Cour d'appel d'Orléans, 15 septembre 2011, n° 11/00132

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Orléans, 15 sept. 2011, n° 11/00132
Juridiction : Cour d'appel d'Orléans
Numéro(s) : 11/00132
Décision précédente : Tribunal de commerce d'Orléans, 15 décembre 2010

Texte intégral

XXX

Me DAUDE

Me GARNIER

15/09/2011

ARRÊT du : 15 SEPTEMBRE 2011

N° :

N° RG : 11/00132

DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : Tribunal de Commerce d’ORLEANS en date du 16 Décembre 2010

APPELANTS :

Monsieur Y X

XXX

XXX

SAS VIFRELEC agissant poursuites et diligences de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège

XXX

XXX

représentés par Me Estelle GARNIER, avoué à la Cour

ayant pour avocats la SELARL BERNABEU, du barreau d’ORLEANS

D’UNE PART

INTIMÉE :

LA SA SOCIETE GENERALE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

XXX

XXX

représentée par Me Jean-Michel DAUDE, avoué à la Cour

ayant pour avocats la SCP LAVILLAT-BOURGON, du barreau de MONTARGIS

D’AUTRE PART

DÉCLARATION D’APPEL EN DATE DU 10 Janvier 2011

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 19 mai 2011

Lors des débats, affaire plaidée sans opposition des avocats à l’audience publique du 16 Juin 2011, à 9 heures, devant Monsieur Thierry MONGE, Conseiller Rapporteur, par application de l’article 786 du Code de Procédure Civile.

Lors du délibéré :

Monsieur Alain RAFFEJEAUD, Président de Chambre,

Monsieur Alain GARNIER, Conseiller,

Monsieur Thierry MONGE, Conseiller qui en a rendu compte à la collégialité.

Greffier :

Madame Sylvie CHEVREAU, lors des débats,

Madame A B, lors du prononcé

Prononcé le 15 SEPTEMBRE 2011 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.

EXPOSÉ :

Y X, président directeur général de la S.A.S. Vifrelec, s’est porté le 17 octobre 2001 caution solidaire de tous engagements de l’entreprise envers la Société Générale à hauteur de 260.000 francs, soit 39.636,74€. Une procédure de redressement judiciaire a été ouverte le 30 novembre 2004 à l’égard de la société Vifrelec, dont le plan de redressement par continuation a été adopté par le tribunal de commerce de Montargis. Selon acte du 2 novembre 2007, la Société Générale a fait assigner M. X en paiement de 39.636,74€ au titre de son cautionnement. La S.A.S. Vifrelec a elle-même fait assigner la banque le 26 janvier 2008 en lui réclamant remboursement de frais et commissions et des dommages et intérêts pour manquement à son devoir de conseil et à son obligation de discernement, mauvaise tenue de son compte et rupture abusive de son concours.

Après avoir joint les deux procédures le 7 octobre 2010, le tribunal de commerce d’Orléans a, par jugement du 16 décembre 2010 assorti de l’exécution provisoire, condamné M. X à payer à la Société Générale 39.636,74€ outre intérêts au taux légal à compter du 7 septembre 2007 avec capitalisation, en lui refusant tous délais de grâce, et débouté la société Vifrelec de ses demandes en paiement.

Au soutien de sa décision, le tribunal a, notamment,

— dit que la caution n’était pas caduque, et que la Société Générale pouvait s’en prévaloir

— dit que la banque n’avait pas failli à ses obligations de conseil et de discernement envers la société

— dit que l’erreur de la banque relative au rejet d’effets n’avait entraîné aucun préjudice financier pour Vifrelec, laquelle ne pouvait obtenir de dommages et intérêts pour cette faute

— jugé que Vifrelec n’avait pas fait l’objet d’une rupture abusive des concours financiers

— dit que la Société Générale n’avait aucune responsabilité dans l’origine et la cause de la cessation des paiements et du règlement judiciaire

— constaté que le montant de la créance de la Société Générale était définitivement admis

— prononcé à son encontre la déchéance des intérêts contractuels sur l’année 2005, et ordonné à la banque de recalculer sa créance d’intérêts sur le compte courant pour ladite année, tout en constatant que cette déchéance demeurait sans incidence sur sa créance en raison du montant du cautionnement.

Monsieur X et la S.A.S. Vifrelec ont relevé appel le 10 janvier 2011.

