Cour d'appel de Nîmes, 8 décembre 2009, 08/00302

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Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Seule constitue une perte de chance réparable, la disparition actuelle et certaine d’une éventualité favorable en lien de causalité direct avec une faute du médecin. Une perte de chance hypothétique n’est pas indemnisable.

Dès lors, le choix d’opérer le patient à risque dans une unité de surveillance plutôt que dans un service de réanimation ne permet pas de caractériser une insuffisance ou une défaillance dans les soins prodigués, la différence essentielle entre ces deux types de services reposant dans la durée de l’assistance ventilatoire qui ne peut être que temporaire dans le premier.

Ainsi, compte tenu de la nature des complications respiratoires survenues et de leur issue irréversible chez un patient à poumon unique atteint d’une aggravation nette de l’épanchement péricardique ancien, la réalité d’une perte de chance de guérison ou d’amélioration en relation de causalité avec les manquements relevés par les experts n’est pas établie

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Sur la décision

Référence :
CA Nîmes, ct0355, 8 déc. 2009, n° 08/00302
Juridiction : Cour d'appel de Nîmes
Numéro(s) : 08/00302
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Privas, 29 novembre 2007
Dispositif : other
Date de dernière mise à jour : 15 septembre 2022
Identifiant Légifrance : JURITEXT000021861535
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Sur les parties

Texte intégral

ARRÊT No733

R. G. : 08 / 00302

CJ

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PRIVAS

30 novembre 2007

P…

X…

Y…

X…

C /

S. A. CLINIQUE PASTEUR

Z…

A…

Q…

B…

CPAM DE LA DROME

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

1ère Chambre A

ARRÊT DU 08 DÉCEMBRE 2009

APPELANTS :

Madame Denise

C…

épouse X…

née le 03 Octobre 1937 à MEKNES (MAROC)

26000 VALENCE

représentée par la SCP GUIZARD-SERVAIS, avoués à la Cour

assistée de Me Anne-Catherine D…, avocat au barreau de VALENCE

Madame Florence X… épouse Y…

née le 25 Mai 1963 à MELUN (77)

3 Parc de Lattre de Tassigny

92400 COURBEVOIE

représentée par la SCP GUIZARD-SERVAIS, avoués à la Cour

assistée de Me Anne-Catherine D…, avocat au barreau de VALENCE

Monsieur Bernard Y… pris en sa qualité d’administrateur légal de ses enfants-Pierre né le 3 Février 1994, Sophie Y… née le 03 Mars 1996, François né le 30 Décembre 1999

né le 26 Juin 1964 à SAINT RAPHAEL (83)

3 Parc de Lattre de Tassigny

92400 COURBEVOIE

représenté par la SCP GUIZARD-SERVAIS, avoués à la Cour

assisté de Me Anne-Catherine D…, avocat au barreau de VALENCE

Monsieur Olivier X…

né le 04 Mai 1965 à VALENCE (26)

26000 VALENCE

représenté par la SCP GUIZARD-SERVAIS, avoués à la Cour

assisté de Me Anne-Catherine D…, avocat au barreau de VALENCE

INTIMÉS :

S. A. CLINIQUE PASTEUR, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

294 Bd Général de Gaulle

07500 GUILHERAND GRANGES

représentée par la SCP P. PERICCHI, avoués à la Cour

assistée de la SCP CHAVRIER FUSTER SERRE, avocats au barreau de PRIVAS

Monsieur Philippe Z…

Clinique Pasteur-294 Bd Général de Gaulle

07500 GUILHERAND GRANGES

représenté par la SCP M. E…, avoués à la Cour

assisté de Me F…, avocat au barreau de LYON

Monsieur Philippe A…

né le 11 Janvier 1949 à MARAULT (52)

Clinique Pasteur-294 Bd Général de Gaulle

07500 GUILHERAND GRANGES

représenté par la SCP FONTAINE-MACALUSO JULLIEN, avoués à la Cour

assisté du Cabinet AUBER, avocats au barreau de PARIS

Monsieur Laurence

G…

né le 08 Janvier 1968 à TROYES (10)

Clinique Pasteur-294 Bd Général de Gaulle

07500 GUILHERAND GRANGES

représenté par la SCP FONTAINE-MACALUSO JULLIEN, avoués à la Cour

assisté du Cabinet AUBER, avocats au barreau de PARIS

Monsieur B…

Clinique Pasteur-284 Bd Général de Gaulle

07500 GUILHERAND GRANGES

représenté par la SCP POMIES-RICHAUD-VAJOU, avoués à la Cour

assisté de la SCP BERAUD COMBE LECAT CHEMEL, avocats au barreau de PRIVAS

CPAM DE LA DROME

prise en la personne de ses représentants légaux en exercice, domiciliés ès qualités au siège social sis

Avenue du Président Edouard H…

BP 1000

26204 VALENCE CEDEX

représentée par la SCP CURAT-JARRICOT, avoués à la Cour

assistée de Me Viviane I…, avocat au barreau de PRIVAS

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 02 Octobre 2009

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

M. Dominique BRUZY, Président,

Mme Christine JEAN, Conseiller,

M. Serge BERTHET, Conseiller,

GREFFIER :

Mme Véronique VILLALBA, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision.

