Cour d'appel de Lyon, 26 octobre 2007, 06/07950

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Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Selon l’article L122-6 du Code du travail, la faute grave résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise pendant la durée du préavis.

En l’espèce, il ressort des attestations concordantes que le salarié a proféré des insultes ainsi que des menaces à l’encontre de son supérieur hiérarchique, puis a réitéré ses menaces envers son supérieur et en a proféré de nouvelles à l’encontre du président-directeur-général de l’entreprise. Il importe peu que les témoignages ne rapportent pas ces scènes dans des termes absolument identiques dès lors qu’il n’existe entre eux aucune contradiction flagrante ni aucune incohérence.

En outre, il semble que le supérieur hiérarchique du salarié ne se soit pas toujours comporté de façon très digne avec ce dernier, car des témoignages attestent qu’il a parfois tenu des propos déplacés et racistes envers lui. Mais cette circonstance n’explique pas, ne justifie pas et n’excuse pas le comportement incorrect observé chez le salarié quelques temps après les faits signalés par les témoins. Elle excuse encore moins les insultes et menaces proférées par le salarié.

Les menaces et insultes proférées par le salarié constituent donc une violation des obligations découlant du contrat de travail d’une importance telle qu’elles ont rendu impossible son maintien dans l’entreprise pendant la durée du préavis.

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, ct0193, 26 oct. 2007, n° 06/07950
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 06/07950
Importance : Inédit
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Saint-Étienne, 20 novembre 2006
Dispositif : other
Date de dernière mise à jour : 15 septembre 2022
Identifiant Légifrance : JURITEXT000017700265
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Sur les parties

Texte intégral

AFFAIRE PRUD’HOMALE

RAPPORTEUR

R.G : 06 / 07950

X…

C /

SOCIETE JEAN-PIERRE Y…

APPEL D’UNE DECISION DU :

Conseil de Prud’hommes de SAINT-ETIENNE

du 21 Novembre 2006

RG : F 06 / 00145

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 26 OCTOBRE 2007

APPELANT :

Monsieur Tarik X…

représenté par Maître CHABANNES, avocat au barreau de ST ETIENNE substitué par Maître KELES Saint-Etienne, avocat au même barreau

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2006 / 033794 du 24 / 05 / 2007 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de LYON)

INTIMEE :

SOCIETE JEAN-PIERRE Y…

14 route de l’Etrat

42270 ST PRIEST EN JAREZ

représentée par Maître Jean-Pierre PALANDRE, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

PARTIES CONVOQUEES LE : 27 Avril 2007

DEBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 20 Septembre 2007

Présidée par M. Bruno LIOTARD, Président, magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Madame Malika CHINOUNE, Greffier

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Monsieur Bruno LIOTARD, Président

Madame Hélène HOMS, Conseiller

Madame Marie-Claude REVOL, Conseiller

ARRET : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 26 Octobre 2007 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Signé par Monsieur Bruno LIOTARD, Président, et par par Madame PELLETIER Annick, adjoint administratif assermenté faisant fonction de Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS ET PROCÉDURE :

Après avoir suivi divers stages de vente au cours de l’année 2004 au sein de la SAS Y…, concessionnaire automobile, Monsieur X… a été embauché par cette société le 6 juin 2005 dans le cadre d’un contrat jeunes en entreprise avec affectation au service de la préparation des véhicules neufs.

Il a été muté le 29 septembre 2005 au service des pièces détachées.

Par lettre recommandée avec avis de réception en date du 16 février 2006, il a été licencié pour faute grave.

Saisi par Monsieur X…, le Conseil de Prud’hommes de SAINT-ETIENNE a, par jugement en date du 21 novembre 2006, déclaré bien fondé le licenciement pour faute grave et débouté le salarié de toutes ses demandes en le condamnant à payer à la SAS Y… 100 € au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

Appelant de cette décision, Monsieur X… demande à la Cour de :

— réformer en totalité le jugement précité,

— déclarer son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

— condamner en conséquence la SAS Y… à lui payer les sommes suivantes :

. 1. 473,50 € à titre d’indemnité de préavis,

. 147,35 € pour congés payés afférents avec intérêts au taux légal sur ces deux sommes à compter du jour de la demande,

. 8. 841 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse avec intérêts légaux sur cette somme à compter de la décision attendue,

— condamner la SAS Y… à lui remettre un bulletin de salaire correspondant au préavis, un certificat de travail et une attestation destinée aux ASSEDIC rectifiée en conséquence de l’arrêt,

— et condamner la SAS Y… à lui payer 2. 500 € au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu’aux dépens de première instance et d’appel.

