Cour d'appel de Paris, 4e chambre, 15 mai 1998

  • Copie servile de trois modèles de la meme gamme·
  • Vente de vetements confectionnes dans ce tissu·
  • Clientele différente du demandeur, fabricant·
  • Anteriorite du modèle argue de contrefaçon·
  • Modèles anterieurs du defendeur-imprimeur·
  • Empreinte de la personnalité des auteurs·
  • Reproduction des éléments protegeables·
  • 2) faconnier et vendeur detaillant·
  • Bonne administration de la justice·
  • Éléments d'appréciation suffisants

Résumé de la juridiction

Commande des cylindres destines a la fabrication posterieurement a la date de creation et de commercialisation par le demandeur

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 4e ch., 15 mai 1998
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Domaine propriété intellectuelle : DESSIN ET MODELE
Référence INPI : D19980022
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Texte intégral

FAITS ET PROCEDURE B, fabricant de tissus, indique avoir créé début 1993 un tissu rayé référencé JULIEN n 3242, et avoir découvert la présence sur le marché, début 1994, de vêtements fabriqués dans un tissu similaire, imprimé par ACTUA’TEX, qui l’avait vendu notamment aux sociétés DAUPHIMAILLE et EPCOT, cette dernière ayant elle-même fourni en vêtements VERT BAUDET. Par actes des 14, 18 et 19 avril 1994, B a fait assigner devant le tribunal de commerce ACTUA’TEX, DAUPHIMAILLE et VERT BAUDET. Invoquant, dans le dernier état de ses écritures, la contrefaçon et la concurrence déloyale, elle réclamait, outre des mesures d’interdiction, que ses adversaires soient solidairement condamnées à lui payer une provision de 500.000 F à valoir sur son préjudice pour l’évaluation duquel elle sollicitait l’institution d’une expertise.. ACTUA’TEX a conclu au débouté, soutenant que le dessin litigieux, qui aurait existé dans sa collection depuis 1990, antériorisait celui de B et que ni contrefaçon, ni concurrence déloyale ne pouvaient lui être imputées. Reconventionnellement, elle reprochait à B d’avoir contrefait ses créations et demandait outre des mesures d’interdiction et de destruction sous astreinte que B soit condamnée à lui payer les sommes de 150.000 F et de 1.7166.263, 25 F de dommages intérêts respectivement au titre de la contrefaçon et de la concurrence déloyale. DAUPHIMAILLE a également conclu au rejet des demandes de B en s’associant aux écritures d’ACTUA’TEX. VERT BAUDET a conclu au débouté de B pour le cas où le tribunal ferait droit aux prétentions d’ACTUA’TEX et sollicité que, dans le cas contraire, celle-ci soit condamnée à la garantir. C’est dans ces circonstances qu’est intervenu le jugement entrepris qui en retenant que B justifiait être propriétaire des modèles de tissus invoqués, et sans se prononcer sur la contrefaçon, a dit qu’ACTUA’TEX, DAUPHIMAILLE et VERT BAUDET avaient commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de B, prononcé à leur encontre des mesures d’interdiction sous astreinte, et les a condamnées respectivement à payer à B des provisions de 350.000, 100.000 et 50.000 F dans l’attente des résultats d’une expertise confiée à M. W. Le tribunal, qui a rejeté la demande en garantie de VERT BAUDET, a en outre condamné chacune des défenderesses à payer à B une indemnité de 12.000 F par application de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile. L’expert M. W a déposé en décembre 1995 son rapport dans lequel il a conclu qu’ACTUA’TEX avait vendu au total 4.340 mètres de tissus incriminés pour une valeur de 88.909 F, que DBC avait vendu 1035 articles fabriqués dans ce tissu pour une valeur de 66.569 F et que VERT BAUDET en avait commercialisé 1985, pour une valeur de 300.000 F.