DÉBATS :

à l’audience publique du 27 Octobre 2009, où l’affaire a été mise en délibéré au 08 Décembre 2009

Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel ;

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé et signé par M. Dominique BRUZY, Président, publiquement, le 08 Décembre 2009, date indiquée à l’issue des débats, par mise à disposition au greffe de la Cour.

* * *

EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE ET DES PRÉTENTIONS DES PARTIES

M. Michel X… a été opéré le 1er avril 2003 par le Dr Z…, à la clinique PASTEUR de GUILHERAND GRANGES (07), en raison d’un épanchement péricardique consécutif à une radiothérapie subie à la suite d’une pneumonectomie droite réalisée en 1993 et qui s’était aggravé depuis l’année 2002. Après la réalisation de la péricardectomie avec fenêtre péricardo-péritonéale, M X… a présenté une décompensation respiratoire par pneumopathie sur le poumon gauche. Il a été transféré dans le service de réanimation polyvalente de l’hôpital de Valence le 3 avril 2003 où il est décédé le 26 avril 2003.

Par exploit d’huissier du 30 juillet 2004, Mme Denise X… a fait assigner en référé la clinique PASTEUR, le Dr Z…, le Dr J…, et les anesthésistes, les Drs A…, B… aux fins d’expertise. Par ordonnance du 7 octobre 2004, un collège d’experts constitué des Drs METRAS, K… et MANELLI a été désigné. Le rapport d’expertise a été déposé le 16 décembre 2005.

Par exploits du 27 septembre 2006, Mme X…, ses enfants, Florence et Olivier X…, ainsi que M. et Mme Y… agissant en qualité d’administrateurs légaux de leurs enfants mineurs Sophie, Pierre et François ont fait assigner devant le Tribunal de Grande Instance de Privas, la SA clinique PASTEUR, le Dr Z…, les anesthésistes, les Drs A…, B… et Q…, ainsi que la CPAM de la Drôme en responsabilité pour fautes médicales et en réparation de leurs préjudices.

Par jugement du 30 novembre 2007, le Tribunal de Grande Instance de Privas a déclaré inopposable au Dr

G…

le rapport d’expertise judiciaire et débouté les consorts L…

Y… de leurs demandes formées à l’encontre de la clinique et des médecins. La CPAM de la Drôme a été déboutée de ses demandes. Le Tribunal a dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du Code de Procédure Civile et a condamné les consorts L…

Y… aux dépens.

Les consorts L…

Y… ont relevé appel de cette décision.

Pour l’exposé du détail des prétentions et moyens des parties devant la Cour, il est expressément fait référence à leurs conclusions récapitulatives signifiées le :

-31 juillet 2008 pour la clinique PASTEUR,

-15 septembre 2008 pour le Dr Z…,

-24 octobre 2008 pour Mme

G…

et M A…,

-27 novembre 2008 pour Mr B…,

—  7avril 2009 La CPAM de la Drôme,

-15 septembre 2009 pour les consorts L…

Y….

Les consorts M… demandent la réformation du jugement déféré, l’homologation du rapport d’expertise judiciaire et entendent voir dire et juger que les Drs Z…, A… et B… ont commis des fautes et négligences qui sont à l’origine d’une perte de chance pour M X… d’amélioration de son état ou de guérison ; ils demandent la condamnation in solidum des défendeurs à payer :

— à Mme Denise X… la somme de 16 358, 14 € au titre de son préjudice économique et celle de 24 000 € au titre de son préjudice moral,

— en réparation de leur préjudice moral :

* à Mme Florence Y… née X… la somme de 14. 000 euros,

* à M. Olivier X… la somme de 14 000 €,

* à Pierre, Sophie, François Y… la somme de 10. 000 € à chacun,

* la somme de 2000 € en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

M Z… conclut à la confirmation du jugement déféré. A titre subsidiaire, il entend voir limiter à 20 % la fixation de la perte de chance à répartir dans une égale mesure entre les quatre praticiens intimés. Il conclut à la réduction des demandes d’indemnisation formée au titre des préjudices moraux et au rejet de la demande de la CPAM ; il sollicite l’allocation d’une somme de 1000 € au titre des frais irrépétibles.

