Cour d'appel de Paris, 4e chambre section a, 4 décembre 1996

  • Mesure sollicitee dans l'assignation·
  • Numero d'enregistrement 813 352·
  • Trouble manifestement illicite·
  • Intervention forcee en appel·
  • Contestation sérieuxse·
  • Ordonnance de référé·
  • Mise hors de cause·
  • Validité du modèle·
  • Élément nouveau·
  • Modèle de sac

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 4e ch. sect. a, 4 déc. 1996
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Décision(s) liée(s) :
  • Tribunal de commerce de Paris, 18 décembre 1995
Domaine propriété intellectuelle : DESSIN ET MODELE
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : 813352
Classification internationale des dessins et modèles : CL03-01
Référence INPI : D19960253
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Texte intégral

FAITS ET PROCEDURE Le 30 septembre 1981, la SA HERMES PARIS a déposé à l’Institut National de la Propriété Industrielle sur le fondement des dispositions de la loi du 14 juillet 1909 un modèle de sac qui a été enregistré sous le n 813.352 et publié le 2 décembre 1981 sous le n 195.877. Ce modèle avait été originellement dénommé BUGATTI mais un jugement du Tribunal de Grande Instance de Paris du 20 janvier 1995 ayant dit que les sociétés HERMES et HERMES international, en utilisant cette dénomination sans l’autorisation de la société BUGATTI International, titulaire de la marque BUGATTI n 1.135.188, avaient commis des actes de contrefaçon au préjudice decelle-ci, les sociétés en cause ont renoncé à ce terme et ont désormais désigné leur modèle sous l’appellation BOLIDE. Il convient de préciser que le Tribunal de Commerce de Paris :

- par jugement du 18 décembre 1995, a dit que la SARL le SHOW ROOM (représentée par son mandataire liquidateur, Me B) avait commis des actes de contrefaçon et de concurrence déloyale au préjudice de la SA HERMES en diffusant un sac fourni par la SARL BUGATTI FRANCE,
- par jugement du 24 mai 1996, a dit que la SARL BUGATTI Boutique (prise en la personne de Me Leila B mandataire liquidateur) « en ouvrant rue François 1er, dans un quartier consacré au luxe, proche voisin du siège et du magasin de la société HERMES, en commercialisant vers la même clientèle un sac de maroquinerie qui appartient à la société HERMES, en l’entourant de publicité » s’était rendue coupable d’actes de contrefaçon, de concurrence déloyale et de publicité mensongère et a notamment validé une saisie contrefaçon pratiquée le 16 décembre 1994 par Me Denis C huissier de justice au cours de laquelle trois sacs avaient été saisis et placés sous scellés. Ayant entre-temps appris que des sacs semblables à ceux-ci étaient exposés dans les vitrines et à l’intérieur d’un magasin à l’enseigne BUGATTI sis […] à paris, la société HERMES a fait dresser par le ministère de Me Denis C, le 29 novembre 1995 un procès- verbal de constat et un additif à celui-ci lesquels ont revélé que :

- dans la vitrine et sur les rayonnages situés au fond du magasin « à l’enseigne BUGATTI portant le sigle »EB« en enseigne étaient exposés »différents modèles de sacs semblables à celui argué de contrefaçon",
- le magasin en cause dépendait de la SA Louis C, enseigne « EB BUGATTI », sise […] (1er arrondissement). Autorisée par ordonnance du 8 décembre 1995, la société HERMES a assigné à bref délai la société Louis CHANTILLY et « 3 B BUGATTI » devant le Tribunal de Commerce de Paris aux fins de voir :

— constater que la société Louis CHANTILLY exposait et offrait à la vente dans une boutique située […] (1er) des modèles de sacs à main semblables à ceux ayant fait l’objet d’une saisie-contrefaçon en date du 17 (en fait, 16) décembre 1994 par les soins de Me Denis C, huissier de justice à Paris.

