Cour d'appel de Nîmes, Chambre sociale, 13 décembre 2011, n° 10/03498

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Nîmes, ch. soc., 13 déc. 2011, n° 10/03498
Juridiction : Cour d'appel de Nîmes
Numéro(s) : 10/03498
Décision précédente : Conseil de prud'hommes d'Avignon, 19 avril 2010

Texte intégral

ARRÊT N°

R.G : 10/03498

XXX

CONSEIL DE PRUD’HOMMES D’AVIGNON

20 avril 2010

Section : Encadrement

Y

C/

SA HELEN TRAITEUR

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 13 DÉCEMBRE 2011

APPELANT :

Monsieur A Y

né le XXX

XXX

Chez Madame X

XXX

représenté par la SCP ZOUARAT -ISAIE-BECHEROT, avocats au barreau

D’AVIGNON

INTIMÉE :

SA HELEN TRAITEUR

prise en la personne de son Président en exercice

XXX

XXX

XXX

représentée par la SCP BAGLIO-ROIG-ALLIAUME-BLANCO, avocats au barreau d’AVIGNON

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Monsieur Philippe SOUBEYRAN, Conseiller, a entendu les plaidoiries en application de l’article 945-1 du code de Procédure Civile, sans opposition des parties.

Il en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Régis TOURNIER, Président

Madame Sylvie COLLIERE, Conseiller

Monsieur Philippe SOUBEYRAN, Conseiller

GREFFIER :

Madame Marie-Christine LANDBECK, Greffier, lors des débats et Madame Catherine ANGLADE, Adjoint Administratif faisant fonction de Greffier lors du prononcé de la décision.

DÉBATS :

à l’audience publique du 12 Octobre 2011, où l’affaire a été mise en délibéré au 22 Novembre 2011, prorogé au 13 décembre 2011

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort, prononcé et signé par Monsieur Régis TOURNIER, Président, publiquement, le 13 décembre 2011

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Monsieur A Y était engagé à compter du 5 janvier 1998 par la SA HELEN TRAITEUR en qualité de chef de cuisine, catégorie cadres.

Il percevait un salaire moyen mensuel de 4.250 euros brut.

La convention collective applicable est la convention collective nationale des cafés, hôtels, restaurants.

Il était licencié suivant courrier du 4 décembre 2008 ainsi libellée :

'Suite à notre entretien en date du 25 novembre 2008 au cours duquel vous étiez assisté par Monsieur Julien DOMANGE, nous avons le regret de vous notifier par la présente, votre licenciement pour motif économique.

Nous vous avons expliqué que notre entreprise connaissait des difficultés importantes liées notamment à une diminution importante de chiffre d’affaires. Ainsi, à fin octobre 2007 le chiffre d’affaires prévu pour l’exercice 2008 était de 4.857 000€. A fin octobre 2008 le chiffre d’affaires prévu pour l’année 2009 est seulement de l.818 000 €.

Cette diminution importante de chiffre d’affaires est due à la conjoncture économique actuelle particulièrement difficile qui a une répercussion immédiate sur notre activité et à la perte de manifestations importantes telles que les marchés de l’OM, le Beach Volley, l’Open 13 et la manifestation de Limoux. Ces marchés représentent 15 %de notre chiffre d’affaires.

Dans le contexte de crise actuel, les perspectives de redressement de l’activité de notre entreprise en 2009 apparaissent extrêmement difficiles et la situation est telle qu’elle nécessite impérativement une réorganisation de notre activité . Nous avons exposé cette situation au comité d’entreprise le 13 novembre 2008 et nous lui avons, notamment fait part, au vu de la réduction de notre activité de la nécessité de supprimer des postes de cuisine.

Cette réorganisation nous amène à supprimer le poste de travail de chef de cuisine que vous occupez .Vos fonctions seront désormais reparties entre le second de cuisine et les différents Chefs de partie.

