Cour d'appel de Nîmes, 5ème chambre sociale ta, 24 septembre 2019, n° 17/01732

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Nîmes, 5e ch. soc. ta, 24 sept. 2019, n° 17/01732
Juridiction : Cour d'appel de Nîmes
Numéro(s) : 17/01732
Décision précédente : Tribunal des affaires de sécurité sociale d'Ardèche, 5 avril 2017, N° 20140019
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

ARRÊT N°

R.G : N° RG 17/01732 – N° Portalis DBVH-V-B7B-GTW5

GLG/DO/CM

TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SÉCURITÉ SOCIALE D’ARDÈCHE

06 avril 2017

RG:20140019

SARL L’INATTENDU

C/

URSSAF DE RHÔNE- ALPES

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 24 SEPTEMBRE 2019

APPELANTE :

SARL L’INATTENDU,

[…]

[…]

représentée par Me Guillaume ALLIX, avocat au barreau de VALENCE substitué par Me Marine BOULARAND, avocat au barreau de VALENCE

INTIMÉE :

URSSAF DE RHÔNE- ALPES

[…] […]

[…]

représenté par Me Eric RIVOIRE de la SA FOLLET & RIVOIRE, avocat au barreau de VALENCE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Monsieur Guénaël LE GALLO, Président, et Madame Evelyne MARTIN, Conseillère, ont entendu les plaidoiries en application de l’article 945-1 du Code de Procédure Civile sans opposition des parties.

Ils en ont rendu compte à la Cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Guénaël LE GALLO, Président

Monsieur Thomas LE MONNYER, Conseiller

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère

GREFFIER :

Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision.

DÉBATS :

à l’audience publique du 23 Avril 2019, où l’affaire a été mise en délibéré au 02 Juillet 2019, prorogé à celle de ce jour.

Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel .

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort, prononcé et signé par Monsieur Guénaël LE GALLO, Président, publiquement, le 24 septembre 2019, par mise à disposition au greffe de la Cour.

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 10 juillet 2012, la SARL L’inattendu exploitant un restaurant à l’enseigne 'La Calèche’ à Largentière (07) a fait l’objet d’un contrôle effectué par l’URSSAF de l’Ardèche avec l’assistance de la gendarmerie nationale dans le cadre d’une opération du comité départemental anti-fraude.

Suite aux constats complémentaires du 6 août 2012 et du 16 octobre 2012, l’inspecteur du recouvrement a établi un procès-verbal de travail dissimulé, le 16 janvier 2013, pour avoir employé M. A Y en qualité de commis de cuisine depuis le 10 juillet 2012 au moins, sans avoir effectué la déclaration préalable à l’embauche prévue par l’article L. 1221-10 du code du travail.

Le 17 janvier 2013, l’inspecteur a adressé à la société une lettre d’observations l’informant que la vérification entraînait un rappel de cotisations et contributions de sécurité sociale, d’assurance chômage et de garantie des salaires d’un montant total de 7 427 euros, outre les majorations de retard dues en application de l’article R. 243-18 du code de la sécurité sociale.

Ses observations ayant été rejetées par courrier du 23 mai 2013, suivi d’un rappel à la loi notifié par le procureur de la République à la gérante et d’une mise en demeure de régler la somme totale de 9 318 euros, dont 7427 euros de cotisations et 891 euros de majorations, délivrée le 11 juin 2013, la SARL L’Inattendu a saisi la commission de recours amiable, le 28 juin 2013, laquelle a rejeté sa contestation, par décision du 9 septembre 2013, notifiée le 23 novembre 2013.

Son recours formé auprès du tribunal des affaires de sécurité sociale de l’Ardèche, le 20 janvier 2014, a également été rejeté par jugement du 6 avril 2017, la condamnant à payer à l’URSSAF Rhône-Alpes la somme de 8318 euros, outre les majorations de retard.

La société L’Inattendu a interjeté appel de cette décision le 26 avril 2017.

Aux termes de ses conclusions écrites soutenues oralement à l’audience, l’appelante demande à la cour d’infirmer le jugement déféré ainsi que la décision de la commission de recours amiable, et à titre principal, de constater la nullité du redressement du 17 janvier 2013.

Elle fait valoir que le contrôle ayant été opéré sur le fondement des articles L. 8271-1 et suivants du code du travail, dans le but de rechercher et constater des infractions de travail illégal, comme en convient l’URSSAF dans ses dernières écritures, les dispositions applicables n’étaient pas celles de l’article R. 243-59 mais de l’article R. 133-8 du code de la sécurité sociale prévoyant que la lettre d’observations doit être signée par le directeur de l’organisme et non par l’inspecteur du recouvrement, qu’en outre l’inspecteur a auditionné les personnes présentes lors du contrôle sans avoir recueilli leur

consentement en méconnaissance des dispositions de l’article L. 8271-6-1 du code du travail, et qu’enfin il appartient à l’URSSAF de justifier que la mise en demeure a été adressée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.

Ajoutant qu’elle a dû faire face le 6 juillet 2012, en pleine période estivale, à l’inaptitude soudaine du cuisinier, M. X, ce qui l’a contrainte à recruter en urgence un commis de cuisine, que M. Y ayant postulé téléphoniquement, le 9 juillet 2012, suite à l’annonce publiée sur le site de Pôle emploi, elle l’a embauché le 10 juillet 2012 à 9 heures, que la déclaration d’embauche a été formalisée par son expert-comptable par télécopie transmise le même jour à 11h24, et que le registre du personnel a été complété le jour même, elle demande à titre subsidiaire de constater l’absence d’élément intentionnel du délit de travail dissimulé et d’annuler le redressement.