- en conséquenceinterdire à « la société Louis CHANTILLY et/ou 3 B BUGATTI » ainsi qu’à tousses magasins, détaillants, sous-traitants, établissements secondaires d’exposer, commercialiser, faire commercialiser, importer, exporter tant en FRANCE qu’à l’étranger tous modèles de sacs à main semblables à ceux qui avaient fait l’objet de la saisie- contrefaçon susvisée,
- condamner « la société LOUIS CHANTILLY et/ou 3 B BUGATTI » au paiement d’une indemnité provisionnelle de 100.000 frs et d’une somme de 20.000 frs au titre de l’article 700 du nouveau Code de Procédure Civile. La Société Louis CHANTILLY a répliqué que la société BUGATTI n’était pas domiciliée dans ses locaux et conclu au rejet de la demande et à la condamnation de la société HERMES à luiverser les sommes de 50.000 frs en réparation d’une procédure qualifiée d’abusive et de 15.000 frs sur le fondement de l’article 700 du nouveau Code de Procédure Civile. « 3 B BUGATTI » ne s’est pas fait représenter. Par ordonnance de référé réputée contradictoire en date du 18 décembre 1995, le Président du Tribunal de Grande Instance de Paris a :

- donné acte à la SA Louis C de ce qu’elle s’était engagée « à la barre » à retirer les sacs litigieux de la vente,
- constaté que cette société exposait et offrait à la vente "dans une boutique située […] 1er des modèles de sac à main semblables à ceux ayant fait l’objet d’une saisie-contrefaçon en date du 17 décembre 1994 par les services de Me Denis C huissier de justice à Paris",
- interdit à « la Société Louis CHANTILLY et/ou 3 B BUGATTI » ainsi qu’à ses magasins, détaillants, sous traitants, établissements secondaires, d’exposer, commercialiser, faire commercialiser, importer, exporter, tant en FRANCE qu’à l’étranger tous modèles de sacs à main semblables à ceux qui ont fait l’objet de la saisie-contrefaçon en date du 17 décembre 1994 par les soins de Me Denis C", sous astreinte de 20.000 frs par infraction constatée,
- condamné « la société Louis CHANTILLY et/ou 3 B BUGATTI » à payer à la société HERMES les sommes de 100.000 frs à titre de dommages et intérêts et de 20.000 frs en application des dispositions de l’article 700 du nouveau Code de Procédure Civile. La Société Louis CHANTILLY a interjeté appel de cette décision le 15février 1996.

Par requête du 20 février 1996, elle a fait valoir que « devant le mépris total des règles de procédure qui n'(avaient) été observés ni par la société HERMES ni par le Tribunal de Commerce de Paris, elle (était) bien fondée à appeler la société ETTORE BUGATTI, société de droit italien et la société qui la représente en FRANCE, la société BUGATTI France pour la première fois en cause d’appel pour prendre fait et cause dans la procédure ». Alléguant que l’exécution de l’ordonnance déférée aurait pour conséquence de la mettre en péril dans la mesure où le fonds de commerce qu’elle exploite est consacré à la vente des sacs BUGATTI, elle a été autorisée à assigner à jour fixe tant la société HERMES que les deux sociétés susvisées à l’audience du 29 avril 1996 de la 1re chambre section A de la Cour, laquelle a fait renvoyer la procédure à son audience du 13 mai 1996 puis devant la 4e chambre section B enfin devant la 4e chambre section A. Par conclusions du 26 avril 1996, la société Louis CHANTILLY alléguantque la société ETTORE BUGATTI étant en était de procédure collective, a demandé acte de son désistement d’appel à l’égard de celle-ci. La société HERMES faisant alors valoir que si la société ETTORE BUGATTI avait effectivement été déclarée en faillite par jugement du Tribunal de BOLZANO le 8 février 1996, elle-même n’entendait pas abandonner ses prétentions à son encontre a, en vertu d’une ordonnance du 2 mai 1996, assigné pour le 13 mai 1996 GIAMBATTISAT ALBERTINI (en fait Gianbattista ALBERTI), pris en sa qualité de curateur de la société en cause, lequel bien que régulièrement cité n’a pas constitué avoué. La Société Louis CHANTILLY invoque à l’appui deson recours :

- la nullité de l’ordonnance entreprise,
- le faitque la société HERMES n’établit pas l’existence de la contrefaçon qu’elle allègue,
- le défaut de validité des modèles déposés le 30 septembre 1981 sous le n 813.352. Elle sollicite la condamnation de la société HERMES au paiement d’une somme de 100.000 frs en réparation d’une procédure qu’elle qualifie d’abusive. La Société BUGATTI FRANCE qui a formé un appel incident par conclusions du 29 avril 1996 invoque, quant à elle :

- l’irrégularité de la procédure à l’encontre de la société ETTORE BUGATTI, compte tenu du jugement du Tribunal de BOLZANO en date du 8 février 1996,
- la nullité de l’ordonnance de référé du 18 décembre 1995,
- l’irrecevabilité de sa mise en cause, en cours d’appel.

