Cour d'appel de Paris, 25 octobre 1990, n° 88/6738 ; 88/20948

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 25 oct. 1990, n° 88/06738
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 88/6738 ; 88/20948
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 18 janvier 1988

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE PARIS

4ÈME CHAMBRE SECTION B

ARRÊT DU 25 OCTOBRE 1990

RG N° 88/6738 88/20948

Décision déférée : jugement du tribunal de grande instance de Paris, Chambre 3 Section 1, du 19 janvier 1988

PARTIES EN CAUSE

1. Monsieur X (Y) dit Z

[…], Appelant,

Représenté par Maître MOREAU, avoué.

Assisté de Maître André SCHMIDT, avocat.

2. La société anonyme MUSIDISC dont le siège social est à LEVALLOIS 9230) […],

Intimé,

Représentée par la SCP d’avoués GAULTIER KISTNER GAULTIER,

Assistée de Maître THORNE, avocat.

3. La Société Nouvelle de Presse et de Communication S.N.P.C. dont le siège social est […] à Paris 3ère, en la personne de ses représentants légaux y domiciliés,

Intimée,

Représentée par Maitre BLIN, avoué,

Assistée de Maître NATIVI, avocat.

COMPOSITION DE LA COUR

(lors du délibéré)

Président : Monsieur POULLAIN

Conseillers : Messieurs BONNEFONT COUGE

GREFFIER : Mademoiselle MALTERRE

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DEBATS

A l’audience publique du 20 septembre 1990 Monsieur BONNEFONT, magistrat chargé de la mise en état a, en application de l’article 786 du NCPC, entendu les plaidoiries, les avocats ne s’étant pas opposés. Il en a rendu compte à la Cour dans son délibéré.

ARRET

Contradictoire.

Prononcé publiquement par Monsieur BONNEFONT, président, lequel a signé : minute avec

Mademoiselle MALTERRE, greffier.

FAITS ET PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE

Editant le Quotidien Libération dont le titre est protégé par la marque 1 212 235 la Société Nouvelle de Presse et de Communication (SNPC) assignait le 11 mai 1987 la Société MUSIDISC et

X, producteur, interprète en contrefaçon de ladite marque et violation des droits

d’auteur. L’article 1382 du Code civil était également visé dans l’exploit introductif d’instance qui énonçait que le disque « LE RETOUR DE LA HORDE » du groupe Z avait été distribué en

France dans une pochette reproduisant le losange sur lequel s’imprime le mot Libération dans la marque susvisée et la présentation de la première page du journal Libération. Subsidiairement, il était reproché aux défendeurs d’avoir voulu créer un risque de confusion diminuant le pouvoir attractif de la marque et d’avoir ainsi commis une faute.

Des dommages intérêts étaient sollicités ainsi que le bénéfice de l’article 700 du Nouveau Code de

Procédure Civile.

MUSIDISC concluait à sa mise hors de cause au motif que X avait assuré disposer de tous les droits pour la diffusion des phonogrammes. De plus, par acte du 16 novembre 1987, elle assignait X pour se voir garantie en vertu du contrat la liant à ce dernier connu sous le pseudonyme Z.

Au titre de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile elle réclamait 5 000 Francs à la

Société Nouvelle de Presse et de Communication.

X, concluait au débouté de la Société Nouvelle de Presse et de Communication estimait que la garantie n’avait pas lieu d’être.

2


LE JUGEMENT CRITIQUÉ

Par son jugement du 19 janvier 1988, le Tribunal de Grande Instance de Paris a joint les procédures et a entre autres dispositions :

- Dit la Société Nouvelle de Presse et de Communication mal fondée en son action en contrefaçon et recevable à agir sur le fondement de l’article 13 de la loi du 11 mars 1957 ;

- Dit la Société Nouvelle de Presse et de Communication bien fondée en son action en responsabilité et condamné in sodium MUSIDISC et X à lui payer 20.000 Francs de dommages intérêts ;

- Condamné X à garantir MUSIDISC ;

- Débouté les parties de leurs demandes au titre de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

L’APPEL

Des appels ont été déclarés par X le 22 février 1988 et par la Société Nouvelle de Presse et de Communication le 25 novembre 1988.