Nous avons recherché toutes les possibilités de reclassement qui pourraient vous être proposées.

Malheureusement notre situation économique est telle qu’elle rend impossible tout reclassement.

Pour l’ensemble de ces raisons, nous sommes dans l’obligation de procéder à votre licenciement pour motif économique.

(…)'

Contestant la légitimité de la mesure prise à son encontre, il saisissait le conseil de prud’hommes d’Avignon en paiement d’indemnités de rupture et de diverses sommes, lequel par jugement contradictoire en date du 20 avril 2010 :

— disait que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse,

— condamnait la SA HELEN TRAITEUR à lui payer les sommes de :

* 25.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

* 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

— ordonnait le remboursement des indemnités ASSEDIC dans la limite de 6 mois d’indemnités de chômage.

Par acte du 6 juillet 2010, Monsieur A Y a régulièrement interjeté appel cantonné à l’indemnisation du licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par acte du 8 juillet 2010, la SA HELEN TRAITEUR a régulièrement relevé appel principal général.

Par conclusions développées à l’audience, elle demande d’infirmer la décision déférée, de débouter Monsieur Y de l’ensemble de ses demandes et de le condamner à lui payer la somme de 1.500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle soutient que :

— Les entreprises de restauration, tout particulièrement les traiteurs et organisateurs de réceptions ont été durement frappés par la crise à partir de 2008. La société a constaté au mois de novembre 2008 un chiffre d’affaires prévisionnel en chute de l’ordre de 37,5% et s’est trouvée confrontée à des annulations de commandes ou des pertes de marchés.

— D’autres indicateurs négatifs l’ont conduit à mettre en oeuvre une réorganisation à l’effet de prévenir des difficultés économiques sérieuses et à tout le moins destinée à préserver sa compétitivité.

— Le poste de chef de cuisine occupé par Monsieur Y, seul salarié cadre au sein du service de cuisine a bien été supprimé, ses attributions ayant été reprises par les autres membres du service cuisine.

— Elle s’est trouvée dans l’impossibilité de le reclasser.

— Seul cadre dans le domaine de la cuisine, les dispositions relatives à l’ordre des licenciements n’avaient pas à s’appliquer. En tout état de cause, ce débat pour lequel Monsieur Y ne formule aucune demande n’a aucun impact sur le caractère réel et sérieux du licenciement.

— La demande indemnitaire est excessive, Monsieur Z ayant retrouvé un emploi peu de temps après son départ.

Monsieur A Y reprenant ses conclusions déposées à l’audience a sollicité :

à titre principal

— la confirmation du jugement en ce qu’il a jugé le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse,

— sa réformation sur le quantum de dommages et intérêts, formulant sa demande à hauteur de 76.523,36 euros

à titre subsidiaire, la condamnation de la SA HELEN TRAITEUR à lui payer la somme de 76.523,36 euros à titre de dommages et intérêts pour le non respect des règles relatives à l’ordre des licenciements

en toute hypothèse, la condamnation de la SA HELEN TRAITEUR à lui payer 1.500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Il soutient que :

— la lettre de licenciement ne mentionne aucun des motifs justifiant un licenciement pour motif économique. La perte d’un marché, pas plus que la baisse du chiffre d’affaires, ne peut en soi constituer un motif de licenciement. Alors qu’il est évoqué un prévisionnel de chiffre d’affaires de 4,8 millions pour 2008, la société a réalisé 9,1 millions ; pour 2009, elle a réalisé 6 millions alors qu’il est évoqué un prévisionnel de 1,8 million.

— L’organigramme permet de constater que son poste n’a pas été supprimé puisqu’un responsable de cuisine intervient en ses lieu et place.

— Il n’est pas justifié de la mise en place et de l’application des critères du licenciement alors que le directeur des banquets relève de sa catégorie d’emploi.

— La société a été totalement défaillante dans ses obligations de formation et de reclassement.