A cet effet, Monsieur X… soutient :

— que pour apprécier la réalité du motif de licenciement et la valeur probante des pièces des parties, il faut tenir compte du contexte des relations de travail,

— qu’après sa mutation dans le service des pièces détachées, il s’est trouvé confronté à l’attitude hostile et méprisante de son supérieur hiérarchique qui tenait des propos racistes envers lui comme en ont attesté deux clients de la concession ainsi qu’un ancien salarié de l’entreprise,

— qu’aux mois de décembre 2005 et janvier 2006, il a fait l’objet d’accusations de vol de véhicules neufs ainsi que de clés de véhicules, son employeur lui ayant indiqué que puisqu’il était domicilié dans un quartier difficile de la ville et même s’il n’avait pas participé directement aux cambriolages, il devait calmer les auteurs des faits,

— que la plainte qu’il avait déposée à la suite de ces accusations avait été classée sans suite mais qu’il ressortait de l’enquête à laquelle il avait été procédé que des membres de l’entreprise supposaient bien qu’il devait avoir des contacts avec les délinquants de son quartier,

— que son licenciement était intervenu dans ce contexte,

— qu’il lui était reproché d’avoir insulté le responsable du magasin le 2 février 2006 en le traitant de raciste et de branleur et d’avoir confirmé ces propos en présence de plusieurs témoins,

— que les deux attestations produites à ce sujet n’établissaient pas qu’au delà de ses protestations, il ait porté quelqu’insulte ou menace à l’encontre de son supérieur,

— qu’aucune d’entre elles ne confirmait les insultes prétendues,

— que l’un des témoins n’était pas présent dans le bureau où la scène s’était produite,

— qu’il lui était également reproché d’avoir tenu des propos incorrects à l’égard du président-directeur-général de l’entreprise,

— que la teneur de ces propos n’était rapportée par aucun témoin,

— que la preuve n’était pas établie de la faute grave alléguée,

— que si des mots avaient été échangés enter lui-même et le responsable de magasin, il subsistait un doute sur la responsabilité de l’un et de l’autre des protagonistes,

— qu’eu égard au contexte, sa réaction verbale, même excessive, ne saurait constituer un motif de licenciement,

— et que les indemnités qu’il réclamait étaient justifiées dès lors qu’il était resté sans emploi pendant de nombreux mois.

La SAS Y… prie la Cour de confirmer le jugement entrepris, de débouter Monsieur X… de toutes ses demandes et de le condamner à lui payer 1. 000 € au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

Elle fait valoir :

— que l’attitude agressive et excessive de Monsieur X… s’est manifestée dès le début de son contrat de travail, contraignant le président-directeur-général à le muter dans un autre service alors qu’il aurait pu le licencier,

— que le comportement de Monsieur X… ne s’est pas amélioré,

— que le paroxysme a été atteint le 2 février 2006 lorsque Monsieur X… s’en est pris violemment à Monsieur A…, responsable du magasin de pièces détachées,

— que ce responsable a attesté des propos agressifs de Monsieur X… à son égard,

— qu’il a ajouté que Monsieur X… a poursuivi ses insultes dans le bureau du président-directeur-général, Monsieur Y…,

— que deux autres salariés ont témoigné des propos injurieux ou menaçants proférées par Monsieur X…,

— que les témoignages recueillis par la Police dans le cadre de l’enquête ayant suivi le dépôt de plainte de Monsieur X… a démontré qu’en aucun cas, Monsieur Y… n’avait accusé ce dernier de vol,

— que les attestations produites par l’appelant au sujet du racisme prêté à Monsieur A… sont contestées, la personne mise en cause n’étant pas nommée et les faits n’étant pas datés,

— que les termes du témoignage au demeurant tardif de Monsieur B…, ancien salarié de l’entreprise, sont vagues et, de surcroît, contredits par les pièces du dossier,

— et que le licenciement de Monsieur X… pour faute grave était bien fondé comme l’a jugé le conseil de prud’hommes.

