Cour d'appel de Nîmes, 14 février 2013, n° 12/00859

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Nîmes, 14 févr. 2013, n° 12/00859
Juridiction : Cour d'appel de Nîmes
Numéro(s) : 12/00859
Décision précédente : Tribunal paritaire des baux ruraux d'Uzès, 25 janvier 2012

Sur les parties

Texte intégral

ARRÊT N°

R.G. : 12/00859

XXX

TRIBUNAL PARITAIRE DES BAUX RURAUX D’UZES

26 janvier 2012

X

C/

X

E

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

1re Chambre B

ARRÊT DU 14 FEVRIER 2013

APPELANT :

Monsieur A X

né le XXX à XXX

XXX

XXX

Comparant en personne assisté de Me Philippe GONI (avocat au barreau de PARIS)

INTIMÉS :

Monsieur Y X

né le XXX à XXX

XXX

MEGIERS

XXX

Non comparant représenté par la SELARL Pascale BORDES,(avocats au barreau de NIMES)

Madame C D E épouse X

née le XXX à XXX

XXX

MEGIERS

XXX

Non comparante représentée par la SELARL Pascale BORDES (avocats au barreau de NIMES)

Statuant en matière de baux ruraux et après convocation des parties par lettres recommandées avec accusé de réception.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

M. A MULLER, Président,

M. Jean-Paul RISTERUCCI, Conseiller,

Mme C-Agnès MICHEL, Conseiller,

GREFFIER :Mme Amélie BARD,Greffier en Chef, lors des débats, et Madame Catherine LIBEROTTI, Greffier, lors du prononcé de la décision,

DÉBATS :

à l’audience publique du 04 Décembre 2012, où l’affaire a été mise en délibéré au 07 Février 2013 prorogée à celle de ce jour

Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel ;

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé et signé par M. A MULLER, Président, publiquement, le 14 Février 2013, par mise à disposition au greffe de la Cour

* * *

EXPOSE DU LITIGE

Suivant acte notarié du 14/12/1982, M. Y X et Mme C-D E son épouse ont donné à bail à ferme à leur fils A X, diverses parcelles sises à XXX) d’une superficie de XXX

Par acte notarié du 4/07/1989, les parties ont transformé ce bail en bail à long terme, jusqu’au 1er/12/2007, moyennant un fermage annuel représenté par la valeur en espèces de 190 hectolitres de vin AOC et 18 quintaux de blé fermage, et portant sur une superficie totale de 23 ha 31 a 43 ca en nature de vignes, maison et dépendances, terres et bois.

Suivant acte notarié du 14/12/1992, les époux Y X ont fait donation à titre de partage anticipé de leurs biens à leurs deux enfants, M. A X s’est vu attribuer le domaine viticole, objet du bail à long terme signé le 4/07/1989, avec réserve d’usufruit pour les donataires.

Suivant avenant notarié du 27/01/2000, à effet rétroactif, à compter de l’année culturale 1999, les parties sont notamment convenues de baisser le fermage, fixé à 80 000 francs HT, et ont inséré page trois de cet acte deux clauses C et D intitulées ' en ce qui concerne les travaux’ et ' en ce qui concerne les investissements réalisés par le preneur'.

Par un nouvel avenant sous seing privé du 18/07/2005, les parties sont convenues de fixer le fermage en espèces de six hectolitres de vin AOC par hectare, soit au total, 103,80 hectolitres et ce, à compter de la récolte septembre-octobre 2004.

Le bail a été résilié conventionnellement en 2010 et les terres louées à un autre preneur suivant bail notarié des 7/01 et 9/03/2011.

Le 20/04/2011, M. A X a saisi le tribunal paritaire des baux ruraux d’Uzès aux fins de voir désigner un expert avec pour mission de procéder à un état des lieux et de chiffrer l’indemnité au preneur sortant qui lui est due, compte tenu des améliorations qu’il a apportées depuis le début du bail.