X conclut à l’infirmation du jugement sauf en ce qu’il a rejeté les prétentions de la

Société Nouvelle de Presse et de Communication sur le fondement de la marque et de la loi du 11 mars 1957. Il demande sa mise hors de cause soutenant subsidiairement qu’il n’y a pas lui garantie.

Il réclame à la Société Nouvelle de Presse et de Communication 20.000 Francs en application de

l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La Société Nouvelle de Presse et de Communication conclut à l’infirmation de toutes les dispositions lui faisant grief, priant la Cour de dire qu’il y a en contrefaçon partielle de sa marque par reproduction du losange qui en est l’un des éléments et violation de ses droits sur l’oeuvre collective que constitue la première page du journal.

En outre, elle prétend avoir été victime d’une concurrence déloyale, la reproduction de la « une » de

Libération ayant tendu à faire croire que journal était à l’origine du disque à une clientèle jeune, non conformiste et intéressée par la musique moderne.

Elle réclame 50.000 Francs au titre de la contrefaçon, 50.000 Francs pour l’atteinte à ses droits

d’auteur et 150.000 Francs pour concurrence déloyale ainsi que 20.000 Francs en vertu de l’article

700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

3



Intimée, MUSIDISC conclut qu’il plaise à la Cour d’infirmer la décision déférée en ce qu’elle a dit bien fondée l’action en responsabilité de la Société Nouvelle de Presse et de Communication.

Elle reprend sa demande de mise hors de cause et subsidiairement de garantie. Elle sollicite la condamnation de la Société Nouvelle de Presse et de Communication au titre de l’article 700 du

Nouveau Code de Procédure Civile.

SUR CE, LA COUR

Qui pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties se réfère au jugement critiqué et aux écritures d’appel.

SUR L’ACTION EN CONTREFAÇON DE MARQUE

- Considérant que le dépôt invoqué par la Société Nouvelle de Presse et de Communication ne comporte pas de revendication de couleurs ; qu’à l’examen du certificat d’identité en noir et blanc, on observe un contraste entre les lettres claires de la dénomination et le losange foncé qui, d’une absolue banalité, ne sert à rien d’autre qu’à mettre en valeur le mot Libération qui seul a un pouvoir attractif.

- Considérant que le losange, n’étant pas protégeable isolément, la contrefaçon partielle ne peut être retenue ; que d’autre part le grief d’imitation illicite n’est pas subsidiairement articulé.

- Considérant que le jugement qui à bon droit a écarté l’atteinte à la marque, sera sur ce point confirmé.

SUR LA VIOLATION DES DROITS D’AUTEUR

- Considérant qu’un journal est une oeuvre collective dans laquelle se fondent les contributions individuelles de divers journalistes ayant participé à son élaboration ; que de plus la composition de la première page d’un quotidien obéit à des règles strictes, observées de façon permanente quels que soient les auteurs des articles et les rédacteurs en Chef.

Car elles tendent à fixer dans l’esprit du public une structure lui conférant une personnalité bien distincte de la « une » des journaux concurrents.

Que la Société Nouvelle de Presse et de Communication est par suite recevable à faire protéger la

« une » de Libération s’agissant de sa mise en page, sur le fondement de la loi du 11 mars 1957.

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- Considérant que si MUSIDISC n’en convient pas formellement, il n’est pas douteux que la pochette du disque « LE RETOUR DE LA HORDE » est le fruit d’une imitation d’ailleurs expressément admise par X, son concepteur dans la mesure où il oppose à l’action de la

Société Nouvelle de Presse et de Communication les droits au pastiche et à la parodie.