Appel a été interjeté du jugement respectivement par :

- ACTUA’TEX et Groupe DBC (RG 95 11668)
- VERT BAUDET (RG 95 13689). Les deux procédures ont été rapprochées devant cette chambre. ACTUA’TEX poursuit la réformation intégrale du jugement. Elle reprend son argumentation initiale soutenant qu’elle « bénéficie dune antériorité sur le modèle référencé dans ses catalogues sous le n 90/1003, 209, et 442 et ce depuis le 2 février 1990 », et qu’elle est titulaire des droits d’auteur sur ce modèle qu’elle reproche à B d’avoir reproduit, commettant des actes de contrefaçon et de concurrence déloyale. Outre des mesures d’interdiction et de destruction sous astreinte, elle réclame que B soit condamnée à lui payer les sommes de 150.000 F et de 300.000 F à titre de dommages intérêts respectivement pour la contrefaçon et la concurrence déloyale. Elle conteste la recevabilité de la demande en contrefaçon formée par B, de même que son bien fondé ainsi que celui de sa demande en concurrence déloyale et elle soutient que cette société ne justifie pas du préjudice qu’elle allègue. Elle réclame une indemnité de 20.000 F pour ses frais irrépétibles. DBC conclut également à la réformation. Elle fait valoir essentiellement qu’étant façonnier alors que B est fabricant de tissus, celle-ci ne peut lui imputer d’actes de concurrence déloyale puisqu’elles ne s’adressent pas la même clientèle. VERT BAUDET qui poursuit aussi la réformation, excipe de sa bonne foi, soutenant que les affirmations de B selon lesquelles elle aurait demandé à ACTUA’TEX la réalisation du tissu litigieux ne sont appuyées d’aucune preuve et sont inexactes alors qu’elle s’est contentée de se fournir auprès de la société de confection marocaine EPCOT. Invoquant, comme Groupe DBC, le fait qu’elle a une clientèle distincte de celle de B, déniant avoir commis des actes de concurrence déloyale et avoir causé un quelconque préjudice à B, elle demande sa mise hors de cause et subsidiairement, réclame la garantie d’ACTUA’TEX. Elle demande reconventionnellment que B soit condamnée à lui payer une somme de 20.000 F à titre de dommages intérêts pour procédure abusive et une indemnité du même montant pour ses frais irrépétibles. B qui expose qu’elle avait agi en première instance sur le double fondement de la contrefaçon et de la concurrence déloyale, poursuit la réformation du jugement en ce qu’il n’a pas été fait droit à ses prétentions du chef de la contrefaçon et prie la cour de dire que ses adversaires se sont rendues coupables d’actes de concurrence déloyale et de contrefaçon. Elle réclame pour le surplus la confirmation du jugement et sollicite que chacune de ses adversaires soit condamne à lui payer une indemnité complémentaire de 15.000 F pour ses frais irrépétibles.

DECISION Considérant qu’il convient, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, de joindre les procédures enrôlées sous les n RG 95 11668 et 95 13689 ; Considérant que B, poursuivant la réformation du jugement en ce qu’il n’a pas fait droit à sa demande en concurrence déloyale, prie la cour de dire que ses adversaires « se sont rendues coupables d’actes de concurrence déloyale et de contrefaçon » ; que Groupe DBC et VERT BAUDET n’ont pas répliqué sur ce point, se bornant à solliciter la réformation du jugement du chef de la concurrence déloyale ; qu’ACTUA’TEX, en revanche, a soulevé l’irrecevabilité de la demande en contrefaçon de B prétendant qu’il s’agirait d’une demande nouvelle en appel, et a également conclu à son mal fondé ; Considérant que si B, dans son assignation, ne s’est fondée que sur la concurrence déloyale, il ressort du jugement qu’elle a ensuite, devant les premiers juges, également invoqué la contrefaçon ; que l’exception soulevée par ACTUA’TEX tendant à voir déclarer cette demande irrecevable comme nouvelle en appel ne saurait en conséquence prospérer ; Considérant sur le fond :