Par jugement du 26/01/2012, le TPBR d’Uzès a:

— réputé non écrites les clauses C premier paragraphe et D de l’avenant du 27/01/2000,

— dit que M. A X a droit à une indemnité au preneur sortant nonobstant l’avenant du 27/01/2000,

— dit que M. A X ne peut se prévaloir de la liberté générale de procéder à tous travaux et investissements en se dispensant de l’accord du bailleur quand le statut le requiert,

— dit au moins que l’indemnité au preneur sortant ne peut porter sur les investissements immobilier relatifs à la cave et au caveau ni sur les sommes résultant de l’arrachage et replantations très importants effectués en l’absence d’autorisation du bailleur,

— réservé les autres demandes, et notamment d’expertise pour le surplus de l’objet possible de l’indemnité due au preneur sortant et de condamnation au paiement des loyers,

— rouvert les débats à une audience ultérieure pour permettre aux parties de conclure sur les points restant en litige.

Le 16/02/2012, M. A X a interjeté appel de ce jugement.

Dans ses conclusions déposées et développées à l’audience du 4/12/2012 à laquelle le dossier a été retenu, M. A X demande à la cour de:

— le recevoir en son appel,

— réformer le jugement entrepris en ce qu’il a déclaré nulle et non écrite la clause C 1er§ de l’avenant au bail et jugé en conséquence qu’il ne pouvait prétendre à l’indemnité due au sortant faute d’autorisation du bailleur,

— confirmer le jugement pour le surplus,

vu les articles L 411-69 et L 411-73 du code rural et de la pêche maritime,

— dire et juger recevable et bien fondée sa demande tendant à obtenir l’indemnisation des travaux et améliorations apportés au fonds loué,

— voir désigner tel expert aux fins de décrire les améliorations apportées par le preneur, déterminer l’indemnité due au preneur et établir les comptes entre les parties.

Il soutient que contrairement à ce qu’a considéré le jugement attaqué, seule la clause D relative à l’indemnisation du preneur est d’ordre public en application de l’article L 411-77, et non la clause C relative à la demande d’autorisation préalable prévue à l’article L 411-73, laquelle peut résulter d’une clause du bail.

Dans ses conclusions déposées et développées à l’audience, M. Y X et Mme C D E, son épouse, concluent comme suit:

— confirmer la décision entreprise en ce qu’elle a déclaré réputée non écrite la clause C premier § de l’avenant à bail rural à long terme signé entre les parties le 27/01/2000,

— en conséquence, constater que M. A X ne pouvait prétendre à l’indemnité au preneur sortant faute d’autorisation expresse du bailleur,

— en toute hypothèse, constater que M. A X ne justifie pas avoir réalisé quelque amélioration que ce soit,

— en conséquence, le débouter de l’intégralité de ses demandes,

— réformer par ailleurs la décision entreprise et condamner M. A X au paiement de la somme de 48 750 € à titre d’arriéré de loyers des années 2005 à 2010, outre intérêts au taux légal,

— condamner M. A X au paiement de la somme de 2000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Les époux X rappellent que l’appelant demeure débiteur de la somme de 48 750 € au titre des loyers de 2005 à 2010.

Ils estiment que le jugement attaqué a considéré à bon droit que l’économie du contrat est guidée par l’interdépendance entre les clauses C et D, l’une étant la contre partie de l’autre.

Ils ajoutent que par application de l’article L 411-73 et de la jurisprudence qui s’y rattache, l’autorisation générale contenue dans la clause C est rédigée en termes trop généraux pour valoir autorisation d’effectuer tous types de travaux, sans autorisation préalable du bailleur.

MOTIFS DE LA DECISION

Il est essentiel de rappeler in extenso les clauses litigieuses, incluses dans l’avenant à bail rural à long terme signé par les parties le 27/01/2000, à effet rétroactif pour l’année culturale 1999:

'C. En ce qui concerne les travaux:

Le bailleur autorise irrévocablement et expressément le preneur à effectuer tous les travaux qu’il jugera utiles et nécessaires à son exploitation, y compris les travaux importants, tels que arrachage et replantation, sans que le preneur obtienne un accord oral ou écrit du bailleur.