Elle poursuit « àtout le moins », la réformation de la décision déférée aux motifs que les faits allégués ne sont pas établis et que les modèles déposés ne sont pas valables. Elle demande la condamnation de la société HERMES à lui verserles sommes de 100.000 frs à titre de dommages et intérêts et de 30.000 frsen vertu de l’article 700 du nouveau Code de Procédure Civile. La Société HERMES conclut à :

- l’irrecevabilité de l’intervention forcée dela société BUGATTI FRANCE en cause d’appel,
- la confirmation de l’ordonnance entreprise,
- la condamnation de « la société Louis CHATILLY et/ou la société ETTORE BUGATTI » au paiement d’une somme de 20.000 frs au titre de l’article 700 du nouveau Code de Procédure Civile.

DECISION I – SUR LA DEMANDE DE LA SOCIETE BUGATTI FRANCE Considérant que cette intimée invoque l’irrégularité de la procédure à l’encontre de la société ETTORE BUGATTI et l’irrecevabilité de sa propre mise en cause. Considérant que la société BUGATTI FRANCE qui constitue une personnemorale distincte de la société ETTORE BUGATTI, au demeurant régulièrement citée dans la présente instance, n’a pas qualité à invoquer en ses lieu et place une quelconque irrégularité. Qu’en revanche, elle est recevable à contester l’intervention forcée dont elle-même a été l’objet. Qu’il convient en effet de rappeler qu’en matière contentieuse, l’appel ne peut être dirigé que contre ceux qui ont été parties en première instance. Que ce principe ne souffre d’exception que lorsque l’évolution du litige implique la mise en cause de personnes qui n’étaient ni parties ni représentées en première instance ou qui n’y avaient pas figuré en une autre qualité c’est-à-dire lorsqu’apparaît un élément nouveau, révélé par le jugement ou survenu postérieurement à celui-ci susceptible d’éclairer devant la Cour le litige d’une manière inattendue.

Or considérant, en l’espèce, que la mise en cause de la société BUGATTI FRANCE était possible dès l’introductionde la procédure. Qu’au demeurant, la société LOUIS CHANTILLY n’invoque pour justifier l’intervention forcée de cette société, aux termes de ses écritures du 7 octobre 1996 que le fait que « la société BUGATTI FRANCE n’était pas étrangère à la procédure ». Qu’il en résulte que cette intimée est non seulement recevable mais bien fondée à voir écarter sa mise en cause. II – SUR LA DEMANDE EN ANNULATION DE L’ORDONNANCE DEFEREE Considérant que la société LOUIS CHANTILLY expose que l’assignation qui lui a été délivrée par la société HERMES n’a pas saisi le juge des référés du Tribunal de Commerce de Paris « mais bien le Tribunal de Commerce de Paris en une audience spéciale tenue par Madame le Président COTELLE de la chambre du conseil ». Qu’elle soutient que « la formule de comparution qui figure sur l’acte introductif d’instance délivré par la société HERMES à la sociétéLOUIS C et la société BUGATTI démontre bien que la société HERMES a voulu faire comparaître lesdites sociétés devant le Tribunal et non devant Monsieur le Juge des référés ». Qu’elle ajoute que « la société HERMESn’a pas fourni les moyens nécessaires lui permettant d’obtenir le référé àbref délai » et qu’il suffit pour s’en convaincre de se reporter à la requête, laquelle ne comporte aucune indication relative à l’urgence ou au péril. Qu’elle en déduit que l’ordonnance déférée, rendue sur l’assignationà bref délai devant le Tribunal de Commerce est nulle et non avenue. Considérant qu’il ne saurait être contesté que l’exploit introductif d’instance délivré à la société LOUIS CHANTILLY porte la mention « assignation à bref délai devant le Tribunal de Commerce de Paris » (p.1) et vise « MM. les Président et Juges composant le Tribunal de Commerce… audience spéciale tenue par Madame le Président COTELLE, sur la Chambre du Conseil » (p.2). Mais considérant qu’un exploit n’est pas nul par le seul fait que la juridiction qu’il indique est mentionnée en sa forme collégiale et non en sa composition particulière aux référés. Que l’erreur en cause peut se rectifier par les autres énonciations de l’acte. Or considérant, en l’espèce, que la société HERMES fait à bon droit observer qu’étaient jointes à l’assignation la requête « afin d’être autorisée à assigner en référé à bref délai » par elle présentée le 6 décembre 1995 au Président du Tribunal de Commerce et l’ordonnance du 8 décembre suivant faisant droit à cette demande, qui précise expressément : « l’exposant pourra assigner devant nous statuant en référé la société LOUIS CHANTILLY, la Société EB BUGATTI ».