DISCUSSION :

La faute grave énoncée par l’article L. 122-6 du code du travail résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise pendant la durée du préavis.

Monsieur X… a été licencié au motif suivant :

« Le jeudi 2 février 2006 à 11 heures, vous avez insulté le responsable de magasin en le traitant de » raciste « et de » branleur, toi et tes magasiniers ". Vous avez confirmé ces propos en présence de plusieurs témoins en y ajoutant des menaces à l’encontre du responsable de magasin et en tenant des propos incorrects à l’égard du président-directeur-général.

L’ensemble de ce comportement caractérise une faute grave justifiant votre licenciement immédiat ".

La SAS Y… produit trois attestations dans lesquelles il est indiqué notamment :

— par Monsieur C…, commercial, qu’il a surpris Monsieur X… le 2 février 2006 tenant des propos menaçants envers la personne de Monsieur A… « Fais le malin, tu vas le payer », scène qui s’est produite dans le magasin de pièces détachées en présence de Monsieur D… et de Monsieur E…,

— par Monsieur A…, responsable magasin, qu’il a été agressé verbalement par des propos injurieux de Monsieur X… le 2 février 2006 : « petit chef de merde, branleur, arrête de me fliquer etc… » et que convoqué dans le bureau de Monsieur Y…, Monsieur X… a renouvelé ses propos injurieux tout en prononçant des menaces tant à son encontre qu’à celle de Monsieur Y…,

— et par Monsieur F…, responsable véhicules neufs, qu’à la même date, alors qu’il était présent dans le bureau de Monsieur Y…, il a entendu des propos incorrects et injurieux de la part de Monsieur X…, ces propos ayant également atteint Monsieur A….

Il ressort de ces attestations concordantes que Monsieur X… a dans un premier temps, proféré des insultes ainsi que des menaces à l’encontre de Monsieur A…, son supérieur hiérarchique, avant, dans un deuxième temps, de réitérer ses menaces envers son supérieur et d’en proférer de nouvelles à l’encontre du président-directeur-général de l’entreprise. Il importe peu que les témoignages ne rapportent pas les deux scènes dans des termes absolument identiques dès lors qu’il n’existe entre eux aucune contradiction flagrante ni aucune incohérence.

Il semble que Monsieur A… ne se soit pas toujours comporté de façon très digne avec Monsieur X…, comme le démontrent les attestations de Messieurs G… et H… qui l’ont entendu tenir des propos déplacés et racistes au début de l’année 2006.

Cette circonstance n’explique pas, ne justifie pas et n’excuse pas le comportement incorrect observé par le salarié plusieurs jours ou plusieurs semaines après les faits signalés par les témoins.

Elle excuse encore moins les insultes et menaces proférées par Monsieur X… à l’encontre de Monsieur Y….

Il ne doit pas être perdu de vue que le 29 septembre 2005, le président-directeur-général de l’entreprise a adressé à Monsieur X… un courrier destiné à informer ce dernier de son affectation au service des pièces détachées pour le motif suivant : « Il s’avère qu’après un peu moins de 4 mois d’activité, nous ne sommes pas satisfaits du travail que vous fournissez au sein de ce service et vous avez également des difficultés relationnelles sérieuses avec l’ensemble des membres du personnel de ce service ».

Dans ce contexte, les menaces et les insultes proférées le 2 février 2006 par Monsieur X… constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail d’une importance telle qu’elles ont rendu impossible le maintien de ce salarié dans l’entreprise pendant la durée du préavis.

La décision des premiers juges doit être confirmée en totalité.

Il n’est pas inéquitable de laisser à la SAS Y… la charge de tous ses frais de défense. Sa demande fondée sur les dispositions de l’article 700 du nouveau code de procédure civile doit être rejetée.

Monsieur X… succombe et devra supporter les dépens. Aucune indemnité ne peut lui être allouée au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile. Sa demande de ce chef doit être rejetée.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Confirme la décision des premiers juges,

Rejette les demandes des parties fondées sur les dispositions de l’article 700 du nouveau code de procédure civile,

Condamne Monsieur X… aux dépens d’appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code du travail
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Cour d'appel de Lyon, 26 octobre 2007, 06/07950