A ce sujet, il est également convenu entre les parties que l’intégralité des frais et droits de plantation seront pris en charge par le preneur, de sorte qu’en fin de bail, le preneur restera propriétaire desdits droits de plantation.

D. En ce qui concerne les investissements ayant été réalisés par le preneur:

D’un commun accord entre elles, les parties déclarent que les investissements réalisés par le preneur ne pourront donner lieu à une quelconque indemnité à son profit, en contrepartie de la totale liberté dont il bénéficie dans la réalisation des travaux et investissements ainsi qu’il a été indiqué ci-dessus'.

Il est incontestable que par ces clauses les parties ont entendu écarter des dispositions du statut du fermage.

En application de l’article L 411-69 du code rural et de la pêche maritime, le preneur qui a, par son travail ou par ses investissements, apporté des améliorations au fonds loué a droit, à l’expiration du bail, à une indemnité due par le bailleur, quelle que soit la cause qui a mis fin au bail.

Il est de principe que le preneur ne peut prétendre à cette indemnité que si les travaux ont été réalisés dans le respect des procédures de contrôle du bailleur ( autorisation ou notification préalable) prévues par le statut des baux ruraux, notamment par l’article L 411-73.

L’article L 411-77 répute non écrite toute clause ou convention ayant pour objet de supprimer ou de restreindre les droits conférés au preneur sortant ou au bailleur par les dispositions précédentes.

De façon plus générale l’article L 415-12 dispose que toute disposition des baux restrictive des droits stipulés au statut du fermage est réputée non écrite.

Au regard des dispositions ci-dessus, la clause D susvisée qui a pour effet de supprimer le droit à l’indemnité due au preneur sortant doit être réputée non écrite.

M. A X soutient que les parties ayant prévu dans la clause C une autorisation de travaux à son profit, il peut prétendre à l’indemnité prévue par l’article L 411-69 sans que puisse lui être opposé le non respect des procédures d’autorisation du bailleur prévues par le statut et ajoute que les premiers juges ont commis une erreur de droit en déclarant cette clause non écrite, l’autorisation de travaux pouvant résulter d’une clause du bail.

Cependant, dès lors que l’autorisation donnée en l’espèce est tout à fait générale, allant jusqu’à 'une liberté totale dans les investissements', alors que l’article L. 411-73 du Code rural subordonne l’indemnisation des travaux de toute nature réalisés par le locataire soit à la communication d’un état descriptif estimatif, soit à la notification d’une proposition au bailleur, elle supprime tout droit de contrôle du bailleur et contrevient ainsi au droit du bailleur, de sorte qu’elle doit également être réputée non écrite dans son premier paragraphe.

Par ailleurs, il est incontestable au regard des termes employés par les parties, que cette clause, bien que formellement distincte de la précédente, constitue un tout avec cette dernière, ainsi que le confirme le terme ' en contrepartie', le bailleur donnant une autorisation générale de travaux et d’investissement, le preneur ne réclamant aucune indemnité en fin du bail, et ce 'd’un commun accord entre les parties'.

En conséquence, le jugement mérite confirmation en ce qu’il a réputé non écrites les clauses C premier paragraphe et D de l’avenant.

Dès lors, si M. A X peut prétendre à l’ indemnité prévue par l’article L 411-69 du code rural et de la pêche maritime, qui constitue sa seule demande, elle ne peut porter sur des investissements nécessitant une autorisation du bailleur.

A l’appui de sa demande, M. A X produit un rapport établi par CER France Gard, association de gestion et de comptabilité du Gard, qui chiffre les améliorations réalisées par L’EARL les Avelans, à 154 878 €, soit 52 585 €: plantations et palissage, 100 682 €: bâtiments, 1611 €: installations d’irrigation.