Y X conclut principalement au rejet des prétentions qui le visent en soutenant que son cautionnement s’est éteint au jour de la mise en place du contrat d’affacturage comportant cession de garantie au profit de la Société Générale. Il se dit subsidiairement bien fondé à opposer à la Société Générale la compensation des sommes dues par cette dernière à la société Vifrelec et demande à être déchargé à due concurrence, en soutenant que les fautes commises par la banque ont précipité la déconfiture de l’entreprise et aggravé ainsi sa propre situation de caution. Il réclame plus subsidiairement des dommages et intérêts de même montant que sa dette, et soutient plus subsidiairement encore ne pouvoir être tenu au-delà de 14.522,95€ au motif que la Compagnie Générale d’Affacturage, filiale de la Société Générale, a versé à celle-ci 25.113,79€ par voie de délégation de paiement. Il invoque la déchéance du droit aux intérêts du créancier pour 2005 et pour les années 2007 à 2010 faute d’information annuelle, et sollicite l’autorisation de se libérer en vingt-quatre échéances mensualités.

La société Vifrelec reproche quant à elle à la Société Générale d’avoir manqué à son devoir de conseil et à son obligation de discernement en lui recommandant de souscrire un contrat d’affacturage inadapté et ruineux qui l’a privée d’une trésorerie indispensable ; d’avoir mal tenu ses comptes notamment en rejetant en octobre 2004 des effets pourtant compris dans le découvert autorisé, aggravant ainsi sa situation et affectant la confiance de ses partenaires commerciaux ; et d’avoir rompu abusivement ses concours, affirmant qu’elle aurait pu éviter l’ouverture d’une procédure judiciaire si la banque n’avait pas commis ces manquements. Elle réclame à titre de remboursement 15.000€ pour les frais du contrat d’affacturage, 5.546,12€HT pour les commissions d’affacturage et 7.199,70€ et 8.786,63€ pour des frais, ainsi que 151.000€ au titre de la rupture abusive des concours, 65.000€ au titre des frais issus de la procédure collective et 50.000€ au titre de la rupture des paiements fournisseurs.

La Société Générale sollicite la confirmation du jugement déféré et le rejet de toutes les prétentions adverses. Elle nie avoir libéré M. X de son engagement de caution. Contestant les manquements qui lui sont imputés, elle indique ne pas être partie au contrat d’affacturage, selon elle d’ailleurs avantageux et conclu par un dirigeant averti ; elle estime que la déconfiture de Vifrelec provient uniquement de difficultés d’exploitation ; elle affirme que son rejet par erreur de lettres de change fut aussitôt réparé, sans préjudice pour l’entreprise ; elle nie avoir dénoncé ses concours par le courrier du 4 octobre 2004, et considère l’avoir fait conformément à la loi et aux stipulations du contrat par celui du 18 octobre laissant à sa cliente un préavis de soixante jours. Elle conteste pouvoir être engagée par les termes du message électronique invoqué par les appelants, sur lequel elle émet au surplus de forts doutes. Elle objecte très subsidiairement que les réclamations de la société appelante ne sont justifiées ni dans leur principe ni dans leur quantum.

Il est référé pour le surplus aux dernières conclusions récapitulatives des parties, respectivement déposées et signifiées le 22 avril 2011 s’agissant de M. X et de la société Vifrelec, et le 4 mai 2011s’agissant de la Société Générale.

L’instruction a été clôturée par une ordonnance du 19 mai 2011, ainsi que les avoués des parties en ont été avisés.

MOTIFS DE L’ARRÊT :

Attendu que le cautionnement souscrit le 17 octobre 2001 par Y X était à durée indéterminée et n’a pas été dénoncé ; qu’il n’était assorti d’aucune condition ; qu’il n’est nullement démontré qu’il ait été rendu caduc, ou que la banque y ait renoncé, la mise en place d’une délégation de la retenue de garantie effectuée par Vifrelec au profit de la Compagnie Générale d’Affacturage -tierce, même si elle est une filiale de la Société Générale- ne pouvant avoir eu pour effet par elle-même de libérer la caution, ne s’étant accompagnée d’aucune renonciation expresse de la banque au bénéfice du cautionnement, et ne caractérisant pas en soi de sa part une manifestation non équivoque de renonciation à cette garantie ;

Que pour le surplus, le courriel invoqué par l’appelant n’établit nullement sa décharge, s’agissant d’un document incomplet, dont la force probante est contestée et rendue, de fait, douteuse par ses lacunes et sa formule finale, voire sa teneur, et qui, émanerait-il même d’un préposé de la Société Générale, n’implique en tout état de cause, au vu de ses énonciations, ni renonciation ni engagement de la part de la banque ;

