses demandes et infirmé la décision de rejet du 29 mars 2001, o

dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile, -

condamné l’administration aux dépens lesquels comprendront exclusivement les frais définis à l’article L 207 et R 207-1 du livre des procédures fiscales,

Monsieur le directeur des services fiscaux de l’Ain a relevé appel de cette décision.

Il demande à la cour d’infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a substitué un nouveau point de départ à l’intérêt de retard et de le confirmer en ce qu’il dénie le caractère de sanction à l’intérêt de retard. Il sollicite la condamnation de son adversaire aux entiers dépens.

* Il fait valoir que le point de départ de l’intérêt de retard est l’acte de mutation qui constitue le fait générateur des droits d’enregistrement. Il observe que le point de départ de quatre ans pour construire est la date de l’acte de mutation bénéficiant de l’exonération de droits d’enregistrement (article 691 ancien du code général des impôts ) et que l’intérêt compensant le préjudice lié à l’encaissement tardif de sa créance par le Trésor public remonte au jour de l’acte de mutation, date à laquelle le contribuable a bénéficié du régime fiscal plus favorable qui a ensuite été remis en cause, et non pas à la première réquisition du service. Il relève qu’il ne convient pas de faire un amalgame erroné entre pénalités et intérêts de retard, qu’il résulte de l’article 1727 du code général des impôts que l’intérêt de retard est dû indépendamment de toute sanction, que selon la Cour de cassation, l’intérêt de retard ne constitue pas une pénalité de retard mais une dette du seul fait de retard pris pour le dépôt des déclarations et des versements correspondants, et que l’intérêt de retard n’entre pas dans le champ d’application de l’article 6 -1 de la Convention européenne des droits de l’homme qui ne trouve à s’appliquer qu’aux seules pénalités de retard.

L’intimée, la SCI les Bouleaux, demande à la cour de confirmer le jugement entrepris, y ajoutant, de prononcer à son bénéfice une décharge supplémentaire de 1.621 euros, et de condamner l’administration à lui verser la somme de 1.500 euros en application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile et à payer les entiers dépens.

* Elle expose que l’administration fiscale a, à tort, appliqué un intérêt de retard de 0, 75 % par mois à compter de la date d’acquisition du terrain alors que l’exonération prévue s’analyse en une condition suspensive et que les droits d’enregistrement ne deviennent exigibles que si la construction n’est pas réalisée dans le délai légalement prévu. Elle ajoute qu’elle n’est pas un marchand de biens et que l’article 1840 ter du code général des impôts, qui seul ici trouve application, précise expressément qu’en cas de défaut de production de la justification prévue (.) l’acquéreur est tenu d’acquitter, à première réquisition, l’imposition dont il avait été exonéré. Elle indique qu’ainsi le fait générateur de l’imposition est bien la réquisition de l’administration. Elle relève que l’administration fiscale, pour une période de 126 mois, applique un taux global d’intérêt de 94, 5 % manifestement excessif et que ces intérêts ainsi calculés doivent s’analyser comme une sanction pénale qui, au regard de l’article 6 -1 de la Convention européenne des droits de l’homme, peut être modulée par les juges et ramenée, en l’espèce, au taux légal en vigueur. MOTIFS DE LA DECISION : Attendu que SCI les Bouleaux a acquis le 26 mai 1989 un terrain à Divonne les

Bains au prix de dix millions de francs ; que, cette acquisition ayant été faite pour édifier une construction, elle a bénéficié de l’exonération du doit d’enregistrement à la condition de bâtir sur ce terrain dans les quatre ans ; que ce délai a été prorogé à plusieurs reprises par l’administration fiscale jusqu’au 30 juin 1999 ; que la SCI les Bouleaux n’a pas réalisé la construction projetée ;

* attendu qu’elle soutient, d’abord, que le droit d’enregistrement, dû, en conséquence, par elle et dont elle ne conteste pas le principe, ne doit porter intérêts que du jour où le règlement en était exigible à savoir à première réquisition de l’administration après la fin du délai imparti, ainsi que le prévoit expressément l’article 1840 ter du code général des impôts ; mais attendu que si le contribuable a, en l’espèce, bénéficié d’un régime fiscal plus favorable c’est à la condition de construire dans le délai imparti ; que, la SCI les Bouleaux n’ayant pas respecté son engagement, il doit être fait, en conséquence, application du régime fiscal de droit commun qui prévoit le paiement des droits d’enregistrement à la date d’acquisition ; que la référence à la première réquisition du service prévue par l’article 1840 ter du code général des impôts fixe seulement la modalité de recouvrement de l’imposition correspondante ; qu’il convient, en conséquence, de réformer à cet égard le jugement entrepris ;

* attendu que la SCI les Bouleaux soutient, ensuite, que l’intérêt de retard de 0, 75 % par mois prévu par le code général des impôts est en l’espèce excessif et constitue, comme tel, une amende pénale déguisée, qui, à ce titre et au regard de l’article 6 -1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme, peut être modulée par les juges et ramenée, en l’occurence, au taux légal en vigueur ; mais attendu que la cour relève que les intérêts de retard sont distincts des pénalités de retard que l’administration fiscale peut, par ailleurs, réclamer ; que, en effet, il résulte de l’article 1727 du code général des impôts que l’intérêt de retard est dû indépendamment de toute sanction et constitue une dette du seul fait du retard pris pour le règlement de l’impôt ; que l’intérêt de retard n’entre pas dans le champ d’application de l’article 6 -1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme qui ne trouve à s’appliquer qu’aux seules pénalités de retard ; qu’il y a lieu sur ce point de confirmer le jugement entrepris et de débouter la SCI les Bouleaux de l’ensemble de ses demandes ;

* attendu que la partie qui succombe doit supporter les entiers dépens ; PAR CES MOTIFS : La cour, Réformant partiellement le jugement entrepris, Déboute la SCI les Bouleaux de l’ensemble de ses demandes. Condamne la SCI les Bouleaux aux dépens de première instance d’appel. Autorise l’avoué de son adversaire à recouvrer directement contre elle les dépens d’appel dont il a fait l’avance

sans avoir reçu provision.

* Cet arrêt a été prononcé publiquement par le président, en présence du greffier, et a été signé par eux. LE GREFFIER,

LE PRESIDENT, Madame JANKOV

Jean François JACQUET

Extraits similaires
highlight
Extraits similaires
Extraits les plus copiés
Extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Lyon, du 13 mai 2004, 2003/01178