Il sera observé que si le bail a été mis à la disposition d’une EARL, le preneur reste seul titulaire du bail conformément à l’article L 411-37 du code rural et de la pêche maritime, de sorte que les intimés ne peuvent valablement soutenir que M. A X ne pourrait valablement réclamer pour le compte de l’EARL, le paiement de l’indemnité due au preneur sortant.

Par ailleurs, la pièce ci-dessus établie à partir du casier viticole informatisé et les pièces comptables de l’ EARL confirme la réalité des améliorations revendiquées, de sorte que les intimés ne peuvent davantage faire valoir que l’appelant n’apporterait aucune preuve des améliorations qu’il a réalisées.

Selon l’article L. 411-71 du Code rural, les travaux indemnisables se répartissent en trois catégories, certains concernent les « bâtiments et les ouvrages incorporés au sol », sont également visées les plantations, il s’agit enfin des travaux de transformation du sol et des améliorations culturales.

S’agissant des bâtiments, un agrandissement de la cave a été réalisé en 2003 et 2004 avec l’installation de cuves en béton, et des améliorations ont été apportées au caveau et à la cave de stockage. Ces investissements nécessitaient l’autorisation écrite du bailleur en application de l’article L 411-73 2 alinéa 2 du code rural et de la pêche maritime.

Les plantations sont soumises à notification préalable de la proposition au bailleur par lettre recommandée avec demande d’avis de réception en application de l’article L 411-73 2 alinéa 1.

Les installations d’irrigation enfouies dans le sol nécessitent également autorisation du bailleur.

Ces autorisations ne sont pas produites et il ne peut être argué d’une autorisation tacite, le bailleur se pensant protégé par les clauses de l’avenant litigieux.

L’article R 411-15 du code rural et de la pêche maritime dispose que les améliorations mentionnées à l’article L 411-69 résultent soit d’un état des lieux, soit de tout autre moyen de preuve admis par le droit commun.

En l’espèce, aucun état des lieux d’entrée n’a été dressé. En l’état, il n’est produit aucun élément probant établissant d’autres améliorations que celles examinées plus haut. l’expertise sollicitée qui semble plutôt avoir pour but de déterminer l’état des lieux par rapport au nouveau preneur, non appelé en cause, n’en invoque pas d’autres. Les constats produits ( pièces n° 7,8 et 10 ) se référent au changement d’état des lieux, Le constat du 23/09/2011 se rapporte à la cave.

En cet état, sans qu’il y ait lieu à ordonner une expertise, qui ne ferait que pallier la carence de l’appelant dans l’administration de la preuve, ni rouvrir les débats, M. A X sera débouté de sa demande d’indemnité sur le fondement de l’article L 411-69 du code rural et de la pêche maritime.

Sur la demande en paiement des fermages, dont la cour est saisie par l’effet dévolutif, les intimés sur lesquels pèsent la charge de la preuve ne produisent aucune pièce à son soutien, aucune mise en demeure ou sommation de payer, alors que M. X conclut au débouté de l’ensemble de leurs demandes. Ils en seront déboutés.

Compte tenu de la décision rendue, chaque partie succombant sur sa demande principale, les dépens de première instance et d’appel, seront partagés par moitié entre elles.

L’équité ne commande pas de faire application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement rendu en ce qu’il a dit que sont réputées non écrites les clauses C premier paragraphe et D de l’avenant du 27/01/2000,

Le réforme pour le surplus et y ajoutant,

Déboute M. A X de sa demande d’expertise et de sa demande d’indemnité sur le fondement de l’article L 411-69 du code rural et de la pêche maritime,

Déboute M. Y X et Mme C D E, épouse X de leur demande en paiement des fermages des années 2005 à 2010,

Les déboute de leur demande faite en application de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes plus amples ou contraires,

Fait masse des dépens de première instance et d’appel et dit qu’ils seront partagés par moitié entre les parties.

Arrêt signé par M. MULLER, président et Mme LIBEROTTI, greffier,

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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  1. Code de procédure civile
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