Attendu que la démonstration d’une caducité, d’une renonciation ou plus généralement de l’existence d’un obstacle quelconque à ce que la Société Générale se prévale du cautionnement, ne résulte pas non plus des termes de son courrier du 18 octobre 2004 à Vifrelec en ce qu’elle y évoque, parmi diverses prétentions, son souhait de recueillir le consentement de Mme X en cas de maintien de ses concours à l’entreprise, s’agissant d’un renforcement de la garantie dont elle bénéficiait du fait de sa ratification par le conjoint et non de la preuve ou même de l’indice qu’elle n’aurait plus disposé de cette garantie ;

Qu’il peut être encore relevé, comme le fait valoir l’intimée sans contestation ni réfutation, que Y X, tout en soutenant que son engagement de caution était caduc depuis la mise en place de la convention d’affacturage en avril 2004, ne justifie ni ne prétend avoir protesté au reçu des lettres d’information annuelles qui lui furent adressées en sa qualité de caution les 8 mars 2005 et 9 mars 2007 ;

Et attendu que la validité de ce cautionnement n’est pas autrement contestée ; que donné manuscrit, en chiffres et en lettres dans des termes conformes aux exigences légales, il est régulier ;

Que c’est ainsi à bon droit que les premiers juges ont dit que la banque pouvait s’en prévaloir ;

Attendu que ce cautionnement solidaire a été consenti à hauteur de 260.000 francs, soit 39.636,74€ ;

Qu’aucune disposition légale ni stipulation convenue entre les parties ne justifie d’en déduire la somme de 25.113,79 € correspondant au montant du solde de la retenue de garantie reversée par la Compagnie Générale d’Affacturage, et dont les productions permettent de vérifier qu’il a été porté au crédit du compte de la société Vifrelec en déduction de sa dette totale (cf pièce n°13) ;

Attendu que la créance déclarée par la banque au redressement judiciaire de Vifrelec a été admise pour (151.953,67, 36.563,71 et 2.632,86) = 191.150,24€ (cf pièce n°6 de l’intimée); qu’il ressort du décompte actualisé de créance de la Société Générale qu’en l’état des dividendes annuels encaissés au titre de l’exécution du plan de redressement, celle-ci demeure créancière de 77.513,28€ (cf pièce n°21) ; que le cautionnement étant donné en garantie de toute dette de l’entreprise, c’est à bon droit que le tribunal a condamné M. X au paiement du plafond de son engagement soit 39.636,74 €, la substitution des intérêts légaux aux intérêts contractuels dont la banque admet être déchue par application de l’article L.313-22 du code monétaire et financier pour l’année 2005 demeurant sans incidence sur le montant de la condamnation dès lors qu’elle n’a pas pour effet de ramener la dette à une somme inférieure à ce plafond, étant précisé qu’il est justifié d’une lettre d’information pour toutes les autres années, y compris durant la procédure judiciaire (cf pièces n°14 à 20) ;

Attendu enfin que M. X est malheureux et de bonne foi ; qu’il peut être autorisé à se libérer en vingt-quatre mensualités, la totalité de sa dette devenant exigible en cas de manquement, dix jours après une mise en demeure de régulariser restée vaine ;

Attendu que s’agissant des manquements imputés à la banque par la société Vifrelec, c’est à raison que le tribunal a débouté cette dernière de ses prétentions ;

Attendu en effet que pour ce qui est en premier lieu de l’affacturage, il s’agit d’une convention conclue entre Vifrelec et une société CGA dont la personnalité juridique est distincte de celle de la Société Générale, quand bien même elle serait sa filiale ; que le recours à l’affacturage a été décidé par M. X, président directeur général de Vifrelec depuis 1994 et associé majoritaire (cf pièce n°9 de l’intimée), qui était donc averti de ce type de procédé, auquel il avait d’ailleurs déjà antérieurement recouru (cf pièce n°8) ; qu’il ressort au surplus des productions que cet affacturage, souscrit aux conditions usuelles, n’avait aucun caractère ruineux, et qu’il permit d’améliorer substantiellement la situation de l’entreprise -dont le découvert fut ramené de 278.953€ à 71.323€ entre juin et août 2004- et d’obtenir rapidement de la trésorerie sur plus de 500.000€ de factures, les considérations contenues dans le courriel invoqué par l’appelante quant aux limites de ce procédé, ne retirant rien à ces constatations, outre le caractère peu probant, déjà relevé, de ce document ;