Mme

G…

et M A… demandent la confirmation du jugement entrepris et la condamnation des demandeurs à leur payer une somme de 2000 € en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile. À titre subsidiaire, ils demandent la réduction des indemnisations sollicitées et entendent voir limiter à 5 % la part de responsabilité qui serait mise à la charge du Dr A… au titre d’une perte de chance de survie.

M B… conclut au rejet de l’appel et à la confirmation du jugement déféré en l’absence de toute faute professionnelle qui lui serait imputable dans le cadre de la consultation pré-anesthésique et de lien de causalité entre cette consultation et le décès. Il sollicite l’allocation d’une somme de 3000 € en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

La clinique PASTEUR demande la confirmation du jugement entrepris et entend voir dire inopposable à son égard l’expertise judiciaire à laquelle elle n’a pas été appelée. Subsidiairement, elle entend voir dire qu’elle n’a commis aucune faute en lien de causalité direct et certain avec le préjudice allégué et demande condamnation des appelants à lui payer une somme de 3000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive outre une somme de 3000 € en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

La CPAM de la Drome demande la réformation du jugement déféré aux fins d’entendre déclarer les Drs Z…, B…, A… et la clinique PASTEUR responsables de fautes dans la réalisation de l’intervention chirurgicale subie par M. X… et d’obtenir leur condamnation in solidum à lui payer la somme de 30. 808, 80 € au titre des frais d’hospitalisation du 3 avril 2003 au 26 avril 2003 outre la somme de 955 € au titre de l’indemnité forfaitaire pour frais de gestion et 2 000 € au titre de ses frais irrépétibles.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance en date du 2 octobre 2009.

MOTIFS

Les actes médicaux en cause étant postérieurs au 5 Septembre 2001, la loi du 4 mars 2002 est applicable à l’espèce. Conformément à l’article 1142-1 du Code de la Santé Publique, la responsabilité du médecin est subordonnée à la démonstration d’une faute en lien de causalité avec le préjudice, qu’il appartient au malade ou à ses ayants-droit de prouver.

Les appelants se prévalent d’une perte de chance de guérison de M X… ou d’amélioration de son état, caractérisée selon eux par les conclusions de l’expertise judiciaire.

Mme

G…

n’a pas été appelée ni représentée aux opérations d’expertise. C’est donc à bon droit que le rapport d’expertise lui a été déclaré inopposable. Aucune demande n’est présentée contre elle par les appelants. La clinique PASTEUR, assignée en référé, a été représentée aux opérations expertales par le Dr N… mandaté par la Cie AXA.

Le médecin est tenu de prodiguer des soins consciencieux, attentifs et, réserve faite de circonstances exceptionnelles, conforme aux données acquises de la science.

En l’espèce, M. Michel X… a été adressé au Dr Z… par son cardiologue pour réalisation d’une fenêtre péricardique. Les experts judiciaires concluent que M. X… est décédé d’un syndrome de détresse respiratoire aigu sur poumon unique probablement consécutif à une inhalation de liquide gastrique ; ils retiennent que l’intervention était justifiée, qu’elle a été correctement réalisée, que le type d’anesthésie et sa conduite n’appellent pas de remarque particulière et ils qualifient la prise en charge de M. X… d’attentive et diligente. Toutefois, ils relèvent que certains éléments sont « critiquables » tels le choix d’opérer ce patient à risque dans un établissement qui ne comportait pas de service de réanimation, la succession de trois anesthésistes différents et l’absence de transfert dans une unité de réanimation avant le 3 avril 2003.

Ils concluent en ces termes :

«  La surveillance et le traitement de ce type de complication doivent être gérés dans une structure de réanimation et non en surveillance continue. Le choix de réaliser l’anesthésie et l’intervention à la clinique Pasteur qui ne comporte pas de réanimation a constitué une perte de chance pour M. X…. Le Dr Z… et les Drs B…, LABBE et A… auraient pu opérer dans un autre établissement de soins ou adresser M X… dans une structure mieux adaptée.

La succession de trois anesthésistes différents pour la consultation, la visite pré-anesthésique et l’anesthésie elle-même chez un patient classé ASA III, sans être contraire à la lettre du Code de la Santé, n’est pas conforme à l’usage et aux bonnes pratiques professionnelles ; si l’on peut admettre que la consultation soit pratiquée par un anesthésiste différent, la visite prè-anesthésique et l’anesthésie auraient dû être pratiquées par le même anesthésiste.