À titre extrêmement subsidiaire, elle demande de constater que le redressement doit être effectué sur la rémunération réellement versée à M. Y, lequel n’a finalement travaillé que le 10 juillet 2012, et en tout état de cause, de lui allouer la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’URSSAF Rhône-Alpes venant aux droits de l’URSSAF de l’Ardèche demande de confirmer le jugement et l’intégralité du redressement, de dire et juger que le contrôle est parfaitement régulier et bien fondé, de débouter la société L’inattendu de l’ensemble de ses prétentions, et de la condamner à payer la somme de 8 318 euros, outre majorations de retard, ainsi qu’une somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle réplique que si l’article R. 243-59 du code de la sécurité sociale n’était pas applicable au redressement opéré sur le fondement des articles 8271-1 et suivants du code du travail, il n’en demeure pas moins que la lettre d’observations prévue par l’article R. 133-8 et signée par l’inspecteur du recouvrement, titulaire d’une délégation de pouvoir du directeur de l’organisme, est parfaitement régulière, que la rédaction d’un procès-verbal d’audition n’étant qu’une simple faculté, la Cour de cassation admet depuis 2011 que celle-ci prenne la forme d’un questionnaire auquel les salariés sont libres de répondre sans que la nullité du contrôle ne soit encourue, que l’avis de réception de la mise en demeure adressée à la société est versé aux débats, que la gérante connaissait ses obligations, que les motifs invoqués pour tenter de se justifier sont inopérants et qu’il lui appartenait de s’organiser en conséquence, et enfin que l’attestation de M. Y ainsi que le bulletin de paie qui lui a été délivré sont insuffisants à rapporter la preuve de la durée réelle de l’emploi occupé.

MOTIFS DE L’ARRÊT

L’article L. 8271-6-1 du code du travail créé par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011, applicable en l’espèce, dispose :

'Sont habilités à entendre, en quelque lieu que ce soit et avec son consentement, tout employeur ou son représentant et toute personne rémunérée, ayant été rémunérée ou présumée être ou avoir été rémunérée par l’employeur ou par un travailleur indépendant, afin de connaître la nature des activités de cette personne, ses conditions d’emploi et le montant des rémunérations s’y rapportant, y compris les avantages en nature. De même, ils peuvent entendre toute personne susceptible de fournir des informations utiles à l’accomplissement de leur mission de lutte contre le travail illégal.

Ces auditions peuvent faire l’objet d’un procès-verbal signé des agents mentionnés au premier alinéa et des personnes entendues.

Ces agents sont en outre habilités à demander aux employeurs, aux travailleurs indépendants, aux personnes employées dans l’entreprise ou sur le lieu de travail ainsi qu’à toute personne dont ils recueillent les déclarations dans l’exercice de leur mission de justifier de leur identité et de leur adresse.'

Le procès-verbal établi par M. Z, inspecteur du recouvrement, le 16 janvier 2013, mentionne au titre des constats du 10 juillet 2012 :

'[…]Nous demandons si le responsable de l’entreprise est présent sur les lieux. L’une des deux femmes présentes en cuisine se présente comme étant Madame B C, gérante de la société.

Nous l’informons que nous allons procéder à l’audition des personnes en situation de travail.

Les intéressés déclarent se nommer : […]'

Sont ensuite consignées les identités des personnes présentes, dont celle de M. A Y, ainsi que leurs déclarations reproduites entre guillemets au procès-verbal, auquel sont annexées des fiches signées par 'la personne entendue' et l’inspecteur, mentionnant la date du 10 juillet 2012 et l’heure précise de chaque audition (soit 11 heures pour M. Y), le nom de l’inspecteur et celui de la 'personne interrogée', ainsi que les informations fournies concernant l’emploi exercé et la rémunération versée.

Alors qu’il est ainsi établi que l’inspecteur a procédé à l’audition des personnes en situation de travail, sans qu’aucun élément ne permette de vérifier si leur consentement a été recueilli, contrairement à la gérante dont les déclarations, également reprises au procès-verbal du 16 janvier 2013, ont fait l’objet d’un procès-verbal d’audition établi le 6 octobre 2012, mentionnant expressément le recueil son consentement, l’URSSAF n’est manifestement pas fondée à soutenir que 'le fait d’avoir répondu librement et par écrit à un questionnaire de l’inspecteur lors du contrôle en 2012 suffit à établir le consentement des salariés (pièce n° 1 annexes 1 à 6)', et que 'dans ces conditions, le contrôle est parfaitement régulier.'

Au surplus, la lettre d’observations du 17 janvier 2013 se réfère aux dispositions de l’article R. 243-59 du code de la sécurité sociale, alors que l’URSSAF convient que la procédure applicable était celle prévue par l’article R. 133-8.

En conséquence, le jugement sera infirmé et le redressement annulé.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière de sécurité sociale, par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

Annule le redressement notifié par l’URSSAF de l’Ardèche à la SARL L’Inattendu, suivant mise en demeure du 11 juin 2013,

Dit n’y avoir lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne l’URSSAF Rhône-Alpes aux dépens.

Arrêt signé par Monsieur LE GALLO, Président et par Madame OLLMANN, Greffière.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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