— Son préjudice est important puisqu’âgé de 55 ans, il n’a retrouvé un emploi un an après que pour une courte durée, évincé pendant la période d’essai. En situation précaire, il a dû rendre son logement et se trouve hébergé chez sa soeur.

MOTIFS

Est d’ordre économique le licenciement prononcé par l’employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant notamment d’une suppression d’emploi consécutive notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques, selon l’article L. 1233-1 du code du travail, ou à une réorganisation nécessitée par la sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise.

Selon les termes de la lettre du 4 décembre 2008, le licenciement de Monsieur Y est uniquement motivé sur des difficultés économiques, la réorganisation de l’entreprise n’étant abordée que sous l’aspect conséquence de celles-ci et non sous celui de la sauvegarde de la compétitivité, aucune menace sur celle-ci n’étant évoquée.

A la date de notification de ce licenciement, les difficultés économiques de la société SA HELEN TRAITEUR n’apparaissent pas décisives. Abordées dans la lettre uniquement sous l’angle du chiffre d’affaires, elles reposent sur un prévisionnel erroné puisque, sur le vu du compte de résultats de l’année 2008, le chiffre d’affaires réalisé en 2007 de 9.444.240 euros s’est finalement avéré en très légère diminution à 9.107.519 euros en 2008, soit – 1,037%.

Il n’est pas justifié du chiffre d’affaires de l’année 2009, la société ne produisant qu’un tableau comparatif évoquant un CA 'prévu’ à hauteur de 6.790.108 euros, alors que le temps de la procédure permettait de justifier du chiffre effectivement réalisé.

La perte de marchés, à défaut de justification de leur incidence avérée sur les difficultés économiques, ne constitue pas en soi un motif générique valable de licenciement.

Quant à la 'conjoncture économique actuelle particulièrement difficile', la généralité des termes employés s’oppose à l’approche nécessairement individualisée à l’entreprise concernée de ses propres difficultés économiques.

Le licenciement de Monsieur Y est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Il l’est d’autant plus que :

— l’organigramme de la société à la date du 22 juin 2009 établit que le poste de chef de cuisine occupé par Monsieur Y n’a pas été supprimé, un sieur C D y figurant en qualité de responsable de cuisine,

— la société ne justifie d’aucune tentative de reclassement de Monsieur Y, le postulat étant posé d’une situation économique telle qu’elle rend impossible tout reclassement.

Monsieur Y, âgé de 54 ans et disposant d’une ancienneté de 10 ans au jour de son licenciement, justifie de son préjudice en produisant tant les relevés de situation délivrés mensuellement par Pôle Emploi depuis mars 2009, date à laquelle prenait fin son préavis, jusqu’en août 2011, qu’une attestation d’hébergement chez sa soeur à partir d’août 2010.

Il n’est nullement établi qu’il ait retrouvé un quelconque emploi stable comme l’allègue l’employeur.

L’importance de ce préjudice justifié conduit à allouer à Monsieur Y une indemnité de 63.000 euros à titre de dommages et intérêts.

L’équité commande d’allouer à Monsieur Y pour ses frais non compris dans les dépens exposés en cause d’appel une somme de 500 euros.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Réforme le jugement déféré,

Statuant à nouveau de ce chef,

Condamne la SA HELEN TRAITEUR à payer à Monsieur A Y la somme de 63.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Confirme pour le surplus,

Condamne la SA HELEN TRAITEUR à payer à Monsieur A Y la somme de 500 euros pour ses frais en application de l’article 700 du Code de procédure civile,

Dit qu’une copie du présent arrêt sera expédiée à l’ASSEDIC devenu PÔLE EMPLOI TSA XXX

Condamne la SA HELEN TRAITEUR aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Arrêt signé par Monsieur Régis TOURNIER, Président et par Madame Catherine ANGLADE, Adjoint Administratif faisant fonction de Greffier.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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