Le transfert dans une unité de réanimation aurait pu s’effectuer dans la nuit du premier au 2 avril 2003 en raison de l’intensification des signes respiratoires avec hypoxémie très sévère. En tout cas, ce transfert s’imposait le 2 avril au matin où l’état de M X… loin de s’être amélioré, s’était encore aggravé. La prise de ce type de décisions revient de façon solidaire au chirurgien et à l’anesthésiste.

Les liens entre les manquements relevés et le décès ne peuvent pas être établis de façon formelle. Seule une perte de chance peut être évoquée ".

Cependant, seule constitue une perte de chance réparable la disparition actuelle et certaine d’une éventualité favorable en lien de causalité direct avec une faute. Une perte de chance hypothétique n’est pas indemnisable.

En l’espèce, comme à juste titre retenu par le Tribunal aux termes de motifs précis et pertinents que la Cour adopte, il n’a pas pu être établi formellement de lien de causalité entre les manquements relevés et le décès de M X…. Ce point n’est d’ailleurs pas remis en cause par les appelants qui précisent en page 8 de leurs conclusions récapitulatives que « le dommage n’est pas constitué par le décès mais par la perte d’une chance de guérison ou simplement d’amélioration de son état. »

Or, les experts ne caractérisent pas une insuffisance des soins prodigués à M X… dans l’unité de surveillance continue de la clinique Pasteur. La différence essentielle entre un service de ce type et un service de réanimation dans la durée de l’assistance ventilatoire, qui ne peut être que temporaire dans le premier, comme la différence d’effectifs est sans lien avec les complications survenues chez ce patient. En effet, il ressort du rapport d’expertise et du compte-rendu du Dr O…, chef du service de réanimation du centre hospitalier de Valence où a été transféré M X…, que ce dernier a été intubé et a bénéficié d’une ventilation mécanique à la clinique, en service de surveillance continue, avant son transfert et que ses constances étaient alors stables. Le Dr O… précise que le transfert en réanimation en post-opératoire immédiat n’aurait pas été accepté puisque le patient ne justifiait pas le recours immédiat à la ventilation mécanique et qu’un traitement médical et une surveillance pouvaient être effectués en surveillance continue. Le décret du 7 avril 2002 dispose que les unités de surveillance continue sont organisées pour prendre en charge des malades « qui nécessitent, en raison de la gravité de leur état, ou du traitement appliqué, une observation clinique et biologique répétée et méthodique », ce qui était le cas de M X…. Au cours de la période sous ventilation mécanique en surveillance continue, les échanges gazeux sont restés bons et l’hémodynamique était stable. Le seul fait de l’opération d’un patient classé ASA III à la clinique ne peut être imputé à faute en l’absence de preuve d’une insuffisance ou de défaillance dans les soins alors surtout que les chirurgiens vasculaires de la clinique Pasteur dont le Dr Z… assuraient sur le secteur les urgences vasculaires graves, que plus de mille patients de cette classe avaient chaque année été opérés dans cet établissement depuis 2001 et que le Dr Z… était également attaché au centre hospitalier de Valence avec lequel la collaboration était déjà effective depuis plusieurs années.

S’agissant de l’intervention de trois anesthésistes différents pour la consultation, la visite pré-anesthésique et l’anesthésie elle-même, elle n’est pas contraire au Code de la Santé Publique comme précisé par les experts judiciaires et cette pratique est d’ailleurs courante dans les établissements hospitaliers même dotés d’un service de réanimation. Le Tribunal a pertinemment relevé que les experts judiciaires ne caractérisaient pas en quoi ce fait a causé un préjudice à M X…; il n’est non plus établi aucun lien de causalité avec les complications survenues et l’absence d’amélioration de l’état du patient.