Attendu que pour ce qui est en second lieu de l’erreur commise par la Société Générale dans la tenue du compte, elle est avérée et reconnue, la banque ayant rejeté des LCR alors que sa cliente se trouvait dans les limites de l’autorisation de découvert ; qu’il ressort toutefois des productions (cf notamment pièces n°10 et 20) qu’elle a aussitôt admis par écrit son erreur et indiqué que les lettres pouvaient être représentées, qu’elle les a payées, sans frais ni pénalité, et qu’elle a prévenu la Banque de France que l’incident lui incombait et ne devait pas être imputé à l’entreprise ; qu’il n’est justifié d’aucun préjudice financier à ce titre ; que s’agissant du préjudice commercial, la rapidité avec laquelle la banque a complètement réparé son erreur exclut qu’il en ait existé réellement un, étant observé que les quatre courriers de partenaires commerciaux invoqués par la société Vifrelec au soutien de sa demande indemnitaire sont dépourvus de lien de causalité avéré avec cet incident puisqu’ils datent respectivement des 1er, 6, 7 et 13 septembre 2004 (cf sa pièce n°18) et sont tous antérieurs à cette erreur, commise fin septembre 2004 lors du traitement du relevé au 30 septembre (cf pièce n°10) ; qu’en tout état de cause, le dirigeant ayant procédé quelques semaines plus tard à la déclaration de cessation des paiements, pour des motifs étrangers à cette erreur, celle-ci ne peut avoir créé aucun dommage réel à la réputation de l’entreprise ;

Attendu que pour ce qui est en troisième lieu de la rupture par la banque de ses concours, il ressort des productions que malgré une formulation de sa lettre du 4 octobre 2004 (pièce n°8 de l’appelante) pouvant signifier qu’elle entendait mettre fin à son autorisation de découvert sous huit jours, la Société Générale a maintenu son concours et continué au-delà de ce délai à honorer les paiements de l’entreprise (cf pièce n°3 de l’appelante, laquelle n’en disconvient au demeurant pas) ; qu’elle a ensuite procédé conformément aux prescriptions légales et aux clauses de la convention de trésorerie courante, en notifiant dans les formes sa décision de mettre fin à ses concours à l’issue d’un préavis de soixante jours ; qu’à ce titre pareillement, aucune faute ni manquement ne sont caractérisés ;

Que c’est donc à bon droit que le tribunal a débouté la société Vifrelec de l’ensemble de ses prétentions ;

Que les demandes indemnitaires subsidiaires formées par Y X en réparation du préjudice que lui auraient causé les fautes ou manquements de la banque doivent également être rejetées, en l’absence de preuve de ces fautes ou manquements, ou du lien de causalité avec le préjudice allégué, les productions (et notamment la procédure d’alerte du commissaire aux comptes) persuadant que les difficultés ayant conduit à l’exigibilité des concours cautionnés, puis à l’ouverture de la procédure collective, résultaient de causes liées à l’exploitation même, telles la nature du poste client, l’augmentation du taux horaire, le coût d’un déménagement en 2003 et l’échec d’une tentative d’implantation dans l’Yonne (cf pièce n°10);

Attendu que le jugement entrepris sera donc confirmé, sauf en ce qu’il a refusé des délais de grâce à M. X ;

Que l’équité justifie de ne pas allouer d’indemnité de procédure à la banque ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort CONFIRME le jugement entrepris sauf en ce qu’il a débouté Y X de sa demande de délais de grâce ;

et statuant à nouveau de ce chef :

AUTORISE M. X à se libérer en vingt-quatre mensualités consécutives, la première dans le mois suivant celui de la signification du présent arrêt, avant le 10 de chaque mois, et DIT que la totalité de sa dette deviendrait exigible en cas de manquement, dix jours après une mise en demeure de régulariser restée vaine

y ajoutant :

DÉBOUTE Y X et la S.A.S. Vifrelec de tous leurs chefs de prétentions

CONDAMNE in solidum Y X et la S.A.S. Vifrelec aux dépens d’appel

DIT n’y avoir lieu à indemnité de procédure

ACCORDE à Maître DAUDÉ, titulaire d’un office d’avoué, le droit à recouvrement direct reconnu par l’article 699 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Monsieur Alain RAFFEJEAUD, président et Madame A B, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT.

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