- que B soutient que le tissu JULIEN n 3042 est une oeuvre collective créée par son équipe de stylistes salariés au début de l’année 1993 dans trois coloris différents référencés 05, 10 et 15, qui a été commercialisé à partir de mars 1993, et qu’elle reproche à ACTUA’TEX d’avoir copié servilement dès le mois d’avril 1993,
- qu’ACTUA’TEX prétend au contraire que son tissu incriminé par B, dénommée BOUNTY, n’est que la déclinaison dans des coloris nouveaux, en 1993, d’un dessin de tissu à rayures qu’elle avait crée et commercialisé sous la dénomination HAWAI dès 1990, de sorte que ce serait B qui aurait commis des actes de contrefaçon ; Considérant que les pièces versées aux débats établissent :

- qu’ACTUA’TEX n’a commandé la réalisation des cylindres destinées à la fabrication du tissu BOUNTY, qui est un coton imprimé et non pas un tissé teint comme JULIEN, qu’en avril 1993, postérieurement à la date de création attestée par les témoignages versés aux débats des stylistes salariés de B et après que celle-ci ait commercialisé son tissu dès le début du mois de mars 1993 ainsi que l’établissent les factures versées aux débats,
- qu’ACTUA’TEX prétend vainement que JULIEN serait antériorisé par ses propres créations remontant à 1990 dont BOUNTY ne serait qu’une déclinaison, alors que BOUNTY (pour l’impression duquel elle a fait réaliser de nouveaux cylindres) porte une dénomination différente de celle des tissus HAWAI par elle commercialisés en 1990 et 1992, que son dessin, quoique très proche de celui de ces tissus, en diffère toutefois assez sensiblement par la largeur et la disposition des rayures, et surtout par les couleurs, BOUNTY comportant plusieurs bandes blanches alors que HAWAI ne présente que des bandes vivement colorées,
- que le tissu BOUNTY reproduit toutes les caractéristiques du tissu JULIEN, dessin des

rayures et dispositions des couleurs dans ses trois variantes 1, 2 et 3 qui correspondent à chacune des références 05, 10 et 15 de JULIEN, Considérant qu’il s’ensuit que le tissu JULIEN, qui ne contrefait pas les réalisations antérieures d’ACTUA’TEX, constitue en revanche dans ses trois variantes, par la combinaison particulière de ses rayures et de ses couleurs une oeuvre collective, portant l’empreinte de la personnalité de ses créateurs, et dont B est fondée à obtenir la protection au titre du droit d’auteur ; que les caractéristiques précises qui font l’originalité du tissu JULIEN dans chacune de ses trois variantes ayant été reproduites par les tissus BOUNTY, tant qu’ACTUA’TEX, qui a fabriqué ces tissus, que DBC et VERT BAUDET qui ont commercialisé des vetements confectionnés dans lesdits tissus ont commis des actes de contrefaçon au préjudice de B ; que leur responsabilité de ce chef sera retenue par ajout au jugement ; Considérant que c’est à juste titre que les premiers juges ont dit qu’ACTUA’TEX qui a fabriqué et vendu des tissus constituant la copie servile des trois tissus composant la gamme JULIEN de B a commis au préjudice de celle-ci des actes de concurrence déloyale ; Considérant en revanche que le grief de concurrence déloyale ne peut être retenu à l’encontre de DBC et VERT BAUDET, respectivement façonnier et détaillant, qui ne s’adressant pas à la même clientèle que B, fabricant ; que le jugement sera réformé de ce chef ; Considérant qu’il y a lieu d’évoquer sur le préjudice au vu du rapport de l’expert commis par les premiers juges ; qu’il ressort des constations de cet expert qu’ACTUA’TEX, qui a fabriqué et vendu 4553 mètres (au prix moyen de 19 F le mètre) de tissus contrefaisant les tissus JULIEN, en a vendu 1398 mètres (pour 27.261 F), dans un seul coloris, au façonnier marocain EPCOT qui a fourni VERT BAUDET, et 602 mètres (pour 11.045, 40 F) à DAUPHIMAILLE aujourd’hui DBC ; que les ventes de vetements confectionnés dans ces tissus se sont élevées à 66.569 F pour DAUPHIMAILLE, et 300.000 F pour DBC, qui, à la différence de DAUPHIMAILLE, commercialise directement auprès du public ; Considérant qu’en ce qui concerne les quantités produites par ACTUA’TEX, B conteste les conclusions de l’expert en faisant valoir que c’est à tort que celui-ci n’a retenu dans la masse contrefaisante que les trois coloris 05, 10 et 15 correspondant à ses références 1, 2 et 3, alors que les cylindres commandés par ACTUA’TEX ont servi, non seulement à la fabrication de ces 4.553 mètres de tissus (vendus pour un prix total de 88.909 F), mais aussi à la réalisation de 21.000 autres mètres de tissus dans des coloris différents ; que, toutefois, ces contestations ne sauraient être retenues, alors qu’aucune indication n’est donnée sur ces autres coloris et qu’il n’est pas établi que les tissus concernés auraient reproduit la combinaison particulière de dessin et de couleurs qui confèrent leur originalité aux tissus JULIEN de B ;