Qu’il s’impose cependant de rappeler que le pastiche, imitation d’une manière et la parodie qui imite une oeuvre sérieuse dans une forme burlesque, sont les produits d’un effort créatif qui tend à provoquer le rire ; qu’en l’espèce, les textes ou les illustrations figurant sur la pochette n’ont pas de rapport évident avec ce que Libération propose à ses lecteurs ; que l’accumulation de grossièretés qui les caractérise, si elle est bien faite, ce qui est manifestement le but recherché, pour choquer est dénuée de toute vertu conique ; qu’en l’absence de pastiche ou de parodie, c’est à bon droit que la

Société Nouvelle de Presse et de Communication se plaint d’une violation de ses droits d’auteur, le jugement étant de ce Chef infirmé.

SUR L’ACTION EN RESPONSABILITE

- Considérant que le jugement énonce, en s’appuyant sur certaines similitudes de présentation, que les défendeurs ont cherché à capter vers leur oeuvre musicale d’avant garde la clientèle de

Libération.

Qu’il retient donc un grief de parasitisme et non de concurrence déloyale étant observé ici que le disque de Z n’est pas un produit concurrent de Libération et que ses ventes ne sont pas de nature à enlever des lecteurs à ce journal.

- Considérant toutefois que l’imitation relevée la charge de Z ne procède pas d’une intention parasitaire évidente ; qu’en tout cas rien ne démontre qu’elle ait pu inciter le lectorat de Libération à croire que son quotidien favori était pour quelque chose dans les entreprises artistiques de Z ; qu’au surplus la faute ainsi imputée à ce dernier repose sur des agissements dont la matérialité est déjà incriminée sur le fondement de la loi du 11 mars 1957 ; qu’il n’y a donc pas lieu d’accueillir

l’action en responsabilité.

SUR LES DOMMAGES-INTERETS

- Considérant qu’au vu des éléments d’appréciation fournis il sera alloué à la Société Nouvelle de

Presse et de Communication en réparation du préjudice matériel et moral.

Découlant de la violation de ses droits d’auteur la somme indiquée au dispositif.

5


SUR LA DEMANDE EN GARANTIE

- Considérant qu’aux termes du contrat intervenu le 4 juin 1986 entre MUSIDISC, le distributeur et

X, le producteur, ce dernier déclarait être titulaire des droits de reproduction et de commercialisation des phonogrammes objet du contrat et en outre disposer des droits attachés aux photographies et autres documents utilisés pour les besoins de leur diffusion.

- Considérant que force est de le constater, X en appel comme en première instance se borne à indiquer que l’action en garantie n’a pas lieu d’être dès lors que les prétentions de la Société

Nouvelle de Presse et de Communication sont mal fondées mais n’oppose aucune réplique à

l’interprétation que donne MUSIDISC de la clause prérappelée pour justifier sa demande que la demande de MUSIDISC, bien fondée, sera accueillie.

SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 700 NCPC

- Considérant qu’il serait inéquitable de laisser à la Société Nouvelle de Presse et de Communication la charge des frais non compris dans les dépens exposés pour la défense de ses droits d’auteur, que pour l’ensemble de la procédure MUSIDISC et X seront condamnés à lui payer le montant justifié indiqué au dispositif.

PAR CES MOTIFS ET CEUX

- Sur l’appel partiellement fondé de la Société Nouvelle de Presse et de Communication

- Confirme sur le rejet de l’action en contrefaçon de marque infirmant pour le surplus.

- Dit que la Société MUSIDISC et X ont méconnu les droits d’auteur de la Société

Nouvelle de Presse et de Communication sur la partie de l’oeuvre collective constituée par la composition de la première page du Journal Libération.

- Condamne MUSIDISC et X à payer à la Société Nouvelle de Presse et de

Communication en réparation de son préjudice la somme de 20.000 Francs déboute la Société Nouvelle de Presse et de Communication de son action en responsabilité.

- Dit la Société MUSIDISC bien fondée en sa demande de garantie à l’égard de X.

- Condamne in solidum la Société MUSIDISC et X à payer à la Société Nouvelle de

Presse et de Communication au titre de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile la somme de 16.000 Francs.

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- Dit que MUSIDISC et X supporteront les dépens de première instance et d’appel.

- Admet Maître BLIN aux bénéfices des dispositions de l’article 699 du Nouveau Code de

Procédure Civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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