Cour d'appel de Paris, 23 novembre 1994, n° 93/013040

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 23 nov. 1994, n° 93/01304
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 93/013040
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 5 avril 1993

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE PARIS

15ÈME CHAMBRE SECTION A

ARRÊT DU 23 NOVEMBRE 1994

N° RÉPERTOIRE GÉNÉRAL : 93/013040

ARRÊT AU FOND

Sur appel d’un jugement du TGI de Paris 4ème chambre 1ère section en date du 6 avril 1993

PARTIES EN CAUSE

1°) Monsieur Z X, demeurant […],

2°) La COMPAGNIE NATIONALE SUISSE ASSURANCES, dont le siège social est […]

[…],

APPELANTS au principal

INTIMES incidemment

Représentés par Me MOREAU, Avoué Assistés de Me R. BONNET, Avocat

3°) Monsieur A Y, demeurant […]

[…],

INTIME au principal

APPELANT incidemment

Représenté par la S.C.P LAGOURGUE, Avoué

Assisté de Me CHAIBAN, Avocat

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré,
Monsieur B. PEYRAT, Président M onsieur F. DUCLAUD, Conseiller
Madame C. FAVRE, Conseiller

GREFFIER : Melle HOUDIN

DEBATS : A l’audience publique du 19 octobre 1994,

ARRET :

Contradictoire

Prononcé publiquement par Madame FAVRE, Conseiller

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Signé par Monsieur le Président PEYRAT et par Melle HOUDIN, Greffier.

Propriétaire d’un appartement à Paris 16ème, […], Monsieur A Y a fait assigner Monsieur Z X, à qui il en avait confie la gestion, ainsi que son assureur, la COMPAGNIE NATIONALE SUISSE, en paiement de la somme de 107.677,67 frs à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice qu’il aurait subi du fait que le locataire choisi par son mandataire aurait quitté les lieux sans s’acquitter de nombreux loyers, en emportant des objets mobiliers et en ayant dégradé les locaux.

Par jugement rendu le 6 avril 1993, le Tribunal de Grande Instance de Paris (4ème Chambre – 1ère section) a condamné solidairement Monsieur X et la COMPAGNIE NATIONALE

SUISSE, dans la limite de sa garantie, à payer à Monsieur Y la somme de 70.000 frs à titre de dommages-intérêts avec intérêts légaux à compter du jugement.

Monsieur X et la COMPAGNIE NATIONALE SUISSE ASSURANCES ont relevé appel de cette décision.

Ils soutiennent :

- que Monsieur X s’est toujours comporté en bon père de famille ; qu’aucun reproche ne peut lui être fait ;

- qu’en tout état de cause, le montant de la somme allouée excède très largement celui du préjudice.

Ils concluent à l’infirmation du jugement frappé d’appel, à ce que Monsieur Y soit déclaré mal fondé en toutes ses demandes et condamné à restituer à la COMPAGNIE NATIONALE

SUISSE ASSURANCES la somme de 65.153,28 frs versée le 11 mai 1993 en exécution provisoire du jugement.

Monsieur A Y, intimé, répond qu’en sa qualité d’administrateur de biens, titulaire d’un mandat de gestion salarie, Monsieur X avait l’obligation, avant de louer l’appartement, de

s’assurer par des vérifications sérieuses, de la solvabilité du locataire et de prendre les garanties requises pour assurer le règlement des loyers ; qu’il a failli à ses obligations ; qu’il a en outre, au lieu d’engager des poursuites judiciaires à l’encontre du locataire, laissé trainer les choses et laissé les arriérés de loyers s’accumuler. Il demande donc la confirmation du jugement pour avoir retenu la responsabilité contractuelle de son mandataire.

Formant appel incident sur le quantum du préjudice, il réclame, à titre de dommages-intérêts, les sommes correspondant à la perte éprouvée (loyers échus non payés, frais de procédure inutile, commission perçue sans droit, disparition d’objets) et aux loyers non encore échus mais

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contractuellement dus, soit, en deniers ou quittances, la somme de 81.187,67 frs et celle de 10.000 frs au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

Les appelants ont répliqué, sur le principe de la responsabilité, en affirmant qu’une enquête de solvabilité avait été faite auprès de la B.N.P, établissement bancaire du locataire, sur les garanties exigées, selon eux suffisantes en raison de la durée du bail, sur les mesures conservatoires et poursuites judiciaires. Subsidiairement, sur le préjudice, ils font valoir que la somme de 70.000 frs est supérieure à la dette du locataire telle qu’elle résulte du jugement prononcé à son encontre le 12 novembre 1992 et que seul l’arriéré de loyers de 40.441,62 frs constitue une dette démontrée.

Monsieur Y a discuté dans d’ultimes conclusions signifiées le 23 juin 1994, l’ensemble de

l’argumentation de ses adversaires et demande le bénéfice de ses précédentes écritures et de son appel incident.

CELA ETANT EXPOSE.