Considérant que B qui commercialisait les tissus JULIEN au prix de 35 F le mètre ne fournit aucune indication sur la marge brute que lui apportait ses ventes ; qu’au vu de l’ensemble des pièces du dossier et notamment du rapport d’expertise, la cour dispose toutefois d’éléments suffisants pour fixer à 150.000 F le montant du préjudice résultant de la contrefaçon ; que les appelants seront condamnés in solidum à payer cette somme à titre de dommages intérêts à B, étant précisé cependant que ces condamnations ne s’appliqueront à DBC et VERT BAUDET que dans la limite respectivement de 25.000 et 50.000 F ; Considérant qu’en commercialisant des vetements fabriqués dans un tissu contrefaisant, VERT BAUDET (dont la bonne foi est d’ailleurs contestée par B qui soutient qu’elle aurait commandé à ACTUA’TEX la réalisation des tissus litigieux) a commis une faute personnelle qui engage sa responsabilité propre et sera déboutée de sa demande en garantie à l’encontre d’ACTUA’TEX ; Considérant que B qui réclame la confirmation pure et simple du jugement du chef des mesures réparatrices n’a pas précisé le montant du préjudice imputable selon elle aux seuls actes de concurrence déloyale commis par ACTUA’TEX ; qu’une indemnité de 75.000 F réparera justement et intégralement ce chef de préjudice ; Considérant que le jugement sera confirmé pour les mesures d’interdiction ; que le demande de dommages intérêts pour procédure abusive formée par VERT BAUDET, pour l’essentiel déboutée de son appel, sera rejetée ; que l’équité commande d’allouer à B, pour ses frais irrépétibles d’appel, une indemnité globale complémentaire de 14.000 F qui incombera à ses trois adversaires in solidum ; PAR CES MOTIFS : Joint les procédures respectivement enrôlées sous les n RG 95-11668 et 95-13689 ; Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu’il a retenu le grief de concurrence déloyale à l’encontre des sociétés LE DAUPHIN DAUPHIMAILLE et VERT BAUDET ; Réformant de ce chef, statuant à nouveau, ajoutant, et évoquant sur les dommages intérêts : Dit que les sociétés ACTUA’TEX, LE DAUPHIN DAUPHIMAILLE et VERT BAUDET ont commis des actes des contrefaçon au préjudice de la société BOUSSAC ; Alloue de ce chef à la société BOUSSAC la somme de 150.000 F à titre de dommages intérêts et condamne in solidum les sociétés ACTUA’TEX, Groupe DBC et VERT BAUDET au paiement de cette somme, dans la limite d’un montant de 25.000 et de 50.000 F de respectivement en ce qui concerne les sociétés Groupe DBC et VERT BAUDET ;

Condamne la société ACTUA’TEX à payer à la société BOUSSAC la somme de 75.000 F à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice causé par ses agissements constitutifs de concurrence déloyale ; Condamne in solidum les sociétés appelantes à payer à la société BOUSSAC une indemnité complémentaire de 14.000 F pour ses frais irrépétibles d’appel ; Rejette toute autre demande ; Condamne in solidum les sociétés appelantes aux dépens comprenant les frais d’expertise ; Admet la SCP PARMENTIER HARDOUIN LE BOUSSE au bénéfice des dispositions de l’article 699 du nouveau Code de procédure civile.

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