Que la société LOUIS CHANTILLY qui n’a, au demeurant, pas invoqué ce moyen devant le premier juge et qui n’établit pas le grief qui résulterait de l’irrégularité dénoncée, sera déboutée de sa demande en annulation. III – SUR LA DEMANDE DE LA SOCIETE HERMES Considérant que la société LOUIS CHANTILLY fonde son appel sur le fait que l’ordonnance déférée l’aurait condamnée en se référant d’une part, à un procès-verbal de saisie contrefaçon dressé le 16 décembre 1994 par Me C dans le cadre d’une instance distincte mettant en cause des parties différentes, d’autre part, à un « simple procès-verbal de constat en date du 29 novembre 1995 qui n’a pu faire que des »constatations« puisque non autorisé par ordonnance » et qui ne comporterait aucune description précise des actes argués de contrefaçon, enfin au dépôt du modèle effectué en 1981 alors que ledit modèle appartiendrait au domaine public. Qu’elle ajoute que le premier juge a statué ultra petita en prononçant une astreinte qui n’avait pas été demandée et en la condamnant en référé au paiement de dommages et intérêts. Considérant, ceci exposé, quela validité du modèle invoqué suffit à constituer une contestation sérieuse qu’il n’appartient pas à la Cour, saisie en l’état de l’appel d’une ordonnance de référé, de trancher. Qu’il convient cependant de rappeler quele Président du Tribunal de Commerce peut, dans tous les cas d’urgence et même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoire ou de remise en état qui s’imposent pour faire cesser un trouble manifestement illicite. Or considérant qu’il est établi par le procès-verbal dressé par Me C, huissier de justice, le 29 novembre 1995 qu’à cette date, la société Louis CHANTILLY offrait à la v ente dans la vitrine de son magasin et sur les rayonnages situés au fond de celui-ci onze sacs décrits comme étant « semblables à celui argué de contrefaçon ». Que la similitude ainsi relevée suffit à caractériser l’existence d’un trouble suffisamment grave pour que le juge des référés prenne toutes mesures propres à y mettre un terme et notamment interdise à la société LOUIS CHANTILLY de poursuivre de tels actes. Que cette interdiction a pu, à bon droit, être assortie d’une astreinte dans la mesure où la société HERMES avait sollicité celle-ci dans son assignation (p.4 par.1) étant rappelé qu’en toute hypothèse, le juge peut même d’office l’ordonner pour assurer l’exécution de sa décision. Qu’en revanche, le Président du Tribunal de Commerce, saisi par voie de référé, ne peut accorder de provision (et non des dommages et intérêts) que lorsque l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable.

IV – SUR LES AUTRES DEMANDES Considérant que l’ordonnance déférée étant confirmée en son principe, les sociétés BUGATTI FRANCE et LOUIS C seront déboutées de leurs demandes en dommages etintérêts et du chef de l’article 700 du nouveau Code de Procédure Civile. Qu’il est en revanche équitable de condamner la société LOUIS CHANTILLY à verser à la société HERMES pour les frais non compris dans les dépens par elle exposés en cause d’appel une somme de 15.000 frs. PAR CES MOTIFS Dit la mise en cause et l’intervention forcée de la Société BUGATTIFRANCE par la Société LOUIS CHANTILLY irrecevable, Rejette la demanded’annulation de l’ordonnance déférée, Confirme ladite ordonnance en toutes ses dispositions à l’exception de la condamnation au paiement d’une somme de 100.000 frs à titre de dommages et intérêts, Déboute la Société HERMES de ce chef de demande, Condamne la Société LOUIS CHANTILLY à verser à la Société HERMES une somme de 15.000 frs par application en caused’appel des dispositions de l’article 700 du nouveau Code de Procédure Civile, Rejette toutes autres demandes, Condamne la Société LOUIS CHANTILLY aux dépens d’appel, Admet la SCP FANET, titulaire d’un office d’avoué, au bénéfice de l’article 699 du nouveau Code de Procédure Civile.

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