Sur les fautes de gestion

Considérant que l’administrateur de biens auquel est confié la gérance d’un immeuble est tenu, en tant que mandataire salarié, de s’assurer par des vérifications sérieuses de la solvabilité réelle du locataire qu’il installe dans les lieux ;

Considérant, en l’espèce, qu’il n’est justifié par Monsieur X d’aucune vérification ; que celui-ci se contente en effet d’affirmer qu’il aurait obtenu des renseignements bancaires satisfaisants ; qu’à supposer qu’il ait accompli une telle démarche, il lui appartenait encore, à tout le moins eu égard au montant du loyer exigé, de s’assurer des ressources dont disposait le candidat à la location ; qu’il n’est même pas prétendu par l’intéressé avoir interrogé sur ce point son client ; que le mandataire a donc commis une faute dans l’exécution de son mandat ;

Considérant que les premiers juges ont encore à juste titre retenu que Monsieur X avait été négligent lors de la survenance du premier impayé, puisqu’il apparait que le loyer n’étant plus régulièrement payé depuis le mois de février 1991, il a attendu le mois d’octobre pour lui faire délivrer un commandement visant la clause résolutoire ;

Que le jugement sera dès lors confirmé pour avoir dit que Monsieur X avait engagé sa responsabilité contractuelle ;

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Sur le préjudice

Considérant, invoquant les dispositions de l’article 1151 du Code Civil, que Monsieur Y soutient que son préjudice est constitué par les impayés de loyers, les frais inutilement avancés dans le cadre d’une procédure tardive a l’encontre du locataire, la disparition d’objets dans l’appartement,

l’attribution par Monsieur X de commissions sur des arriérés de loyers non encaissés et enfin le gain manqué correspondant aux loyers non encaisses pendant la durée du préavis contractuel ;

Mais considérant en premier lieu que certains des préjudices allégués ne sont pas établis ;

Qu’il en est ainsi des frais prétendument avancés inutilement dans le cadre d’une procédure tardive à l’encontre du locataire, alors que le caractère inutile de la procédure n’est nullement démontré, et que le propriétaire, informé par courrier du 16 octobre 1991 de l’intention de son mandataire de diligenter une procédure en recouvrement des loyers impayés, ne l’en a nullement dissuadé ;

Qu’il en est de même du préjudice allégué du fait de la disparition d’objets puisqu’aucun constat ne vient attester de ladite disparition et que la liste des objets prétendument disparus fournie par
Monsieur Y fait à elle seule ressortir le peu de sérieux de sa demande, la plupart des objets qui y sont mentionnés ne figurant pas sur l’inventaire dressé lors de l’entrée dans les lieux (lampe de chevet, cocotte minute, théière, tasses a thé, soucoupes, cendriers, égouttoir, sèche-linge etc…) ;

Que s’agissant de la remise en état des lieux, il est uniquement versé aux débats deux factures de

180 frs et 425, 40 frs non datées ;

Qu’enfin, Monsieur Y ne peut reprocher à Monsieur X d’avoir perçu le montant des honoraires contractuellement prévus ;

Considérant, en second lieu, que l’administrateur n’est pas garant de la bonne exécution du contrat conclu ; qu’il ne peut donc être tenu au paiement des loyers impayés, aux lieu et place du locataire, et encore moins être tenu du règlement de ceux qui auraient été payés en cas de respect du préavis contractuel ;

Considérant en définitive que les négligences du mandataire ont fait perdre au bailleur une chance importante de recouvrer les loyers arriérés ; que la Cour dispose des éléments d’appréciation suffisants pour fixer à 40.000 frs le montant des dommages-intérêts dus en réparation de ce préjudice, les intérêts de cette somme étant dus à compter du jugement déféré lequel avait retenu le principe de la condamnation ;

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Considérant que cette condamnation sera prononcée en deniers ou quittances eu égard au fait que la

COMPAGNIE NATIONALE SUISSE ASSURANCES a exécuté la décision entreprise ; que le cas échéant, Monsieur Y sera condamné à rembourser le trop perçu, augmenté des intérêts légaux à compter des conclusions contenant demande de remboursement et valant mise en demeure signifiées le 5 octobre 1993 ;

Considérant qu’il serait inéquitable de laisser à la charge de l’intimé la totalité des frais non taxables qu’il a dû exposer ; qu’il lui sera alloué à ce titre la somme de 8.000 frs ;

PAR CES MOTIFS.

La Cour,

Confirme le jugement entrepris sauf en ce qui concerne le montant des dommages-intérêts ;

L’ émendant de ce chef, statuant à nouveau et y ajoutant :

Condamne in solidum Monsieur X et la COMPAGNIE NATIONALE SUISSE

ASSURANCES, cette dernière dans la limite de sa garantie, à payer en deniers ou quittances à
Monsieur Y la somme de 40.000 frs à titre de dommages-intérêts, avec intérêts légaux à compter du 6 avril 1993 ;

Condamne en tant que de besoin Monsieur Y à restituer les sommes trop perçues, avec intérêts légaux a compter du 5 octobre 1993 ;

Condamne in sodium Monsieur X et la COMPAGNIE NATIONALE SUISSE

ASSURANCES à verser à Monsieur Y la somme de 8.000 frs au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Condamne les mêmes aux dépens d’appel et autorise la S.C.P. LAGOURGE, avoué, à les recouvrer conformément à l’article 699 du nouveau code de procédure civile.

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Textes cités dans la décision

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  2. Code civil
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