Les experts retiennent encore au titre des manquements imputés au chirurgien et à l’anesthésiste l’absence de transfert dans une unité de réanimation avant le 3 avril 2003 alors qu’il s’imposait selon eux dès le 2 avril au matin. Toutefois, ils ne donnent aucun élément précis sur les conséquences de ce retard ni sur une relation de causalité avec l’absence d’amélioration ou de guérison de l’état du malade. Ils précisent au contraire que la surinfection pulmonaire du syndrome de détresse respiratoire aigu (SDRA) chez un patient n’ayant qu’un seul poumon, probablement consécutif à une inhalation de liquide gastrique est très fréquente et participe « à l’évolution vers l’irréversibilité ». L’absence de perte de chance en lien de causalité avec la date du transfert est caractérisée par les constatations mêmes des experts judiciaires qui indiquent en page 12 de leur rapport que « la question d’un transfert en réanimation depuis le 2 avril au matin, voire pendant la nuit du premier au 2 avril aurait dû se poser sans qu’il soit possible d’affirmer que l’évolution ait été différente dans cette hypothèse. » Il faut encore observer que M X… a été intubé et ventilé à la clinique Pasteur dès le 2 avril sans attendre le transfert au centre hospitalier, qu à son admission en service de réanimation il était donc déjà en ventilation contrôlée avec selon le rapport d’expertise « une hémodynamique stable sous catécholamines » et qu’il est décédé plus de 20 jours après son admission au service de réanimation dont les soins n’ont permis aucune amélioration de son état malgré une ventilation invasive et toutes les thérapeutiques employées, compte tenu d’un évolution vers une hypoventilation alvéolaire globale réfractaire qui n’est aucunement en lien avec les fautes reprochées au chirurgien et aux anesthésistes qui l’ont pris en charge à la clinique.

La perte de chance ne peut être retenue pour pallier les incertitudes existant sur le lien de causalité direct entre les fautes invoquées et la réalisation du dommage. En l’espèce, il résulte de l’ensemble des éléments ci-dessus exposés que compte tenu de la nature des complications respiratoires survenues et de leur issue irréversible chez un patient à poumon unique atteint d’une aggravation nette de l’épanchement péricardique ancien, la réalité d’une perte de chance de guérison ou d’amélioration de l’état de M X… en relation de causalité avec les manquements relevés par les experts n’est pas établie.

Les appelants invoquent aussi un manquement du Dr Z… au devoir d’information. Mme X… a confirmé auprès des experts que son mari a reçu une information sur la nature de l’intervention mais non sur les risques de complications sévères hors celle d’une extension cancéreuse, ce qui a conduit à renoncer au CHU de Lyon et au choix de la clinique Pasteur. En admettant même la réalité d’une insuffisance d’information, il ressort des documents médicaux produits aux débats et du rapport d’expertise judiciaire que M X…, âgé de 67 ans, présentait une aggravation nette de l’épanchement péricardique devenu compressif avec retentissement clinique, objectivée par l’échographie cardiaque et par le scanner thoracique. L’intervention de réalisation de fenêtre et de drainage péricardiques n ‘ aurait pas été refusée par M X… compte tenu de cette aggravation même en étant parfaitement informé de tous les risques et la position contraire n’est d’ailleurs ni soutenue ni même alléguée par les appelants. Par ailleurs il a été ci-dessus explicité que le choix de la clinique avec service de surveillance continue et non du centre hospitalier avec service de réanimation a été sans incidence sur l’évolution irréversible de l’état de M X…. Aucun préjudice n’est donc résulté du défaut d’information.

En conséquence, c’est à bon droit que le Tribunal a débouté les consorts X…

Y… de leur demandes d’indemnisation formées contre le chirurgien et les anesthésistes. Le rejet des demandes de la CPAM contre ces derniers sera également confirmé.

Le Tribunal a encore, par des motifs complets et pertinents que la Cour adopte, écarté la responsabilité de la clinique, dont les médecins n’étaient pas les salariés, en l’absence de démonstration d’une faute dans l’organisation des services ou dans la gestion de son personnel.

Le jugement déféré sera donc confirmé dans toutes ses dispositions.

Le fait d’être convaincu même à tort de son bon droit n’est pas constitutif d’abus. Il n’y a donc pas lieu à condamnation des appelants à dommages-intérêts.

L’équité ne commande pas de faire application en la cause des dépositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Les appelants succombent et supporteront les dépens.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,

Dit l’appel régulier et recevable en la forme,

Vu l’article 1142-1 du Code de la Santé Publique,

Vu le rapport d’expertise déposé par les Professeurs METRAS et MANELLI et Dr K…,

Confirme le jugement déféré dans toutes ses dispositions,

Dit n’y avoir lieu à dommages-intérêts ni à application dans la cause de l’article 700 du Code de Procédure Civile,

Condamne les appelants aux dépens qui seront distraits au profit des SCP PERICCHI, E…, FONTAINE-MACALUSO-JULLIEN, CURAT-JARRICOT, POMIES-RICHAUD-VAJOU, avoués, sur leurs affirmations de droit.

Arrêt signé par M. BRUZY, Président et par Mme VILLALBA, Greffier.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

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Cour d'appel de Nîmes, 8 décembre 2009, 08/00302